chapitre 3

Ecrit par Max Axel Bounda

Lundi 07 Aout 2017

CHUL

12 h 02


Le Sous-Directeur Nkulu gara sa Toyota dans le parking du CHUL. Je savais que j’allais encore subir les attaques de Claude, et franchement il aurait raison. Car on avait trainé pour essayer d’expliquer cela au Directeur Asselé. J’étais toute rouge de colère.

Nous quittâmes la voiture pour entrer dans le bâtiment de l’institut médico-légal. Nous rejoignîmes la salle d’autopsie au sous-sol où nous mimes une combinaison et tout l’équipement réglementaire. J’eus une de ses envies d’éclater de rire en voyant combien le Sous-Directeur Nkulu était ridicule avec sa charlotte sur la tête.

Je poussai la porte pour entrer dans une salle qui ressemblait à un bloc opératoire. Une odeur de viande en décomposition parfumait la salle. L’odeur de la chair humaine. Comment est-ce qu’ils faisaient pour travailler là tous les jours ? C’était horrible.

Un corps nu était allongé sur une table en inox, Claude était penché sur le cadavre en nous faisant face et avait commencé à le découper. Il portait une blouse verte et des gants, ainsi qu’une charlotte sur la tête et un masque au nez.

— Finalement, tu es arrivée, Koumba ? Me dit-il en baissant la tête pour continuer son travail.

— On a eu un petit boulot au bureau. Ex…

Mais Claude ne me laissa pas le temps de finir ma phrase.

— Pardon, je m’en fous de ton excuse bidon là. Que tu te sois fait tirer par trois mecs hier soir, ne m’intéresse pas. Tu n’auras qu’à consulter mon rapport. Je t’ai appelée parce que j’ai trouvé des choses inhabituelles.

Je m’approchai de la table en inox, le Sous-Directeur Nkulu resta en retrait. J’observai le visage de Rigoberta déformé par la mort. Il ne faisait aucun doute qu’elle avait été belle.

En me retournant, je remarquai que le Sous-Directeur Nkulu, était tout pâle. Lorsque Claude plongea ses mains dans les poumons du corps de Rigoberta, le Sous-Directeur Nkulu eut un hoquet et attrapa un sceau sous une table. L’instant d’après, il vomissait dedans.

— Regardez-moi celui-là, ricana Claude.

— Il n’est pas habitué, rendis je. Franchement, c’était bien fait pour lui. Il m’avait fait arriver en retard.

L’autopsie achevée, Claude retira ses gants, ôta son masque et nous fit signe d’approcher. Je me rapprochai de la table en inox, mais le Sous-Directeur Nkulu préféra rester à l’écart.

— La victime a eu un rapport sexuel avant d’être tuée, commença Claude. Je n’ai trouvé aucune trace de sperme, mais j’ai relevé des résidus de latex, on dirait que l’assassin a utilisé un préservatif et je n’ai noté aucune trace de viol, cela suppose qu’elle était consentante.

— Quoi ? Vous voulez dire qu’elle n’a pas été violée alors ?

Il fallait que je comprenne bien. Ce qu’il me disait là dépassait tout entendement.

— Je parle français Koumba. Le rapport sexuel ne semble pas avoir été forcé.

Je jetai un œil par-dessus mon épaule en direction du Sous-Directeur Nkulu. Il avait l’air aussi étonné, mais il ne se rapprocha même pas un peu de la table.

— Nous savons qu’il donne du Kobolo à ses victimes pour les rendre dociles, dit le Sous-Directeur Nkulu. Il a dû profiter de cela pour la violer.

L’explication du Sous-Directeur Nkulu ne tenait pas la route. Ce n’était pas le style de notre homme. À moins qu’il ait changé de façon de faire, mais pourquoi ? Le profil de ce type n’arrêtait pas de changer. C’était un détail que je devais rapporter à Cassydie.

D’un geste de la main, Claude me fit signe de m’approcher encore plus. Je me penchai pour observer ce qu’il me montrait sur le corps de Rigoberta. L’odeur de chair humaine était horrible.

— Il y a des traces de pression au niveau du cou, cette fille est morte par strangulation.

Quoi ? Comment ça par strangulation !

J’étais totalement surprise. Trop de changement en une seule fois. C’est étrange !

— Vous voulez dire qu’elle était déjà morte quand le Chirurgien lui a arraché le cœur ?

— Exactement. Il lui a enlevé le cœur après l’avoir étranglée. J’ai remarqué des lésions internes au niveau du cou et de la gorge. La trachée a été comprimée. Et les points de pression démontrent qu’elle a été étranglée par devant.

Je me retournai pour échanger un nouveau regard avec le Sous-Directeur Nkulu qui évitait soigneusement de regarder la table.

— Pourquoi l’a-t-il étranglée s’il lui a fait prendre du KBL ? Demanda-t-il. Puisqu’elle était droguée et docile, pourquoi ne pas lui arracher le cœur comme les autres ?

Sa remarque était pertinente, en effet.

— Pour les autres victimes, la mort a été provoquée par ablation du cœur, fis-je remarquer. Dans le cas de Rigoberta, qu’est ce qui peut justifier un tel changement ?

— Peut-être aussi qu’elle s’est débattue et ça l’a mis en rogne.

Je secouai la tête. Comment pouvait-elle être droguée au KBL et se débattre ?

— J’ai aussi découvert autre chose, l’ablation du clitoris et des ongles a été pratiquée après la mort de la victime, répondit Claude. Autre chose, ses mains ont été nettoyées au détergent, ce qui prouve que l’assassin a voulu effacer ses traces.

Le chirurgien a commis une erreur.

Je vis le Sous-Directeur Nkulu retrouver des couleurs. Il venait sans doute de penser à la même chose que moi. Pour la première fois, le chirurgien venait de montrer qu’il pouvait perdre son sang-froid. Donc on peut l’arrêter.

Sang Royal