Chapitre 31
Ecrit par Annabelle Sara
Chapitre
31
Les
vagues, le soleil, la brise tous ces éléments de la nature si pure, si saine
qui la transportaient au loin. Sans ambages, ni équivoque vers de nouvelles
sensations dont elle ne connaissait pas encore la saveur. Toutes ces choses qui
l’apaisaient, la revigoraient, elle qui avait été trompée, dupée et
grossièrement trahie, elle se sentait à présent libre.
Mais
une flamme en elle lui disait qu’elle n’avait pas encore tout vécue et donc ne
pouvait renoncer, malgré les peines et les blessures elle devait user le peu de
force qui lui restait pour aimer.
Elle
ouvrit les yeux et le premier visage qu’elle vit, lui confirma qu’elle était
faite pour cela, aimer.
Aimer
de toute ses forces cet homme qui l’entourait de son amour et qui la soutenait
quelque soit l’épreuve. Il y’avait une autre personne qu’à présent elle allait
s’employer à aimer avec toutes les fibres de son être.
« Ly ! », chuchota-t-elle en essayant de se redresser sur le lit
qu’elle occupait.
Stéphane
attiré par sa voix ouvrit les yeux, lui sourit et la retint dans sa position
couchée.
« Non chérie, ne bouges pas tu es encore très faible, et Ly va bien elle
est dans sa chambre à côté… »
« Je veux la voir… », ajouta la jeune femme. « S’il te plaît Steph… »
« Je sais mon amour que tu veux la voir mais il faut d’abord que tu
récupères… tu ne veux pas qu’elle te voit dans cette état… si ? »
Il
lui baisa le front et lui caressa les cheveux.
« Et puis de toutes les manières tu ne peux pas encore lui parler, elle
aussi a besoin de repos après ce qu’elle a vécu, hein ! »
« Oui, tu dois avoir raison… mais je suis ici depuis combien de
temps ? », s’enquit-elle en furetant autour d’elle surprise d’être
dans un lit d’hôpital.
« Deux jours! Tu as fais une crise d’angoisse et le docteur a dit que tu
avais besoin de repos… »
Elle
l’observa et vit en instant passer dans ses yeux l’inquiétude qui l’avait
rongé.
« Tu nous as fait très peur tu sais ? », dit-il en l’embrassant
de nouveau. « Je ne t’ai jamais vu dans cet état ! »
« Je suis désolée ! J’ai un peu péter les plombs ! »,
dit-elle en se rappelant de la scène et du tôlé que cela avait créé.
« Ne le sois pas, je ne peux même pas imaginer ce que tu as ressenti
lorsque tu t’es rendue compte de la supercherie. Je t’aime ! »
Elle
lui sourit péniblement car son corps était encore faible et le moindre geste
lui donnait le tournis.
« Je t’aime, moi aussi ! »
« C’est bon à savoir parce qu’il y’a une personne qui voudrait te voir et
moi… disons que je suis un peu jaloux de ce que vous allez partager tous les
deux ! »
Victoire
ne comprenait pas de qui il parlait et le fit savoir :
« Pourquoi tu dis cela ? De qui tu parles ? »
« Le mieux c’est que je le fasse entrer ! », répondit-il
mystérieux. « Je reviens, d’accord ? »
Il
lui vola un dernier baiser avant de la quitter.
Victoire
était perplexe, qui pouvait bien être cette personne avec qui elle devait
partager des choses au point de rendre Stéphane jaloux. Elle n’y comprenait
rien du tout.
Elle
essaya de se redresser dans son lit pour mieux s’installer, mais ses membres ne
suivirent guère. Et puis elle vit entrer un grand gaillard aux épaules
carrées, qui autrefois avait fait battre son cœur au point de devenir sa
maîtresse et de quitter son époux trop radin pour lui.
Luke
n’avait pas changé en deux ans. Toujours aussi beau et ce sourire enjôleur dont
il ne se départissait jamais. Le père de sa fille était là debout dans sa
chambre.
