Chapitre XIV

Ecrit par imalado

------ Athan Akué ------

J’ai la rage et j’ai l’impression que tout m’échappe. Depuis que je suis rentré, je ne fais face qu’à des problèmes dans la société, et j’en suis excédé.

-         J’ai du nouveau pour toi…

-         Noel, tu rentres comme une chienne enragée dans ce bureau !

-         J’ai des nouvelles pour toi… Tu m’avais demandé de me renseigner sur la nouvelle collaboratrice ? Voici ce qu’il a trouvé…

Je parcours les documents que Noel m’a remis. Le premier contient les photos de Belinda, dans un appart du centre-ville, selon le dire de l’homme de main, c’est là qu’elle habiterait avec son copain surement, un chirurgien, un certain Jonathan Baron et quelques fois au supermarché. Et sa vie ne s’arrête qu’à ça. Rien d’important. Mais trop parfait pour dire vrai…

Mais le deuxième document attire énormément mon attention… Une photo d’Anaïs sortant de sa voiture, d’une boutique de produits cosmétiques qui l’appartiendrait et devant une maison, qui me rappelle vaguement quelque chose. Mais il y’a là, une remarque qui m’intrigue : aucune photo de Naya. Rien. Comme si, elle n’existait pas… Elles étaient pourtant inséparables…

-         C’est tout pour ce document ?

-         Oui. Je sais ce que tu te dis, mais mon homme m’a assuré qu’Anaïs occupe seule cette maison. Et quand à la fille, elle semble avoir une vie plutôt posée, tranquille… Mais je lui ai tout de même demandé de garder un œil sur elle. On n’est jamais trop prudent…

-         Je vois… Dis au chauffeur d’apprêter la voiture, je vais rendre visite à une vieille connaissance.

-         Ce n’est pas une bonne idée Athan.

-         Je sais, mais il faut que je la voie…

Je rejoins le chauffeur au parking avant de lui remettre l’adresse indiquée sur la carte que Noel m’a remise. Anaïs Robéri Oyoko, cette femme ne m’a jamais porté dans son cœur.

         Mais plus que tout c’est la réaction de Naya que j’appréhende. 23ans… J’ai l’impression que c’était seulement hier…

------ Anaïs Oyoko------

J’ai décidé de rentrer tôt du boulot aujourd’hui pour suivre les instructions de ma petite fleur. Elle ne veut rien qui la rattache à cette maison, même si ça me fond le cœur de ne pas voir son sourire sur cette photo d’elle et de Naya que j’avais placé au beau milieu du salon…

Je m’étais occupée de sa chambre et l’avait complètement vidée il y’a deux jours. Je me sers un verre de vin avant de m’étendre sur le canapé, épuisée par tout ce Remus ménage, quand j’entends sonner à la porte. Je me lève en sautant, ma petite fleur me manque tellement et j’espère bien que c’est elle.

En ouvrant la porte, je croise le regard du diable. Exactement le diable en personne venait de frapper à ma porte. Je sens le verre que je tiens en main, me glisser entre les doigts. Malgré toutes ces années, les traits de son visage n’ont pas changé. Se tenait devant moi, la raison de tous mes chagrins… 23 ans. J’ai tant attendu ce moment, me dire que quand je me retrouverais en face de lui, je lui ferais payer mon mal, mais non, je prends le temps de cerner l’horreur de la réalité… Mais les deux se confondent… Que fait-il-là ? Et quel culot que de se pointer ici après toutes ces années !

Mon cœur fait un bond quand je pense à Bel. Seigneur, a-t-il seulement découvert qui elle est ?

-         Anaïs Robéri Oyoko. 23 ans et tu resplendis toujours d’aussi belle.

Je ne contrôle pas la portée de mon geste quand ma main fit sonner une alarme sur sa joue. Une gifle. Loin de me soulager j’entame de faire une autre, quand son bras cale ma main et me saisit.

-         Ça suffit.

-         Quel culot tu as de venir ici !

-         Il faut qu’on parle.

-         Même pas en rêve tu ne mettras pas un pied dans cette maison !

-    Alors je vais rester à l’entrée et on va parler.

Je tente de lui claquer la porte au nez, mais il la cale.

-         Je veux la voir.

-         Tu veux voir qui ?

-         Naya.

Le voir dire son nom me met hors de moi, je me sens aux bords des larmes mais je feins de me retenir de toutes mes forces…

-         Tu l’ignores ? Tu l’as tué salopard.

-         Quoi ? Naya est morte ?

-         Il y’a cinq ans, d’un cancer du sein, qui était opérable mais énormément couteuse comme opération ! Elle est morte parce que tu as volé son argent, tu l’as tué Athan, on peut considérer que tu lui as mis une balle en plein cœur. Tu peux être fier de tout ce boulot que tu as abattu pour être riche, maintenant sors de chez moi, et s’il te plait oublie-moi.

