Chapitre 26 : Nouveau départ

Ecrit par Chrime Kouemo

Denise donna les consignes aux danseurs pour la dernière séquence de répétition de la journée. Pendant qu’ils reprenaient la chorégraphie avec toute l’énergie qu’elle leur demandait, elle tournait autour du groupe, notant les dernières améliorations à apporter. Le résultat était déjà très bien, elle devait le reconnaître, mais pour Sax, un « très bien » n’était pas assez. C’était d’ailleurs un de ses slogans préférés. 

La session terminée, les danseurs partis, elle avait la salle pour elle toute seule. Elle s’installa à la barre pour faire quelques étirements avant de chausser ses talons hauts. Tous les soirs de la semaine, elle s’entraînait, composait des mini chorégraphies pour les abonnés de sa page. Cela lui permettait de garder le contact avec ses élèves qui lui envoyaient des vidéos d’elles reproduisant les pas. Elle en faisait des montages qu’elle publiait chaque semaine sur sa page. 

Ses élèves lui manquaient. Elle avait pris un plaisir fou à leur enseigner les basiques et à les voir progresser de jour en jour, prendre confiance en elles. Avec des des danseurs expérimentés, le plaisir n’était pas le même; il était plutôt question d’harmonie, de techniques. Il n’y avait pas que ses élèves qui lui manquaient par ailleurs. Elle avait la nostalgie des deux dernières années passées au pays, du climat, des plantains-prunes, des débats très souvent sans queue ni tête dans les taxis ou au marché, des paysages époustouflants, de sa famille avec les nouveaux liens qu’elle tissait avec son père, de ses amies et le plus dur de Simon. Il lui manquait atrocement. Elle avait cru tourner la page assez facilement, mais la réalité était bien plus rude. Chaque fibre de son coeur criait son envie de lui, de le revoir, de se blottir contre lui, de se retrouver dans le cercle de ses bras protecteurs. En journée, il était facile de se focaliser sur son travail et des exigences qu’il impliquait, mais une fois dans la solitude des murs de son appartement, elle recevait tout ce vide de plein fouet. Rien, même le fait de voir son nom figuré en grand sur les affiches du spectacle placardées dans la ville de Paris, ne la consolait, ne la réchauffait. Elle n’en profitait même pas. En revenant s’installer dans la ville lumière, elle avait retrouvé Shana ainsi que plusieurs autres de ses anciennes amies. Tous les week—ends, elles avaient une sortie au cinéma, ou au restaurant. Sa vie sociale était donc bien riche, mais cela ne comblait pas le vide intérieur qu’elle ressentait.

Elle referma la porte du studio de danse et se retrouva dans la grande avenue. Avec les jours qui rallongeaient et la météo douce, les rues et les terrasses du quartier Alésia étaient bondées. Elle hésita à prendre le métro pour rentrer chez elle avant de se décider à marcher. Elle en avait pour une bonne trentaine de minutes, mais ça lui ferait du bien. Et peut—être que de voir ces gens dehors  qui semblaient heureux parviendrait à améliorer son humeur. Son casque audio vissé aux oreilles, elle marcha d’un bon pas. En traversant les nombreux mini parcs du quatorzième arrondissement, elle tomba à plusieurs reprises sur des joggueurs. Elle scruta leurs visages à chaque fois, mais aucun d’eux n’était Simon.

Un silence pesant l’accueillit quand elle entra dans son appartement.  Elle s’empressa de basculer l’audio de son téléphone sur l’enceinte Bluetooth du salon, puis baissa un peu le volume pour ne pas gêner ses voisins. Il était à peine 20h30, une éternité avant sa journée de travail demain. S’installant dans le canapé, elle répondit aux messages d’Amandine et d’Armelle avec qui elle échangeait tous les jours. Son ventre gargouilla. Elle l’ignora, elle n’avait pas d’appétit.