Elle
n’eut d’autre choix que de lui ouvrir ses bras pour y pleurer son amertume.
« Luke, mon Dieu, tu es là ! »
Il
la serra dans ses bras en la réconfortant d’une caresse dans le dos.
Elle
avait rêvée de ce moment pendant des années, ce moment où elle l’accueillerait
les bras ouverts pour lui présenter leur bébé. Elle ne savait pas vraiment
pourquoi le ciel exauçait son vœu aujourd’hui mais elle était heureuse de
pouvoir partager ce moment avec son ex-mari, parce qu’il est bien le seul homme
avec qui jusqu’ici elle avait voulu avoir un enfant.
« Je ne pouvais manquer de te revoir, je suis arrivé par le premier
avion ! Tu as l’air d’une miraculée ! »
« Je le suis… nous le sommes tous les deux ! Le ciel a écouté nos
prières… »
Il
prit la chaise à son chevet et s’assit en gardant ses mains dans les siennes.
« Tu es très belle même avec ce teint affreux ! »
Elle
rit doucement.
« Comment… comment tu as appris pour… »
« Medou m’a contacté et m’a raconté toute l’histoire depuis le début
jusqu'à ton malaise ! », répondit-il en lui souriant.
« Et tu l’as vu ? », demanda Victoire comme si c’était la
première fois que Luke voit sa nièce.
« Je n’ai pas voulu rentrer dans sa chambre, je l’ai observé par la vitre.
J’ai toujours trouvé qu’elle te ressemblait un peu trop ! », lui
avoua-t-il. « Mais je n’aurais pas cru ta sœur capable de ça ! »
« Ne parlons plus de cette histoire… »
« Il faut qu’elle paie pour ce qu’elle a fait ! »
La
voix de Luke était tranchante et froide.
« Luke… »
« Je sais que c’est ta sœur mais c’est aussi une criminelle… à cause
d’elle, je ne pourrais pas faire la connaissance de ma fille ! »
Victoire
fronça les sourcils et secoua vivement la tête.
« Pourquoi ? Il suffit que tu entres dans sa chambre et que tu lui
dises bonjour… »
« Non, je ne peux pas faire cela… je ne peux pas m’imposer à cette enfant !
Je… j’ai une famille aujourd’hui et elle a besoin de stabilité… Un papa
présent ! »
« Mais, elle a aussi besoin de toi… »
« Elle a besoin d’une figure paternel stable ! Tu pourras
parler de moi avec elle et nous nous accorderons pour que je le vois de temps à
autre… Mais il faut qu’elle profite de sa mère… », murmura-t-il en lui
caressant les cheveux.
« Mais nous avons rêvé de cet enfant… »
Le
regard lui sourit et prit sa main.
« Je suis certains que tu pourras gérer et je serais toujours présent mais
je ne veux pas que ma fille soit bousculée… Elle a plus besoin de toi en ce
moment que de moi ! »
Victoire
n’y croyait pas, ils avaient vécu ensemble pendant quatre ans, ils ont désiré
cette petite fille, mais aujourd’hui ils ne pouvaient pas former une famille
pour elle.
« En plus tu as un homme à tes cotés… Comme j’ai une femme ! Nous
avons besoin d’habituer notre bébé tout doucement à cette nouvelle
situation ! Une famille à la fois ! »
« Je comprend ! »
Il
lui frotta les mains pour la rassurer.
« Oh Luke, non… »,
murmura-t-elle.
« Ne pleures plus ma belle ! », la consola-t-il en essuyant ses
larmes. « Si Medou te voit pleurer il va me tuer, aller sèches tes
larmes. »
« Je ne peux pas croire si ma sœur ne nous avait pas enlevé notre fille
nous serions toujours ensemble ! »
« Nous aurions quand même réussi à nous détruire ! Nous n’étions plus
sur la même longueur d’onde longtemps avant cela et je pense qu’avec Medou… Tu
as enfin trouvé ce dont tu as besoin ! Vic, il prendra soin de vous… sinon
je reviendrais lui botter les fesses ! »
« Tu risques d’être désagréablement surpris ! », rigola-t-elle
en se nettoyant le nez du revers de la main.
