CHAPITRE 8: Une séparation déchirante
Ecrit par kaynaliah
JEANNE MINKO
Un mois plus tard
Le temps passait mais les choses avaient tellement changé. Il y a
quelques semaines encore j’avais une vie, un mari, une famille, des amis
et en une fraction de seconde je suis redescendue de mon nuage. Alors
que j’imaginais la vie future de ma fille: son adolescence, la voir
grandir, la voir rentrer à l’université, la voir se marier et être aussi
maman a son tour, tout m’est arraché. La vie est tellement cruelle.
Jamais je ne verrai toutes ces choses. Je ne verrai pas mon bébé
grandir. Réhyma est mon unique trésor et à chaque fois que je la
regarde, je ne peux empêcher mes larmes de couler abondamment. Quelle
douleur! Ca fait trop mal. Avec Georges, c’est tellement compliqué. Il
est à la fois si distant et si proche. Il a été tellement secoué par
cette nouvelle qu’il refuse de faire face à la réalité. A chaque fois
que mon regard croise le sien, on peut y lire clairement la tristesse
avant de voir ses yeux s’embuer. J’ai tellement mal. J’ai déjà bien
compris que je me rapproche de plus en plus de la tombe mais je dois
être sûr que Georges sera fort pour veiller sur notre petit rayon de
soleil. Je passe tellement de temps avec ma petite fille. Elle ne se
doute même pas du drame qui se passera dans quelques semaines. Elle
arrive à sécher mes larmes de tristesse et d’amertume rien que par son
sourire ou ses câlins ou encore ses nombreux bisous qu’elle aime tant me
donner. J’ai commencé sous peu à écrire un journal où je lui écrirai
tout ce qu’elle doit savoir et puisse se souvenir de moi en grandissant.
Je veux qu’elle sache que malgré le fait que je ne sois plus là
physiquement, je serai toujours à ses côtés et veillerai toujours sur
elle. Elle est mon miracle, ma vie, mon amour et jamais je ne
l’abandonnerai.
Georges, je ne lui en veux pas du tout. Il est
tout simplement dépassé par les évènements. Il a peur car il ne sait pas
comment les choses vont se passer. Je le comprends. Il est juste
effrayé par ce qu’on vit en ce moment et ce qu’il vivra demain, tout
seul. Je sors de la chambre et me dirige vers son bureau. Georges
travaille depuis un mois depuis la maison. IL préfère qu’on soit
ensemble mais c’est comme si on ne l’était pas du tout. Il s’enferme
continuellement dans son bureau. Je l’ai laissé faire un moment mais là
j’en ai marre. Au lieu de s’apitoyer sur notre sort, on devrait plutôt
profiter des instants qui nous restent à vivre avant que la maladie ne
se fasse vraiment ressentir et me rappelle donc que j’ai un pied dans la
tombe. Je donne trois coups à la porte de son bureau avant de poser ma
main sur la poignée et de l’ouvrir. Je le trouve les yeux plongés dans
le vide, sans connexion avec la réalité. Il refuse de faire face à la
réalité mais je vais l’y obliger.
-”Poussin?”
Aucune
réponse. Je me rapproche de lui et là enfin il remarque ma présence. Il
n’a pas le temps de dire quoi que ce soit car je le prends dans mes
bras et le serre très fort. C’est tellement difficile de savoir que tous
ces petits gestes d’amour que je lui donne cesseront dans quelques
temps. Tellement difficile de se dire que d’ici quelques semaines, on
sera privé de tout ce bonheur car on se retrouvera dans deux mondes
différents. C’est très éprouvant comme situation. La seule chose que je
veux est que ma fille ne se rende pas compte d emon état et de cette
douleur que j’éprouve. Je n’ai même pas encore eu le temps de l’annoncer
à ma soeur. Je veux d’abord que George parvienne à accepter la vérité
avant dE tout dire à ma soeur.
-”Comment fais-tu pour être aussi forte? Tu sembles tellement accepter cette nouvelle sans heurt”
-”Je me sens mal George. Je me sens tellement impuissante, mal”
-”......”
-”Mais je me dis qu’après tout, c’est Dieu qui a voulu que les choses
se passent ainsi. Mon seul regret est de partir maintenant et de ne pas
pouvoir vieillir à tes côtés ni voir notre bébé grandir. Je suis encore
là chéri et j’ai besoin que tu sois là pour Réhyma et moi. On a besoin
de toi….. Quand je ne serai plus là, elle n’aura que toi et il faudra
bien que tu apprennes à conjuguer avec cette douleur. Oui je vais
mourir, on le sait tous. Mais je suis là pour l’instant et je me dis
qu’on devrait juste profiter de la vie, de chaque seconde que nous
pouvons passer ensemble en famille. On peut voyager si tu veux,
découvrir le monde… Je refuse qu’on reste là à s’apitoyer sur notre
sort. On perd du temps en le faisant.” dis-je en larmes
-”Je suis
perdue Jeanne. Je refuse de te perdre. je en sais pas comment je ferai.
