Chapitre 3 : Les brumes du passé

Ecrit par Tunde William

 

 Chapitre 3 : Les brumes du passé

 *** Marie Jeanne HOUNTON** .

Le taxi que j'avais pris me déposa à l'entrée de la vons adjacente à la ruelle où se trouvait ma maison.

- Ça te coûtera quoi si tu rentres dans la vons ? Demandai-je. 

-Non désolé Tantine, regardez par vous-même cette vons est complètement inondée. Je ne peux pas continuer, vous allez devoir faire le reste du trajet à pied.

- Ça ne fais rien dis je en lui tendant son argent. Il avait raison nous sommes au début de l'hivernage et ce quartier est toujours sous l'eau malgré les efforts intempestifs de la mairie de Cotonou. Si effort, elle fournit effectivement. Chaque année c’est le même scénario. Telle centaine de millions allouée pour lutter contre les inondations, telle autre allouée pour aider les victimes. Et puis tu les verras, les équipes des ingénieurs en Génie Civil s’accaparer toute une voie, pour y travailler dessus. Si le travail finit, tu ressentiras une certaine fierté à emprunter cette rue jusqu’à la prochaine saison des pluies. Et rebelote. Je me demande souvent si le cas de Cotonou n’est pas une occasion en or pour ses pseudos entrepreneurs et leurs alliés nos gouverneurs puisque chaque fois c’est toujours la même rengaine. Et toujours la même solution qui ne marche pas mais qui nous coûte des millions de francs pour des problèmes qui ne finiront sans doute jamais. Mais comme le disait toujours feu mon père, si le problème ne te concerne pas, ne te donne même pas la peine d’y penser avant de dire que tu donneras ton avis.  

Je pris mon panier rempli de victuailles que je posai sur ma tête à l'image de ces braves femmes peules. C'était innée en moi d'autant plus que j'avais un brin de leur sang dans mes origines. Mon arrière grand-père maternel était peul.

 Malgré la mévente de cette journée, j’étais très enthousiasmée de rentrer chez moi à l'idée de la bonne eau tiède qui m'attendait sagement dans la douche et surtout à cause de cette bonne soupe épicée de poisson chat qu'allait préparé mon fils. C'est un vrai cordon bleu tout comme son père. 

Ah Claude Marcel d'Oliveira, le seul vrai amour que je n'ai jamais eu. C'est dommage que tu n'aies pas eu confiance en moi et surtout que tu t'es basé sur des préjugés ridicules . 

Bon ça ne sert à rien de ressasser le passé. Dans la vie, les personnes qui sont fortes sont souvent les plus blessées . Ce qui fait d'eux des héros c'est qu'ils arrivent à transformer leurs douleurs et leurs faiblesses en une force herculéenne. Ils utilisent leurs peines pour mieux se comprendre eux-mêmes.  N'importe qui peut vous aimer quand votre soleil est au zénith mais quand s'abattra le voile des ténèbres et les tempêtes sur votre vie, ne resteront que ceux qui tiennent réellement à vous. 

Ce fut malheureusement mon cas, car lorsque j'ai tenu notre fils , euh mon fils dans les bras je me suis dis que je ferai tout ce qui était en mon possible pour lui. Je me suis accrochée à lui tel un naufragé s'accrochant à sa bouée de sauvetage . Il était le seul qui m'a aidé à retrouver mon chemin dans cet obscur labyrinthe que m'a plongée Claude Marcel et sa mère Irène. D’habitude, je refuse complètement de me laisser à la nostalgie que représente mon passé. 

Le croassement des crapauds et des grenouilles , ainsi que les cris des lucioles et autres  bestioles nocturnes me rappelèrent que je devais traverser pieds nus l'eau boueuse qui n'était plus très loin. 

- Bonsoir Maman, me dirent un couple de jeunes en me dépassant .

- Bonsoir répondis-je .

 L'homme était un  grand noir baraqué tandis que la femme courte était  un peu ronde. Ils formaient une belle paire exactement comme Claude Marcel et moi.  Ah mon cher ex fiancé , où serait il donc ?  En Amérique , Asie , Afrique qu'en sais je. Surement pas en Europe vu comment il déteste les apprécient peu les européens. Marcel et ses manies d'allergies aux trucs européens. Je n'ai jamais vu quelqu'un qui n'aime pas les européens autant que lui les détestent. Où doit t'il être en ce moment?  Il doit être heureux avec mon ex meilleure amie Vicky et leurs enfants. 

 Je ne sais même pas comment j'ai pu aimer follement un homme aussi vil et lâche que lui. Il était mon pilier et mon existence. Je ne sais même plus comment j'ai pu garder mon sang froid quand après avoir refusé de donner son nom à Jean Claude à l'hôpital, il s'est présenté devant moi dans la résidence sociale dans laquelle je logeais avec un chèque de cinq mille dollars .

- Voici un chèque de cinq mille dollars m'avait- il dit le sourire crispé. Cela pourrait peut être t'aider à t'occuper de ton fils car jamais je n'accepterai un bâtard comme étant mien.

