Chapitre 5: Le phénicien

Ecrit par MTB

Richard choisit pour l’occasion une chemise manche courte griffée LV (Louis Vuitton) de couleur blanche portée sur un jean bleu marine et une chaussure en cuir. Il avait également fait un tour chez le coiffeur pour se refaire une jeunesse et surtout arranger sa barbe pour donner l’air d’un garçon sérieux. Après tout, il était un homme sérieux. C’est vrai qu’il aimait les filles mais il estimait qu’il n’avait pas d’engagements pour qu’on l’accuse à tort. En réalité, toutes les filles qui étaient passées dans son lit ne pouvaient pas attester qu’il avait promis les épouser ou faire d’elles sa fiancée. Il se pointa un bon quart d’heure avant l’heure fixée afin de ne pas faire attendre Chantal et donner une mauvaise impression. En bon gentleman, il avait pris soin de commander un joli bouquet de fleurs pour la circonstance.

De son côté, Chantal se présenta dans une robe bleue fleurie légèrement évasée au niveau de ses genoux. Elle portait des ballerines pour ne pas avoir à supporter le poids de son corps sur ses talons. Le maquillage était léger et faisait ressortir la beauté de son visage. Elle était venue avec le chauffeur de la maison car ses parents n’acceptaient pas encore qu’elle conduise la nuit. A peine le chauffeur eut fini de garer la voiture que Richard s’empressa de lui ouvrir la portière et de lui tendre le bouquet de fleurs dès qu’elle eut posé ses pieds par terre.

-          Un bouquet de fleurs pour la mère des fleurs.

-          Merci, c’est très gentil et très élégant de ta part répliqua Chantal.

Le vigile à l’entrée s’empressa de leur ouvrir la porte et ils prirent l’ascenseur menant au roof. Ils étaient installés face à face et passèrent comme commande le menu du jour. Pour une première fois, Richard ne savait quoi dire devant une telle beauté. Les pensées se bousculaient dans sa tête sans cesse à tel point qu’il ouvrait la bouche mais aucun son ne sortait. Mais en bon dominateur, il finit par lâcher :

-          Je te trouve vraiment ravissante. Le bon Dieu a dû passer plus de temps à te créer par rapport aux autres.

-          Vraiment ? Tu trouves ?

-          Aussi sincère que peut-être un humble serviteur.

-          Toujours aussi flatteur à ce que je vois. J’accepte tes compliments par courtoisie car je connais déjà cette méthode de drague que vous les hommes avez l’habitude d’utiliser.

-          Une drague ? Serais-je déjà en train de te draguer ? En y pensant, je crois que ce n’est pas une si mauvaise idée que cela.

-          Tu veux me dire que tu m’as invitée ici juste pour la forme ? Cher monsieur, tu ne m’auras pas à ce jeu.

-          Voilà qui attise d’avantage mon envie. Et je parie que tu ne mettras pas longtemps à céder. Je sens déjà que nous allons bien nous entendre.

-          Que proposes-tu ?

-          Déjà que tu dises oui avant que je ne commence par te dire que j’ai envie qu’on fasse route ensemble.

-          Pour aller où ?

-          Si je te dis qu’on ne fera pas un tour dans mon lit, alors j’aurai menti. Mais ce n’est pas l’objectif pour aujourd’hui.

-          Et c’est quoi l’objectif alors ?

-          Dîner. Après on verra.

Chantal se disait en son for intérieur qu’il était culotté de s’y prendre de cette façon. Il était tellement direct dans ses propos que si tu acceptes sa compagnie, c’est qu’indirectement tu lui disais oui. Le temps passa vite et il sonnait presque vingt-et-une heures quand Chantal s’excusa pour aller aux toilettes. Richard profita pour remettre deux billets de dix-milles francs à l’un des serveurs en lui murmurant quelque chose dans les oreilles. Peu de temps après, Chantal revint s’asseoir. Dès qu’ils eurent fini de terminer le dessert fait de mousse au chocolat et de vider la seule bouteille de vin blanc achetée, Richard demanda l’addition et fut surpris de s’entendre dire que la note avait déjà été réglée. Il ne fallait pas être un génie pour comprendre que c’était un coup de Chantal. Il comprit immédiatement que la tâche serait ardue. Il fit une mine boudeuse mais face au sourire de Chantal, il ne pouvait pas. Il ne savait même pas à combien s’élevait l’addition. Bref, il ne se laissera pas dépasser par les événements.

Ils descendirent et se une fois sur le parking, Chantal ne pouvait voir trace de son chauffeur ni de la voiture. Elle prit son téléphone et appela plusieurs fois mais l’appel ne passait pas. Elle demanda à l’agent de sécurité du parking qui l’informa que le chauffeur était parti il y avait une demi-heure déjà après qu’un des serveurs soit venu lui parler. Elle se retourna pour interroger Richard et remarqua que la mine déconfite de tout à l’heure avait laissée place à une mine gaie avec un sourire au coin de la bouche.

-          Puis-je vous déposer, mademoiselle Chantal ?

-          Tu n’es qu’un vrai salaud toi.

-          Je pense que c’est un gros mot. En plus je considère que nous sommes quittes. Ou bien ?

-          Si tel est le cas, alors je préfère chercher un taxi.

-          Ne fais pas la dure. Laisse-moi te déposer.

-          Jamais.

-          Je te rappelle que tu ne m’as pas laissé le choix pour l’addition alors que c’est moi qui t’ai invitée. Alors je pense que tu me dois au moins cela.

-          JAMAIS. Je préfère marcher d’ailleurs.

-          Ne sois pas capricieuse, tu vas prendre un coup de froid.

Elle était sur le point d’exploser. Après tout elle l’avait bien cherché. Elle voulait prendre de l’avance sur lui mais elle se rendait compte que Richard aussi était un fin stratège. Finalement, elle se demandait pourquoi ne pas jouer au jeu proposé par ce bel homme ? Au lieu de se laisser séduire, pourquoi ne pas plutôt séduire. Soudainement, elle se dirigea comme une amazone vers la voiture de Richard en prenant soin de le bousculer avec sa poitrine de telle sorte qu’il sente le contact avec ses seins. Malgré l’effet ressenti, Richard se tenait déjà debout tenant la portière pour qu’elle puisse s’installer. Elle-même fut surprise de le voir réagir si vite. Le combat serait donc très intéressant. Il la déposa devant chez elle puis s’empressa de la remercier d’avoir accepté l’invitation en lui baisant légèrement la main comme les bourgeois le font. Elle le remercia également et lui souhaita d’être prudent en rentrant. Il attendit qu’elle franchisse le pas de la porte puis démarra sa voiture en jouant « I believe I can fly ».


à suivre...
ENTRE DEUX AMOURS