Chapitre 30
Ecrit par Les Chroniques de Naty
Chapitre 30
Être patient pour attendre le changement de quelqu'un c'est bien, mais parfois, il faut aussi savoir mettre un point final, surtout si de l'autre côté ça ne se bouge pas. Mettre sa vie en suspens, se rendre malade, se tourner les pouces en attendant, que la personne veuille bien prendre conscience des choses .... Ça va un moment ! Les années passent vite, on prend de l'âge, on ne rattrape pas le temps qui passe. Alors un moment donné plutôt que d'attendre inlassablement sur place un changement ou une réaction possible, vaut mieux partir et faire avancer sa vie. Je ne sais plus si je dois espérer un quelconque retour de Moctar reviendrai. Mais une chose est sûre, il faut que j’arrête de me voiler la face et que je puisse refaire ma vie ; car oui le temps passe et je ne suis plus aussi jeune qu’à l’époque.
Comment refaire sa vie quand le seul homme qu’on ait réellement aimé nous hante encore le cœur et l’esprit ?
Il m’est difficile de l’oublier. Fatou me demande de sortir pour faire des rencontres. Elle essaie de me caser. Maman s’y est mise ; elle me dit que la solitude n’est pas agréable pour une femme. Car j’ai besoin de la présence d’un homme dans ma vie. Mais ce qu’il Ya, c’est que je n’arrive pas à trouver un autre homme. D’une part j’ai cette peur d’échouer à nouveau et d’autre part, je me demande quel autre homme pourra me faire oublier Moctar.
La vie continue néanmoins. Mes enfants passent du temps chez leur grand-mère et j’avoue que cela me va bien dans la mesure où j’arrive à me reposer. Il me manque souvent, mais je ne veux pas trop le faire savoir à maman Justine. Nos rapports sont au beau fixe, et il ne faudrait pas qu’elle se dise que je ne veux pas qu’elle reste avec ses petits-enfants. Ces derniers l’adorent. Elles leur passent tous leurs caprices. Le plus heureux c’est Ely ; lui qui n’a jamais connu cela est aux anges. Ma mère est comme moi, un peu sévère avec les enfants. Mais quant à maman Justine, elle est la douceur et la tendresse incarnée. C’est à moi qu’elle faisait vivre l’enfer, sinon elle a toujours aimé son petit-fils. C’est vrai qu’il y avait des moments où elle se comportait de manière assez étrange avec lui, mais j’ai fini par comprendre que ce n’est pas parce qu’elle ne l’aimait pas.
Je la découvre sous un autre jour. Une femme drôle et aimante. Elle est bonne conseillère et me parle beaucoup du père de Moctar que je n’ai pas connu. Elle se confie à moi et me raconte les épreuves qu’elle a eu à vivre dans son propre couple. J’ai fini par comprendre tellement de choses. Avec tout ce qu’elle a vécu, je me dis que c’est normal qu’elle soit aussi amère à son tour. Son mari n’a pas été tendre avec elle, à cela s’ajoute sa belle-mère qui la martyrisait. Moi j’ai eu la chance d’avoir le soutien de Moctar lorsque sa mère n’était pas agréable avec moi.
Je me demande encore comment une femme peut-elle détester la compagne de son fils ? C’est juste impensable pour moi. Je sais que je ne serai pas comme ça avec les épouses de mes garçons ; parce qu’aimer une personne est noble. Alors la femme qui aimera mon fils ne peut qu’avoir mon amour et mon affection en retour. Ces belles mères qui pourrissent la vie de leur bru doivent se revoir à la baisse.
Mais de mon côté, je rends grâce à Dieu dans la mesure où j’ai pu surmonter toutes ces épreuves et aujourd’hui je me sens libre et bien dans ma peau et dans ma tête.
N’est-ce pas ça le plus important ?
Alors pourquoi n’arrive-je pas à sortir Moctar de ma tête ? Bientôt quatre ans que nous ne sommes plus ensemble, mais j’ai l’impression que je ne suis pas heureuse sans lui. Il est vrai que je me fais draguer. Je trouve ça un peu dôle pour mon âge. Je sais que je ne suis pas aussi vieille que ça et donc il est normal que j’attire encore le regard des hommes sur moi. Cependant j’avoue que je pourrai bien me passer de ça. Fatou a essayé de me caser aussi, mais elle s’est maintes fois heurtée à ce mur qu’est mon refus catégorique.
