Ciara reste immobile encore sous l’effet des paroles prononcées par Stéphane. Ces mots ont déclenché en elle les souvenirs de la nuit torride qu’ils ont passé ensemble. Que veut-il dire par là ? S’il croit qu’elle va de nouveau se retrouver dans son lit, il se trompe lourdement. Sortie de ses pensées, elle referme tout doucement la porte que vient de franchir Stéphane puis monte dans sa chambre. La journée de demain s’annonce longue. Soupire-t-elle.

Le trouble a pris possession de Stéphane. Il ne s’attendait pas à tomber sur Ciara encore moins dans ces circonstances. Lorsqu’il l’a vue, là, qui se redressait sur son siège son cœur a automatiquement cessé de battre. Il l’a tout de suite reconnue. Sur le coup, il avait été plus qu’heureux de la retrouver puis le moment d’après, il a réalisé que sa présence dans la salle signifie qu’elle fait partie du comité administratif de food’s Industry. Comment est-ce possible ? Lui qui a pour devise : ne jamais entretenir de relation sexuelle avec ses employées, voilà qu’il est mal barré. La joie ressentie quelques minutes plutôt s’était aussitôt transformée en colère. Il était en colère contre elle et contre lui. Il sait qu’elle n’est en rien responsable mais cela ne l’a pas empêché de s’en prendre à elle. Il avait remarqué à quel point elle était troublée et confuse. Sa réaction à lui a été idiote il l’admet mais il n’a pas pu se contrôler et il s’en est voulu plus tard. Même si l’envie folle de la rejoindre dans son bureau pour s’excuser l’avait animé, son bon sens avait pris le dessus. Il faut avouer que cette nouvelle facette de Ciara l’a laissé bouche bée. Il a été impressionné de découvrir qu’elle est la directrice marketing de son entreprise. Pour être franc, jamais il n’a pensé qu’elle pouvait occuper un poste aussi important. Elle est arrivée chez lui habillée en prostituée bon sang ! Aujourd’hui son accoutrement était différent, distingué et élégant. L’ensemble tailleur gris qu’elle avait vêtu lui donnait fière allure. Il en avait été séduit. Le pantalon épousait parfaitement son corps dévoilant ainsi sa belle paire de fesses. Et voilà que ça recommence. Son corps entre en ébullition chaque fois qu’il s’en rappelle.  Cette fille va le rendre fou et s’il ne prend garde il risque d’être accro.

-         Sapristi ! jure-t-il en entrant dans sa salle de bain.

Apparemment tout va bien aujourd’hui, tout le monde semble normal même si l’ambiance qui règne à l’entreprise n’est plus la même qu’avant c’est-à-dire il y’a deux jours. Une sorte de peur enfouie flotte dans l’air. L’odeur est flagrante. Il faut dire que le patron a fait forte impression en seulement une matinée. Eh bien les jours à venir s’annoncent éprouvants.

-         Bonjour Sylvie ! Lance Ciara en passant en flash devant le bureau de sa secrétaire.

-         Bonjour mademoiselle Kipré. Répond la jeune femme en se levant aussitôt.

Cette dernière la suit, son bloc note en main. Une fois à l’intérieur, elle part se mettre en face du bureau de Ciara qui s’installe dans son siège.

-         Alors, quoi de neuf aujourd’hui ? Demande Ciara en sortant de son tiroir des documents qu’elle pose sur la table avant de porter toute son attention sur Sylvie.

-         M. N’Goran souhaite que vous passiez à son bureau. Annonce Sylvie la voix hésitante.

-         Quoi ? Maintenant ? Il est déjà arrivé ? S’écrie Ciara paniquée.

-         Il est arrivé de bonne heure mademoiselle, bien avant moi.

Ciara s’étonne de ce que Stéphane soit si matinal. Sylvie fait partie de ces personnes qui arrivent au travail avant tout le monde. Et si Stéphane était là avant elle cela veut dire qu’il est arrivé avant 6h. Est-ce à cause d’elle ? Non, c’est stupide ! Pense-t-elle.

-         Et que me veut-il ? Son ton méfiant n’échappe pas à Sylvie.

-         Aucune idée mademoiselle. Il a juste ordonné que vous soyez dans son bureau dès votre arrivée.

-         Très bien. Merci Sylvie.

