Chapitre 35

Ecrit par WumiRa

« Une femme heureuse et comblée te donnerait le monde entier si elle le pouvait »



Sidérée par ce que venait de dire Malik, Maya marqua une pause. 


- Tu es assez intelligente pour faire le bon choix, fit-il encore. Et d'ailleurs même si c'était permis, je ne tolérerai jamais que tu fasse disparaître "mon héritier".


Elle dût se mordre jusqu'au sang pour ne lui lancer une réplique cinglante. C'était injuste, personne n'avait le droit de l'obliger à faire un tel sacrifice et encore moins pour lui !


- Tout ce que tu as à faire c'est prendre soin de toi ou plus précisément de vous "deux". 


Son regard descendit vers le ventre de la jeune femme. 


- Dis toi qu'une fois que tout sera fini, tu n'entendras plus jamais parler de moi. Je te dédommagerai comme je l'aurais fait avec une mère porteuse et tout le monde sera content.


Au fur et à mesure qu'il parlait, elle se demandait si par hasard il n'avait pas plus de problèmes que ce qu'elle avait cru. Parce qu'en l'instant précis, il était en train de lui acheter leur propre bébé. Un enfant qu'elle n'était même pas encore sûre de vouloir garder. Soit il avait complètement perdue la boule, soit il le faisait délibérément, rien que pour avoir la satisfaction de la voir souffrir. Mais pourquoi ? Il ne pouvait pas être à ce point insensible ! Elle n'avait rien fait pour mériter tout ça.


Sans un mot, elle rabattit les couvertures du lit, avant de s'y glisser, le corps endolori, le cœur lourd et les idées sens dessus dessous.  Le salaud n'avait même pas jugé utile de lui faire part de cette tradition dans sa famille, qui voulait qu'on n'avorte pas. Mais après, qui dit ce genre de choses ? Quand même pas quelqu'un qui tient obstinément à avoir un enfant ; à savoir d'où lui venait ce besoin devenu une obsession.


Elle tourna la tête et l'observa ; lui aussi avait les yeux rivés sur elle. Il la regardait avec la même intensité qu'à leur début, mais maintenant elle connaissait ce regard et ce qu'il signifiait. C'était celui qu'affichait son cher mari lorsqu'il convoitait quelque chose et là c'était "l'héritier" en train de prendre vie dans son ventre, qu'il voulait.


- Comment ça va à ton travail ? demanda t-il, pour détendre l'atmosphère.


Elle demeura muette. Il n'avait pas à feindre l'intéressé.


- Je donne parfois l'impression de m'en foutre de ce que tu fais, mais tu es ma femme et tout ce qui est en rapport avec toi, me concerne. Tout ce qui te touche m'atteint aussi. 


- Je ne suis pas ta femme. 


Elle arracha la bague à son annulaire et la déposa sur la table de nuit.


- Une étrangère, voilà ce que je serai dorénavant pour toi.


Son geste n'eût aucun effet de surprise sur lui. Il dit juste :


- Je ne faisais que prendre des nouvelles de ton travail. Il est de mon devoir de savoir si tu t'y sens bien ou si...


- Ou s'il faut que tu rachètes l'immeuble parce que je ne m'y sens pas bien ? 


Elle le toisa et tourna la tête ailleurs.


- Je ne suis pas un maniaque du contrôle.


- Va savoir si tu sais même ce que tu es en réalité.


Elle allongea la main, alluma la veilleuse avant d'éteindre la lumière. C'était sa manière à elle de lui faire savoir qu'il ne fallait rien ajouter, qu'ils n'avaient plus rien à se dire. Mais comme elle s'y attendait bien, il s'approcha du lit et remis la lumière.


- Je ne comprends toujours pas ce qui te met en colère dans toute cette histoire. J'ignore où est le malentendu parce que depuis le début j'ai joué franc, je t'ai dit ce que je voulais et tu as accepté. Je ne t'ai jamais menti ; tu as pleinement eu le choix. 


- J'aurais dû refuser et voir mon père sombrer, d'après toi ?


- Tu ne lui dois rien, Maya.


- Tu n'as pas de cœur. 


- J'ai dit, tu ne dois rien à Henri. Tu ne lui devras jamais rien.


Elle secoua la tête.


- Je me demande ce que tu comptes faire avec cet enfant s'il venait à naître, quand tu es toujours incapable de comprendre le lien qui existe entre un père et sa fille.