« Ah bon ! Tu le défends déjà ? »
Ils
rirent ensemble encore un moment et Luke prit congé d’elle après l’avoir
embrassé et remercié pour le cadeau qu’elle lui avait offert.
Victoire
pleurait, elle pleurait cette famille qu’elle aurait peut-être eu mais aussi
celle qu’elle allait maintenant avoir. Sans Ange ! Comment allait réagir
la petite ? Elle pleurait encore lorsqu’elle l’entendit s’adresser à Stéphane
qui était derrière la porte à attendre, en disant, la voix coupé par
l’émotion :
« Prenez soin d’elles Medou, toutes les deux, c’est un grand cadeau que je
vous fais… prenez soin d’elles ! »
Victoire
sombra de plus belle dans les larmes, elle n’en pouvait plus, de devoir
supporter cette douleur.
Cassie
qui elle aussi était dehors entra dans sa chambre et la voyant ainsi en larme
s’assit sur son lit et se blottit contre elle pour la réconforter. Elle
s’effondra en réalisant la situation dans laquelle elle se retrouvait ou plutôt
celle de la petite Cathy Ly, une fille, deux mères !
« Calmes-toi ma belle, chuuut… »
« Je voulais juste une famille heureuse et soudée… ce n’est pas juste, la
vie ne peut pas être aussi cruelle… je n’en peux plus ! Mon Dieu, je n’en
peux plus ! »
Etienne
observait ses neveux tandis que leur mère relatait calmement les faits troubles
qui entouraient la mort factice de leur père.
Sur
le visage de Cassie on pouvait lire la surprise, le dégout, la colère et finalement
une immense peine et de la honte. Comme si appartenir à cette famille, était
devenu un parcours du combattant pour elle et qu’elle en avait marre de se
retrouver chaque fois face à une nouvelle épreuve, qui ne la laissait jamais
idem.
Ronald
lui était au départ très surprit, puis l’on a eu le sentiment à un moment que
toute cette histoire farfelue faisait son chemin dans sa tête. Il donnait même,
presque, l’impression d’avoir un jour émit l’hypothèse que son père n’était pas
vraiment mort, mais dans son regard l’inquiétude se dessinait chaque minute qui
passait et que sa mère avançait dans son histoire.
Le
troisième neveu, l’ainé par contre ne laissait rien transparaitre. Aucune trace
de désarroi, ni d’énervement, ses yeux étaient un océan plat. Juste un immense
horizon, comme si la lune n’existait plus et ne pouvait plus donc dicter aux
vagues leur conduite. Stéphane était assis face à un ouragan et il ne bougeait
pas, ne cillait pas, comme si apprendre autant de mauvaises nouvelles en si peu
de temps ne l’atteignait plus. Il était comme un critique immunisé face à
l’humour médiocre d’un comédien.
Cette
réaction ou plutôt ce manque total de réaction inquiéta Etienne qui connaissait
son neveu comme un feu brûlant et une tempête. Son histoire avec les sœurs Esso’o
l’avait certes épuisé, mais son regard perdu dans le loin était très alarmant.
Cassie
fut la première à réagir lorsque sa mère eu fini.
« Tu veux… tu es en train de dire que papa est en vie ? »,
demanda-t-elle en se tenant le ventre comme si toute cette révélation était un
coup en plein dans son estomac.
« Oui… et je ne sais pas… je n’arrive plus à entrer en contact avec lui…
je crois qu’à présent il lui est arrivé quelque chose et il faut… »
« Qu’on le retrouve avant… avant cette mystérieuse femme ! », termina
Ronald en se servant un verre.
