Chapitre 39
Ecrit par Auby88
Aurore AMOUSSOU
Aujourd'hui, je me suis réveillée aux aurores, avec une grande inspiration.
J'en profite pour réaliser quelques dessins de vêtements.
Ça me fait tout drôle d'employer ainsi mon prénom. (Rire)
J'entends des bruits de pas qui viennent du dehors. Je me retourne.
- Bonjour Aurore ! fait-il en pénétrant notre salon.
- Bonjour Femi, réponds-je en déposant les dessins sur le guéridon.
Près de moi, il s'amène en me déposant un bisou furtif sur la joue. Je me sens toute bizarre. (Sourire)
Ses yeux se posent sur mes croquis.
- Tu dessines ?
- Oui, lui réponds-je en souriant grandement.
- Je peux voir ? me demande-t-il en se penchant au-dessus du guéridon.
- Évidemment.
- Je peux déjà dire que tes créations sont magnifiques, même si je ne suis pas un professionnel de la mode.
- Pour moi, tous les avis comptent.
- C'est bon à savoir.
Il me fixe. Je fuis son regard. Un silence s'installe entre nous. Je tente de le briser.
- Arabella … ne devrait ... pas tarder à descendre. Elle est … très enthousiaste à l'idée de passer du temps avec toi ici. Elle n'a que cela à la bouche depuis hier.
- J'imagine ! réplique-t-il en me souriant. Tu comptes … sortir ?
- Oui. Tout à l'heure, je dois me rendre à l'atelier.
- Pourquoi ne resterais-tu pas plutôt avec nous ?
- Ta proposition est intéressante ; cependant je ne peux vraiment pas !
- Allez ! Dis oui. Et puis aujourd'hui, c'est samedi !
Je secoue la tête. L'instant d'après, j'entends une petite voix très familière derrière nous.
- Papa !
Contre son père, elle vient se blottir.
- Bonjour ma princesse. Tu as bien dormi ?
- Oui, papa.
- Ton maillot te va super bien !
Elle porte un maillot de bain en pagne que j'ai spécialement conçu pour elle.
- Merci papa. C'est maman qui a fait ça pour Arabella !
En parlant, elle se montre du doigt. Je ne peux m'empêcher de sourire.
- Ah bon ! Maman a vraiment des doigts de fée !
Mes yeux croisent ceux de Femi. Je détourne aussitôt la tête.
- Oui, ma maman est une fée ! complète Arabella.
Ses mots me vont droit au cœur.
- Merci, ma chérie !
Elle tient à me donner un bisou. D'ailleurs, Arabella est devenue une donatrice de bisous. Elle en fait tout le temps. Je me penche en avant et la laisse faire.
- Arabella, et moi ? intervient Femi.
Elle me délaisse pour ses bras et lui donne un long bisou sur la joue en ajoutant :
- Toi, tu es mon papounet chéri !
Nous éclatons de rire. Arabella est un amour !
Père et fille continuent leur discussion dans le canapé. Je suis près d'eux, essayant d'achever mon dernier dessin, avant de m'en aller.
- Papa, je suis contente que tu sois venu. Nous allons bien nous amuser !
- Oui, Arabella. Dommage que maman ne puisse être avec nous ! Elle doit aller travailler.
- Encore ! s'étonne-t-elle en me faisant une mine déchantée.
Je hoche la tête, en ressentant en moi une certaine culpabilité.
- S'il te plaît, reste avec nous !
- Je suis désolée, ma chérie, mais …
- Ton travail te prend tout ton temps !
- Je t'ai déjà dit que je dessinais des vêtements pour toi et ...
- Mais c'est TOI que je veux !
Sa triste mine me désole.
- D'accord, ma jolie. Je reste avec vous.
- Bon choix, maman ! reprend Femi.
J'esquisse un sourire.
- Alors, va chercher ton maillot ! poursuit-il.
- Mon … maillot ! Non. Je vais … juste rester là à vous regarder nager.
Femi secoue la tête. Arabella imite son père.
- C'est bon. Devancez-moi. Je vous rejoins dans quelques minutes.
- Ne tarde pas trop, maman !
- D'accord, Chef ! réplique-je sur un ton amusé.
Quelques minutes plus tard.
Je suis assise au bord de la piscine. Arabella, quant à elle, est dans l'eau avec sa bouée. Femi, qui l'a initiée à la nage chez lui, l'assiste. Ils se parlent. Par moments, ils me regardent en souriant. Qu'est-ce qu'ils peuvent bien se dire ?
Près de moi, ils finissent par se ramener. Femi aide Arabella à sortir de la piscine et à ôter sa bouée. Il repart ensuite dans l'eau.
- A toi maintenant, me précise-t-il.
- Maman, Maman, c'est ton tour ! reprend Arabella en sautillant.
- Finalement, je … préfère rester ici !
