Chapitre 8
Ecrit par NafissaVonTeese
Précédemment
Le dîner chez Seydina avait mal débuté pour
Fama avec les menaces de Isabella. Elle n’avait qu’une seule envie, quitter
cette maison au plus vite et passer à autre chose.
Fama avait supplié Seydina de la ramener chez
elle, mais il refusa, et les choses n’étaient pas prêtes de s’arranger. Après
Isabella, c’était Khady, la seconde mère de Seydina, qui s’en prenait à elle.
***
-
Pauvre
fille ! Tu n’as même pas idée du pétrin dans lequel tu t’es laissée
embarquer !
Fama avait regardé la dame se retourner avec
un calme déconcertant. Elle avait vu Isabella avoir le même comportement
quelques minutes plus tôt, sans réagir, mais là elle était à bout. Elle n’allait pas
se laisser faire. Pas cette fois-ci, même si la peur bouillonnait au plus
profond d’elle-même.
Khady
elle, n’avait plus prononcé un seul mot, comme si elle attendait que Fama
réagisse. Quand elle se rendit compte qu’elle était bien décidée à rester de
marbre, elle soupira et commença à
s’approcher d’elle.
Fama
n’avait aucune idée de ses intentions. Alors même si elle était déterminée à
l’affronter, son instinct lui suggéra de rester sur ses gardes. A chaque pas en
avant que faisait Khady, elle, reculait.
-
Tout va bien ? avait-elle
demandé d’un air innocent qui ne toucha aucunement Fama.
-
Oui.
-
Donc pourquoi me donnes-tu
l’impression d’être effrayée ?
Fama
n’avait pas répondu. Même
si Khady s’était immobilisée au bon milieu de la spacieuse cuisine, Fama
continuait à reculer jusqu’à se heurter contre l’imposant meuble de cuisine en
bois fixé au mur. Quand
elle remarqua un bloc de rangement de couteaux à côté d’elle, elle s’empara
instinctivement d’un poignet et le dirigea vers Khady avant de lui lancer sèchement :
-
Devrais-je être effrayée ?
Sa
réaction choqua visiblement Khady, mais elle garda son calme, comme si elle
savait exactement quoi faire dans ce genre de situation. Elle avait remarqué
que Fama, même si elle tenait fermement le poignet à sa main, avait un regard apeuré.
Elle était peut-être capable du pire comme toutes personnes se sentant en
danger, et Khady en était consciente. Cependant, elle avait une petite idée de
ce qui avait bien pu provoquer un tel agissement.
-
Je suppose que c’est cette folle de
Isabella qui est encore passée par là. Elle a la fâcheuse habitude de pousser
les gens à bout.
Elle
avait attendu que Fama confirme ou lève ses doutes mais elle semblait tétanisée
et n’arrivait même pas à ouvrir la bouche. Elle s’avança et lui arracha le couteau de la
main pour la remettre à sa place.
-
Seydina aime décidément se
compliquer la vie avec des filles étranges ; avait dit Khady avant de lâcher un
soupire.
C’est
à ce moment que Fama réalisa qu’elle venait de menacer la mère de son petit ami
avec un couteau. Elle aurait voulu s’enfuir en courant, non parce-qu’elle avait
peur, mais elle avait terriblement honte de ce qu’elle venait de faire.
-
Je suis désolée Madame Tall.
Excusez-moi… Je ne sais pas ce qui m’a pris. Elle m’a dit qu’elle s’en
prendrait à moi si jamais… Je suis sincèrement désolée.
-
Ça suffit ; avait-elle dit pour
lui couper la parole avant la tenir fermement par les épaules. Cesse de
pleurnicher. Quoi qu’elle ait pu te dire ou faire, sache qu’elle a déjà fait
pire avec moi et certainement avec toutes les personnes qui partagent le
quotidien de Seydina. Depuis
qu’il a commencé à lui parler de toi, elle n’arrête pas de chercher des moyens
de l’éloigner de toi.
-
Qu’est-ce que vous racontez ?
-
Elle a tout essayé. Je pensais que
mon fils t’en avait déjà parlé. Elle ne t’aime pas et d’ailleurs, elle ne
cherche pas à le dissimuler.
-
Mais pourquoi ? Qu’ai-je fait
de mal ?