Je ne sais pas comment je survivrai à cela” dit-il avec des larmes
-”Tu y arriveras mn chéri. Tu sais pourquoi? Pour le bonheur de Réhyma tu y arriveras”
-”j’ai tellement mal dans mon coeur. Pourquoi devrions-nous subir tout cela?”
-”Je sais bébé. Je n’ai pas la réponse non plus. MAis on doit vivre avec cette vérité”
-”Je refuse de penser que dans quelques mois tu ne seras plus là. Que
dirais-je à notre fille quand elle me demandera où est sa mère?”
-”Georges…..” dis-je émue
On s’est étreint et dans ce désespoir total , cette amertume
douloureuse, nous avons fait l’amour là sur son bureau à plusieurs
reprises. Se raccrocher à l’instant présent est tout ce qui nous
restait. On prenait du plaisir mais nos larmes à la fois de tristesse
nous rappelait le drame qui était en train de se jouer actuellement.
Comment survivre à cela? Je me rappelais de la première fois encore que
nous nous sommes connus et des vêtements qu’il portait ce jour-là. Sans
le savoir, mon destin allait changer complètement. Nous sommes tombés
amoureux l’un de l’autre et avions traversé tellement de tempêtes dans
notre vie de couple. Je me souviens encore du jour de notre mariage. Je
me souviens lorsqu’on s’est promit fidélité, amour, assistance,
respect…. Je m’en souviens comme si c’était hier et j’en suis émue à la
fois de tristesse et de bonheur.
-”Georges?”
-”Oui chérie”
-”Promets-moi une chose je t’en supplie”
-”Tout ce que tu veux”
-”Soit toujours là pour notre fille. Parle-lui de moi même quand je ne
serai plus là afin qu’elle se souvienne toujours que je l’aime à la
folie”dis-je avec des tremous dans la voix
-”Je le ferai chérie. Je le ferai” dit-il en se rapprochant de moi et en me serrant très fort dans ses bras.
-”Tu sais je me suis beaucoup documentée depuis que je reste à la maison.”
-”......”
-”Au bout d’un moment, je vivrai d’atroces souffrances et les
médicaments prescrits ne m’aideront pas à aller mieux pour autant car la
douleur sera omni-présente”
-”Qu’essayes-tu de me dire?”
-”Je
ne serai plus là Jeanne que tu vois maintenant. Je serai une autre
personne, malade, affaiblie et amaigrie. Je ne voudrai pas que tu me
regardes avec compassion, pitié. Je veux que jusqu’au dernier instant,
tu me regardes comme tu m’as toujours regardée”
-”Jeanne…”
-”Non George. Promets-le moi”
-”....Je te le promets”
Les jours et les semaines se sont mis à défiler à une vitesse
incroyable.Avec George, on a prévu de se rendre en Afrique du Sud en
famille mais surtout pour voir ma petite soeur et que je puisse enfin
lui parler car je ne peux pas lui annoncer ce genre de nouvelles par
téléphone après tout. George, Réhyma et moi passions tout notre temps
ensemble. Tout aurait pu être si bien si la maladie n’avait pas commencé
à se manifester de manière virulente. Les douleurs ont commencé à être
très virulentes et ne m’ont pas empêchée de prendre l’avion. Dès que
nous sommes arrivés à Pretoria, j’ai été immédiatement hospitalisée.
Georges a appelé Grâce et lui a demandé de nous rejoindre à l’hôpital.
Mais lorsqu’elle est arrivée dans ma chambre, en larmes, j’ai compris
qu’elle savait déjà. Georges avait dû tout lui dire. Elle a fondu dans
mes bras et s’est mise à pleurer sans pouvoir s’arrêter de tout son
soul. Les larmes me sont également montées aux yeux et ont dévalé sur
mes joues. J’ai deamndé à être suivie depuis la maison. ce sera plus
simple pour moi et je pourrai avoir ma famille autour de moi et surtout
ma fille. Je suis sortie de l’hôpital deux jours plus tard et une
infirmière venait s’occuper de moi à la maison. J’étais entourée et
c’est tout ce dont j’avais besoin pour être heureuse. Ma soeur, ma
fille, mon mari étaient avec moi.
……………………………………………………………………
4 mois plus tard
Georges MINKO
Notre vie a pris en autre envol depuis quelques mois. Je ne reconnais
plus ma vie. Celle que j’avais auprès de mon épouse, la mère de mon
enfant. Elle perd du poids et est tellement en souffrance. Mais je vois
clairement qu’elle fait des efforts pour passer du temps avec nous même
quand son corps, physiquement, n’arrive plus à suivre. Réhyma est
devenue toute calme comme si elle se doutait ou soupçonnait quelque
chose. Elle est plus réservée. Elle passe tout son temps auprès de sa
maman et refuse de la lâcher. Même le soir, elle ne veut plus dormir
dans sa chambre. Ni Grâce ni moi ne savions quoi faire. C’est comme si
elle savait que quelque chose allait se produire. Grâce m’aide beaucoup
auprès de sa soeur. mais elel ne comprend toujours pas pourquoi le sort
se jette sur notre famille comme ça. Jeanne a de plus en plus de
douleurs et les doses de morphine qu’on lui injecte ne lui suffisent
plus. Elle est continuellement en souffrance. Nous sommes arrivés à un
stade où on s’occupe d’elle comme un bébé. J’ai tellement mal en la
voyant dans cet état. Ma femme était si pleine de vie il y a quelques
temps et là le destin me rappelle si cruellement que la maladie est
belle et bien présente et continue à se développer. On doit l’aider pour
prendre sa douche de peur qu’elle ne tombe tout comme pour la nourrir.