Ciara remet de l’ordre dans ses cheveux relevés en chignon et tente dans des gestes nerveux d’effacer des plis invisibles sur sa robe.  Ce matin, elle a opté pour une robe droite à manches courtes de couleur turquoise. La robe lui arrive aux genoux et possède une petite fente à l’arrière. Comme toujours ses hauts talons sont au rendez-vous sauf qu’aujourd’hui ils sont blancs. Elle est époustouflante comme d’habitude. C’est sans doute son élégance, en plus de sa beauté qui séduit la plupart de ses collègues de sexe masculin bien entendu.

-         Oui Sara ! Répond Stéphane après avoir décroché le combiné.

-         Mademoiselle Kipré est arrivée.

-         Faites-la entrer. Dit-il avant de raccrocher.

Lorsque Ciara pénètre dans le bureau, elle le trouve assis derrière son bureau travaillant sur son ordinateur. Il ne prend pas la peine de relever les yeux pas quand il lui demande de s’assoir. Ce qu’elle fait sans broncher. Même si elle est furieuse contre lui et malgré la haine qu’elle a à son égard, Stéphane N’Goran est son patron. De ce fait, elle lui doit du respect. Sa nervosité s’accroit de plus en plus au fur et à mesure que les secondes passent. Stéphane quant à lui, parait plus détendu que jamais. Les bruits des touches de son clavier emplissent la pièce. Au moins grâce à ça, il ne peut pas entendre les battements accélérés de son cœur. Se dit-elle. Sa respiration s’arrête quand elle le voit refermer doucement son ordinateur et relever les yeux vers elle.

-         Bonjour mademoiselle Kipré. Dit-il calmement.

-         Bonjour monsieur. Répond-elle sur le même ton.

-         Etant donné que vous étiez absente lors de notre première réunion, j’aimerais que vous me fassiez un rapport concernant les stratégies de vente de notre nouveau produit.

Il a le culot de dire qu’elle était absente alors que c’est lui qui l’a renvoyée de la salle de réunion. Maintenant il essaie de lui faire endosser la faute. Le salaud !

-         Très bien monsieur. Donnez-moi juste le temps…

-         Je veux ce rapport aujourd’hui. Vous avez jusqu’à la fin de la journée. L’interrompt-il sèchement.

-         A présent vous pouvez disposer. Ajoute-t-il en reportant  son attention sur l’ordinateur.

Ciara, furieuse sort de la pièce sans attendre. Est-ce la même personne qui est venue chez elle hier ? Pourquoi se montre-t-il aussi dur envers elle ? Bon, on écarte l’épisode avec Bamba et la réceptionniste. A propos, que deviennent-ils ? Elle n’a eu aucune nouvelle d’eux. Ils doivent être en rogne contre le boss et c’est normal. Même si elle désapprouve leur comportement, Stéphane a été trop sévère. Il aurait pu leur donner un avertissement. Trêve de bavardage, elle a du boulot sur la planche et il faut qu’elle s’active si elle ne veut pas, elle aussi subir la colère du patron.

Ciara est en plein travail quand on frappe à la porte. Il doit être 2h de l’après-midi et elle n’a pas encore pris sa pause. Le rapport à lui seul lui aurait pris une trentaine de minutes mais le souci est que son équipe et elle n’ont pas fini  de mettre au point les stratégies de vente. Deux choix s’offrent à elle ; Soit elle décide d’être honnête et dit la vérité au patron ce qui probablement risque de lui créer de sacrées embrouilles parce que le produit doit être mis sur le marché dans exactement deux semaines. Ou soit, elle essaie vite fait d’élaborer une strategie. Il ne lui en a pas fallu longtemps pour prendre une décision. La seconde option étant la plus censée, elle a passé toute la matinée enfermée dans son bureau au point d’en oublier de déjeuner. Mais ça, c’est le dernier de ses soucis. Le plus important est de fournir un rapport à Stéphane en fin de journée.

-         Je vous apporte de quoi manger mademoiselle. Annonce Sylvie à peine rentrée dans la pièce.

-         Merci Sylvie. Vous êtes mon ange gardien. Son sourire reconnaissant ravit la jeune femme.