-
Aucune idée ! Et ne cherche
même pas à comprendre. Isabella n’est rien d’autre qu’une peste et je suis
certaine qu’elle a une idée derrière la tête. Je n’irai pas jusqu’à dire
qu’elle est dangereuse, mais une chose est sûre, il faut te méfier d’elle. Je
voulais tout juste te prévenir avant que tu ne me…
-
Je suis vraiment désolée ;
s’excusa Fama en l’interrompant. Je vous assure que je ne suis pas comme ça. Je
suis juste sur les nerfs.
-
J’imagine.
-
Mais je ne comprends pas. Pourquoi
a-t-elle voulu me rencontrer si elle ne veut pas de moi ?
-
Je ne sais pas. Mais la connaissant,
ça ne présage rien de bon. Elle voulait te rencontrer seule, mais j’ai réussi à
convaincre Seydina de t’inviter à la maison pour que je puisse garder un œil
sur elle.
-
Qu’est-ce que je suis censée faire
maintenant ? Faire semblant que tout va pour le mieux ?
-
Ne te laisse pas faire sinon elle va
faire de ta vie un véritable enfer jusqu’à ce que tu partes en courant. Elle a bien réussi avec
les autres, si tu la laisses faire, elle fera pareil avec toi. Le pauvre se
laisse manipuler par cette femme parce-qu’il a une confiance aveugle en elle. Parle-lui. Peut-être que toi il te croira. J’ai beau lui répéter
que Isabella va finir par lui gâcher la vie, mais il est persuadé que je dis
tout cela uniquement parce-que j’ai peur qu’elle m’éloigne de lui.
-
Je ne sais pas… C’est sa mère et moi
je ne suis que sa petite amie.
-
Pas que… C’est mon fils et je le
connais mieux que quiconque. Si tu lui dis qu’elle s’en est prise à toi, il te
croira ; avait affirmé Khady en menant Fama vers la porte de la cuisine. Il est certainement dans sa chambre entrain de se
ronger les ongles pour essayer de deviner ce qu’on est entrain de se dire.
Depuis tout petit, à chaque fois que quelque chose le tracasse, il s’enferme
pour réfléchir.
-
Vous êtes sûre ?
-
Bien-sûr ; dit-elle en tournant
la clé de la porte de la cuisine dans sa serrure. Prends les escaliers au bout
du couloir. Sa chambre est au premier étage, la deuxième porte à droite.
Aussitôt
que Fama s’était élancée sur les escaliers se trouvant à l’endroit indiqué par
Khady, Isabella se faufila dans la cuisine.
-
Alors ? avait demandé Isabella
toute souriante.
-
Ça s’est passé exactement comme tu
avais dit.
-
Tu vois Khady, nous formons une
belle équipe.
-
Epargne-moi ton hypocrisie ! Et sache que tout ce que
je fais, c’est pour le bien de mon fils.
-
Mon fils s’il te plait! Pas le tien ; avait sèchement rétorqué Isabella avant de tourner le
pas.
Quand
Fama arriva en haut des escaliers, elle se rendit compte qu’elle ne savait pas exactement
quoi dire. Elle pouvait vendre tout et n’importe quoi à n’importe qui mais
n’avait jamais su comment exprimer ses sentiments sans crier et taper contre
quelque chose. Il
était bien plus facile pour elle de mentir que de dire la vérité et cette
pensée lui aurait fait sourire dans d’autres circonstances mais là, elle était plutôt
préoccupée par la réaction de Seydina. Elle se dit qu’elle n’avait qu’à aller
droit au but.
« Le
mal, c’est comme la mauvaise herbe, elle ne meurt jamais ! Alors mieux
vaut arracher ses racines avant qu’elles ne poussent et se multiplient.
» ; se dit Fama, convaincue qu’il fallait qu’elle demande à Seydina de
tenir Isabella bien loin de leur relation. Elle était sûre d’une chose, s’il tenait
vraiment à elle, jamais il ne douterait de sa sincérité.
« Fama ! »
avait dit une voix féminine trainante. Quand elle se retourna, Fama ne vit
personne et elle était sûre qu’il n’y avait personne avec elle dans le couloir.
Elle entendit son nom à deux autres reprises et le son semblait venir du fond du
couloir.
« Deuxième
porte à droite » repensa-t-elle. Fama
s’arrêta devant celle-ci mais avant de frapper à la porte, elle entendit à
nouveau son nom résonner d’une voix bien plus audible. Quand elle s’avança,
elle remarqua une dernière troisième porte qui s’entre-ouvrit aussitôt.