 La playlist de Spotify s’acharnait à lui plomber encore plus le moral; elle passa plusieurs morceaux puis finit par couper la musique. Même les chansons les plus joyeuses résonnaient comme une triste mélodie. Les larmes jaillirent de ses yeux, sans qu’elle puisse rien n’y faire. Depuis son départ du Cameroun, elle s’était interdit de pleurer. Après tout, elle était revenue en France de son plein gré, galvanisée par son nouveau contrat de D.A et convaincue qu’elle devait poursuivre son but envers et malgré tout. Ce qu’elle n’avait absolument pas pris en compte était que ses ambitions avaient changé en cours de route. Sans le savoir, elle s’était laissée diriger par la crainte de finir aussi aigrie que sa mère. Leurs deux situations étaient pourtant radicalement différentes. Rien, ni personne ne l’avait entravée dans ses objectifs. Une fois qu’elle avait obtenu son premier visa pour la France, elle était partie sans tenir compte de l’avis ou des mises en garde de quiconque. Pendant dix ans, elle avait mené sa vie comme bon lui semblait, rien donc à voir avec sa mère. Cependant, obnubilée qu’elle était à ne pas marcher sur les traces de Madame Rita, elle avait tourné le dos à l’homme qu’elle aimait et mis un terme à la plus belle histoire qu’elle ait jamais eue. 

Elle sanglota longtemps jusqu’à ce que le sommeil l’emporte. 


— Quoi ? Tu vas rentrer au Cameroun ? 

Shana la regardait, l’air interloqué. 

— Oui, ça fait deux mois que je me meurs ici. Et je sais à présent qu’il ne s’agit pas d’une nostalgie passagère. 

— Eh ben... En même temps, je t’avoue que je ne suis pas tellement étonnée. Je te trouvais un peu morose depuis ton arrivée, mais tu avais l’air de tellement savoir ce que tu faisais que je n’ai pas voulu insister. 

Denise hocha tristement la tête. 

— J’étais juste trop têtue pour l’admettre au début et puis, j’avais peur. Peur de me transformer en ma mère si je renonçais à ce contrat. 

— Tu sais que c’est ridicule non  ? Regarde tout ce que tu as accompli. Tu as vu ton carnet de références ? 

Elle sourit. 

— Oui et maintenant, je sais que j’ai envie d’autres choses. 

— Tu vas appeler Simon ?

Son sourire disparut. Elle tritura ses longues tresses en secouant la tête.

— Non, j’irai le voir directement à mon arrivée. Je ne pense pas qu’il accepte de décrocher mon appel vu comment je l’ai quitté comme une lâche.

— J’espère que tout se passera bien.

— J'ai un peu peur d'avoir tout gâché, tu sais. Amandine m'a laissé entendre qu'il avait revu son ex.

— Oups...

Elle avait osé pour la première fois depuis deux mois qu’elle était partie du pays, demander des nouvelles de Simon. Elle avait voulu tâter le terrain en quelque sorte. La réponse l’avait plongée dans un profond désarroi, mais ne lui avait pas fait changer d’avis sur sa décision de rentrer. 

Shana serra sa main par dessus la table.

— Ça ne peut vouloir rien dire qu’il l’ait revue...

— Ouais, tu as raison. C’est à ça que je m’accroche 



Denise leva la main pour faire signe à Sax qui venait d’entrer dans le restaurant. Il s’avança vers elle. Plusieurs femmes tournèrent leurs têtes sur son passage. A plus de 45 ans, le célèbre chorégraphe demeurait un très bel homme, avec ses tempes grisonnantes et sa haute silhouette athlétique. Il se pencha pour lui faire la bise.

— Comment va ?

— Très bien et toi ?

Il hocha la tête et prit place en face d’elle. Elle expira discrètement pour chasser la tension dans ses muscles. Rien ne pouvait lui faire changer d’avis, mais elle s’en voulait un peu de laisser Sax en plan. Il mettait beaucoup d’espoir sur la série de spectacles pour se refaire un nom. Le premier avait lieu dans deux semaines. Elle rentrerait au pays juste après. La troupe était bien entraînée, elle ne se faisait pas de souci pour les deux autres dates en France. 

— Alors, dis-moi, de quoi voulais-tu spécialement me parler ?

