CHAPITRE II : EN AVANT L'AVENTURE!
Ecrit par Chroniques Femmes Fatales
Le père de Poupina se remit à pleurer de plus belle. Elle se sentit coupable de ne pas avoir été honnête avec eux, ils avaient raison, ils étaient une famille et se devaient de tout partager.
Une colère gronda en elle, non contre ses parents ou elle même, juste contre la vie. Elle en avait assez que son monde ne soit que tristesse, elle ne voulait plus voir ses parents pleurer à cause d’elle.
Un détail lui revint cependant. Son père avait parlé de mystérieux yeux verts, et combien de chance que cela ne soit qu’une coïncidence? Elle en doutait fortement. Ils étaient apparus au moment où elle avait souhaité être heureuse, et juste après elle avait eu sa crise de cauchemars. Elle ne comprenait pas. Les seuls capables de lui répondre n’étaient autre que les religieuses, ainsi que le père Daniel, le curé de la paroisse de Zoetele où se trouvait le couvent des sœurs.
André qui au début n’avait pas compris pourquoi sa fille voulait à tout prix passer le clair de son temps là bas, comprit enfin les raisons de ce choix: elle voulait leur épargner ce spectacle! Comment pouvait-il se le pardonner? Pendant des années sa fille avait lutté contre des forces qui dépassaient l’entendement et il n’avait même pas soupçonner cela!
- Et que faites-vous avec des sœurs quand tes rêves apparaissent ? demanda cristal, remise de ses émotions.
- Nous prions. Et le père Daniel m’impose des mains, afin d’éloigner tout esprit malin qui se trouverait encore dans les environs.
- Alors, nous allons va prier, conclut André en se mettant à genoux près du lit de sa fille.
Tout le monde l’imita, et en chef de famille, il fit ce qu’il ne faisait plus depuis longtemps. Il confia à Dieu sa fille, sa famille, lui demanda d’éloigner tout esprit mauvais, ce démon qui la tourmentait. Poupina, les laissa faire, de toutes façons, quelles genres de prières pouvaient-ils adresser à Dieu que les soeurs, elle ainsi que le père Daniel n’avaient fait? Et cela n’avait pas empêché les cauchemars de continuer et de redoubler d’intensité! Oui, elle était devenue sceptique, et il y avait de quoi. Quand elle repensait à ce que lui avait dit son père, elle avait l’impression d’être au milieu de quelque chose qui avait commencé bien avant sa naissance. Un plan minutieusement conçu pour qu’elle se retrouve en enfer!
Mais pourquoi ?
Qu’avait-elle pu faire à Dieu ou à ce démon? Etaient-ce les fautes de sa famille qu’elle devait payer? Pourquoi elle!
Il fallait qu’elle aille à Zoétélé, conclut-elle en se rendant compte que la prière venait de s’achever. Elle eut juste le temps de faire le signe de croix que son père se racla la gorge, signe qu’il avait quelque chose de grave à dire.
- J’ai réfléchi, et je crois que le mieux serait de partir faire un séjour chez les sœurs, elles te diront ce qu’il faut faire, ici, on ne peut rien faire sauf prier avec toi, mais elles sont plus qualifiées. Si tu veux et si elles sont d’accord, on programme le voyage pour demain ou après demain, j’irai avec toi, je dois impérativement parler à la soeur Faustine!
Rien qu’à l’idée de voir son père discuter seul avec la soeur Faustine lui donna des frissons; elle allait en baver après le départ de son père surtout que la soeur Faustine croyait vraiment que ses parents étaient au courant.
- Tien, la pluie vient juste de finir, remarqua Jean.
Elle n’avait même pas remarqué qu’il pleuvait…
***
Le couvent des sœurs de la Sainte Trinité n’était pas proprement dit situé dans la ville de Zoétélé, mais à deux kilomètres de là. Il était construit sur le même site que la paroisse de la Sainte Trinité, et regroupait l’école maternelle, primaire, ainsi le collège technique. Un internat qui hébergeait uniquement des filles se trouvait à quelques pas du collège. Poupina avait passé toute son enfance dans ses lieux. Elle se souvenait très peu des moments passés avec ses camarades, tellement chacun de ses instants libres, elle les passait en compagnie des religieuses. Ce que ses camarades ne comprenaient pas, ce qui faisait d’elle une personne bizarre, et elles avaient presque peur de lui parler croyant que leurs mots seraient reportés aux soeurs. Poupina ne leur en voulait pas, et trouvait au contraire cela normal. Elles n’avaient rien à se dire et n’avaient pas les mêmes centres d'intérêt.
