CHAPITRE 9 : PEUR DANS LA RUE
Ecrit par Chrime Kouemo
Denise débrancha l’enceinte Bluetooth, puis fit un signe à ses élèves de la rejoindre. C’était le dernier cours de samedi après-midi. Elle était éreintée et avait hâte de se glisser sous des draps frais après une bonne douche. Les journées de la semaine depuis son retour de Kribi avaient été longues et éprouvantes. Elle avait commencé à travailler les chorégraphies du spectacle avec Shana, Elsie et Billie. Et comme à chaque fois qu’elle débutait un projet, les idées de pas et d’enchaînement envahissaient son esprit, ne lui laissant aucun répit même pendant ses heures de sommeil. Elle s’éveillait parfois en pleine nuit à cause d’une inspiration soudaine.
En parallèle, elle travaillait avec Conrad, un informaticien et ami d’Amandine, pour la création de son site internet. Plus tard, elle prévoyait de mettre en place une application payante pour du coaching personnalisé et des cours à la demande. Au cours de la semaine, ils avaient eu plusieurs réunions pour l’aider à déterminer les visuels et les fonctionnalités qu’elle attendait de son site. Le jeune homme était assez pointilleux et ne lésinait sur aucun détail. Leurs entrevues bien que constructives avaient été donc pour le moins harassantes.
Son état de fébrilité s’était accentué après le scandale qu’était venu faire le mari de Danielle à son cours du mercredi. Elle revoyait les yeux apeurés de son élève quand il l’avait attrapée par les cheveux et projetée sans ménagement contre la rambarde. Avec l’aide de ses autres élèves, elle avait secouru la pauvre Danielle. Un échange houleux s’en était suivi entre elle et le très gradé lieutenant colonel Abessolo. Denise n’avait pas voulu envenimé la situation, mais cela avait été plus fort qu’elle. Il n’y avait rien de plus lâche que l’usage de la force pour faire entendre son point de vue.
— C’est donc à cela que vous servent vos galons ? À violenter votre femme parce qu’adulte de son état, elle assiste à des cours de bordellerie selon vous ? Avait-elle lancé en pointant un doigt dédaigneux vers lui.
— Mêle-toi de ce qui te regarde, sale pute ! Avait-il éructé. Danielle, monte dans la voiture si tu ne veux pas avoir plus de problèmes à la maison, avait-il ajouté en se penchant pour adresser un regard menaçant à sa femme.
Denise avait jeté un coup d’oeil à Danielle qui continuait de trembler de tous ses membres. Une frayeur sans nom se lisait dans ses prunelles luisantes de pleurs contenus.
— Elle n’ira nulle part avec vous, avait t-elle alors répliqué au lieutenant colonel. Remballez vos galons et aller jouer au commandant ailleurs.
Telle une furie, le mari de Danielle avait allongé le pas vers elle. Instinctivement, elle avait reculé. Ses élèves avaient hurlé, ameutant les passants et voisins. Deux hommes l’avaient retenu avant qu’il ne fondît sur elle.
— Vous ne savez pas qui je suis ! avait-il hurlé tout en se débattant. Je suis le lieutenant colonel Abessolo. Je vous le ferai payer !
Après quelques secondes d’agitation, le mari de Danielle s’était finalement calmé. Les deux hommes l’avaient relâché. Il était remonté dans sa voiture, non sans avoir lancé un regard assassin à sa femme, et avait démarré dans un nuage de poussière.
Danielle s’était installée chez sa sœur en attendant que son mari se calme selon ses dires. Elle craignait pour ses enfants restés seuls avec avec leur père. Denise avait pris de ses nouvelles plusieurs fois par jour, mais depuis hier soir, Danielle n’avait plus répondu à ses appels et messages. Elle n’avait pas voulu s’inquiéter sur le coup, mais après avoir consulté son téléphone à la fin de la séance quelques minutes plus tôt, elle commençait à se faire un sang d’encre.
Elle chassa les mauvaises pensées qui l’assaillaient et se tourna vers ses élèves.
— Les filles, s’il vous plaît, tout le monde en noir samedi prochain. On aura un tournage vidéo et un shooting photos pour le lancement du site internet.
Plusieurs d’entre elles hochèrent la tête.