 Je me rappelle que je lui avais juste fait sourire contrit en lui disant non de la tête.

'' Ok si tu ne veux pas l'utiliser pour t'occuper de ton enfant ,alors prends le juste en compensation du fait que tu ais été ma fiancée juste pour un laps de temps. Oh que je regrette le jour où je t'ai rencontré dans cette fichue bibliothèque .Si j'avais su je t'aurais laissé seule te démerder avec ton vieux manteau de pacotille'' fit-il en me le balançant avant de s’en aller.

  • Je vais lui parler. Tout celà n’est qu’un malentendu. Je vais le faire revenir mais toi, tu lui diras la vérité sur le bébé  avait assuré Vicky avant de se tourner les talons à sa poursuite. 

Je l’avais haï autant que je l’avais jadis aimé. Mais quand je posais les yeux sur mon enfant, toute cette colère et cette rancœur s’en allait comme si elle n’avait jamais pris possession de mon cœur. Je me retrouvai alors le cœur guilleret à chaque fois que mon bébé barbillait que finalement j’ai laissé tombé l’histoire de m’expliquer, de me justifier et  de me réconcilier avec lui. Elle me demandait beaucoup d’énergie et de temps. Il ne voulait plus de moi, il tenait mordicus à l’histoire farfelue racontée par sa mère et confirmée par Vicky que mon égo en a pris un coup. J’ai décidé d’arrêter de pleurer, de vouloir me justifier et de consacrer cette énergie et ce temps à mon enfant.  

Ah l'amour est un luxe que ne peut se permettre qui veut , ni qui le désire mais qui le peut.  Il n'est ni financier ni matériel. Il est juste lui-même. Il te fait souffrir autant qu'il te donne la gaieté. Quand on est amoureux ,on est dans une sorte d'euphorie, de bien être qui ne nous  dit pas son nom. C'était si facile pour moi, j'avais l'impression de vivre un conte à l'eau de rose. Mais la chute a été ce qu'il y avait de plus radieuse tellement cela c'est fait en une nano fraction de seconde, que j'avais l'impression de faire un rêve éveillé. Elle a été soudaine, inexpliquée et surtout terrifiante. Marcel et sa mère n'ont eu aucun remord ni état d'âme en m'abandonnant seule face à mon destin dans ce lit d'hôpital de  Los Angeles.

Ah Los Angeles, la ville de tous mes tourments. Seule, délaissée ,sans abris et sans défense, une nourrice et son nouveau-né de quelques heures abandonné à cause de la couleur blanche de sa peau disait t-on et de ses cheveux noirs frisés; c'était lui et moi dans ce froid inhospitalier de cette maudite ville. Pourquoi ? 

Tout simplement parce sa mère n'est pas nantie  et n'est pas AGOUDA affirmait Vicky, celle qui jouait le rôle de  meilleure amie à mes côtés. Il risquait d'altérer la pureté de leur précieux sang.  Et pour Irène la mère de Claude-Marcel ce n'était pas une fille car depuis la nuit des temps tous les premiers nés de la famille des d’oliveira étaient des filles, celà était la preuve palpable de mon infidélité. 

Il est né mat et ne ressemblait en rien à un noir  donc ne peut pas être de son sang, et le plus grave j’osais lui présenter le fruit de mon infidélité argumentait Claude-Marcel. Il pouvait tout encaisser mais je ne pouvais pas le regarder dans les yeux. Mais ironie du sort, savait il que celles qui lui mentaient étaient sa propre mère et celle qui me était ma meilleure amie. Le bon monsieur pouvait passer l’éponge de l’infidélité mais la preuve est là. Le bébé n'était pas une fille et moi qui m’évertuait à lui mentir encore et encore jurant que je ne lui avais jamais été infidèle. 

C’est vrai que j’étais fautive, j’ai laissé mon amour propre et mon orgueil prendre le dessus. Peut-être que je ne m’étais pas assez battue suffisamment? Peut-être que je n’aurais pas dû laisser mon égo s’exprimer, mais enfin j’étais l’agneau sacrifié et il était hors de question que l’on vienne émietter le peu de fierté qui me restait. Alors drapée de ma dignité, je jetai au loin devant lui, le kit de prélèvement d’un test de paternité. Il n’est pas le père, il ne l’est pas point final. 

  • On te l’avait dit fit Irène. Je suis désolée d’avoir raison mais cette fille n’est qu’une sale arriviste. 

  • Tu vois, elle a voulu te coller un bâtard sur le dos. Mais je suis choquée, faisait Vicky.

Trop blessée, je les regardais faire leur cinéma.  

  • Belle pièce de théâtre. Je vous assure, avec vous Hollywood a encore de l’avenir devant lui. Sans être allés à Juilliard, vous assurez parfaitement dans vos rôles respectifs. Je n’ai rien à vous dire. Et toi Claude-Marcel, tu es le seul qui me déçoit complètement. Maintenant foutez-moi la paix. 

NB: C'est la correction et la réécriture de cette chronique qui date de 2018. Bonne Lecture

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Forgive me......