—Pourquoi vis-tu dans le passé Martine ! Ah tu m’énerve à force.
Elle avait l’air tellement en colère que j’ai éclaté de rire.
—Non mais tu vois ta tête là ? Tu te comportes comme si je suis une adolescente. Je ne cherche pas l’amour Fatou et arrête de vouloir me caser à tout prix. Je ne suis pas encore prête à m’engager ; et puis je crois que ce n’est pas le moment.
—Moi je crois plutôt que tu as peur.
—Peur de quoi ? AHH ma sœur ! À mon Age là c’est quoi qui va me faire peur dans affaire de garçon ? Toi aussi ! J’en ai vu des vertes et des pas mûres. Alors pour ma petite expérience, je doute que quelque chose puisse me faire encore peur.
Elle a sourcillé avant d’éclater de rire.
—Ne te jette pas en brousse ma chérie. Je ne parle pas de ce que tu penses. Elle me fait un clin d’œil lourd de sous-entendus. Je ne te parle pas de ça ; je fais plutôt allusion à cet engagement qu’est une relation se-rieux-se avec un homme qui puisse vouloir vivre avec toi. Parce que oui tu as peur de t’engager à nouveau.
Je lève les yeux au ciel. Exaspérée.
—Pourquoi dis-tu cela ?
—Parce que tu as peur de souffrir ma chérie. Tu ne veux pas retomber dans un Moctar bis. Et sache que je te comprends ; à ta place j’aurais sûrement fais pareil. Mais la peur ne doit pas t’empêcher de faire ce que tu veux. Ou même d’être qui tu veux.
—….. (Silence)
—Je te connais Martine. Nous ne sommes pas amies pour rien. Quoi ? Plus de vingt qu’on se connait et tu penses que je ne peux deviner tes peurs et tes craintes. Elle émet un petit rire puis continue. Tu sais que je ne te dirais jamais ce que tu veux entendre, mais plutôt ce que tu dois entendre.
—Mais Fatou si tu me connais comme tu le dis, tu dois savoir que je ne peux m’engager du jour au lendemain dans une relation dont je ne connais ni les tenants ni les aboutissants.
—Personne ne te demande de t’engager dans quoique ce soit. D’où sors-tu cela ?
—Mais vous voulez tous me caser.
—C’est parce qu’on ne veut plus te voir te morfondre dans ton coin. C’est juste ça. On ne te demande pas de te marier avec le premier venu. Mais plutôt de sortir, respirer un autre air que celui de ta maison et de ton bureau. C’est tout ce qu’on te demande. Il ne s’agit pas pour toi de dire oui au premier venu, mais plutôt d’apprendre à connaitre tous ces hommes qui t’aborde.
—Je ne sais pas. Je n’ai pas confiance. Tu sais très bien que lorsqu’on a été mordu par le serpent, on craint même le bois mort.
—Oui tu as raison sur ce point. Toutefois, ne laisse pas le venin de ce maudit serpent te pourri la vie et t’empêcher de t’épanouir. Il faut savoir, qu'il n'y a pas d'hommes parfait, ni de femmes parfaite. C'est nous qui idéalisons la personne qu'on aimerait avoir, exigeons et créons un personnage qu'on ne pourra jamais trouver ! Tu as besoin de la présence d’un homme dans ta vie ; je ne dis pas qu’être célibataire c’est mauvais, loin de là. Ce qui est mauvais, c’est de ne pas essayer quelque chose. On ne sait jamais où et quand la chance pourra te sourire. Tu te dis que tes enfants sont encore petits et que tu as tout le temps. Mais n’oublie pas que ces garnements grandissent à une allure vertigineuse. Et dans peu de temps, tu les verras prendre la route du lycée puis de l’université. A ce moment-là, tu seras toute seule dans ta maison, à te morfondre.