- Tu parles. Je ne suis pas tombé du ciel, moi.


- Tu m'en vois étonnée, ironisa t-elle. Le "chacun n'a que ce qu'il mérite" a tellement de sens maintenant.


Elle lui tourna le dos.


- D'après toi je mérite d'avoir vécu tout ce enfer ?


Elle lui refit aussitôt face.


- Quel enfer ? De quel enfer est-ce que tu parles ? Celui dans lequel tu m'as entraînée ou lequel déjà ? 


Elle se redressa.


- Si à un moment de tout ça j'ai eu pitié de toi, à présent ce n'est plus le cas ! Tout ce par quoi tu es passé ou pas ne m'importe plus, je n'en ai quasiment plus rien à foutre !


- Tu ne devrais pas t'emporter dans ce cas. Si comme tu le dis je te suis à présent indifférent, tu devrais peut-être arrêter de gueuler comme tu le fais. À moins que tu ne veuilles que j'y mette du mien.


En un temps record, Maya bondit sur ses pieds et se mit face à lui. Il la dépassait d'une bonne tête, mais le regard qu'elle posa sur lui aurait déjà refroidit plus d'un.


- Ne fais pas la gamine, je ne suis plus d'humeur...


- Tu vas me frapper ? 


- Tu veux vraiment jouer à ça ?


- Ah d'accord, tu vas vraiment le faire. Et bien vas-y !


Elle se rapprocha de lui jusqu'à ce que leurs poitrines se touchent.


- Frappe moi, Malik, fais sortir l'homme des cavernes en toi ! Qu'est-ce que tu attends ? Tu n'as quand même pas peur de m'abîmer ? Non, j'en doute et de toutes les façons je sais encaisser en silence.


Une expression de surprise se peignit sur le visage de Malik.


- Qu'est-ce que...


Alors qu'il ne s'y attendait pas, mais vraiment pas, elle empoigna le col de sa chemise d'une main, l'obligeant à se rapprocher encore plus d'elle.


- Je risque de te faire...très...mal...


Toute la tristesse du monde apparût sur le visage de la jeune femme, mais elle ne renonça pas pour autant à le pousser dans ses retranchements, à la limite du possible.


- Sois raisonnable et ôte ta main, ordonna t-il, mais avec calme et sérieux.


- Plus jamais je ne veux recevoir d'ordres de toi, articula t-elle, luttant malgré elle contre les larmes qui envahissaient ses yeux. Je...


La main de Malik se referma sur la sienne.


- C'est la dernière fois que je te le "demande".


- Je te quitte.


- Tu n'en es pas capable.


Il entreprit de lui faire lâcher prise, mais même menue comme elle l'était et pour une femme, elle avait une force incroyable en elle. Excédé et à bout de patience, Malik lui saisit le bras et le tira brusquement. Alors, croyant qu'il allait vraiment la brutaliser, elle leva son autre main pour se protéger, mais malheureusement dans son élan de recul, elle se tordit la cheville et tomba à la renverse, avant que sa nuque ne heurte l'un des pieds du lit.


Son cri de douleur alerta Malik qui se baissa aussitôt pour voir si elle avait quelque chose de cassé. Il ne remarqua pas tout de suite le sang sur le sol. Il voulu la toucher mais elle s'écarta de lui.


- Je suis désolée que tu te sois fait...


L'expression de son visage se figea lorsqu'il le vit.


Elle passa une main dans ses cheveux et les doigts qu'elle ramena devant ses yeux étaient tout aussi poisseux les uns que les autres. Elle fronça aussitôt le nez, avant de se lever pour se précipiter vers la salle de bain. Il comprit que la vue du sang lui donnait la nausée. C'était pourtant évident, il n'était pas censé oublier quel était son état et la dispute de tout à l'heure était la preuve que l'avoir à proximité pouvait le troubler au point de le rendre irresponsable. 


Il ouvrit un tiroir dans le mur et en sortit une sacoche contenant des effets médicaux. Il avança vers elle, ignorant le regard incendiaire qu'elle lui lançait à travers le miroir.


- Fais moi voir.


Il vit ses lèvres frémir, comme si elle allait répondre, mais elle n'en fit rien et il put vraiment s'approcher d'elle. Il deversa le contenu du sac par terre et l'invita à s'asseoir sur le couvercle des toilettes. 


- Je suis vraiment désolé, fit-il, lorsqu'elle baissa la tête pour le laisser jetter un coup d'œil à sa blessure. Je ne sais pas ce qui m'a pris, on n'est pas censés se disputer, nous ne sommes plus seuls à présent...