« Nous croyons avec votre mère que nous pouvons le retrouver grâce à une
personne, Shannon ! »
« La fille de l’ombre? C’était ça le motif du chantage qu’elle te
faisait ! », fit Ronald sans surprise dans la voix comme devenait
plausible.
« Je dois la rencontrer aujourd’hui, nous verrons donc ce que nous
pourrons tirer d’elle. », annonça sa mère. Si elle a eu des photos de
votre père et cette femme, alors elle a forcement une idée de l’endroit où ils
se trouvent ! »
« Je croyais qu’elle avait déjà eu ce qu’elle voulait ? »
« Moi aussi, j’ai en ma possession des choses qui lui seront très utiles,
si elle veut quitter le sinus sans dommages ! »
« Je n’arrive toujours pas à y croire ! », s’exclama Cassie en
s’enfonçant dans son siège.
Stéphane
n’avait toujours pas dit un mot.
« Moi, j’ai une autre mauvaise nouvelle à vous apprendre. »
Ce
ton était une véritable alarme pour eux, seul Stéphane ne semblait pas très
surprit d’entendre son frère dire cela.
« Angela Esso’o a dérobé des informations sur notre système de sécurité
qu’elle a dû remettre à une personne et je crois qu’il s’agit de son père.
Dernièrement, il aurait été vu en compagnie d’un des meilleurs informaticien du
Pays… il faut donc s’attendre à une attaque dans les jours qui viennent. Le
pire c’est que l’on ne sait pas exactement ce qu’ils comptent en faire et donc,
nous ne pouvons rien faire d’autre que de mobiliser le personnel pour parer à
toutes éventualités ! »
« Vous ne pouvez pas tout simplement changer les données du
système ? », s’enquit Pulchérie.
« Non, maman. Cela coûterait une fortune de refaire le système à présent,
nous ne pouvons rien faire d’autre que créer des pare-feu annexes à ceux qui
existent déjà qui vont pousser les pirates à dévoiler leurs intentions afin que
nous ayons une meilleure marge de manœuvre. »
« Et est-ce que tout est prêt pour ces éventualités ? », demanda
Etienne en prenant son téléphone pour mettre sur pied une cellule de crise.
« Oui, j’ai donné des ordres et dès que possible je vais me rendre sur
place. Dans le pire des cas nous allons devoir jouer au mort… »
« Ce qui veut dire ? », demanda Cassie.
« Couler la EDANG BROS ! Pour trouver de nouvelle formule, mettre le
personnel en congé et reconstruire un nouveau système sur les cendres de
l’autre en ayant des emplois du temps inhumains, vivre des réserves, mais
surtout prier pour que le nouvel empire survive à l’ouragan qui aura emporté
l’autre, vielle de plus de cent ans. »
La
voix de Stéphane prédisait l’apocalypse et la fin de la famille bicentenaire.
Il avait parlé avec un calme qui faisait froid dans le dos, mais c’était la
pure réalité. La famille toute entière voyait sa fin arriver à grand pas.
Entre
les extravagances des parents, le lacisme des uns et l’absence totale des
autres, ils ne pouvaient plus que se tenir là et voir arriver à grand pas la
déchéance de leur famille qui avait si longtemps survécu aux attaques
extérieures.
« Mais cette option est hors de propos ! J’ai l’intention de demander
à Victoire sa main, je serais donc bientôt le père d’une petite fille de cinq
ans qui aura du mal à comprendre comment sa tante est devenue sa mère. Vicky
n’a pas besoin de rentrer dans une famille où les gens se font passer pour mort
parce qu’ils veulent vivre une amourette. Elles méritent toutes les deux mieux
que cela, et je ne vais pas laisser des femmes aussi insignifiantes, qu’Angela
et Shannon ou même la maitresse de mon père, couler ma famille. Elles veulent
se farcir les bicentenaires ? Très bien ! Nous allons leur montrer
comment on fait un feu de bois dans les montagnes de Mbankomo ! »