Sax ne passait jamais par quatre chemins. Elle n’avait pas toujours apprécié ce trait de caractère chez lui, notamment lorsqu’elle faisait partie de sa troupe de danseurs dans sa comédie musicale. Par contre, pour quelqu’un qui n’avait pas une solide cuirasse, ses remarques piquantes pouvaient aisément heurter l’égo. 

— Je vais rentrer au Cameroun.

Il fronça les sourcils. 

— Comment ça ? 

— Ma vie n’est plus ici. Je suis désolée de te laisser tomber comme ça, mais je ne peux plus continuer. 

— Tu démissionnes ...

— Oui. 

Elle sortit la lettre qu’elle avait rédigée quelques heures plus tôt et la glissa vers lui sur la table. 

— Je ne comprends pas. Tu as eu une meilleure proposition que la mienne par un autre producteur au Cameroun ? 

— Non, ce n’est pas ça. Mes objectifs ont  juste changé. 

Sax la contempla un long moment sans rien dire. 

— Tu vas continuer tes cours de danse, c’est ça ?

Elle opina du chef. Beaucoup de danseurs-chorégraphes  donneraient cher pour un contrat de direction artistique de plusieurs spectacles à travers le monde et ne comprendraient même pas qu’elle en arrive à préférer sa petite carrière naissante au Cameroun. Cependant, les ambitions évoluaient avec le temps. Elle avait cru son rêve de reconnaissance internationale immuable tant elle le désirait depuis l’enfance. Son premier retour au pays étant fortuit, elle n’avait pas pris le temps de s’interroger sur ses nouvelles aspirations. Lorsqu’elle avait commencé à donner des cours, elle n’avait aucun plan, il s’agissait plus pour elle de gagner sa vie en exerçant le métier qu’elle aimait plus que tout. Elle avait mis du temps pour comprendre qu’elle n’envisageait plus son futur ailleurs que dans son pays natal. 

— Je t’admire, tu sais ? Avoir le courage de refuser une telle offre. Peu de gens en seraient capables. 

Elle haussa les épaules. 

— J’écoute mon cœur, c’est tout. 

— Il y a un homme derrière tout ça, je me trompe ?

— C’est la partie de l’histoire qui ne te concerne pas.

Il sourit et secoua la tête. Elle était soulagée qu’il le prenne aussi bien.

— Bon... Tu resteras au moins jusqu’au premier spectacle conformément au délai du préavis ?

— Oui, c’est prévu. 

— Je ne te cache pas que ça ne m’enchante pas de me remettre à chercher quelqu’un d’autre, mais je sais que ça ne servirait à rien d’insister. J’ai besoin de quelqu’un qui soit investi à cent pour cent. Je te demanderais juste de l’être jusqu’à la fin de ton préavis.

— Ne t'inquiète pas pour ça, je ferai ce qu'il faut.


***


Simon apposa sa signature sur la dernière page du contrat d’une main énergique. L’accord d’exploitation de plusieurs hectares de plantation à Nkolmetet pour une durée de trois ans était scellé. Avec les revenus engendrés, il y avait largement de quoi financer les études d’Amandine, sans toucher à l’argent de son héritage. Sur une dernière poignée de mains, il quitta le bureau du notaire l’esprit léger.

Il démarra sa voiture, et après avoir contrôlé les rétroviseurs, s’inséra dans la circulation. Il se félicitait d’avoir finalisé les tractations avant son départ. Même s’il ne s’envolait que pour deux semaines loin du Cameroun, cela lui faisait un sujet d’inquiétude en moins.