Sa dernière phrase nous fait bien rire. Car cela a toujours été notre crainte. Le fait de se retrouver seule et abandonnée vers la fin de sa vie. Je me rappelle que lorsque nous étions plus jeunes, nous en parlions en faisant des signes de croix. Et dire qu’aujourd’hui, je tends immanquablement vers cette fatalité.
—Bon tu as fini de me convaincre…
—Yes ! Jubila-t-elle.
—Mais ! Mais ! Laisse-moi finir. On le fait à mon rythme. Et je ne veux surtout pas les farfelus qui servent d’amis à Abdoul. Vue comme il se comporte, je suis sûre que ses amis sont pires que lui. Et je ne veux pas tomber dans un autre cycle infernal de mensonge et de tromperie.
—Hum à qui le dis-tu ? Moi-même je vais bien surveiller tes arrières et crois-moi que des « sans la loi » comme Abdoul et sa bande seront nos ennemis.
Nous sommes partis d’un grand éclat de rire. Ça fait du bien d’avoir des gens à qui parler, mais surtout avec qui partagé ses inquiétudes et ses doutes.
Avec cette expérience et cette épreuve, j’ai fini par comprendre de la vie que lorsque nous plaçons beaucoup de confiance ou d'attentes chez une personne, le risque d'une déception est grand. Les gens n'existent pas dans ce monde pour répondre à nos attentes, tout comme nous ne sommes pas là pour satisfaire les leurs. Nous devons nous contenter de nous-mêmes. Et quand on veut être avec quelqu'un, on doit être conscients que l'on est ensemble parce qu'on l'aime, on le veut et on doit aller bien.
Jamais parce que nous avons besoin de quelqu'un. Une personne n'a pas besoin d'une autre, elles se complètent : pas pour être deux moitiés, mais pour être un entier. Disposées à partager des objectifs communs, de la joie et de la vie. Au fil du temps, nous nous rendrons compte que pour être heureux avec une autre personne, dans un premier temps, il est nécessaire que n’ayons pas besoin de cette personne. Nous devons comprendre aussi que si la personne que nous aimons ou que nous pensons aimer, ne veut rien partager avec nous, c'est parce que sans aucun doute, ce n'est pas l'homme ou la femme de notre vie. Nous devons apprendre à nous aimer, à prendre soin de vous-même. Aussi, et surtout qu'il faut aimer ceux qui nous aiment.
Je me dis que c’est peut-être le cas entre Moctar et moi. Nous ne sommes pas forcement fait pour être ensemble ; et je m’entêtais à le rester. Et puis de toutes les façons, la vie en a décidé autrement. Même si j’avoue que j’aimerais un tantinet revenir à cette belle époque d’insouciance et d’amour partagé.
J’ai donc fais un effort pour Fatou et essayer de répondre à quelques invitations. Mais j’avoue que j’ai regretté car je partais de catastrophe en catastrophe. Certains même me disaient carrément qu’ils ne sont pas prêts pour le mariage et veulent juste qu’on s’étudie afin de mieux se connaitre.
Non mais quoi encore ? À mon âge ais-j ’encore envie de me faire étudier par un homme ? Ou est-ce que je ressemble aux minettes qui ont envie de fricoter ?
Tout ça m’a emmené à baisser les bras et à me contenter de mes bébés et de mon travail. Je ne veux plus perdre de temps dans des rendez-vous qui n’en valent vraiment pas la peine. Je voyais ça comme un signe de Dieu pour me fermer à toutes relations qui pourront me distraire. Mon cœur semble être mort avec le départ de Moctar. Je n’arrive plus à aimer.
Je ne me sens plus la force d’aimer un homme comme je l’ai aimé lui. Je pense que c’est juste impossible même si les autres veulent me faire croire le contraire.
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Aujourd’hui c’est l’anniversaire d’Orphée. Mon bébé grandi. Il a six ans et je veux lui organiser une petite fête avec ses amis de l’école. Il a hâte aussi ; car selon lui, tous ses copains ont eu droit à une belle fête. Donc il veut pareil. Mais surtout il veut être le roi de la fête.