Son père et elle arrivèrent dans l’après-midi, malheureusement ils trouvèrent que la soeur Faustine avait fait un déplacement pour pour la capitale. Quelle ironie du sort, pensa son père, surtout qu’ils en revenaient! Selon la soeur chargée de l'accueil, soeur Faustine devait récupérer des jeunes à l’aéroport et ne serait de retour que très tard ou le lendemain. C’était fâcheux pour le père de Poupina qui était de service le lendemain matin. Non pas qu’il y ait une grande distance entre Zoétélé et la capital, mais il pensait pouvoir faire le trajet aller-retour sans problème. Il décida de rentrer après avoir pris rendez-vous avec la soeur Faustine par téléphone, pour la semaine suivante.
Poupina regarda son père rentrer, se demandant de quoi ils allaient discuter la soeur Faustine et lui. D’elle, bien évidemment!
Seule, et à présent dans la chambre du parloir qu’elle occupait pendant ses séjours durant les vacances, Poupina ne cessa de repenser à tout ce qui lui était arrivé, une question ne cessait de refaire surface: avait-elle vraiment bien fait de venir, ou c’était la volonté de quelqu’un d’autre?
Elle avait hâte de discuter avec celle qui la comprenait le mieux, malgré qu’elle serait contrariée du mensonge de Poupina, celle-ci était sûre qu’elle lui donnerait des réponses adéquates, du moins, parviendrait à calmer la peur qui l’habitait.
Elle avait bien voulu en savoir plus sur le déplacement de la soeur, mais presque toutes ne savaient presque rien, c’était juste un groupe de jeunes selon certaines qui venaient faire “on ne sait quoi”. Elle passa le reste de la soirée à dévorer les livres posés sur sa table de chevet. Elle y trouvait toujours des livres, toutes ici connaissaient son goût pour la lecture, et quand l’une d’elles avait un livre, elle venait le poser dans sa chambre. C’était ce genre de petites attentions qui faisaient en sorte qu’elle se sente ici chez elle, les unes comme les autres; étaient attentionnées et elle n’avait pas l’impression d’être étouffée en même temps. Même son fauteuil avait une place spéciale.
Très tard dans la nuit, elle fut réveillée par de petits coups frappés sur sa porte. apparemment, elle s’était endormie en pleine lecture, et il se faisait trop tard. La sœur Faustine apparut quelques secondes plus tard, toute souriante. Elle était grande de taille, toute sèche, au premier abord, on aurait dit un homme, et sa voix grave n’arrangeait rien, mais pourtant, il y avait cette bienveillance dans son regard, et quand elle souriait, son visage se transformait totalement, chose qu’elle faisait rarement, parce qu’il fallait être intransigeante et ferme avec certains parents qui refusaient de terminer la pension scolaire de leurs filles, et aussi avec certaines pensionnaires qui n’arrivaient pas à calmer leurs hormones. Pourtant Poupina savait que derrière cette image, se cachait la plus gentille des femmes, elle avait accueillie Poupina à bras ouvert comme sa propre fille, et depuis elles étaient très liées. Et c’était une fine psychologue, elle savait ce que les autres pensaient, bien avant que cela ne franchisse les lèvres. Derrière ses lunettes, se cachait aussi une grande observatrice de la vie, du monde.
- J’espère que je ne te réveille, fit-elle en prenant place sur la chaise libre près de la table. Si c’est le cas, je peux revenir le lendemain matin.
- Non, non, mentit Poupina, cela me fait plaisir de vous revoir, ajouta-t-elle ravie ravie de revoir son amie.
- Je viens juste d’arriver avec des jeunes volontaires d’une organisation, comme il se fait tard, tu les verras demain. Je suis sûre que vous vous entendrez bien, ils sont très gentils, tout comme toi.