Sylvie pose le sac en carton sur la table et s’en va. Ciara se jette immédiatement sur l’emballage et en sort le contenu. Un sandwich au jambon accompagné d’une boisson gazeuse. Ce n’est pas ce qu’on appellerait un déjeuner appétissant mais c’est mieux que rien. Sylvie est vraiment un amour. Pense-t-elle en mordant dans son sandwich. La journée s’achève et  Ciara a réussi à faire un rapport correct. Elle-même en est épatée. Elle n’aurait pas pu faire mieux. Au début, elle croyait qu’elle n’arriverait pas à établir en si peu de temps une stratégie mais il s’est avéré que les idées lui sont venues naturellement. La preuve qu’elle est faite pour ce job. C’est d’un air satisfait qu’elle se rend dans le bureau de Steph. En sortant du sien elle remarque que l’entreprise est presque vide, tout le monde est déjà rentré. Il ne reste plus que Sylvie qui s’apprête elle aussi à partir et sans doute Sara l’assistante de Stéphane. Les agents de sécurité, eux travaillent 24h/24.

-         Sara, pouvez-vous m’annoncer  à monsieur N’Goran s’il vous plait. Demande-t-elle le sourire aux lèvres.

Celui-ci s’évanouit lorsque l’assistante l’informe que le patron est déjà rentré chez lui.

-         Quoi ? s’exclame-t-elle.

-         Il est parti il y’a une heure de cela. Précise Sara.

-         Mais il m’a demandé de lui apporter mon rapport sur…

-         Il m’a chargée de vous dire qu’il le récupèrera demain après-midi.

Apparemment cette femme d’âge mûre ne l’apprécie pas beaucoup vu le ton hostile sur lequel elle n’a pas hésité une seconde à lui parler. C’est étrange, elle lui rappelle la gouvernante de Stéphane, c’est quoi son nom déjà ? Zut, elle ne s’en souvient pas. Et d’ailleurs elle s’en moque. Une chose est sûre, elles ont le même caractère. Ciara remercie l’assistante en la gratifiant d’un sourire forcé avant de partir en trombe en direction de son bureau. Sylvie n’est plus là, certainement qu’elle est rentrée elle aussi. Ciara range rapidement ses affaires et part à son tour. Cet enfoiré ne perd rien pour attendre. Elle s’est démenée pour terminer ce travail dans le délai qui lui a été imposé et lui se permet de la faire balader. Qu’est-ce qu’il lui reproche au juste ? De l’avoir abandonné ? Si c’est réellement la raison de son comportement absurde, il la déçoit énormément. Comment peut-il mélanger ses sentiments et le travail ? Lui qui se dit Homme rigoureux, sérieux dans le travail au point de punir sévèrement ses employés pour des choses banales, il s’autorise à laisser ses sentiments prendre le dessus sur son travail. C’est déplorable. C’est la rage au ventre que Ciara arrive chez elle. Elle entend le son de la télé depuis le seuil de la porte d’entrée. Lala doit être là. Elle lui a récemment remis le double de ses clés histoire que celle-ci puisse aller et venir comme bon lui semble.

-         C’est toi Ciara ? Lance-t-elle depuis la cuisine.

-         Oui la grosse et t’imagine même pas à quel point je suis éreintée.

-         Oh ma pauvre. Surtout ne touche à rien, installe toi confortablement, je m’occupe de toi.

-         Tu es un amour la grosse. Répond Ciara d’une voix reconnaissante.

L’une des raisons pour lesquelles elle adore Lala est son amour pour les autres. Son amie serait prête à sacrifier le seul bien qui lui reste juste pour rendre heureux quelqu’un d’autre. Comme le dit l’expression, elle a le cœur sur la main.

-         Je t’ai préparé une bonne sauce tomate avec du riz. Informe-t-elle, les bras chargés d’un énorme plateau.

-         Merci Lala. Tu es super.

Ciara s’installe pendant que son amie pose le plateau sur la petite  table du salon. Celle-ci disparait de nouveau dans la cuisine et revient quelques instants plus tard avec de l’eau gazeuse.

-         J’ai bien fait de te donner le double des clés.  Plaisante Ciara la bouche pleine.

-         Ouais c’est ça, comme ça t’aura une boniche qui te fait à manger tous les soirs.

-         Exactement ! Dit Ciara en riant.

-         Tu as l’air épuisée ma belle. Remarque son amie.

-         Si tu savais ce qui m’est arrivée, tu ne le croirais pas.

Cette déclaration éveille la curiosité de Lala.

-         Qu’est ce qui t’es arrivée ? Questionne-t-elle avec empressement.

-         J’ai revu Stéphane ? Les yeux de Lala s’arrondirent de surprise.

-         Où ?