— Pareil pour les chaussures ? demanda l’une d’elles.
— Si vous pouvez bien sûr. Et dans la mesure du possible également, prenez des talons aiguille plutôt, ajouta Denise.
La salle était à présent vide. Denise fit un dernier tour dans les vestiaires pour s’assurer qu’elle n’avait rien oublié, puis ferma la porte.
La nuit était tombée, et la lueur du réverbère éclairait chichement le parvis du petit immeuble qui abritait la salle de danse, laissant les bosquets qui entouraient la bâtisse plongés dans la pénombre. Dans la rue calme et paisible, un couple marchait tranquillement main dans la main.
Denise rejoignit le trottoir, le regard à l’affût des taxis qui passaient. Elle espérait qu’elle en trouverait un assez rapidement. Elle avait un peu perdu l’habitude de prendre un taxi pour rentrer chez elle; c’était Armelle qui la raccompagnait systématiquement depuis plusieurs semaines maintenant. Dommage pour elle aujourd’hui, son amie était retenue au chevet de son fils Stan qui souffrait d’une varicelle sévère. Avec l’état d’épuisement qui était le sien, cela n’aurait pas été de refus de se faire conduire.
Elle héla deux ou trois taxis, mais ceux-ci ne daignèrent même pas s’arrêter. Il fallait peut-être qu’elle remonte vers le carrefour Bastos qui se trouvait à environ sept cent mètres de là; elle aurait certainement plus de chance là-bas. Rajustant la lanière de son sac sur son épaule, Denise se mit à marcher en direction du carrefour.
La brise de ce début de soirée du mois d’août était légèrement fraîche et faisait voleter les feuilles des arbres alentour. La rumeur des snack-bars animés situés plus haut sur le carrefour lui parvenaient dans un bruit assourdi.
Des taxis passèrent encore à sa hauteur, mais ils ne s’arrêtèrent pas non plus. L’aboiement d’un chien alors qu’elle évoluait à la hauteur d’un grand portail métallique noir la fit sursauter. Le coeur battant, elle accéléra le pas. Deux pâtés de maisons plus loin, un gardien dans sa guérite lui adressa un sourire à son passage. De son visage masqué par la pénombre, elle ne voyait que ses yeux et ses dents. Un étrange frisson lui parcourut l’échine. Elle détourna le visage sans répondre et poursuivit son chemin. Vivement qu’elle trouve un taxi au plus vite. Elle ressentait une étrange sensation et elle ne savait pas à quoi cela était dû. Une forte envie de se retourner s’empara d’elle, mais elle n’en fit rien. Elle avait vraiment besoin de se reposer.
Parvenue au carrefour Bastos, son appréhension baissa quelque peu, les terrasses étaient remplies comme il se devait pour un samedi soir. Une minute plus tard, elle s’engouffrait enfin dans un taxi.
Maugréant, Denise déposa son sac de sport à ses pieds. Ses clés avaient encore eu la bonne idée de se ficher tout au fond de son sac cabas. Elle fut un instant tentée de renverser le contenu de son sac au sol pour simplifier le processus, mais se retint au dernier moment. Enfin, ses doigts effleurèrent le métal froid de ses clés. Elle allait enfin pouvoir être tranquille chez elle.
Elle enfonçait la clé dans la serrure quand un bruit de pas derrière elle la fit se retourner. Avant qu’elle ne comprenne ce qu’il lui arrivait, une grande main s’abattit avec violence sur son visage. Elle poussa un cri de douleur et lâcha ses clés qui s’échouèrent sur le parterre de fleurs à droite du portillon. Sonnée, elle porta les mains sur son visage. Un autre coup l’atteignit en plein plexus solaire. Elle s’écroula à genoux, le souffle coupé, la douleur irradiant dans tout son corps. Avec effort, elle ouvrit les yeux et aperçut le bas d’un pantalon jean et de grosses bottes noires avec crampons.
Elle n’avait pas encore retrouvé son souffle qu’elle se sentit violemment tirée par les cheveux. Elle hurla. Une grosse main se posa devant sa bouche la bâillonnant et obstruant partiellement ses narines. Une terreur sans nom s’empara d’elle.