- Je l’espère bien.
La sœur Faustine ôta ses lunettes, et les essuya, elle n’aimait pas aller par quatre chemins.
- J’avoue que l’appel de ton père m’a un peu étonné, on aurait dit qu’il ne savait pas que tu avais des cauchemars. Tu n’aurais pas par hasard oublié de le lui dire ?
Son regard déstabilisa Poupina, elle s’attendait bien à cette question, la meilleure façon de répondre était d’être juste honnête.
- Je n’ai pas voulu le leur dire ma sœur…
- Et pourquoi cela ?
- Parce que je me sens déjà comme un fardeau, je me sens déjà assez coupable d’attirer autant d’attention sur moi, alors ajouter les démons et autres, était au-dessus de mes forces. J’ai l’impression d’être un boulet qu’ils sont obligés de traîner avec eux. Je ne leur cause que peine et soucis.
Poupina avait parlé comme si elle était seule dans sa chambre, mais elle savait bien que la religieuse écoutait chacun de ses mots.
- Tu vas faire quelles études après ton Bac ? demanda la religieuse en changeant subitement de sujet.
Elle ne répondit pas, elle prit le temps de choisir sa réponse, la sœur Faustine lisait en elle.
- Pour dire vrai, je ne sais pas, j’ai peur, très peur de ce qui m’attend à l’université.
- Explique mieux s’il te plaît…
- J’ai peur de grandir, de me retrouver face à moi-même, cela a l’air absurde, mais je ne sais pas ce que je ferai de ma vie loin d’ici. En même dans, je me dis que je dois avancer, devenir cette grande fille. Vous savez, si je me retrouve devant un impasse, je ne saurai même pas ce que je devrais faire. Je sais pourtant aussi que je devrais cesser d’être cette jeune fille rêveuse…
- Continues…
- De plus, je sais le nombre de responsabilités que cela implique d’entrer à l’université…
- Et toi tu n’es pas prête face à tant de responsabilité c’est ça ?
La sœur avait parlé d’un ton si calme qui inquiéta Poupina, elle connaissait bien la sœur Faustine, et s’attendait à recevoir une leçon de morale.
- Pas que je n’ai pas envie de grandir ma sœur, juste que l’inconnu m’effraie. Je pense que j’aurais aimé avoir un peu plus de temps pour mieux préparer mon futur, essaya-t-elle de justifier tant bien que mal devant le regard perçant de la religieuse.
Celui-ci brillait de colère contenu.
- J’ai l’impression Poupina que cette situation te plaît apparemment, rejeter les autres parce que tu te crois tout le temps rejetée. Te cacher derrière ton malheur, et jouer ensuite à celle qui n’a besoin de personne. Tu as peur, c’est normal, tout le monde un jour ou l’autre éprouve ce sentiment. Tu es une fille très intelligente, tu as eu ton examen avec mention, tu comprends ce que cela signifie ? Que tu peux déposer ton dossier dans n’importe quelle université, tu seras reçue.
Elle se tut un instant et regarda Poupina, les larmes perlaient sur les yeux de celle-ci.
- Je…
- Non, ne dis rien. Je croyais que tu avais la tête sur les épaules, tu es hantée par ton passé, pourtant, ce qu’il faut faire, c’est vivre ta propre vie et rien d’autre. Pense à ton avenir et le plus important, vois le monde, les jeunes de ton âge.
Son regard s’adoucit en se posant sur elle. Elle essuya affectueusement la larme qui coulait le long de la joue de Poupina.
- Tu sais que je veux ton bien n’est-ce pas ?
Poupina fit oui de la tête, et essuya le reste des larmes.
- Tu sais pourquoi je suis partie à l’aéroport ? demanda la sœur Marie.
- J’ai cru entendre que vous aviez des gens à récupérer à l’aéroport…
- Ce sont des jeunes qui viennent passer les vacances d’été au pays. Ils font partis d’une association caritative, qui les envoie dans le monde entier chaque vacances, construire et rénover des lieux qui sont utiles à des populations dans le besoin.