- Papa m'a dit que tu nages encore mieux que lui. Je veux le voir !
Quel mensonge ! A quoi joue Femi ?
- Arabella, ton père est le meilleur nageur que je connaisse !
- Donc je mens ? riposte-t-il.
Là, je suis confondue.
- Non, tu ne mens pas ! réponds-je faiblement.
- Alors, viens avec moi dans l'eau.
- Allez maman, montre-moi ! poursuit Arabella.
J'acquiesce.
Avec un bras, Femi entoure ma taille et me fait descendre tout doucement dans l'eau. Arabella applaudit. Elle semble bien heureuse de nous voir ainsi.
Moi a contrario, je ne me sens pas à mon aise. Le corps de Femi contre le mien vient de réveiller la femme en moi. Je m'efforce de ne pas le regarder.
Je voudrais lui dire que je suis maintenant capable de me mouvoir toute seule dans l'eau en prenant appui sur mes mains. Mais je n'y arrive pas.
- Je m'excuse de t'avoir un peu contrainte tout à l'heure, commence-t-il.
Je l'écoute à peine.
- Je regrette, Femi, mais … je dois m'en aller.
- Mais nous venons à peine d'entrer dans l'eau ! Et …
- N'insiste pas ! dis-je en haussant le ton.
Il me regarde avec des yeux grandement ouverts. Je me rends compte de ma bêtise.
- Excuse-moi Femi. Le défilé approche et je suis de plus en plus stressée.
- Je vois, mais tu devrais te ménager.
Je hoche juste la tête et essaye de m'éloigner de lui.
- Attends, je t'aide à regagner le bord.
- Non, merci. Je sais le faire toute seule.
- D'accord.
Il relâche ma taille. Avec mes mains, je prends appui sur les bords de la piscine pour quitter l'eau, mais je n'y parviens pas. Je sens les mains de Femi agripper à nouveau ma taille.
- Laisse-moi t'aider.
Je ne m'y oppose pas. Il m'aide d'abord à m'asseoir sur le bord de la piscine, sort à son tour puis me soulève pour me déposer avec délicatesse dans l'un des fauteuils.
- Merci, lui dis-je en me mordant la lèvre inférieure. Arabella, passe-moi la serviette.
- Maman, tu pars déjà ?
- Oui, je suis désolée.
- Tu m'avais promis de …
- Ne me fais pas cette triste mine ! lui dis-je en caressant son menton. A mon retour, nous jouerons à tout ce que tu voudras.
- Promis ?
- Oui, mon cœur. Tu n'es plus fâchée ?
- Non, maman.
J'approche mes lèvres de ses joues.
- A présent, donne-moi la serviette.
Avec grand entrain, elle s'exécute puis rejoint son père.
Femi, debout près de moi, a les yeux rivés sur moi. J'évite de le regarder. Je m'essuie rapidement, rapproche mon fauteuil et entreprends de m'y asseoir.
- As-tu besoin d'aide ?
Je secoue fermement la tête.
- Bien, me dit-il.
Puis il ajoute :
- Ne t'inquiète pas, Arabella. Nous allons bien nous amuser tous les deux !
- Je vous laisse. Passez une bonne journée ensemble. A bientôt, Femi.
En guise de réponse, il hoche juste la tête sans trop prêter attention à moi. J'attire mon fauteuil vers moi et m'y assois. Puis, je prends la direction du salon.
Mon attitude a certainement froissé Femi. Malheureusement, je n'y peux rien. M'enfuir tel que je viens de le faire est la seule solution. Car il m'est pénible d'être devant l'homme que j'aime et de devoir réprimer mes sentiments. Je pensais pouvoir m'y faire à cette relation juste amicale, voire platonique entre lui et moi. Mais je n'y arrive plus. J'en ai marre de me mentir à moi-même. Je l'aime trop pour continuer à le voir uniquement comme un simple ami, juste comme le père d'Arabella. Si seulement ... il n'y avait pas cette femme, cette Paula entre nous !
Il était si près de moi, mais je n'ai pas eu le courage de lui voler un baiser. Je craignais trop sa réaction. Il se serait sûrement fâché si j'avais tenté de l'embrasser. Il m'aurait encore rappelé combien il aime sa Paula.
A mi-chemin, je tourne la tête en arrière. Père et fille s'amusent dans l'eau. J'entends les cris de joie d'Arabella et le rire de Femi. Mon cœur se serre .
* *
*
Dans la soirée. A l'Atelier.- J'ai fini mon travail, me dit Baï. Je t'aide à faire quelque chose ?
- Non, merci, lui dis-je en continuant mon ouvrage.
- Je peux attendre, si tu veux.
- Non, j'insiste. Rentre chez toi. Je compte travailler encore un peu avant de rentrer.
- D'accord, mais il se fait tard, finit-elle par dire en déposant son tablier et ses ciseaux.