— Tais-toi ! Ordonna une voix d’homme caverneuse. Ça t’apprendra à t’occuper de ce qui te regarde.
Des larmes s’échappèrent de ses yeux tandis qu’elle se débattait. L’homme l’avait fait se redresser et la maintenait fermement contre son torse de son bras encerclant sa taille. Sa main la bâillonnait toujours et l’odeur de sueur et de fumée de cigarette qui s’en dégageait lui donna des hauts le cœur. Le cœur cognant furieusement contre sa poitrine, elle continua de s’agiter du mieux qu’elle put. L’homme était grand, costaud et avait l’air solidement campé sur ses jambes. Il ne semblait pas le moins du monde déstabilisé par les coups de pied qu’elle tentait de lui donner.
Il l’entraîna vers une voiture garée dans un coin mal éclairé dans la rue en contrebas. Un coup d’œil lui permit de constater que celle-ci était déserte. Personne ne viendrait à son secours. Les battements de son coeur redoublèrent. Elle essaya tant bien que mal de contenir la panique qui montait en elle. Il lui fallait trouver le moyen de le déstabiliser et de gagner un peu de temps.
Une idée lui vint. D’un coup, elle cessa de se débattre et se laissa couler contre lui comme un poids mort. Il trébucha et leurs deux corps titubèrent un instant. Poussant un grognement, il mit un certain temps à retrouver son équilibre.
— Tu te crois maligne hein ? Attends, tu vas voir, grogna t-il.
Sa prise autour d’elle se raffermit et il la souleva du sol pour la jeter par dessus son épaule.
Sa bouche à présent libérée, Denise cria de toutes forces tout en agitant ses pieds et ses mains contre le corps dur et musculeux de son agresseur.
Il la reposa brusquement par terre, puis lui décocha une gifle qui fit vriller ses mâchoires et s’entrechoquer ses dents. Complètement assommée, elle chancela en arrière avant d’échoir lourdement sur les fesses.
— Tu vas la boucler maintenant ! Encore un cri et tu vas me sentir ! Menaça le type en lui présentant son couteau devant le visage.
Elle ravala le hurlement d’effroi qui remontait dans sa gorge et leva les yeux. La silhouette haute et imposante de l’inconnu se dressait devant elle, masquant la faible lueur que projetait le plafonnier du portillon de la résidence. Sa casquette vissée bas sur son crâne ne lui permettait pas de distinguer ses yeux. Seules ses narines béantes et le rictus mauvais qui étirait ses lèvres étaient visibles.
— Je... J’ai de l'argent dans mon sac à main et aussi dans ma chambre... Je peux tout vous donner, articula t-elle d'une voix chevrotante.
— Tais-toi ! Maintenant, lève-toi et marche vers la voiture là bas, ordonna t-il, la lame luisante de son couteau toujours pointée vers elle.
Les jambes flageolantes, elle se mit péniblement debout et se mit en marche vers la voiture.
***
Simon allongea sa foulée en abordant l’angle de la rue de la résidence. Ses poumons se consumaient littéralement après plus d’une heure de course acharnée. La journée de travail avait été longue et stressante et il aspirait à se libérer de toutes les tensions accumulées au fil des dernières heures. La rue était paisible. Seuls ses pas martelant le macadam venaient en troubler la quiétude. C’était l’une des raisons pour lesquelles il adorait son quartier. Avec l’urbanisation galopante et mal encadrée, la ville de Yaoundé comptait de moins en moins de véritables zones résidentielles. De nombreux quartiers étaient envahis par des bars et autres petits commerces en tout genre.
Deux silhouettes mouvantes captèrent son attention alors qu’il débouchait sur sa rue. La distance à laquelle il se trouvait ne lui permettait pas de distinguer les traits de leur visage, mais il reconnut les longues tresses couleur acajou de Denise qui pendaient dans son dos.
Le couple sursauta à son approche et se retourna. En une fraction de seconde, il remarqua l’air terrorisé de Denise et le couteau que l’homme tenait dans sa main. Il s’arrêta brusquement, tous ses sens en alerte.
— Hé ! Qu’est-ce que...
Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Denise hurla. L’homme la poussa au sol et s’élança vers une voiture garée dix mètres plus loin. Simon se précipita vers la jeune femme et l’attira avec lui sur le bas côté de la route alors que le rugissement du moteur déchirait le silence et que le véhicule s’ébranlait à quelques mètres d’eux dans un crissement de pneus.