- Elle semble grande cette association, remarqua Poupina revenue de ses émotions.
- En effet. Ils vont dans le monde entier, ils sont plus de dix milles, je ne sais pas comment cela est possible, mais je t’assure que je les avais vu en œuvre. Cette année, on a la chance d’avoir certains d’entre eux ici au Cameroun. Tu connais l’Abbaye de la Miséricorde Divine ?
- Evidemment ! s’exclama Poupina. C’est l’un de mes endroits préférés.
Elle se souvenait avoir fait une recollection avec ses camarades de classe trois ans plutôt, elle ne s’était jamais sentie si bien dans un lieu.
- Tu te souviens de l’état dans lequel leur jardin botanique se trouve ? Il tombe en ruine, l’école date de la colonisation, le dispensaire ne contient que du pur essentiel, et cela n’est pas assez pour la santé de la population locale et ses environs.
Poupina n’avait pas oublié cet endroit qui était pour elle le plus beau qu’elle ait vu de toute sa vie, mais devenait avouer qu’il tombait en ruine. C’était un endroit regorgeant d’histoire, du pays, les traces de la colonisations et des premiers missionnaires y étaient encore, sans oublier le jardin qui à lui seul valait le déplacement. Toute une forêt qui s’était mise en harmonie pour créer un lieu paradisiaque. La nature à l’état sauvage, pur, des sentiers tracés par la “main de Dieu” comme le lui avait dit un des moines de l’abbaye. Poupina se souvint l’avoir appelé “Jardin d’Eden”.
Et savoir qu’un si bel endroit tombait en ruine, lui fit de la peine.
- Je croyais qu’ils prévoyaient une rénovation. après tout, ils ont des chambres d’hôtes pour ceux qu’ils veulent se reposer et méditer.
- Tu as une très bonne mémoire, ils devaient rénover les lieux en effet, seulement, l’argent que rapporte les chambres d’hôtes, n’est pas assez. Les visiteurs se font rares, et le travail à abattre est tellement énorme qu’il faut du temps et beaucoup de mains d’oeuvre que les moines ne peuvent pas payer. Mais ces bénévoles veulent le reconstruire, le remettre en état afin de mieux le faire revivre, avec l’aide de la population locale, bien évidemment.
- Je trouve cela très gentil, ils font du bon travail je trouve. Je pari qu’ils sont nombreux à être venus au Cameroun.
- Tu pourras le constater par toi-même, rétorqua simplement la soeur faustine en se levant. Je t’ai inscrit comme bénévole, tu travailleras avec eux pendant trois mois. C’est ton cadeau pour avoir réussi.
La nuit se passa lentement au goût de Poupina. Elle n’avait cessé de se retourner sur sa couche, se demandant ce qui avait bien pu se passer dans la tête de la religieuse! Franchement, comme cadeau, elle avait connu mieux et pouvait bien se passer de celui-ci. Bien évidemment, elle pouvait refuser, trouver toutes les raisons pour ne pas y aller, mais elle voyait bien que c'était une sorte de test et surtout un défis que lui lançait son amie: survivre durant trois mois avec des inconnus, et en fauteuil.
A six heures, les cloches de l'Église se mirent à sonner, signale de la messe de du matin. Elle aimait entendre le son des cloches percer le silence du matin, c’était apaisant. après s’être apprêtée, elle sortit de sa chambre pour l’église, en respirant l’air frais et pur du matin. La paroisse se trouvait à quelques pas du couvent, et malgré le noir qui s’attardait encore, elle put voir que cela n’avait pas diminué le nombre de fidèles de l’église.