« Je veux une fête comme pour Nathan maman ». Alors je me dois de lui faire une fête pareille à celle de Nathan, sinon plus. J’ai donc été voir leur maitre qui m’a guidé. Vu que le papa du petit Nathan était en mission, je n’ai pu le voir pour lui en parler. Ce dernier viendra avec sa tante. Il a été l’une des premières personnes à être invité à l’anniversaire. Je me suis donc débrouillée avec les moyens de bord afin que la sienne soit une réussite. C’était ça ou j’aurai droit à des pleurs pour le restant de l’année.
Il veut comme thème de la fête « Sam le pompier ». Parce qu’il s’avère que son ami a eu le même à son anniversaire et son père l’a déguisé en « Sam le pompier ». Il veut textuellement la même chose. Je me suis donc converti en PCO avec l’aide des uns et des autres afin de donner une belle fête à mon fils. J’espère qu’il aimera. Mais surtout j’espère aussi que cela lui passera l’envie de voir son père ; même si j’en doute fort.
Vu que la fête est pour 16 heures, j’ai demandé à Nouria et Fatou de passer m’aider. Elles s’occuperont de la cuisine tandis que j’irai faire les dernières courses à Cap Nord. Il faut que tout soit parfait.
Je me gare donc au parking du super marché et je cours prendre un cadi. Je n’ai pas beaucoup de temps devant moi. Je passe dans les rayons prendre tous les articles que comporte ma liste. A savoir les bougies, les ballons et les autres décorations. Il Ya des paquets cadeaux prévus pour les invités. Il y aura en tout vingt personnes. Ne me retrouvant pas dans mes notes, j’appelle Nouria pour qu’elle me fasse le point de ce qui manque à la maison.
—N’oublie pas aussi les pistolets à eaux. Me rappela-t-elle.
—Ah tu vois que si tu ne l’avais pas dit, je ne pouvais même plus m’en souvenir.
—Et puis… il Ya … je crois qu’il manque également les petits camions citernes que tu dois prendre au rayons jouets. Et pour finir tu dois passer récupérer le gâteau.
—Ma mère va s’en occuper. Je ne peux gérer tout ça en même temps. Essaie de faire la liste de tout ce qui est susceptible de manquer et tu m’envoie ça par message. Parce qu’au téléphone comme ça, je ne me retrouve pas trop.
—C’est compris. Mais martine il faut aussi que je te dise qu’on a un gros…
Je ne l’écoutais même plus déjà.
Je crois que j’ai rêvé de ce moment depuis je ne sais combien de temps. Oui je me suis demandé ce que ça ferrait de le revoir après toutes ses années. Je m’étais imaginé bien des scenarios. Des plus farfelues au moins sordides. J’ai tout imaginé sauf ça.
—Allô ! Allô.
Je me rends compte je suis toujours en ligne avec Nouria. Je ne sais même plus ce qu’elle me disait. Et j’avoue aussi que je ne peux plus lui accorder mon attention. Celle-ci est attirée par autre chose ; que dis-je par une autre personne. Je raccroche instinctivement et m’avance vers lui.
C’est fou comme le temps est passé, mais que j’ai l’impression qu’on ne s’est quitté qu’hier. Le souvenir de notre dernière rencontre me revient et mon cœur se serre de douleur. Cependant, cela n’empêche que je veuille toujours lui parler. Arriverais-je un jour à détester cet homme en dépit de toutes les peines qu’il m’a infligé ?
Non ! Je ne pense pas y arriver. Disons que je ne veux pas y arriver. Le détester reviendrai à détester le fruit de mes entrailles, qui ne sont autre que le fruit de ses semences.
Plus je m’approche de lui, et plus je sens mon cœur cogner fort dans ma poitrine. Mon Dieu donne-moi la force. Priais-je intérieurement. Je ne le quittais pas du regard. Je me disais que même en clignant des yeux, il pourrait s’évaporer et je ne le reverrai plus jamais. Alors je le fixai au point où il s’est retourné et nos yeux se sont croisés.