— Ça va ? Demanda t-il à Denise quelques secondes plus tard.
Elle hocha la tête sans mot dire. Il la sentait trembler contre lui.
— Il t’a fait du mal ?
— Il m’a frappée au visage et ... au ventre.
Simon tourna sa tête vers lui, scrutant les traits de son visage. Une goutte de sang perlait sur sa lèvre inférieure. Délicatement, il l’essuya à l’aide de son pouce.
— Viens, on va rentrer.
***
— Ca va aller ?
Denise leva les yeux vers Simon et prit la tasse de thé fumante qu’il lui tendait.
— Oui… enfin, je crois.
Elle trempa ses lèvres dans le liquide brûlant dans l’espoir qu’il la réchaufferait. Malgré la longue douche tiède qu’elle avait prise, elle se sentait glacée jusque dans ses os. Elle l’avait échappé belle. Que serait-il advenu d’elle si Simon n’était pas arrivé ? Un frisson glacé lui parcourut l’échine et elle sentit à nouveau les larmes lui monter aux yeux.
Simon prit place près d’elle sur le canapé et l’entoura d’un de ses bras.
— N’y pense plus. C’est passé. Tu es en sécurité maintenant.
— Hum… oui, tu as raison. Merci d’avoir été là… murmura t-elle tout bas avant que sa voix se brise et qu’elle n’éclate en sanglots bruyants.
Simon la serra contre lui et elle se laissa aller à pleurer tout son soul contre son tee-shirt. Son odeur familière de mâle mêlée de sueur la rassura.
Plusieurs minutes plus tard, elle s’était enfin calmée. Un détail lui revint alors en mémoire.
— Il a dit quelque chose quand il m’a frappée la première fois.
— Quoi ?
— Que cela m’apprendra à m’occuper des choses qui ne me regardent pas.
— Curieux… commenta Simon les sourcils froncés. Tu penses l’avoir déjà rencontré ?
— Non, je ne crois pas. Mais en même temps, je n’ai pas bien vu son visage à cause de sa casquette.
— J’ai relevé sa plaque d’immatriculation. On la signalera quand tu iras porter plainte.
— OK, même si je ne suis pas sûre que ça aboutisse à quelque chose, soupira t-elle.
— Ce sera toujours mieux que de rester les bras croisés et ne rien faire et puis, j’ai un contact dans la police qui pourra nous aider.
— Merci, Simon. Je ne sais même pas comment te remercier…
— Tu n’as pas à me remercier, c’est normal.
Il se dégagea de son étreinte et se leva.
— Je vais y aller. S’il y a quoi que ce soit tu m’appelles, d’accord ?
Elle ne voulait pas qu’il s’en aille. Elle craignait de se retrouver seule, mais elle ne pouvait décemment pas le retenir.
Simon tenait à présent la poignée de la porte. Elle prit une inspiration pour se donner du courage. Il lui fit un petit signe de la tête puis referma doucement la porte.
Denise tourna la clé à double tour, s’efforçant de chasser le tremblement qui s’était emparé de ses mains. Le silence des lieux que seul le tic tac de la grande horloge accroché au dessus de la télé venait rompre, l’envahit. Elle se rassit dans son canapé, replia ses jambes sous elle et appuya sur la télécommande pour allumer la télé.
Sans aucune conviction, elle zappa d’un programme à un autre. Il était à peine 22 h. La nuit s’annonçait longue. Elle finit par arrêter son choix sur « Danse avec les stars ».
