Chapitre 29
Ecrit par Meyroma
Enfin, le soleil se lève, plus radieux que jamais sur la brume opaque qu'est devenue mon existence, au fil de ces dernières semaines. la vie m'apparait désormais comme le beau temps après l'ouragan, pittoresque, calme et heureuse.
A présent que Djibril est completement rétabli, nous passons la plupart du temps ensemble soit à nous dévouer aux affaires du cabinet, soit à nous occuper des préparatifs du mariage, soit à vivre intensément notre amour.
Notre relation s'est affermi à tel point que Djibril est devenu plus qu'un ami, un confident, mon alter ego.
En ce jour, a lieu le procès de Fati, accusée de tentative de meurtre sur la personne de Djibril. L'ironie du sort à voulu que l'avocat qui assure sa défense ne soit nul autre que sa propre victime. D'aucuns affirment n'avoir jamais vu de cas aussi contrastif que celui-ci. D'autres, à l'imagination débordante vont jusqu'à médire sur les intentions de Djibril, racontant sans vergogne qu'il s'est proposé comme avocat afin de piéger Fati et se venger d'elle.
Bien-sûr, je ne leur en tiens pas rigueur vu qu'il s'agit de personnes qui ne connaissent rien du caractère généreux, noble et de la grandeur d'âme qui définissent Djibril. Indifférente aux spéculations que suscite cette affaire, je lui ai apporté mon soutien inconditionnel d'une part en tant que son assistante féale, d'autre part en tant que sa femme, son égide, son levier. J'ai assisté aux longues journées de labeurs et aux interminables nuits blanches qui nous ont permis de préparer une solide défense.
Par la grâce de Dieu, notre travail s'en est trouvé récompensé. En verdict, le juge a reconnu la folie que nous avons plaidé et autorisé l'admission de Fati dans un centre pshychiatrique où elle devra suivre un traitement à l'issu duquel elle rentrera à la maison.
- Cela peut prendre une année, des années ou jamais, à déclaré le médecin.
Par grande fortune, le médecin en chef du centre pshychiatrique où elle est admise s'avère être un vieil ami de Djibril. Il use de cette amitié pour faire interner Fati dans une chambre cinq étoiles et lui obtenir les meilleurs traitements de faveur possible.
La pauvre est devenue si pathétique que j'en ai les larmes aux yeux. Son regard qui jadis débordait d'une énergie quoi que malsaine et malveillante, exprimant que haine, agressivité, hostilité est devenu aujourd'hui plus vide qu'un abîme et dépourvu de toute expression. J'espère de tout mon coeur que ce traitement psychiatrique lui sera curatif.
Après notre énième victoire, rendant notre admirable duetto encore plus inébranlable qu'il l'était, nous retournons au cabinet pour accomplir les formalités de cessation de travail car le mariage aura lieu dans une semaine et nous avons accumulé tellement d'instance dans les préparatifs du mariage qu'il nous faut anticiper nos congés pour nous en acquitter. Je fais la passation avec Jamila et Djibril avec maître Mohamed.
*****
Nous consacrons notre premier jour de congés à explorer les boutiques de mobilier, pour amenager notre nouvelle maison selon nos goûts.
Dans notre culture, il incombe aux parents de la jeune mariée, les charges relatives aux bien mobiliers. Mais Djibril, par solidarité et par compassion eût égard à nos conditions financières précaires, voulait s'accaparer de cette responsabilité et nous en décharger. J'avoue que s'il n'y avait pas eu cette fierté et cette dignité ancrés au plus profond de mon patrimoine génétique, cela aurait été un grand soulagement. Mais pour une question de principes, ma mère et moi declinons son offre, préférant faire face à nos charges par nos propres moyens, dans la limite de nos capacités, aussi maigres soient-ils.
-Il est hors de question que tu achètes ne serait-ce qu'un morceau de bois, Djibril . Que ça soit bien clair : j'accepte que tu m'accompagnes seulement pour recueillir ton avis quant au choix des meubles.
C'est la dernière mise en garde que je lui fais avant que nous nous mettions en route.
- C'est d'accord Yasmine. Pour te montrer ma bonne foi, tiens regarde dit-il à mon adresse, en vidant ses poches. Je n'emporte même pas un centime avec moi. Jespère que tu es rassurée maintenant . Néanmoins, j'ai une condition aussi.