Je me suis revenu dix ans en arrières. J’ai revu ce jeune monsieur beau et fringuant qu’il était ; un homme doux et tendre. Un homme à la générosité qui n’a d’égal que L’amour qu’il a en lui pour son prochain. Je suis tombé amoureuse de l’homme qu’il était, je suis tombé amoureuse du père qu’il est devenu. Et je suis sûrement amoureuse de l’image que je garde de lui. Parce que celui que j’ai en face de moi ressemble au sosie de Moctar. Il se ressemble. Mais est-ce lui ?
—Moctar ? Appelais-je pour être sûr de ne pas me tromper sur l’identité de mon interlocuteur. De loin je l’ai reconnu, mais de près, c’est une toute autre personne.
—Martine !
Sa réponse m’a juste confirmé que c’est bel et bien lui.
—Qu’est ce qui t’arrive Moctar ? Es-tu souffrant ?
C’est la première chose que je lui demande presque quatre ans sans se voir. Je ne peux contenir mes larmes. Je me suis mise à pleurer comme un enfant. Seigneur que lui est-il arrivé ? Il ne ressemble plus qu’à l’ombre de lui-même.
—Je vais bien Martine.
Il me sourit tendrement. Je passe une main tremblante sur son visage que je caresse doucement. Il a une sale barbe. Son regard est vide et empreint de mélancolie. Je ne sais pas ce qui se passe, mais je pense qu’il est plus mort que vif. Il a perdu toute sa vigueur d’antan.
—Je ne sais pas…. Je …
Je ne pus terminer ma phrase parce que je pleure trop.
—C’est l’anniversaire d’Orphée aujourd’hui. Dis-je en souriant. Il a grandi et il te ressemble beaucoup ; c’est ton portrait craché. Tu le verras que tu penseras que c’est toi en plus jeune.
J’ai vue plusieurs émotions traverser son visage. La surprise, la joie, puis la tristesse s’est installée.
—J’imagine ! murmura-t-il. Il me manque beaucoup… je veux dire… les deux me manquent beaucoup.
—Tu leur manque également. Orphée n’arrête pas de te demander. Il ne cesse de regarder tes photos. Il ne t’a pas oublié Moctar. Comment pourrait-il t’oublier… tu es son père et un enfant a besoin de son père à ses côtés. Tu lui as appris à marcher ; c’est ton nom qu’il a prononcé en premier…
Ma voix se brise sous le poids de l’émotion.
C’est comme ça la vie ! Elle est ainsi faite. Elle nous sépare et nous réunis selon son bon vouloir. J’ai juste envie de revenir dans le passé et de bien faire les choses. Maman dit que je suis en partie responsable du déclin de mon mariage. Je le pense aussi. J’ai laissé un serpent à sonnette s’infiltrer dans ma maison, ce dernier m’a non seulement mordu, mais il a aussi détruit mon bonheur et celui des miens.
—Arrête de pleurer s’il te plait. Je n’ai jamais supporté te voir ainsi.
—Mais je ne peux m’empêcher de le faire quand je te vois dans cet état. Dis-je en sanglotant de plus belle.
Les gens dans les rayons commençaient à nous observer. Je ne pouvais contenir tout ce que j’avais dans le cœur. Si seulement ils savaient ne serait-ce que la moitié de l’histoire, je crois qu’ils m’offriraient un paquet de lotus afin que je puisse essayer es larmes. Car celles du cœur sont encore plus douloureuses que celles qui coulent des yeux.
— Eh calme-toi. Ne te mets pas dans un état pareil pour moi. Tu crois que j’en vaux la peine ?
Je ne sais quoi répondre à cette question. Je le regarde et ses yeux brille d’un éclat qui n’existent plus je crois. Il me touche l’épaule et un long frisson me parcours tout le corps. C’est surement ce qu’ils appellent l’amour. Quand la haine ne peut altérer un sentiment, quand la haine ne peut prévaloir sur un sentiment… lorsqu’en dépit de toutes les souffrances endurées par la faute d’une personne, et que vous êtes toujours sous un coup de chaleur lorsque vous voyez cette même personne… c’est ça l’amour. Quand la haine, la douleur, la tristesse, les larmes et même l’abandon ne peuvent être un frein à ce sentiment…
—Désolé. Je ne voulais pas. S’excusa –t-il en voyant le trouble qu’il a créé en moi.