« Viens
Fama ! »
Cela
la fit froid dans le dos mais elle posa la main sur le poignet de la porte. Si
c’était une des sœurs de Seydina qui lui faisait une mauvaise blague, elle
allait amèrement le regretter. Le fait de ne pas se laisser faire ne
s’appliquait pas seulement à Isabella, mais à tous les membres de cette
famille.
La
pièce était entièrement plongée dans le noir. Fama avait essayé de trouver un interrupteur en
tâtant le mur, en vain.
« Viens ! »
-
Ce n’est pas drôle. Qui est
là ?
-
C’est moi Fama ! Tu ne me
reconnais pas ?
Etonnement,
Fama ne ressentit aucune peur, au contraire, la voix lui semblait bien
familière. Elle avait franchi la porte et avait recherché à nouveau un
interrupteur incrusté au mur. C’est là qu’une lumière clignota et elle crut
apercevoir quelqu’un au fond de la pièce.
-
Qui est-ce ?
Personne
ne répondit mais ma lumière s’alluma de nouveau et avant qu’elle ne s’éteigne,
Fama eu le temps d’entrevoir un visage. Elle eut
l’impression que son cœur s’était arrêté de battre puis elle quitta aussitôt la
pièce presque en courant. A sa grande surprise, elle tomba sur Seydina qui
remarqua son air effrayé. Ses mains tremblaient comme des feuilles, sans
qu’elle ne puisse les contrôler.
-
Qu’est-ce qu’il y’a encore ?
-
Quoi ? avait-elle difficilement
prononcé Fama.
-
Je t’ai entendu parler à quelqu’un.
Et qu’est-ce que tu fais là toute seule ?
-
C’est à qui cette chambre ?
demanda Fama en pointa la pièce du doigt.
-
Personne ; répondit Seydina
d’une voix agacée. Ma mère s’en sert pour ranger de vieux trucs qu’elle
n’utilise plus mais qu’elle refuse de jeter.
Fama
avait passé ses mains sur son visage avant de se jeter dans les bras de
Seydina. Celui-ci
comprit aussitôt qu’elle allait à nouveau lui demander de la ramener chez elle
et il était bien déterminé à refuser, encore une fois.
Des
bruit et injures venant du rez-de-chaussée les firent tous deux sursauter.
-
Qu’est-ce qui se passe ?
demanda Fama.
-
Aucune idée. On va voir.
Le
couple s’était élancé sur les escaliers main dans la main. Quand ils arrivèrent au salon, des cris les
accueillirent. Le
sang de Fama se glaça quand elle vit son père entrain de hurler sur les parents
de Seydina.
-
Papa… Qu’est-ce que tu fais là ?
Tous
se retournèrent pour faire face au couple et le silence tomba aussitôt dans la
pièce avant que Isabella ne l’interrompit.
-
Quand on parle du loup…
-
Toi, tu la fermes vieille
sorcière ; dit le père de Fama avant de s’adresser à sa fille. Je ne crois
pas avoir besoin de te dire que tu m’as vraiment déçue, mais on en reparlera
plus tard. Viens, on
s’en va.
-
Non ! avait-dit Fama avant de
vraiment réaliser que pour la première fois de sa vie, elle venait de s’opposer
à son père.
Elle
n’était plus une gamine à qui on pouvait dicter la conduite, et il fallait
qu’il s’en rende enfin compte. En le voyant
bouillonnant de colère, elle se dit qu’elle n’avait qu’à en profiter pour
éclaircir la situation une bonne fois pour toutes. Au moins cela lui évitera de
l’énerver à nouveau une fois chez eux, en lui avouant qu’elle sortait avec « le
blanc ».
-
Papa, j’ai quelque chose à te dire. Seydina
et moi sommes ensemble.
A
sa grande surprise, il ne dit rien. Il s’était juste avancé jusqu’à elle pour
l’arracher de la main de Seydina avant de l’entrainer vers la sortie.
-
Mais attends papa. Tu me fais honte.
A
ces mots, il la lâcha aussitôt avant de lui lancer :
- Tu oses me dire que je te fais honte ?
C’est comme ça que je t’ai éduqué ?
Il
avait posé cette question en la fusillant du regard, ce qui fit comprendre à
Fama qu’elle ne devait surtout pas répondre au risque de se prendre une baffe
devant toute la famille de Seydina. Elle était écœurée de ne voir personne
intervenir, même pas son petit ami qui semblait ne pas être concerné, en
gardant le silence.
-
Figure-toi que moi aussi j’ai
quelque chose à dire petite effrontée, ta mère est aux urgences. Alors tu viens
ou tu restes avec ces acolytes du diable ?