Rien de ce qu'il dit ne la fit sortir de son mutisme. Au contraire, elle profita du fait qu'il ne voit pas son visage, pour verser des larmes en silence. Mais pourtant à un moment, il dû se rendre compte qu'elle pleurait parce qu'après avoir nettoyée la plaie, il lui prit les épaules, l'obligeant à se tourner vers lui. Maya s'empressa aussitôt de s'essuyer le visage du revers de la main. 


- Nous allons finir par nous entre tuer, déclara t-il, d'une voix penaude. J'ai honte de moi, je n'aurais pas dû...


C'était tout lui ça, songea t-elle. Les beaux discours après un dérapage... Il trouvait toujours les mots adéquats, mais malheureusement ce n'était que des mots ; ils finissaient toujours par s'engueuler à nouveau. Et maintenant qu'elle éprouvait des sentiments pour lui, c'était trop dur à encaisser. Et Dieu sait... Dieu seul savait s'il aurait vraiment été capable de lever la main sur elle.


- Je préfèrerais encore perdre tout ce que j'ai, que de devoir lever la main sur toi. Si à un moment je t'ai donnée cette impression, j'en suis désolé. Pardonne moi.


Et quoi ? Il lui demandait vraiment pardon ? Non c'était encore l'une de ses fantaisies pour lui faire baisser la garde. 


Et en parlant de cela, il avait toujours une main sur son épaule.


- Baal ma (Excuse-moi).


Elle allait répondre, mais la sonnerie d'un téléphone portable l'interompit. 


- C'est le tien ? demanda t-il. 


Elle acquiesça et il alla le chercher. 


- C'est un numéro masqué, annonça t-il, lorsqu'il revint. 


Il le lui tendit, mais elle demeura immobile, laissant sonner.


- Tu ne décroches pas ? Tu veux que je le fasse ?


- Non. 


Il n'essaya pas d'en savoir plus et sortit un bandage de la sacoche, pour sa plaie.


- Il faudra que je t'emmène à l'hôpital demain.


- Je ne crois pas que ce soit grave.


- Justement, il faut que j'en ai le cœur net. 


 Pourquoi diable feignait-il l'inquiétude ? Parce qu'il en était arrivé à avoir pitié d'elle ? 


Dès qu'il eût fini, elle se leva pour se diriger vers la porte, sans un mot, mais il la retint et sans prévenir il l'embrassa. 


Plus que surprise, Maya demeura un instant de marbre, mais à la minute il passa une main sous le T-shirt qu'elle portait, pour désagrafer son soutien gorge, elle s'abandonna complètement à lui, sans même chercher à comprendre pourquoi. Pourtant ils venaient bien de se disputer et plus violemment que d'ordinaire. Puis la cause indirecte de cette dispute était l'enfant qu'elle portait en elle, mais qu'elle n'avait pas désiré. N'était-elle pas encore en train de se mettre dans une nouvelle impasse ? Ne risquait-elle pas sa dignité de cette façon ? 


Elle fit un pas en arrière, pour lui échapper et regagner la chambre, mais il la rattrapa.


- Nous ne pouvons pas faire ça.


- Je sais. C'est pourquoi si tu me demandes d'arrêter, j'arrêterai.


Impasse.


Ce n'est pas comme si elle voulait qu'il arrête. Le simple fait qu'il soit à proximité suffisait à embraser ses sens, mais en même temps...


- Tu as une minute pour réfléchir.


Elle battit des paupières, puis ses yeux se posèrent sur sa bouche. Cette bouche qui l'avait à maintes reprises blessée et humiliée, mais qui était également capable de lui faire de ces choses...


- Ta minute vient de s'écouler.


Ils n'eurent qu'à faire quelques pas pour se retrouver au pied du lit, mais contrairement aux fois précédentes, il ne fit pas preuve d'une grande douceur. Il lui fit passer le T-shirt par dessus la tête et défit le bouton de son Jean. 


Motivée, à son tour Maya entreprit de le débarrasser de sa chemise, mais soit trop tendue, soit trop excitée, elle finit par déchirer le tissu. 


Malik s'interrompit.


- Tu as vraiment fait preuve de sauvagerie ce soir, fit-il remarquer, sur le ton de la plaisanterie.


- Pour un mentor, j'ai ce qu'il faut.


Sensuelle Ennemie