Réhyma a dû remarquer que sa maman se transformait physiquement et elle
en est affectée.
La situation est tellement difficile. J’ai
beau joué le fort mis je suis mort de trouille. Plus les jours passent,
plus je crains de me réveiller le lendemain sans Jeanne, l’amour de ma
vie, à mes côtés. Je passe mes nuits à la contempler même si elle
déteste que je le fasse depuis qu’elle perd du poids et ses cheveux.
C’est ma femme, mon tout, mon amour, mon ange…. C’est Jeanne tout
simplement et je l’aime. Je ne sais pas à quoi ressemblera ma vie demain
ainsi que celle de ma fille, mais je refuse d’y penser. Je ne sais même
pas combien de fois je me réveille dans la nuit pour vérifier qu’elle
respire encore. Je suis tombée sur son journal à plusieurs reprises. Je
sais qu’il est destiné à Réhyma mais je n’ai pas pu m’en empêcher. Elle
me décrit tellement comme une personne parfaite alors que je sais que je
suis imparfait. Pourquoi le sort s’acharne ainsi sur nous? Pourquoi les
médecins n’ont pas su détecter cela plus tôt? Pourquoi? J’ai des
multiples questions qui resteront sans réponse malheureusement.
Depuis que nous sommes arrivés en Afrique du Sud, notre rituel est de
lire la Bible et de beaucoup prier. Si ça ne tenait qu’à moi, je m’en
passerai car il y a bien longtemps que j’ai cessé de croire en Dieu vu
toutes ces choses que je traverse dans ma vie mais Jeanne y tient plus
que tout. Mine de rien, je répare petit à petit ma foi qui était tout
bonnement ébranlée. Ce matin, je suis sortie acheter un bouquet de roses
blanches pour mon épouse. C’est devenu un rituel depuis que nous sommes
dans ce pays et je le fais depuis que nous sommes en couple d’ailleurs.
Aujourd’hui, nous célébrons notre septième anniversaire de mariage et
j’ai tenu à ce que tout soit parfait. L’infirmière restera avec nous ce
soir à la maison tandis que Grâce s’occupera de Réhyma en la faisant
sortir pour l’éloigner un peu. Après le déjeuner, nous nous sommes
installés au salon, Réhyma, Jeanne et moi. On passe beaucoup de temps
dans cette pièce car Jeanne n’aime pas trop rester dans la chambre. On a
donc déplié le grand canapé-lit et nous nous sommes installés dessus.
Réhyma tenait sa peluche d’une main et attrapait sa maman de l’autre
main. Elle était placée entre nous deux et commençait à sombrer dans le
sommeil. Jeanne et moi continuons à discuter mais à voix basse pour ne
pas la réveiller. Grâce était dans sa chambre en train de travailler.
-”Merci de me rendre heureuse et de m’avoir donné ce mini-nous. Merci
pour tout Georges. Je t’aime tellement. Ne l’oublie jamais”
-”Je
t’aime ma petite crevette. Tu es une épouse, une maman et une femme
formidable. Je ne pouvais pas espérer mieux. En attendant, repose-toi
car on aura une longue soirée”
-”A vos ordres mon commandant”
Nous nous sommes endormis, les doigts entrelacés avec notre petite
fille entre nous deux. Je me sentais un peu plus apaisé que les
précédents jours. Je comptais faire passer une belle soirée à ma femme
et elle ne l’oubliera pas de si tôt. Je sens quelque chose qui bouge sur
le lit. J’ouvre les yeux et vois Réhyma qui bouscule sa maman.
-”Mais qu’est-ce que tu fais chérie? Maman est fatiguée. Laisse-la se reposer”
-”Mais maman devait me donner mon goûter papa. Depuis j’essaye de la réveiller mais elle dort toujours”
Koum Koum Koum
Je touche automatiquement Jeanne et je la trouve froide. Koum. Je mets
mon doigt sous ses narines mais elle ne respire pas. J 'Hurle le nom de
l’infirmière et de Grâce. Cette dernière prend Réhyma et vont dans la
chambre tandis que l’infirmière s’affaire autour de Jeanne. Mais ma
femme est partie. Ma femme est morte. J’ai perdu l’amour de ma vie. J’ai
perdu la mère de mon enfant. Non. Non. Non. Je me rapproche d’elle et
elle semble sourire comme si elle était apaisée. Je l’embrasse une
dernière fois avant de crier et de me mettre à pleurer. J’entends les
cris de Réhyma provenir de la chambre de Grâce car elle veut sortir de
la chambre. Ma femme est partie. Mon épouse est morte.