Poupina se dirigea vers son allée habituelle, une petite entrée qui n’avait ni escaliers, ni autre construction empêchant son fauteuil d’entrer. L’église était très grande, elle pouvait abriter plus de deux milles âmes, et les jours de fêtes, c’était le double. Prenant place au fond de la salle, elle se concentra sur la messe qui allait commencer d’un moment à un autre. Elle avait eu le temps de remarquer un groupe d’étrangers assis de l’autre côté de l’église. Presque toute l’assemblée n’avait d’yeux que pour eux. Après la messe, elle décida de ne pas s’éterniser, elle n’était pas vraiment d’humeur à supporter la pluie de félicitations et toutes les familiarités qui allaient suivre. Elle décida de faire un tour à la bibliothèque. De loin, elle vit la soeur Faustine en compagnie des jeunes qu’elle avait aperçu plus tôt dans l’église, ils faisaient sûrement le tour des environs. Quand elle ressortit de la bibliothèque un livre en main, elle retomba sur eux, et cette fois, ils venaient tous vers elle. Elle soupira en silence, et les regarda venir, sans trop savoir la posture prendre
- Bonjour Poupina, salua la religieuse, quand ils furent près d’elle. Bien dormi ?
- Bonjour ma sœur, en effet j’ai bien dormi.
- Je t’ai vue à la messe le matin, je vois que tu as toujours tes bonnes habitudes, là tu te revenais à la bibliothèque je paris.
Poupina sourit, que de répondre, elle tourna son regard vers les autres, ils souriaient gentiment aussi, mais elle voyait bien la curiosité dans leurs regards. Il y avait une jeune métisse, des jumeaux bruns qui se ressemblaient à s’en troubler, et une jeune blonde. Ils étaient jeunes, sûrement la vingtaine. L’un des jumeaux se dirigea vers elle.
- Ta roue est coincée, je vais t’aider.
Avant qu’elle ne dise un mot, il inclina son fauteuil, remettant la roue bien droite, puis il se plaça derrière elle, comme s’ils se connaissaient depuis.
- Moi c’est Jack Cappelli, voilà mon jumeau John, elle c’est Jane Bradford, et la jolie métisse, c’est Christelle Mengue-hanson, dit-il pour les présentations.
Son était français compréhensible, seul son accent latin disait que ce n’était pas sa langue. A s’y méprendre, Mengue était un nom des environs, nota Poupina, ce qui signifiait que...
- Tu te souviens des jeunes dont je te parlais hier soir ? Les voici. Et je crois que tu as noté l’un des noms de famille de Christelle. Sa mère est d’ici, elle a même fait ses études ici, c’était l’une de nos premières pensionnaires, après l’obtention de son diplôme, elle avait voyagé pour les Etats-Unis. Tout comme toi, elle aimait beaucoup le jardin des moines et avait été désolée d’apprendre qu’il tombe en ruine, je pense que c’est de là que vient l’idée du voyage jusqu’ici non?
Christelle sourit, et secoua affirmativement la tête.
- Ma mère a pu arranger avec la secrétaire, et un groupe a été désigné, c’est à dire nous et une bonne cinquantaine d’autres jeunes.
- Il manque un je crois, vous devriez être cinq non ?
- Oui ma sœur, Richard n’est pas avec nous, il est venu plus tôt avec le premier groupe pour l’installation du camps. Et comme c’est le plus âgé de nous tous, il a été désigné comme chef, c’était John qui venait de répondre.
Poupina éclata de rire, ne pouvant pas résister à l’accent horrible de John. La sœur Faustine se tourna vers Poupina, les yeux souriants.
- Il a un accent horrible n’est-ce pas?
Poupina opina de la tête. La soeur Faustine regarda sa montre.
- Je vais vous laisser faire plus ample connaissance, avant votre départ qui est dans trois heures de temps. Vous pouvez prendre votre petit déjeuner et pourrez ainsi vous tenir au parfum de votre aventure et association. Le petit déjeuner sera servi dans la salle à manger du parloir.
Elle s’éloigna le plus rapidement possible en consultant sa montre. Après le départ de sœur Faustine, un silence s’installa, c’était la première fois que Poupina était confrontée à ce genre de situation, elle ne savait pas quoi dire exactement. Ce fut Jane qui brisa le silence.
- Poupina c’est ça ? C’est ton prénom ? En tout cas je le trouve très beau, et original, c’est ma première fois de l’entendre.
- Merci…
- Moi je suis anglaise, et j’ai vingt ans, les jumeaux eux ils sont italiens, ils ont vingt-trois ans, Christelle vient d’avoir vingt-un ans, et toi Poupina ?
