Chapitre 48

Ecrit par Auby88

Eliad MONTEIRO


Je n'ai plus le droit à l'erreur avec PAGE, si je veux lui démontrer que je l'aime vraiment, si je veux offrir une vraie famille à Camilo et Milena.

 Et pour cela, je me dois en premier de me libèrer des chaînes du passé qui me tiennent sous leur joug.

Je me dois de le faire avant que PAGE revienne de la Clinique. C'est difficile, je le reconnais. Mais primordial, indispensable…


Je quitte la demeure principale pour la chapelle. Près de la tombe de Camila, je m'agenouille et dépose un bouquet de fleurs.


"Buenas tardes, mi belleza (Bonsoir, ma beauté). ! commencé-je en souriant. Je t'ai amené des fleurs. Celles que tu préfères...

Notre fille grandit bien. Chaque jour, elle nous ressemble un peu plus. Un parfait mélange de nous deux. Ni trop, ni moins...

Je prends bien soin d'elle. Mais il n'y a pas que moi. Il y a aussi sa nounou qui la comble énormément d'amour. Je crois qu'on n'aurait pas pu trouver une meilleure nounou pour notre fille. Tu verrais combien elle l'aime que tu n'en reviendrais pas...


Je prends une pause avant de continuer sur un ton plutôt sérieux.


Cette femme, elle s'appelle PAGE et… JE… L'AIME.

Pardonne-moi pour ne pas avoir tenu la promesse que je t'ai faite de n'aimer que toi pour l'éternité. Pardonne-moi, Camila, mais j'ai vraiment besoin de cette femme pour être heureux.


C'est elle qui m'a redonné gout à la vie, qui m'a rapproché de Milena, qui m'a soutenu tant et tant de fois quand je sombrais, qui m'a aimé inconditionnellement... C'est sans doute ainsi qu'elle s'est infiltrée dans mon cœur.


Tu la conaitrais que tu te lierais facilement d'amitié avec elle. Elle est douce, sincère, gentille, altruiste, jolie… comme toi. Elle me fait tant penser à toi, même si vous n'avez pas eu des passés similaires… Cependant, bien qu'elle ait choisi des chemins pas orthodoxes, elle a toujours gardé son humanité et sa sensibilité, ma PAGE. Et je suis très fière d'elle, même si je ne le lui dis pas souvent, même si je laisse son passé se dresser tel un mur entre nous…


Aujourd'hui, je ne veux plus agir de la sorte avec elle. Je veux pouvoir l'aimer inconditionnellement, je ne veux plus la faire souffrir, je veux la rendre heureuse. Et pour cela, je me dois de te laisser partir, je me dois de ne plus t'attacher autant d'importance, Camila. J'accepte que tu es morte et que tu ne reviendras pas. Je choisis de refaire ma vie pleinement avec ma PAGE, d'écrire une nouvelle page avec elle, notre fille et Camilo Enzo MONTEIRO, le trésor qu'elle m'a donné. Je sais que tu me comprendras, que tu ne m'en voudras pas.

Sache malgré tout, que même si notre bonheur a été court, j'ai vécu de merveilleux moments avec toi, j'ai découvert le vrai amour près de toi et je ne regrette rien... Te rencontrer a été une bénédiction pour moi.

Sache que jamais je ne t'oublierai, ma Beauté. Tu auras toujours une place dans mon cœur. Tu seras toujours dans mes pensées. Tu seras partout où je serai. Et si un jour, je faillis à cette promesse-ci ; si un jour, je t'oublie, il me suffira de regarder notre princesse Milena pour me rappeler ma promesse... Adieu, ma Beauté ! Adieu, ma Camila. Repose en paix !"


Je me lève et quitte la chapelle sans regarder derrière.



Quelques minutes plus tard. Dans ma chambre.


L'une après l'autre, je décolle du mur les photos de Camila pour les ranger dans une grande boîte que j'ai achetée pour la circonstance. De mon annulaire, j'ôte ma bague de mariage et la dépose au fond de la boîte avant de la refermer. Demain, je mettrai ses vêtements et autres affaires lui appartenant dans un carton. Je les destine pour des œuvres de charité.


En attendant que le peintre vienne demain changer la peinture de ma chambre, j'accroche au mur deux photographies de PAGE que j'ai fait agrandir. Ce sera désormais son visage que je contemplerai, sans m'en lasser.