- Laquelle ? Lui demandé-je dans tout mon sérieux, en priant qu'il s'agisse d'une chose que je peux lui accorder.
- Avant d'acheter le lit, il faut d'abord que nous l'essayions, déclare-t-il avec un clin d'oeil allusif et flagrant.
J'aurais dû m'en douter, venant de lui!
Je hoche la tête , faussement indignée avant de lui lancer d'un ton amusé:
- Espèce de pervers! Esprit tordu.
Nous partons d'un grand eclat de rire, aussitôt embrouillé par les puissants ronronnements émis par le moteur diesel du véhicule de Djibril qui s'engage sur la voix de katako, menant à la maison ollas.
La maison Ollas est une ménuserie spécialisée dans la fabrication locale de meubles. Depuis le temps que j'emprunte ce chemin pour me rendre à la Faculté des sciences Économiques et Juridiques de l'Université Abdou Moumouni de Niamey où j'ai poursuivi mon cursus universitaire, j'ai toujours contemplé les fabuleux meubles exhibés dans les vitrines pour attirer la clientèle, en priant secrètement que Dieu me montre le jour où je ferais partie de ces futures jeunes mariées qui y viennent réaliser leurs rêves.
C'est avec un cœur palpitant d'excitation et des yeux tournant dans tous les sens, incapables de se fixer sur une seule chose à la fois, que je pénètre cet atelier, suivie de Djibril.
-Bienvenue madame, Monsieur, s'enquit la jeune vendeuse qui nous accueille dès qu'elle nous observe.
Sans plus tarder, elle entreprends de nous faire faire une visite guidée des lieux. L'endroit est encore plus grand que la devanture laisserait l'imaginer. L'intérieur est reparti en plusieurs compartiments meublés en chambres complètes de divers modèles, tous aussi beaux que les uns que les autres, suscitant forcément chez le client, l'embarras du choix.
Après avoir pivoté pendant un bout de temps dans une spirale d'indécision , nous nous accordons enfin sur un magnifique ensemble en marbre noir luisant.
Je ne peux m'empêcher d'imaginer les futures nuits enflammées dont sera témoin l'énorme lit surdimensionné sur lequel j'entrevois déjà nos deux corps se livrer à des ebats sans précédent sous le regard muet des miroirs fixés le long des battants de l'architecturale armoire marbré .
*****
- Chérie, je viendrai te chercher a 18h, m'annonce Djibril, tandis que je m'apprête à sortir de sa voiture, garée devant notre maison après avoir fini nos courses.
- Où allons nous? Lui demandé-je, surprise.
- Tu le saura bien assez vite, ma petite fouille-au-pot. Sois élégante et fait moi confiance.
Djibril n'ignore rien de ma nature impatiente, surtout quand il s'agit de surprise, mais il tire toujours un malin plaisir à stimuler ma curiosité. Cette fois, je ne lui ferais pas la grâce de le suplier.
Un peu de patience ne me tuera pas !
Dans la perspective d'accommoder mon style au mot <<Elégance>> qui est le seul indice que Djibril m'a donné sur notre destination , je porte une robe en soie brodée pourpre qui m'a couté la peau des fesses sur Modanisa. Au moins, mon sacrifice n'aura pas été vain car en me mirrant, je suis persuadée que où qu'il ait l'intention de m'amener, je pourrais y aller la tête haute.
Quand il se pointe à notre RDV, c'est un Djibril fidèl à son goût exquis pour la classe et le raffinement que je découvre, dans son pantalon bleue royal et sa chemise blanche. Le style en lui même est simple et ordinaire, mais Djibril par son charisme a le don de sublimer tout ce qui se rapporte à lui. Même le sable au contact de ses doigts se transformerait en poudre d'or.
Sans vouloir exagérer bien-sûr !
Lorsque nous foulons le sol du luxueux hôtel Gaweye de Niamey, ma curiosité devient culminante.
Visiblement, nous sommes invités à un évènement. Mais lequel?
Une idée coquine viens soudain effleurer mon esprit, ébranlant tous mes sens.
Et si cette sortie était motivée par des envies intimes?
Nous traversons le grand hall de la réception et nous dirigeons vers la porte qui débouche sur le jardin où sont généralement célébrés le genre de cérémonies où je nous pensais invités. L'idée de la chambre et de l'évènement viennent donc d'être exclus.
Mais alors, où allons nous?
*****
Vous le saurez dans le prochain épisode.