—Non tu n’as pas à l’être.
—Aujourd’hui est un jour de joie et je ne veux pas que tu te rendes malade pour moi… je sais que je ne le mérite peut-être pas, mais je suis tellement …
—Tu es tellement quoi ?
Nous sommes interrompus par elle. Ah la vipère. Elle rayonne de mille feux ; avec son regard de sphinx. Cette femme est le diable incarné. Malheur à ceux qui la fréquente.
—Je t’écoute. Aller parles. Pourquoi te tais-tu ? Scande –t-elle de plus en plus fort. Je te laisse juste deux minutes pour aller dans un autre rayon et je viens te trouver entrain de fricoter avec cette moins que rien.
—Je ne te permets pas…
—Toi tu la ferme ! Je ne t’ai pas encore sonnée. Me coupa –t-elle.
—Ecoute chérie. Intervient Moctar.
—Il n’y a pas de chérie qui tienne. Tu ne vas pas me berner avec tes conneries hein. Et puis qu’est-ce que tu vas me sortir même comme excuse ? HUM dis-moi ? Qu’as-tu à dire ?
—Je ne faisais rien de mal avec elle. C’est elle qui s’est approché de moi pour me parler et sans plus. Je t’en prie ne te fâche pas pour si peu.
—Tu crois que c’est peu pour moi de venir te voir arrêter avec ton ex-femme ? C’est tout sauf peu et surtout n’essaie pas de rendre la situation moins dramatique qu’elle ne l’est. C’est grave et tu le sais. Ne fais pas semblant.
Il tente de la toucher, mais elle se débat et lui flanque une belle gifle.
J’en suis restée bouchée ouverte.
—Ne t’avise pas de poser tes sales pattes sur moi. Surtout pas après que tu l’as touchée elle.
Cette fois c’est clair, nous attirons le regard des uns et des autres. Des petits groupes ont commencé se former dans les différents rayons et les gens commentent la scène selon leur entendement. Certains ont même sorti leur téléphone portable et prennent des photos ou des vidéos, qui je crois seront postés sur les réseaux sociaux dans moins de deux. Quant à moi, je suis encore sous le choc de la scène qui se déroule sous mes yeux. J’ai du mal à y croire. Elle l’a giflé comme ça ! C’est fou. C’est tellement aberrant en mon sens que j’ai envie de lui rendre sa gifle. C’est quand même le père de mes enfants. De quel droit ose-t-elle lui porter main de la sorte ?
—Attends ! Mais qu’est ce qui ne va pas chez toi ? Pourquoi fais-tu ça ?
—Depuis que je te dis que je n’ai pas affaire à toi mais plutôt à ce pantin ; mais on dirait que tu n’as pas pigé ça hein. Ou bien tu es devenue sourde et idiote ?
—Contrôle ton langage Akabla.
—Sinon quoi ?
—Sinon je vais t’apprendre ce qu’est le respect des ainés. Je me ferrai le plaisir de te refaire ta sale éducation.
—AH bon hein ! Ooorrhh j’aimerais bien voir ça. Martine, ah Martine, on dirait que tu en as pris de la graine hein. C’est bien ça. Je suis contente d’avoir été celle qui t’ouvre les yeux. Toi qui pensait que la vie est un conte de fée où tout et rose et doré. Je me rends compte que tu as gouté à la phase acide et amère de cette putain de vie.
—J’ai toujours su que la vie n’est pas rose. Tu ne m’as donc rien appris.
Elle éclate d’un mauvais rire. Un rire à en faire froid dans le dos.
—Soit ! Dans tous les cas, je peux me vanter de t’avoir fait comprendre certaines choses. Et je sais aussi que jamais tu ne m’oublieras. De ça j’en suis même persuadée. Tu me verras toujours dans tes cauchemars les plus atroces et tes rêves les plus fous. Crois-moi ma belle au bois dormant, mon nom et mon visage vont te hanter pour le restant de tes maudits jours.