Il retient encore une fois la porte quand je tente de la fermer. Cette fois-ci, il me regarde droit dans les yeux, j’en tremble…

-         Et l’enfant qu’elle portait en elle, il y’a 23ans ?

-         Tu te fous de moi ?

-         Je veux savoir ce qu’il en est…

-         Elle a fait une fausse couche et a perdu le bébé. Le docteur a expliqué ça par un « excès de stress », bravo tu peux vraiment être fier de toi, sors de chez moi ou j’appelle la police.

-         Je n’ai jamais voulu ça… Je n’ai jamais voulu qu’elle meurt ainsi crois-moi j’en suis navré…

Sa cerise sur le gâteau pour me mettre au top de ma colère, je lui crache à la figure, avant qu’il n’ait le temps de sortir un mouchoir de sa veste, je lui lance :

-         Vas au diable Athan et je ne veux plus te revoir.

Là je lui claque la porte au nez. Et m’écroule tout doucement à l’entrée. Je me blesse avec les morceaux de verre, mais je ne ressens rien, je suis aux bornes des larmes. La vie n’est-elle pas injuste pour ceux qui sont justes ?

------ Mira Mekahi------

Je suis avec Jonathan dans leur appart, Bel n’est toujours pas rentrée, je décide finalement de commander le diner afin qu’on nous le livre à temps. Elle ne pourra jamais cuisiné à son arrivée. Ça me laisserait le temps de bavarder avec Nathan, avant que la retardatrice ne se pointe…

On se tient au balcon de l’appart, je viens d’ouvrir 2 bières.

-         Ça va le boulot ?

-         Oui, ces temps-ci c’est plutôt calme à l’hôpital… C’est une bonne chose, les gens sont en bonne santé.

-         C’est bien. J’ai eu un reportage sur les conditions de vie des travailleurs à la mine d’or, je suis toute contente. C’est un monde tellement différent… ça emmagasine toutes les vices de monde…

-         Heureux pour toi miss. Dis-moi, Bel te parle souvent de son plan ?

-         Oui, elle m’a dit qu’elle l’a rencontré, j’ai tellement peur pour elle Nathan, si seulement tu savais…

-         Hier je l’ai trouvé ivre morte dans le canapé, je ne supporte pas de la voir ainsi. C’est désolant…

-         Je vois… Pourquoi ne lui dis-tu pas la vérité ?

-         Laquelle ?

-         Voyons, que tu l’aimes.

-         Quoi ? Tu te trompes, Bel c’est juste une amie, comme une sœur, comme toi par exemple.

-         C’est ça, je veux bien te croire. Et tu essaies de te convaincre là ? Parce que moi, tu n’y arriverais pas. Je vois comment tu la regardes, depuis toujours comment tu passes de filles en filles, te disant que tu n’arrives pas à trouver la bonne. Tu sais quoi, parce que ton cœur a déjà choisi la bonne pour toi. Arrête de te voiler la face et accepte tes sentiments.

-         Tu ne sais pas ce que tu dis, tu penses que c’est facile ? Je ne veux pas perdre ce qu’il y’a entre nous.

-         Comment veux-tu qu’elle te voie autrement si tu tiens ce rôle de meilleur ami dans sa vie ?

Notre discussion s’arrête quand on aperçoit Bel sortir d’une Range Rover noir. Le conducteur baisse la vitre pour dire au revoir et on peut distinguer le visage d’Amir. Je me tourne vers Jonathan qui me lance son sourire comme pour me dire « qu’est-ce que je te disais ».

-         Encore désolée du retard, j’ai dû passer avec Amir prendre un verre !

-         Ce n’est pas grave, j’expliquais à Mira que tu ne pouvais certainement pas t’excuser pour la seule fois où on te voit enfin avec quelqu’un.

-         Tu es toute belle. Viens là que je t’étouffe (en me serrant dans ses bras)

-         Uhm, où est-ta voiture ?

-         Au garage, il s’est proposé de me ramener…

-         Bien-sûr…

------ Belinda Ottawi------

Je file prendre une douche avant que le livreur ne vienne. L’eau comme des caresses coulent sur mon corps et ma main frôle mes lèvres me faisant penser à ce baiser volé.

Je me hâte de retrouver Jonathan et Mira dans le salon, et enfile une robe vite fait.


-         Tu as commandé des pizzas ?

-         Oui, je me disais que ça faisait longtemps qu’on n’a pas fait de soirée pizza ?

-         C’est génial, tant que je me remplisse le ventre.

-         Tiens il y’a ton téléphone qui n’arrêtait pas de sonner.

-         C’est Anaïs. C’est bizarre, à cette heure elle dort déjà…

Je la rappelle et le son de sa voix sonne alarme, et quand elle rentre dans les détails, j’ai à peine le temps de retrouver mes clés ou d’expliquer ce qui se passait.