Installé à la terrasse d’un café restaurant, Simon observait les badauds déambuler d’un pas rapide  sur le trottoir. Rien à voir avec la démarche un peu nonchalante de ses congénères sous les tropiques. Une brise fraîche se leva, lui rappelant qu’il était  l’un des rares non fumeurs à avoir pris place à la terrasse. En effet, le temps était maussade et les nuages qui s’amoncelaient dans le ciel annonçaient une pluie certaine. Il rajusta son écharpe autour de son cou et prit une gorgée de sa bière. Le souvenir des dernières semaines défila dans sa mémoire. Elles avaient été difficiles, il ne s’était jamais senti aussi seul. Un bref instant, il avait cru tromper ses sentiments en revoyant Esther. Son coeur l’avait heureusement remis sur le droit chemin. Il revoyait le visage de la jeune femme après le baiser échangé sur son canapé. Le regard lumineux qu’elle avait posé sur lui l’avait mis mal à l’aise. Il avait définitivement compris qu’il ne pourrait jamais lui rendre la pareille. Il était fou amoureux de quelqu’un d’autre et ce n’était pas juste pour elle de lui faire croire qu’avec le temps, il arriverait à l’aimer comme elle le méritait. Surtout s’il n’avait pas remué ciel et terre pour retrouver celle qui avait pris son cœur en otage. 

— Je suis désolé, Esther, s’était-il excusé en s’éloignant d’elle. 

  Pourquoi, Simon ? 

— Je ne peux pas.

  Je sais me montrer patiente, je te promets. 

Il avait doucement repoussé sa main sur sa cuisse et s’était levé. 

— Il faut que j’y aille. Encore désolé. 

Il avait eu honte de lui en sortant de l’appartement de son ex. Cependant, aussitôt arrivé chez lui, il s’était attelé à mettre sur pied un plan d’action pour retrouver Denise. La vie était faite de sacrifices et compromis, et pour elle, il était prêt à tout. Son orgueil et son coeur blessés avaient failli l’empêcher de se battre pour son amour. Tout ne tombait pas toujours tout cru comme il le pensait. Des fois, il fallait juste composer avec les paramètres à sa disposition. Denise avait accepté son contrat de deux ans à l’international, sans lui proposer de la rejoindre certes, mais il lui appartenait aussi d’aller vers elle. A présent, il voulait croire à Amandine qui pensait qu’elle n’avait pas osé lui demander de le suivre connaissant son attachement pour le pays. Il était attaché à sa terre natale, c’était vrai, mais il savait maintenant que sa vie n’aurait plus la même saveur s’il ne la partageait pas avec elle. Le bonheur se trouvait où qu’on soit.

C’est ainsi qu’il se retrouvait dans cette terrasse de café en face de l’immeuble où vivait celle qui avait pris possession de son coeur. Il lui avait fallu presque un mois pour s’organiser, prendre des jours de congés au cabinet et confier quelques affaires courantes à régler en son absence à Christian. Son frère avait commencé à se plaindre, prétextant être trop occupé à Douala pour se déplacer dans la capitale pour suivre le chantier de construction qu’il avait lancé sur un terrain appartenant au patrimoine familial. Il ne lui avait pas laissé le choix. Ça faisait des années qu’il prenait tout sur lui et que ses frères et sœurs le laissaient tout gérer parce qu’il était l’aîné et était volontaire. Dès son retour de congés, il organiserait une réunion de famille pour les informer qu’il cesserait d’administrer seul leur héritage. Chacun serait libre de faire ce qu’il voudrait après.

Il baissa les yeux sur sa montre. Déjà 18h. Elle ne devrait plus tarder à rentrer selon ce que lui avait dit Amandine. Il espérait d’ailleurs qu’elle n’avait soufflé un mot de son arrivée à Denise comme il le lui avait demandé. Son esprit se refusant l’inaction plus longtemps recommença à échafauder mille scenarii de la réaction de Denise. Et si ce qu’il avait à lui proposer ne lui convenait pas ? Et s’il n’avait été qu’une parenthèse dans sa vie si riche ? Il chassa ses reflexions inopportunes et reporta sa concentration sur la bouche de métro et les nombreuses rues avoisinantes.

Enfin, elle apparut au coin de la rue, évoluant d’un pas alerte sur ses hauts talons, un gros casque sur ses oreilles. Elle était à plus d’une centaine de mètres, mais il l’aurait reconnue d’encore plus loin. Son muscle cardiaque pulsa brusquement dans sa poitrine. Elle s’arrêta au feu tricolore avant la terrasse, le regard vissé à son téléphone portable. Sans en avoir vraiment conscience, il se retrouva à un cheveu d’elle, parmi le groupe de personnes qui s’apprêtait à traverser. Le feu passa au vert. 