Ce n'était pas facile, mais je l'ai fait. Et je suis fier de moi. Fier des progrès que je fais. La route vers la reconquête du cœur de PAGE est longue, mais j'y arriverai. Je veux le croire. (Sourire)



******************


Nadia PAGE AKLE


- Eliad, donne  moi Camilo. Je veux qu'il passe la nuit ici.

- Non, PAGE, tu as bien entendu le docteur. Tu as besoin de repos. Ne t'inquiète pas. Je m'occupe de Camilo. Je te l'amènerai dès qu'il aura envie de boire son lolo. Et si tu as besoin de ton chevalier servant que je suis, appuie aussitôt sur la sonnette et j'accourrai la seconde d'après, ma belle !


Chevalier servant ! Tchrouuu oui !


- Bonne nuit, maman ! fait-il en me  souriant largement et en imitant une voix enfantine.

- Eliad !

Il ne m'écoute plus. Je le vois disparaitre avec le couffin.


Je pousse un long soupir.

Deux semaines que ça dure. Ça fait des jours qu'il ne va plus au boulot et qu'il joue au papa modèle en s'accaparant de Camilo.


Je suis la mère et pourtant, je vois à peine mon bébé. Il est tout le temps avec son père, sous prétexte que je dois me ménager.

Certes la douleur et les tiraillements au niveau de la plaie sont parfois douloureux quand je bouge, certes j'ai encore du mal à me lever seule du lit, certes mes douleurs à la main continuent surtout quand j'allaite Camilo, mais je me sens beaucoup mieux pour prendre soin de lui.


Et le pire dans tout ça, oui ce qui me révolte le plus, c'est que ce petit chenapan semble affectionner son père plus que moi. Je ne m'attendais pas à ce retournement de situation. Non. Je pensais que Camilo fuirait son père. Mais il n'en est rien.


Camilo ne s'endort que dans les bras de son père. Et quand je force, c'est parti pour les pleurs en continu. Camilo peut rester toute la journée avec son père, sans broncher une seule fois sauf pour prendre le sein maternel. Bien sûr, avec la complicité de Milena qui assiste son père et prend beaucoup à cœur son rôle de grande-soeur.  


Injuste, n'est-ce pas ? En effet, je trouve injuste que Camilo adore autant son père. C'est moi qui ai accepté de le garder quand Eliad n'en voulait pas. Je l'ai porté dans mon ventre neuf mois durant sans qu'il lui apporte la moindre caresse. J'ai souffert émotionnellement du rejet d'Eliad. Et maintenant, non seulement Camilo porte son nom, mais en plus il n'y a d'yeux que pour ce père qui ne le désirait même pas.


Oui, j'admets qu'Eliad a changé, qu'il affectionne beaucoup son fils, mais je ne peux m'empêcher d'être jalouse de cette complicité grandissante entre père et fils.


Je pousse un long soupir. Peut-être que j'exagère au final. Ce n'est qu'un bébé après-tout. Et un bébé n'est qu'innocence...



***********


Maëlly FREITAS


Tous m'ont tourné le dos. En particulier mes parents qui n'ont plus d'estime pour moi. Je reconnais que j'ai lourdement fauté en tentant de me suicider. C'est comme si, je n'avais aucun respect, aucun amour pour eux alors qu'eux ne cessaient pas de soutenir, de me démontrer combien ils n'aiment.


Je n'ai donc pas eu d'autre choix à part consulter un nouveau psy pour tenter de changer, de retrouver goût à la vie, d'oublier Eliad. Je veux, je tiens à regagner la confiance de mes parents.


La nouvelle psy, comme l'ancienne, m'a recommandé de me débarrasser de tout ce qui me lie à Eliad. Ce à quoi, je m'attelle aujourd'hui, avec l'aide d'une domestique. Je n'ai plus le plâtre, mais j'utilise mon bras droit avec précaution.

C'est impressionnant la multitude de choses inutiles que j'ai gardées parce qu'elles m'avaient été offertes par Eliad : un stylo qui ne marche plus, des bijoux ternis, un porte-clé rouillé, une vieille pièce de monnaie, un mouchoir en papier sale…


Tout ça n'est bon que pour la poubelle !


Je continue ma fouille et tombe sur un lot de photos que j'ai prises avec Eliad. Je me rends compte qu'Edric est sur chacune d'elles, avec moi au milieu d'Eliad et lui. J'avais oublié qu'on était tous trois très complices à l'époque et que j'étais leur petite sœur chérie qu'ils adoraient protéger. (Léger sourire).

