Chapitre 3
Ecrit par Meyroma
-combien de fois devrais-je te répéter la même phrase Mariam? <<Il-est-en-couple>> quel mot de cette phrase tu ne comprends pas? Dans quelle langue veux tu que je m'adresse à toi?
Ça doit faire au moins mille fois que j'explique vainement à Mariam que le scénario dont elle rêve: <<La stagiaire qui tombe éperdument amoureuse du jeune et beau patron, qui l'épouse et lui fait une ribambelle d'enfants et vivent heureux pour l'éternité>> reste et demeure irréalisable.
Numéro 1: le prince charmant à déjà sa princesse.
Numéro 2: je ne suis pas intéressée par une quelconque relation avec qui que ce soit en ce moment.
Numéro 3: Maitre Djibril et moi sommes visiblement incompatibles vu son goût pour les benguistes.
Plus j'essaye de lui expliquer, moins elle a l'air de comprendre.
-tata! Tata! Tata ! Mon petit neveu, le fils de Mariam vient d'arriver avec son papa.
Sauvée par le Gong! pensé-je
Je profite de leur arrivée pour demander la route à Mariam et échapper à notre stérile causerie.
J'etreins mon neveu Imran que j'aime de toutes les fibres de mon corps et salut son père qui est comme un frère pour moi. D'ailleurs il n'hésite pas à m'interpeller:
- Mina tu nous a sevré depuis que tu as commencé le stage. J'espère que ça se passe bien.
- Ce n'est pas facile de concilier boulot et vie sociale Abdou, mais je ferais des efforts, lui promet-je.
Je rentre à la maison vers 22h, notre maison étant dans la même allée que la leurs. Je trouve ma mère et mes sœurs profondément blotties dans les bras de morphée.
N'ayant pas du tout sommeil, J'allume la télévision et tombe sur une rediffusion des <<enquêtes impossibles>>.
Tiens, une de mes émissions préférées!
Tandis que je suis concentrée sur l'épisode qui traite d'un cas d'homicide par empoisonnement, me vient un déclic à l'esprit.
Et si le cas de << famille Tanimoune>> était similaire?
Et si le fameux beau père avait lui-même orchestré la mort de son épouse pour justement hériter de ses biens?
Et si...?
Une foulée de questions se bousculent dans ma tête les unes aussi pertinentes que les autres.
Si mes doutes sont fondés,il ne s'agit plus d'un simple contentieux de succession, mais d'un meurtre avec préméditation. Les idées commencent à se succéder dans mon esprit et je me demande comment élucider cette affaire.
J'y songes toute la nuit et finalement un plan se concocte dans mon cerveau.
Toute la semaine suivante, en même temps que j'accomplis impeccablement ma fonction d'assistante aux côtés de maître Djibril, je mène aussi ma petite enquête sur la famille Tanimoune. Ce dossier est actuellement celui qui nous donne du fil à retordre.
Mes recherches s'avèrent fructueuses car elles m'ont permis de découvrir que le nouveau hériter a à son actif des antécédents de dépendance aux jeux de hasard; qu'il en a été ruiné jusqu'aux os et qu'il croule sous les dettes. Comme si cela ne suffisait pas, il a une maitresse et un fils illégitime. Bien entendu, tout cela reste un secret que personne de son entourage ne connais. Le pire, c'est qu'il continue à entretenir sa famille cachée avec l'argent de sa défunte épouse et il projete de se marier avec la mère de son fils dès qu'il aura touché l'héritage. Tous ces éléments constitués, j'ai désormais un mobile solide et infaillible.
Maintenant, il me reste à dénicher l'arme du crime et toutes les preuves y afférentes.
Après des jours à fouiller dans les documentaires télévisés, les journaux d'enquête policier, les sites internet sur les cas pareils, j'en arrive à la conclusion que mon présumé assassin a procédé par empoisonnement à long terme.
Dans le dossier médical de la défunte, il est mentionné qu'elle à toujours jouit d'une santé de fer jusqu'à trois ans auparavant. Si j'en crois au certificat de mariage joint à ce dossier, cette période correspond à celle de son remariage et marque le début de ses maladies chroniques.
Désormais, je suis sûre et certaine qu'il s'agit bel et bien d'un meurtre avec préméditation. Mais comment le prouver dans un pays où la science médico-légale n'en est qu'au stade embryonnaire? Où l'autopsie n'est même pas envisageable?
Je décide alors d'interroger les différents médecins qui ont suivi la défunte de son vivant. Tous les diagnostics étaient unanimes sur le fait que les causes du mal qui l'a emporté était des déchirures de la jonction gastro oesophagienne et une perforation gastrique. Tous les traitements contre l'ulcère se sont avérés vains. Autant on lui administrait les médicaments, autant la maladie s'empirait.
Après mes innombrables recherches, je découvre que la consommation des bris de glace provoque les mêmes effets que les symptômes de la défunte.
Hélas pour moi, tout mon raisonnement n'est qu'un tas d'hypothèses qu'il reste à confirmer.
J'entreprends alors une démarche un peu dangereuse, mais prometteuse.
Je me muni d'une puce téléphonique jetable avec laquelle j'appelle notre présumé meurtrier pour lui faire du chantage. Pendant des jours, je lui fais croire que je suis au courant de son terrible crime en lui jetant comme appât des miettes de mes hypothèses. prêcher le faux pour avoir le vrai. quel juriste digne de ce nom ne l'a jamais fait?
Finalement, après mes multiples appels anonymes, il cède, flanche et négocie le prix de mon silence.
Après avoir fixé un rendez-vous avec lui, au cours duquel je suis supposée récupérer les dix millions de Francs CFA que j'ai exigé contre mon silence, je décide qu'il est temps d'impliquer maître Djibril dans mon enquête.
Ce dernier informe immédiatement la police qui se saisit de l'affaire.
Après l'arrestation de notre assassin, maître Djibril ne manques pas de me sermonner:
- J'avoue que tu as fais du bon boulot, mais bon sang qu'as tu à la place du cerveau? Comment as tu pu te mettre en danger? Tu es folle? Mais ça ne va pas dans ta tête?
Je le regarde aligner les reproches sans dire mot, incapable de cerner si je lui en veux de se montrer ingrat ou si je me réjouis qu'il s'inquiète pour ma sécurité, ma personne, moi Yasmine Ben Saïd.
Une fois de plus je me demande:
Qu'est ce qui m'arrive?