Parvenus de l’autre côté de la rue, elle poursuivit son chemin avant de ralentir le pas jusqu’à s’arrêter devant une grande porte cochère , puis, enfonça sa main dans son grand sac cabas. Son coeur s’agita encore plus tandis qu’il hésitait sur la marche à suivre.

— Denise ?

Elle ne répondit pas. Il réalisa comme un con qu’avec son casque, elle ne pouvait l’avoir entendu. Il lui effleura l’épaule. 

— Oh !

Elle se retourna dans un sursaut, une main sur sa poitrine, les yeux écarquillés. Le temps se figea pendant que leurs regards se perdaient l’un dans l’autre. Elle abaissa le casque audio sur son cou.

— Simon ? Que… qu’est-ce que tu fais là ?

— Je suis venu à toi. 

Elle ne dit mot pendant un long moment, puis deux larmes glissèrent lentement sur ses joues. Ému, il prit une inspiration et se lança dans le speech qu’il avait préparé. 

— Je suis venu chercher la pièce de puzzle qui manque à ma vie. Si tu dois courir le monde pendant deux ans, je veux être à tes côtés pour le faire avec toi parce que bonheur est auprès de toi et nulle part ailleurs. Je t’aime et je ne veux pas renoncer à toi pour une histoire de distance. Je suis prêt à faire des sacrifices s’il le faut. Cela ne tient qu’à toi si tu veux de moi. 

Il s’interrompit. Les larmes de Denise coulaient de plus belle, ravageant son maquillage. Elle n’en était que plus magnifique. 


***  


Denise éclata en sanglots bruyants. Non, elle n’était pas entrain de rêver. Simon se tenait bien devant elle, à lui déclarer sa flamme alors qu’elle l’avait quitté sans un regard en arrière. Ces derniers jours, après ce que lui avait dit Amandine sur son ex et lui, elle s’était torturé l’esprit en l’imaginant l’avoir perdu à jamais. Son stress tombait tout d’un coup, laissant la place au remords face à l’égoïsme dont elle avait fait preuve. Elle n’avait pensé qu’à elle, comme elle l’avait toujours fait, comme si elle était seule. Elle lui avait dit qu’elle l’aimait, mais elle avait oublié qu’aimer quelqu’un signifiait accepter de mener sa barque avec cette personne, lui confier ses inquiétudes et ses peurs, prendre des décisions à deux, faire des compromis ensemble. 

— Je te demande pardon Simon. Pardon d’être partie comme ça...

Alors qu’elle n’osait toujours pas aller vers lui, elle sentit ses bras autour d’elle, l’enveloppant dans leur chaleur. Ses pleurs redoublèrent, trempant le revers de sa veste en tweed. Dans son étreinte, elle n’avait plus conscience de se retrouver   en bas de son immeuble, en plein milieu de la rue. 

— Je t’aime et bien sûr que je veux de toi dans ma vie.


— Je suis en contact avec un cabinet d’expertise parisien partenaire de notre cabinet au Cameroun. Ils recherchent un collaborateur. J’ai un second entretien avec eux la semaine prochaine. Donc si tout se passe bien, je pourrais m’installer ici dès le mois de septembre. Je...

Denise s’écarta des bras de Simon. Ils étaient blottis l’un contre l’autre sur le canapé, rattrapant comme ils pouvaient les deux mois de leur séparation. 

— Simon, ce ne sera pas la peine pour le cabinet. Je...

— J’étais sérieux, Denise, l’interrompit-il. Ce contrat est prestigieux pour ta carrière et je suis prêt à faire des compromis pour que tu puisses l’honorer. 

Elle posa un index sur ses lèvres, lui imposant le silence. 

— Tu ne m’as pas laissé finir ma phrase. J’ai donné ma démission à Sax la semaine dernière. 

— Quoi ? 