-         Au boulot, figure toi que c’est mon nouveau boss. Déclare-t-elle avant d’avaler la seconde bouchée de son copieux repas.

-         Tu plaisantes ? S’écrie-Lala abasourdie.

Ciara fait un non de la tête. Elle comprend que trop bien la réaction de son amie car elle-même avait réagi de la même façon. Disons pire.

-         Et qu’est –ce qu’il t’a dit ? Que lui as-tu dis ? vas-y raconte !

Lala est très excitée comme à son habitude. Elle veut toujours tout savoir dans les moindres détails. Ciara ne se fait donc pas prier et commence son récit depuis l’épisode de la fameuse réunion jusqu’à aujourd’hui sans oublier la veille où il a débarqué chez elle.

-         Quelle histoire. Finit par dire Lala dans un soupire.

-         Qui aurait cru que le beau mec de la toile serait ton patron. Reprend-elle.

-         Et j’ai l’impression qu’il m’en veut pour être partie de chez lui comme une voleuse. Il m’en fait baver. Si ça continue comme ça, je vais craquer la grosse. Dit-elle en soupirant.

-         Hey ! regarde-moi.

Lala part s’assoir sur la table et lui relève le menton.

-         Tu ne vas pas craquer ! Tu es la meilleure dans ton domaine et il s’en apercevra. Tiens lui tête et montre lui qu’il ne t’atteint pas. Ajoute-elle.

-         C’est bien ça le problème, Il m’atteint jusqu’au plus profond de mon cœur. Avoue ciara.

-         J’ai le cœur qui bat la chamade chaque fois que je suis près de lui. Et je désire plus que tout ne pas penser à lui mais rien n’y fait. Continue-t-elle.

-         Je parie que lui non plus n’est pas indifférent. Tu lui plais grave ma belle, sinon pourquoi  selon toi  te fait-il subir tout ça? hein ?

-         Aucune idée et je ne…

La sonnerie de son téléphone l’interrompt. Elle fait la moue quand elle voit le nom qui s’affiche sur son écran.

-         Bonsoir Isabelle, comment vas-tu ?

-         Mal ! Hurle sa belle-sœur à l’autre bout du fil.

Ciara lève les yeux au ciel avant de porter son regard sur Lala qui a l’air amusé.

-         Qu’est-ce qu’il y a encore Isabelle? Demande Ciara excédée.

-         Tu sais quel jour nous sommes ?

Sa voix se fait plus accentuée.

-         Le 10 août et la salle de réception n’a toujours pas été réservée. Figure-toi que ton frère prétend être occupé avec son boulot. Je dois donc m’en occuper en plus de  toutes les autres choses qu’il y a à faire, distribuer les invitations, choisir le gâteau, engager un service traiteur, ma robe de mariée qui n’est pas encore terminée, celles des demoiselles d’hon….

-         Isabelle, Isabelle respire.

Ciara a de la peine pour sa future belle-sœur. Elle ne se doutait pas qu’elle était autant acculée par les préparatifs du mariage. Il faut avouer que durant tout le mois de Juillet elle ne l’a pas beaucoup aidé. Elle-même était prise par le travail. La date du mariage approche et elle constate qu’il y a encore énormément de choses à faire.

-         Calme-toi. Je vais me charger de réserver la salle de réception et trouver un service traiteur.

-         Vraiment ? s’extasie Isabelle une pointe de joie dans la voix.

-         Oui et si tu as besoin que je t’aide pour autre chose fais le moi savoir.

-         Merci Ciara, tu m’ôtes un poids de la tête… Ah j’oubliais samedi les demoiselles d’honneur iront essayer leurs robes donc informe ton amie Lala.

-         Et à quelle heure est le rendez-vous ?

-         11h de la matinée. La boutique se trouve aux deux plateaux, juste à côté pharmacie ‘’Santé’’. Surtout soyez à l’heure.

-         Ne t’en fais pas Isabelle.

-         Parfait, bonne soirée.

Ciara se laisse tomber sur le canapé après avoir raccroché. Ce mariage la pèse colossalement, vivement qu’il se fasse pour qu’elle puisse enfin respirer.

-         Alors ? Demande Lala assise dans un fauteuil.

-         Essayage de robes samedi à 11h. nous sommes priées d’être à l’heure. Dit-elle sarcastique avant d’exploser de rire. Lala se joint à elle.

 

fin du huitième chapitre. Bizbi.