- J’ai vingt ans, mais cet été, j’aurai mes vingt et un ans.
- J’espère qu’on va fêter ton anniversaire en colonie, fit Jack avec un sourire, ça fera du bien d’avoir une occasion de fêter, vu le travail qui nous attend.
- Je croyais que c’était une organisation, et non une colonie de vacances.
- Oh tu sais Poupina, cela fait plus de cinq ans que nous passons toutes nos vacances ensemble, à faire du bénévolat, c’est devenu pour nous une sorte de colonie de vacances, l’utile à l’agréable, c’est ce qu’on dit en français non ?
Le français de Christelle était impeccable remarqua Poupina, elle n’avait aucune accent.
- Je vois, et c’est quoi au juste votre but ? Je veux dire, est-ce que vous vous êtes levés un beau matin, disant vouloir aider les plus nécessiteux ? Pour des jeunes comme vous, je trouve cela courageux de votre part.
- Tu sais, durant l’année scolaire, on organise des tombolas, des soirées de charité, on fait de petites collectes de fond, et quand l’été arrive, on voit ce qu’on a collecté et on décide d’une destination qui aura besoin de nous. Ce n’est pas grand-chose, certes, mais cela aide parfois à acheter des matériaux nécessaire. Cette année, quand ma mère m’a parlé du jardin des moines et de tout ce site qui tombe en ruine, j’ai eu une envie incroyable de venir le visiter sans savoir pourquoi. Comme si j’étais attirée dans ces lieux.
Poupina regarda Christelle sans comprendre.
- Moi aussi, dit chacun des autres jeunes.
- Et qu’avez-vous vu depuis votre arrivée ? demanda Poupina.
- Pas grand-chose, on est arrivés en pleine nuit, on n’a pas eu la chance de voir le paysage camerounais, mais par contre à l’aéroport, on a vu de superbes filles camerounaises.
La ressemblance entre Jack et son frère était vraiment frappante remarqua une fois encore Poupina.
- Les amis, j’ai faim. On peut rester là à faire plus ample connaissance avec Poupina dans le froid du matin, ou alors on continu la discussion devant une bonne tasse de café. Donc qui à faim, nous suivre Poupina et moi.
Sans attendre l’avis des autres, Jack se mit à pousser le fauteuil de Poupina en direction du couvent, suivit du rire des autres. Jane emboîta rapidement le pas et se mit à leur hauteur
- Tu devrais t’y faire, c’est Jack tout craché.
Durant le trajet, Jane ne cessa de parler.
- Cet endroit parait très sympathique, il paraît qu’on appelle cela internat, c’est ici que tu as grandi ? Christelle m’a dit que cela ressemble à une pension, j’ai horreur des pensions de chez nous. Il paraît que c’est trop digide. Tu te rends compte ? Passer toute une journée enfermé, toute une année, moi je ne le supporterais pas…
Christelle éclata de rire, ainsi que John.
- C’est notre Jane, la pipelette. Elle peut parler jusqu'à ce que la nuit tombe, nous sommes habitués.
Ils arrivèrent au réfectoire du parloir, et trouvèrent la table déjà dressée pour le petit déjeuner. Poupina se sentait très à l’aise avec eux, ils la mettaient étrangement en confiance, elle avait l’impression de les connaître. Ils firent plus ample connaissance durant le repas.
- Et votre travail va vous prendre combien de temps ? demanda Poupina.
- Tu veux dire notre travail? corrigea Christelle.
- Tu viens bien avec nous n’est-ce pas ? fit Jane avec une lueur d’espoir dans la voix.
Poupina lisait aussi la même lueur dans les regards des autres.
- Je crois bien, sinon je vais me faire tirer les oreilles par la sœur Faustine, répondit-elle en souriant.
- Pour la durée, Richard va nous le dire quand on va arriver. On nous a parlé de la rénovation du jardin, de la construction des écoles et du dispensaire, et quelques maisons pour les habitants, énonça John.
- Il paraît que le jardin est magnifique, s’émerveilla Jane en déposant sa tasse de café.
- Ah oui, il est très beau, renchérit Poupina. Les fleurs sont magnifiques, les arbres si vieux et semblent