— Oui, tu as très bien entendu. J’ai réalisé que je n’avais plus rien à accomplir ici. Ma vie est au Cameroun désormais. Le contrat de D.A est certes prestigieux mais j’ai adoré enseigner mes élèves et à organiser le spectacle avec les filles. Mes rêves ont évolué et j’ai mis du temps à m’en rendre compte. 

— Oh Seigneur !

— Mon préavis s’achève la semaine prochaine. et j’avais réservé un billet retour pour Yaoundé à la fin du mois. Je serais venue te retrouver même si je n’avais aucune idée de la façon dont tu allais m’accueillir. 

Simon la rapprocha de lui, le front contre le sien. 

— Je t’aurais accueillie à bras ouverts. Tu m’as tellement manqué. 

— Toi aussi tu m’as manqué. Je peine encore à croire que tu aies fait tout ce chemin pour me retrouver après la façon dont je suis partie. J’avais tellement peur de ressembler à ma mère si je n’acceptais pas ce contrat et je ne me voyais pas non plus te demander de quitter le pays pour moi après ton histoire avec ton ex. 

— Et pourtant, je n’attendais que ça. Tu n’es pas Judith, tout comme tu n’as rien à voir avec ta mère. 

— Oui, et je le sais maintenant. 

— Promets-moi de toujours me parler ce qui te mine. 

— Promis. 

Elle se lova contre lui, chercha ses lèvres dans un élan passionné et laissa son corps lui dire à quel point il lui avait manqué. En elle, tout était clair à présent. Son cœur, son corps et son esprit étaient parfaitement alignés. 


La main dans celle de Simon, Denise déambulait à travers les allées du jardin de Luxembourg. Le soleil printanier dardait sur eux ses rayons chauds et faisait resplendir les fleurs et les feuilles. Plus que trois jours avant leur retour au Cameroun. Elle avait tellement hâte. Ils avaient passé de fabuleux moments ensemble malgré les contraintes de sa dernière semaine de travail. Elle lui avait fait visiter Paris avec ses beaux monuments, ses magnifiques jardins et ses restaurants gastronomiques. Ils avaient beaucoup parlé aussi. Simon lui avait posé plein de questions sur sa vie de danseuse parisienne et londonienne. Il avait assisté à la dernière répétition avec la troupe et de retour à l’appartement, il lui avait redemandé si elle était toujours sûre de vouloir rompre son contrat pour se consacrer à ses élèves au Cameroun, lui rappelant qu’il pouvait toujours rappeler le cabinet d’expertise. Les yeux dans les siens, elle lui avait réitéré ce qu’elle avait dit à Sax et Shana : sa vie et ses rêves se trouvaient désormais avec lui, dans leur pays natal. 

Une fillette juchée sur les épaules de son père lui adressa un petit salut de la main. Elle lui sourit, puis se tourna vers Simon. 

— Tu veux combien d’enfants ? 

— J’ai toujours rêvé en avoir quatre. Et toi ? 

— Je ne me suis jamais vraiment posé la question à vrai dire. 

Il s’arrêta un instant, fixant ses prunelles noires sur elle. 

— Et maintenant ? 

Elle l’observa à son tour. Elle ne se lasserait jamais de voir cette lueur qui brillait au fond de ses yeux quand il la contemplait. Cette lueur qui la faisait se sentir spéciale, unique. Elle s’imagina le ventre rond, puis avec un bébé qui aurait ses traits et son cœur d’or. Un sourire étira ses lèvres. 

— Je crois que j’aimerais bien en avoir deux. 

— J’ai alors le temps de te convaincre d’en faire au moins trois, répliqua t-il l’air confiant. 

Elle se hissa sur la pointe des pieds et lui plaqua un baiser sonore sur la bouche. 

— Oui, tu as toutes tes chances, on peut dire ça. 

— Mais avant, il faudra que j’aille voir tes parents pour bien faire les choses. 

Elle roula des yeux au ciel lui arrachant un rire. 

— Ouais et j’en connais une qui va dégringoler des nues. 


PS : Suryelle et toutes celles qui avaient déjà gâté le nom de Simon ici (oooh il est lâche, faible, salaud...) sont priées de s'excuser publiquement dans les commentaires lool :-)))












Les Promesses du Des...