- Ne t'inquiète surtout pas pour moi. Le chauffeur m'attend dehors. A demain donc. J'envoie des bisous à tes enfants, surtout la dernière.
- Elle parle tout le temps de toi et des robes que tu lui a données.
Je souris.
- Infiniment merci, Aurore, pour l'aide que tu nous apportes. Que Dieu te le rende au centuple !
Je hoche juste la tête, pas trop à l'aise avec ces remerciements que Baï m'adresse presque tous les soirs.
- A demain Baï, fais-je en reprenant mes ciseaux.
D'habitude, je rentre plus tôt. Mais aujourd'hui, mon esprit est si tourmenté que pour l'occuper, je me donne très à fond au boulot. Ça m'aide beaucoup à oublier mon chagrin.
Mon téléphone sonne. C'est maman. Rien de bien grave. Elle s'inquiétait pour moi. J'ai pu la rassurer. Je reste encore un peu à l'atelier puis je rentre à la maison.
Par contre, en restant tard à l'atelier, je n'ai pas pu tenir la promesse faite à Arabella ce matin. Maman vient de me le rappeler. Ma fille a beaucoup pleuré. (Soupir). J'ai tenté de lui parler au téléphone, mais elle n'a pas voulu. Je trouverai bien le moyen de me faire pardonner. Si nécessaire, je resterai deux jours entiers à la maison pour jouer avec elle.
L'esprit "plein", je tente de continuer mon travail. Malheureusement, je peine à rester concentrée.
Zut ! Zut ! Je viens de faire une mauvaise découpe dans le tissu. Quel gâchis ! Il m'a pourtant coûté cher !
Il vaut mieux que je m'en arrête là et que je dessine de nouveaux vêtements.
1,2,3 … Au final, plus d'une dizaine d'essais infructueux, de papiers froissés et jetés à la poubelle. Ça suffit, Aurore ! Assez de gaspillage pour aujourd'hui ! Je dépose le critérium que j'ai en mains, pousse papiers et tissus puis pose la tête sur la table.
Quoi que je fasse, mes pensées vont irrémédiablement vers Arabella et surtout vers … Femi. (Long soupir).
Il faut à tout prix que je distraie mon esprit. Je prends mon téléphone, parcours ma liste de lecture. Mes yeux tombent sur le titre "The vow" de Timi Dakolo que Femi aimait me dédicacer. Je défile rapidement vers le bas de ma liste jusqu'à tomber sur cette chanson "Everytime we touch (A chaque fois qu'on se touche)" de CASCADA que je n'ai pas écoutée depuis. J'hésite un peu puis je clique dessus.
"J'entends toujours ta voix lorsque tu dors près de moi
Je sens toujours ton toucher dans mes rêves
Pardonne-moi ma faiblesse, mais je ne sais pas pourquoi
Sans toi c'est difficile de survivre
Parce que chaque fois qu'on se touche, j'ai ce sentiment
Et chaque fois qu'on s'embrasse, je jure que je vole
Ne peux tu pas sentir mon cœur battre rapidement ?
Je veux que cela dure
J'ai besoin de toi à mes côtés.
Parce que chaque fois qu'on se touche je sens la statique
Et chaque fois qu'on s'embrasse, j'atteins le ciel
Ne peux-tu pas entendre mon cœur battre ainsi ?
Je ne peux pas te laisser partir
Je te veux dans ma vie.
Tes bras sont mon château, ton cœur est mon ciel
Ils essuient les larmes que j'ai pleurées.
Les bons et les mauvais moments nous les avons tous passés
Tu me relèves lorsque je tombe (...)
CASCADA, Everytime we touch ( A Chaque fois qu'on se touche )"
Finalement, je n'aurais pas dû écouter ce son. La voix de la chanteuse, la lenteur ou douceur de la chanson, la mélodie ou l'instrumental… En bref, ce "mixage musical" m'arrache malgré moi des larmes. Je me sens pire.
Pourtant comme si cela ne suffisait pas, je me permets d'aller dans le navigateur Internet de mon mobile et de faire des recherches sur ... Paula KOUTON.
Je ne devrais pas. J'aurai encore plus mal, je le sais. Mais, c'est plus fort que moi. Ma recherche est fructueuse. Sur Facebook, je la reconnais parmi d'autres Paula KOUTON.
Paula KOUTON, Secrétaire de direction à Müller Building Services, donc la même entreprise que Femi.
Je parcours les autres informations la concernant puis je clique sur son album photo. Il n'y a pas beaucoup de photos, juste une dizaine de vues prises entre collègues au bureau. L'une d'entre elles attire mon attention : Elle et Femi sont à la plage ; il a un bras autour de sa taille et tous deux sourient.
La mention "POUR LA VIE" en bas de la photo me rend folle de jalousie. J'envoie d'abord mon téléphone valser avec le carreau, puis tous les objets posés sur la table vont les rejoindre "avec fracas".