Denise s’éveilla en sursaut, trempée de sueur et le cœur tambourinant dans sa poitrine. Elle tendit l’oreille à l’affût du moindre bruit. Son regard tomba sur la grande baie vitrée qui donnait sur le balcon. Le rideau n’était pas complètement tiré et le noir de la nuit se reflétait sur la vitre. Elle se leva précipitamment pour rabattre complètement les rideaux. Elle n’était pas du genre peureux, mais les derniers événements l’avaient secouée plus que de raison. Alors qu’elle repassait devant le canapé pour s’y installer à nouveau, son pied accrocha le bout du plaid qui pendait sur l’accoudoir. Le bout du tissu s’enchevêtra sur les pieds de la table d’appoint et la tasse qui s’y trouvait tomba en se brisant au sol. Elle poussa un cri de frayeur. Son cœur s’affola de nouveau. Elle se rassit, tremblant de tous ses membres. Les yeux fermés, elle essayait de se raisonner mais les images du début de la soirée ne cessaient de défiler dans son esprit. Des larmes chaudes et brûlantes mouillèrent ses joues. Que cherchait l’homme qui l’avait agressée ? Il n’avait même pas essayé de lui prendre de l’argent. Qui pouvait lui en vouloir au point de l’attaquer de la sorte ? Elle n’avait pas le moindre soupçon de réponse à toutes ces questions.
Toujours tremblante, elle s’empara de son téléphone sur la table, elle composa le numéro de Simon.
— J’ai peur Simon... Je n’arrive pas à dormir...
— J’arrive tout de suite.
— Je peux dormir sur le canapé, je suis beaucoup plus petite que toi, proposa Denise pendant qu’elle y étalait un drap.
— Ne t’en fais pas pour ça. C’est toi qui dois te reposer après toutes ces émotions.
Elle le remercia d’un sourire, puis sur un dernier signe de la main rejoignit sa chambre. La lampe de chevet éclairait d’une lumière douce la pièce décorée dans des tons crème et rose clair. Après avoir revêtu sa nuisette, elle se glissa sous les draps frais et ferma les yeux.
***
— C’est encore elle ? Demanda Denise en allumant la lampe de chevet.
Oswald se tourna vers elle, le regard ensommeillé.
— Oui c’est encore Misty.
— Décroche et demande lui de nous laisser tranquille.
— Je n’en ai pas envie. Elle veut encore me supplier d’arrêter la procédure de divorce.
Denise s’étendit sur les oreillers en soupirant. Elle avait hâte que ce divorce soit enfin prononcé et qu’Oswald et elle puissent passer à une autre étape dans leur histoire. Elle n’en pouvait plus de ces drames que leur faisait Misty, la future ex-femme d’Oswald, à tout bout de champ.
Entre les scandales devant les locaux de leur compagnie de danse, les injures écrites aux marqueurs sur sa boîte aux lettres, la tentative d’intimidation de ses copines et elle à sa sortie d’un club, Denise en avait bavé. À plusieurs reprises, elle avait rompu avec Oswald, lui demandant de clôturer son histoire avec sa compagne et mère de ses enfants, mais elle-même n’avait jamais pu se tenir à ses propres règles. Oswald était comme une drogue pour elle et ce, depuis leur rencontre dans une troupe de comédie musicale; elle ne parvenait jamais à se tenir à l’écart de lui pendant longtemps. Il lui avait menti sur son statut matrimonial au début de leur relation et quand elle s’en était rendu compte, elle était déjà pieds et poings liés dans les abîmes de son cœur. Elle avait continué à vivre à fond son histoire avec lui, fauchant au passage ses propres principes.
Deux ans après le début de leur relation tumultueuse, le divorce allait être officiellement prononcé sous une semaine. Oswald et elle pourraient enfin vivre leur passion paisiblement.
— Misty, qu’est ce que tu me veux encore ? Lança Oswald en décrochant le téléphone.
Denise le regarda se masser l’arête du nez, signe d’agacement chez lui.
— Je te l’ai dit et répété : je ne changerai pas d’avis. Tes pleurs et gémissements n’y feront rien ! Toi et moi, c’est fini !
Subitement l’expression d’Oswald changea. Il se redressa sur le lit et appuya sur la touche haut parleur du téléphone.
— Ne fais pas ça, dit-il d’un ton qui s’était fait suppliant.
— Et pourquoi ? Tu ne m’aimes plus... Ma vie n’a plus de sens... Je préfère m’en aller.
Misty sanglotait.
Les yeux de Denise s’écarquillèrent tandis qu’elle comprenait le sens des propos de Misty.
— Non, Misty, ne fais pas ça. Pense à nos enfants !
— Ça... ça ne suffit pas...
— Je... Attends !
Le bruit d’une détonation retentit dans le combiné.
— Misty ! Hurla Oswald.