Trois heures après le départ de ma zélée de copine, je n’arrivais pas à dormir. Il était une heure du matin. L’idée que Jessica soit rentrée avec un sac appartenant à une fille morte ne me rassurait pas. L’insomnie aidant, je pris le temps de boucler la lecture de mon bouquin de science po, en me demandant bien pourquoi fallait-il qu’une chose pareille m’arrive à moi. Je n’avais rien avoir avec cette histoire. Je ne connaissais même pas cette fille. Il fallait donc que je m’en débarrasse en allant tout raconter au recteur. Mais allait-il me croire ? Je n’en savais rien. Il fallait donc que j’essaie. C’était le seul moyen. Épuisé, je me levai, pris une bouteille de lait au frigo et allumai la télévision. Je n’avais pas regardé les informations de toute la journée. Et justement, le flash d’information sur la RTG 1 passait au même moment. L’on y parla de très peu sujets. Pas grand-chose à se mettre sous la dent. L’agenda du président. Les prouesses de son parti politique et quelques faits divers. Pourtant, avant de clore l’édition d’information, le présentateur du JT annonça la nouvelle qu’inconsciemment j’attendais depuis une heure. « Le dépouille d’une étudiante a été découverte ce matin au Pavillon G de l’Université Publique du Gabon. Une découverte macabre qui a plongé les étudiants de ladite université dans une psychose sans nom. La victime a été identifiée comme Rhianne Abessolo une jeune femme ayant récemment soutenu son master en Sciences de l’environnement. Ces condisciples qui la décrivent comme une étudiante brillante, discrète et sans histoire n’arrivent toujours pas à croire qu’elle soit décédée. La police judiciaire a ouvert une enquête pour élucider les circonstances de cette mort mystérieuse. Nous y reviendrons au cours de nos prochaines éditions d’informations. » La première chaîne de télévision afficha alors la photo de la victime. Un petit carré s’afficha à l’angle droit de l’écran. Une jeune femme souriante y apparut. Mon cœur se mit à battre très fort. La victime heureuse comme un nouveau-né arborait un fier sourire. Ses yeux étaient pleins de vie. Qu’elle était belle ! C’était le genre de femmes qui ne passait pas inaperçu, comme le fait que la photo affichée à l’écran de mon téléviseur était en fait celle de ma belle inconnue. Ma belle inconnue et Rhianne Abessolo étaient identiques. Je me pinçai le bras histoire de me rassurer que je ne dormais pas. Et il était clair que j’étais complètement éveillé. L’étudiante morte et ma belle inconnue semblaient être une seule et même personne. Des frissons me traversèrent le corps tout entier. Comment était-ce possible ? Seul dans ma chambre, qui semblait de plus en plus froide, je n’arrivais pas à en croire mes yeux. Je tentai de les fermer, comme pour me rassurer que ce n’était qu’un mauvais rêve. Je les rouvris, mais rien n’avait changé. C’est bien la réalité ! La jeune femme aux lèvres roses et au visage fin ressemblait trait pour trait à la fille que j’avais rencontré plus tôt dans la journée. Elle portait une chainette. Je la reconnus aussitôt. La chainette avec le papillon en diamant. La même que nous avions découvert dans le sac bleu. Rhianne Abessolo avait-elle une jumelle ? Et pourquoi sa jumelle aurait-elle voulu la tuer ? A moins que ce ne fut la même personne. Mais si c’était le cas, comment expliquer notre rencontre de ce soir ? Elle était toute froide… Les lumières clignotantes… L’atmosphère austère dans le couloir… C’était à cause d’elle… J’ai discuté avec un fantôme ! Je sentis le sang s’agiter dans mes veines. L’air s’assombrît autour de moi et soudain, plus rien.