Chapitre 6: La chorale
Ecrit par MTB
-
Merci pour la
soirée, j’ai apprécié.
C’était
le message que Chantal lui avait envoyé juste après s’être réveillée le
lendemain. Et dire qu’elle n’avait pas adoré serait un parjure. Il avait été
franc, et surtout direct dans ses intentions. Elle ne pouvait plus nier qu’il
voulait d’elle si elle se retrouve encore en sa compagnie. Sa seule question à
laquelle elle n’avait pas de réponse était de savoir si c’était juste pour le
sexe ou si c’était pour faire du sérieux connaissant un peu la réputation qu’il
trainait.
-
Le plaisir a été
pour moi et j’avoue que j’aimerais bien recommencer tout de suite et tous les
jours si tu me le permettais. C’était tout simplement magnifique et dire le
contraire serait condamner mon âme à l’errance.
C’était
la réponse de Richard, une réponse reçue en début de soirée presque douze
heures après son message. Cela confirmait un peu ses craintes quant aux
intentions réelles de Richard. Mais que fait un coq qui veut monter une
poule ? Ne fait-il pas semblant de ne pas la désirer en tournant autour
afin de la prendre par surprise ? Bien que le doute soit présent dans sa
tête, Chantal venait de prendre une décision qui risquerait de changer le cours
de sa vie : jouer au jeu de Richard.
Cela
faisait déjà deux semaines que Chantal et Richard se retrouvaient pour discuter
que cela soit sur le campus ou en ville. Les sujets de discussion portaient sur
tout et rien et les spéculations allaient déjà bon train sur l’existence d’une
relation amoureuse entre eux. Mais ils se plaisaient à démentir une affinité de
ce genre. En effet, et même s’il leur arrivait de parler de projet de vie, ils
parlaient beaucoup plus de Management des Entreprises. Richard l’invitait de
temps en temps au bureau de son père où c’était un Administrateur Provisoire
qui était aux commandes. Ils avaient pris aussi l’habitude de passer du temps
dans la bibliothèque du père de Richard. Chantal était fascinée par l’intelligence
de Richard mais ne comprenait pas toujours pourquoi il passait tout son temps à
courir après les filles. Car le plus souvent quand ils étaient ensemble sur le
campus, Richard ne cessait de faire des commentaires sur presque toutes les
filles aux fesses bien modelées et à la démarche endiablée qui passaient sous
leurs nez. En y pensant, elle se rendit compte que depuis deux semaines, ils
passaient presque leur temps ensemble. Un jour, elle osa la question :
-
Et tes
conquêtes ? Elles deviennent quoi ?
-
Quoi ?
Quelles conquêtes ? J’avoue que je me perds un peu.
-
Allez, dis-moi, on
est entre nous.
-
Sérieusement, je
ne sais pas à quoi tu fais allusion.
-
Bref, dis-moi,
pour quelles raisons tu ne me dragues pas depuis deux semaines que nous nous
fréquentons alors que ta réputation dit le contraire ?
-
Chantal, tu n’es
pas une fille comme les autres.
-
Ah bon !
-
Oui, tu es
spéciale. Il y a quelque chose de particulier en toi qui me fascine.
-
Quoi donc de si
fascinant en moi ?
-
Ta rage de vaincre
et surtout de ne pas céder au gain facile.
-
Tu me fais rougir
là.
-
Désolé mais ce
n’est pas de la flatterie. Crois en ma sincérité.
-
Croire un homme
c’est vendre son âme au diable.
-
C’est quand même
mieux que de croire aux femmes.
-
Vraiment !
-
Eh oui, croire aux
femmes, c’est se suicider lentement.
-
Quel raisonnement
bizarre ! Tu veux donc dire que la femme est un malheur pour
l’homme ?
-
La femme est un
mal nécessaire plutôt je dirai.
-
J’avoue que là, tu
commences par philosopher et ça me fait peur. Qu’est-ce que les femmes t’ont
fait ? Cela ne te fait pas déjà quelque chose de les traiter comme des
objets ? Tu dois encore les insulter ?
-
Tu n’as pas idée
de ce dont vous êtes capables. Vous avez des visages d’ange mais à l’intérieur,
c’est l’incarnation du diable.
-
Alors dis-moi,
qu’est-ce qui t’es arrivé jusqu’à détester la gente féminine à ce point ?
-
C’est une longue
histoire et j’avoue qu’elle est aussi ennuyeuse. Il vaut mieux ne pas s’y
attarder.
-
Désolé. Mais tu
sais que toutes les femmes ne sont pas pareilles.