Prise d’une colère aveugle, je me jette sur elle pour la rouer de coups. Elle doit son salut à Moctar et aux autres rayonnismes. Sinon je crois que j’en aurais fini avec elle.
—Tu peux me battre autant que tu veux. Moi j’ai déjà atteint mon but. Je t’ai pris tout ce que tu avais ; il ne te reste plus rien que tes deux batard ainsi que tes pauvres yeux pour pleurer.
—Approche ici pour qu’on parle mieux. Pauvre fille que tu sois.
—C’est toi la pauvre fille ! Frigide et frustrée. Ne me regarde pas ainsi, ce sont les propos de ton mari lorsqu’il se glissait entre mes cuisses chaudes. Moi je suis une vivante, je ne suis pas une morte glacée comme toi. Tu ne sais rien faire à part travailler, et voici qu’il ne te reste plus rien. Va coucher avec tes stylos ou bien tes nombreux dossiers. Un homme a besoin d’une femme pour se réchauffer et vice versa. Mais toi non, c’était plutôt le travail qui te réchauffait la chose. J’ai pitié de toi Oohhh…
Elle se met la main sur la bouche et commence à crier. Cette fille est vraiment sans vergogne. Et ce crétin de Moctar qui regarde sans rien dire. Et moi qui avais pitié de lui à l’instant. C’est sûr qu’il mérite tout ce qui lui arrive. Je suis dégoutée par tout ça.
—Aka chérie vient on s’en va.
—Toi tu ne me touche surtout pas. Tu verras de quel bois je me chauffe à la maison. Imbécile.
—Ne t’énerve pas contre moi. Se défend-t-il. C’est elle qui est venue vers moi chérie et je ne pouvais faire autrement. Tu sais que c’est toi que j’aime. Elle c’est du passé ma princesse. Ne te fâche pas pour si peu. Elle n’en vaut vraiment pas la peine.
Je ne pouvais pas imaginer pire, ni même être plus humilier que ça. Et c’est moi qui passe pour la voleuse de mari aux yeux des autres. Je suis vraiment larguée là.
—Tu ne changeras donc jamais Moctar. Dis-je les larmes pleines les yeux. Cette femme t’a vraiment eu ; elle t’a envouté et maintenant tu la suis comme un chien. Un animal de compagnie.
— Tais-toi Martine. S’il te plait. Ne vois-tu pas que tu me crée des problèmes avec ma femme ? Je t’en prie laisse-moi tranquille. J’espère ne plus jamais te revoir de ma vie.
Comme pour me donner le coup de grâce, Akabla s’approche de moi à son tour avec un sourire vainqueur aux lèvres.
—Que t’ais je di—….
—Ok je vais prendre la peine de te le rappeler. Tu ne gagneras jamais dans cette vie contre moi. Et dans aucune autre d’ailleurs. Puis s’approchant encore plus de sorte à n’être entendu que de nous deux. Ah j’oubliais, le coup du ticket d’hôtel et de restaurant dans les poches ainsi que du parfum, et bien c’était moi. Sans compter tout ce qui a suivi après…
—Oh !
—Oui oui tu as raison de ne pas parler. Et même pour ce qui est de l’incident quand tu étais enceinte, c’est encore moi. En principe, tu devais perdre ton bébé et mourir par la suite. Mais bon Ton Dieu que tu pries en a voulu autrement. Alors je te préviens, si jamais tu t’avise de t’approcher encore de mon homme, ne serait-ce que d’un mètre, je te tue. Non non pas toi… je tue tes enfants.
Et elle s’éloigne de moi en riant. Mais elle s’arrête un peu plus loin, et s’écrit.
—Je souhaite un joyeux anniversaire à mon bébé Orphée. Dis-lui que tata Akabla l’aime beaucoup.
Je ne sais pendant combien de temps je suis resté inerte dans le rayon. Surement une vingtaine de minute. Parce que les gens autour de moi me regardaient comme si j’étais folle. Et c’est là que j’ai fini par me rendre compte que je pleurais toujours. Le cœur et les épaules lourds, je paie mes courses et je retourne à ma voiture. Je me couche sur le siège arrière pour donner libre cours à mon désarroi et ma à douleur.