Comme ce temps d'insouciance et de pur bonheur me manque. J'aurais préféré ne jamais grandir et demeurer la petite Maëlly. Hélas !


- Mademoiselle Maëlly, qu'est-ce que je fais de ça ? me demande la jeune femme en me montrant un roman plein de poussière.


Je ne le reconnais pas.

- Nettoie la poussière et amène le plus près que je le vois.

Elle s'exécute. Edric MARIANO est écrit en grand sur la couverture.

Je le reconnais maintenant. C'est le roman d'Edric qui a reçu un prix, mais que je n'ai jamais ni ouvert.


Poussée par la curiosité, j'ouvre le livre et découvre une dédicace.

" Pour ma grande amie, Maëlly FREITAS, que ces mots t'inspirent davantage. Et que notre belle amitié, qui a commencé depuis l'enfance, éternellement demeure. MARIANO Leonel Edric."


Je me surprends à sourire en lisant cette dédicace. Mes pensées vont vers Edric, qui m'a été d'une grande aide durant mon court séjour à l'hôpital, malgré mes insultes et moqueries quotidiennes à son égard. (Soupir)


A présent, je parcours les pages du roman. Je n'ai pas encore tout lu. Mais il ne m'en faut pas plus pour me rendre compte que l'héroïne de l'histoire, cette adolescente gentille, courtoise, altruiste, qui s'amuse à créer des bijoux et projette de devenir plus tard une femme d'entreprise à succès, une épouse et maman comblée et qui rêve de ressembler à Mère Thérésa, c'est MOI, Maëlly FREITAS.

 

Je n'en reviens toujours pas. Pourquoi n'ai-je jamais lu ce livre avant. Peut-être qu'ainsi j'aurais évité beaucoup d'erreurs. Qui sait ?



**********

Edric MARIANO


J'ai troqué mon canapé douillet contre le sol dur. Et je ne me plains pas. Je suis bien à l'aise ici pour continuer l'écriture de mon roman policier.


La sonnerie retentit dans l'appartement.

- Qui vient me déranger en plein travail ?

Je n'attends personne alors je ne me lève pas.

A nouveau, bruit de sonnerie. Je suis contraint d'aller ouvrir...


- Maëlly, m'étonné-je en la voyant.

- Bonjour Edric.

- Bonjour Maëlly, réponds-je, la tête dans les nuages.

- Je peux entrer ?

- Oui, dis-je timidement en lui cédant le passage.

- Merci, Edric.


Attendez, est-ce bien Maëlly FREITAS la femme qui se tient devant moi et qui vient de me dire "Bonjour" et "merci" ? Étrange ! Car la Maëlly que je connais ne fait plus usage de civilités quand elle me parle.


Ses yeux balayent la pièce du regard.

- Tout est bien rangé ici ! Félicitations, Edric ! commente-t-elle en me souriant.

- Oui, je m'efforce de garder la maison en ordre.

- Belle initiative.

- Assois-toi, je t'en prie.

- Merci, mais non. Je ne serai pas longue. En plus, je viens de remarquer que tu écrivais.

- Oui, mais ce n'est grave. Tu prends au moins un rafraîchissement ?

- Non, Edric. C'est gentil… Si je suis ici aujourd'hui, c'est juste pour te dire Merci.

- Merci ! répété-je, intrigué.

- Oui, merci pour m'avoir soutenue à l'hôpital et pour être resté malgré mon mauvais caractère à ton égard.


Ses yeux semblent sincères.

- Tu n'as pas à le mentionner, Maëlly. Malgré nos différends, je ne pouvais oublier le fait qu'avant nous étions de bons amis.

- Oui, je sais.

- Cependant, ta démarche me va droit au cœur. Merci Maëlly.


Elle hoche la tête.

- C'est tout ce que j'avais à te dire. Je n'attendrai pas davantage. Porte-toi bien. Bonne journée et bonne inspiration !

- Merci, dis-je en la devançant pour ouvrir la porte.

- Aurevoir, Edric.

- Aurevoir, Maëlly.

Elle me fixe un instant puis me tourne le dos. J'attends quelques secondes avant de refermer ma porte.


J'ai encore dû mal à réaliser ce qui vient de se passer. Qu'est-ce qui l'a fait changer d'attitude à mon égard ? C'est bizarre.


J'avoue, ça fait énormément plaisir mais je ne veux pas me réjouir trop tôt car Maëlly FREITAS est très imprévisible.








ÂMES SOLITAIRES