-         Bel ? Qu’est-ce qui t’arrives ?

-         Il faut que j’y aille.

-         Non, dis-nous où tu vas ?

-         Athan est passé à la maison, Anaïs est sous le choc, je peux le sentir au son de sa voix.

-         Je conduis, on y va. Mira ont prend ta voiture.

Je fixe la route et j’ai l’impression qu’elle se rallonge. Tout est de ma faute et Anaïs ne mérite pas tout sauf ça. Pas après tout ce qu’on a traversé. Jonathan est au volant et Mira sur le siège arrière…

-         Je suis sûre qu’elle va bien.

-         Il a intérêt, si jamais il lui a touché un seul cheveu je le tue de mes mains !

-         Il y’a une voiture qui nous suit. La Toyota yaris bleue.

-         Je l’ai vu garer en rentrant.

-         C’est bizarre je l’ai remarqué hier au supermarché… Et aussi ce matin… Vous pensez à ce que je crois ?

-         Il se renseigne sur toi Bel, il se doute de quelque chose…

-         On ne s’alarme pas. Ok passe-moi le volant Jonathan…

-         Ne nous fais pas une partie de Fast and Furious Bel s’il te plait…

Jonathan s’exécute et arrête la voiture et me passe le volant, la voiture qui nous suit ralentit avant de se garer un peu moins cinq mètres. Pour avoir grandi dans ses rues, je connais mieux que personne les chemins. Et je suis plutôt mauvaise conductrice pour le non-respect des codes de la route et la vitesse, mais très bonne dans le jargon des courses.

Je fais arrière et attend que le conducteur se prépare, je le déjoue au bout de vingt minutes aux abords d’une ruelle qui passe par l’arrière de la maison.

On trouve Anaïs, assise sur le canapé, une couverture sous la main et une tasse de café, je m’approche et la serre dans mes bras.

-         J’ai eu si peur. Mon Dieu, il t’a fait mal ?

-         Non, non, j’ai marché sur des morceaux de verre… Je suis contente de te voir ma petite fleur…

-         Je suis si désolée tante Anaïs, tout est de ma faute…

Laisse-moi voir les blessures que vous vous êtes faites, Bel apporte la boite de pharmacie s’il te plaît…

Je laisse Jonathan s’occuper d’elle et Mira m’accompagne chercher la boite de pharmacie… Là j’ai juste envie de m’écrouler.

-         Viens-là…

Je m’effondre dans ses bras et libère toutes les larmes de mon corps. Et ce soir plus que jamais, je veux faire payer Athan Akué…

Le lendemain

------ Belinda Ottawi------

Les évènements d’hier se bousculent dans ma tête. Amir est passé ce matin à mon bureau, j’ai été assez froid avec lui. Je m’en veux pour ça. Mais l’idée ce n’était pas lui au départ, et après ce qui s’est passé, je me dis qu’il ne me sert que de distraction à me déjouer de ce que je prévoie réellement.

J’ai passé la matinée à surveiller les faits et gestes d’Athan. Son bureau est inaccessible, même en son absence. Sa secrétaire ne s’éloigne presque jamais. Risquer de me faire surprendre là-bas ce serait mettre à terre tout ce que j’ai fait jusqu’ici…

Mon téléphone sonne et c’est Sofiane à l’autre bout.

-         Désolée je ne t’ai pas rappelé, j’ai tellement de choses dans la tête…

-         Je comprends ma belle. Mira m’a parlé de la voiture qui vous a suivi hier soir. J’ai mis un de mes gars sur le coup, le type au volant est un habitué de la prison, vol, agressions, meurtre, et récemment il a été banalement sauvé d’une affaire de drogue…

-         Tu ne me dis pas ça pour me rassurer Sofiane.

-         Je sais. Je veux que tu saisisses une bonne fois pour toute, ce dans quoi tu t’embarques. Je vais tout faire pour te protéger, ta tante et toi, mais je veux que tu sois sure du danger auquel vous vous exposer, Anaïs et toi…

-         Sofiane ? Je veux plutôt que tu t’occupes de la sécurité d’Anaïs, moi ça ira. Les chiens ne font pas les chats, n’est-ce pas ? Je n’ai pas peur… La clé que tu m’as remise, ça vous sert au moins ?

-         Oui, oui ça nous sert. Notre agent a pu récupérer quelques dossiers et on a eu accès à sa boîte mail, mais il semble n’y avoir rien mis…

-         Ils ne sont pas dupes Sofiane, s’ils ont pu vous échapper tout ce temps, c’est qu’ils ont quelques grammes de matière grise dans leurs cerveaux. Tu peux passer à l’appart, déposer les micros, c’est plus facile à placer…

-         Oui, écoute, tu sais que cette société n’est qu’une couverture ? J’aurais besoin de toi pour tâter d’autres terrains…

-         Cela lui apporterait quoi ?

Les larmes des liens