A
la vue de l’expression de son visage, elle comprit qu’il avait dû subir une
humiliation profonde. Et se prit de pitié pour lui. Alors elle lui fit une
proposition.
-
Tu aimes le
gospel ?
-
C’est de la
musique comme toutes les autres. J’en écoute de temps en temps même si ce n’est
pas ma musique favorite.
-
Alors j’ai une
invitation pour toi. En espérant qu’elle permette de te faire voir les choses
sous un autre angle.
-
Ah bon ! Tu
crois ?
-
Rendez-vous à
Landjo City le samedi prochain à dix-huit heures au Palais de la Culture.
-
Il y a quoi
là-bas ?
-
Pas besoin que je
te donne les détails. Je t’enverrai la carte d’invitation d’ici vendredi.
-
Tu sais entretenir
des mystères. J’espère que c’est une carte qui me donne le feu vert pour te
faire des avances.
-
Malgré tout, tu ne
penses qu’à cela. J’avoue que tu sais bien jouer à de la comédie.
-
Je peux me faire
accompagner ?
-
Si c’est un garçon
alors oui. Mais si c’est l’une de te conquêtes, alors pas la peine.
-
T’en fais pas, je
suis clean et tu peux me faire confiance. Et si je n’ai pas de tes nouvelles,
je fais comment pour te contacter ?
-
Je sais que tu
n’as pas besoin que je te donne mes contacts téléphoniques. Puisque tu les as
déjà.
En
effet, il avait déjà tous ses contacts. Mais il restait prudent sur ce dossier
qui semblait compliqué car il ne voulait surtout pas mordre dans la poussière.
Il allait prendre tout son temps. Cette fille n’a rien vraiment en commun avec
toutes celles qu’il avait déjà rencontrées. Bref, à vrai dire, elle avait des
seins, des fesses, une jolie bouche et une belle poitrine comme la plupart des
femmes. Ce qu’il voulait dire était plutôt en relation avec son caractère et sa
détermination.
En
effet, le jeudi, il reçut deux cartes d’invitation et s’empressa de demander à
Hervé de l’accompagner. Heureusement que ce dernier n’avait rien de prévu et se
rendit disponible. A la question de savoir ce qui lui prenait de se rendre à un
concert gospel, Richard répondit tout simplement qu’il avait reçu la révélation
et qu’il n’était plus le même homme. Il cherchait du regard Chantal sans
succès. Donc elle voulait juste se moquer de lui parce qu’il avait démontré
qu’il ne s’intéressait pas tant que cela au gospel. De toute façon, il était
déjà là et prenait son mal en patience. La première chorale venait de finir sa
prestation. C’était bien mais Richard ne le sentait pas vraiment. Par contre
Hervé était à fond. Au moment où la deuxième chorale prestait, Richard
s’apprêtait à quitter quand Hervé le retint et pointa du doigt une jolie fille
au premier rang dans la chorale. Il se frotta les yeux par deux fois pour se
rassurer. C’était Chantal. Donc comme cela, elle était choriste.
Evidemment
qu’il apprécia le concert. A la fin, il s’empressa de la féliciter mais fut
surpris de voir qu’Hervé l’avait devancé en débitant toute une litanie d’adjectifs
qualificatifs. Il dût l’interrompre poliment pour lui rappeler sa présence.
-
Ah excuse-moi
Richard.
-
Chantal, je te
présente mon ami Hervé.
-
Enchantée.
-
Hervé, je te
présente Chantal mon amie dont je t’ai parlée.
-
Ravi de faire
votre connaissance. Richard m’a tellement parlé de vous que j’ai l’impression
de vous connaitre déjà.
-
Et qu’est-ce qu’il
raconte sur moi ?
-
Rien que des
éloges et je trouve qu’il n’a pas du tout exagéré.
-
Et si on allait se
rafraîchir au bar ? C’était la voix de Richard pour mettre fin à cette
conversation.
Après
un verre chacun, Chantal s’excusa afin de rejoindre ses amis choristes. Hervé
n’hésita pas à flatter son ami :
-
Tu as le flair et
j’avoue que tu sais dénicher de très bons produits.
-
Hervé, je
t’arrête. Ne parle pas d’elle comme cela. Elle, c’est Chantal, pas un produit.
-
Ok d’accord. Et
depuis quand tu es devenu un Roméo ?
-
Roméo ?
-
Oui dans Roméo
& Juliette ?
-
Je ne vois pas le
rapport.
-
Eh bien, tu le
verras bientôt. En tout cas, ta façon de parler a changé.
Ils
revinrent prendre congé de Chantal après s’être servis chacun un deuxième tour.
Seuls les feux de signalisation des voitures démontraient l’existence d’une vie
dans cette nuit profonde.