CHAPITRE XIV

Ecrit par Samensa

MIKE

Dans ma poche, je sens mon téléphone vibrer. Je le prends et le décroche dès que je vois le nom affiché.

-Allô Safi !

-Mike, bonjour comment tu vas ?

-Je me porte à merveille et toi ?

-J’aimerais pourvoir en dire autant.

-Ah bon ? Qu’est-ce qu’il y a ?

-Euh, j’ai besoin que tu me rendes un service, s’il te plait.

-D’accord… Dis-moi.

-Est-ce que c’est possible que tu m’héberges ? Jusqu’au procès du moins… Ecoute, je sais que je te tombe dessus mais je te promets que je trouverai quoi faire de ma vie d’ici là.

-Franchement Safi pour l’instant je ne peux t’assurer du fait que je pourrai te trouver un endroit. Laisse-moi juste passer des coups de fils et je te ferai signe.

-Oh merci Mike, c’est déjà quelque chose. Merci.

-Je t’en prie. C’est la moindre des choses.

Après notre conversation, je sors mon carnet d’adresses. Je me doute bien que la situation d’hier à l’anniversaire y est pour quelque chose dans cette histoire. En tout cas, ça me donnera l’occasion de l’éloigner de cet avocat. Cette femme, je la veux et je l’aurai.

 

SAFI

Je pousse un soupir en déposant le téléphone près de moi. Une voix me fait sursauter.

-Tu veux aller où ?        

-Quoi ? Tu m’espionnes maintenant ?

-Je t’ai posé une question !

-Baisse d’un ton avec moi, d’accord ?

-D’accord, excuse-moi. Dis-moi juste où tu veux aller.

-Loin d’ici. Je ne peux plus continuer de vivre dans cette maison. Ta vue m’insupporte ! La vue de la mère de ton enfant m’insupporte !

-Safi, c’est une chose de ne plus vouloir être avec moi. C’en est une autre de vouloir partir d’ici. Tu penses à ta sécurité ?

-Marc n’est plus un danger pour moi, tu me l’as dit toi-même.

-On ne sait jamais… Et où comptes-tu aller ?

-Chez Mike… Il m’aidera.

-Mike ? Tu es sérieuse là ? Ce pauvre type ?

-Tout le monde ne peut pas être riche comme vous Me Cissé.

-Arrête ! Tu sais bien que ce n’est pas ce que je voulais dire… Et il va te loger où ? Il n’arrive même pas à gérer ses affaires.

-Qu’est-ce que tu en sais ?

-Oh bien plus que tu ne le crois princesse.

-Arrête de m’appeler comme ça !

-Non, je ne peux pas. Tu es la femme que j’aime Safi. Et même si tu fais semblant de me détester, je continuerai de te prouver que je t’aime. Je t’appellerai comme tu le mérites… princesse !

-Va dire ça à Maya, elle sera heureuse de l’entendre.

-Bon sang ! En quelle langue je dois te dire qu’elle ne signifie rien pour moi ? Rien !

Il m’attire à lui et emprisonne mes lèvres dans un baiser. Je lutte tant bien que mal pour me délivrer de son emprise lorsque je vois ma cousine arrêter à l’étage en train de nous dévisager, la mine confondue. Il n’en faut pas plus pour me pousser à me laisser faire. Si cela la touche tant, alors elle mourra aujourd’hui.

Sa main passe sous ma robe pour flatter mon clitoris. Je me laisse aller aux caresses de Karim en gémissant accordant peu d’importance au fait que n’importe qui peut débouler dans le salon et nous surprendre. Je lève la tête et m’aperçois que la vipère a disparu. A contre cœur, je repousse Karim et monte à l’escalier sans un mot pour lui. J’imagine sa confusion. Je la considère comme ma petite vengeance.

Je passe la majeure partie de l’après-midi sur internet. Sur Google, j’ai fait assez de recherches dont les mots clés étaient : pardonner, rester, amour, enfant. J’ai parcouru assez de forums de discussions sur lesquels les avis étaient mitigés. Pour certaines, il faut rester et se battre pour ce qu’on aime car rien n’est facile sur terre. Pour d’autres, par principe de dignité, il faut s’en aller et laisser l’homme qui n’a pas eu l’esprit d’apprécier la chance qu’il a eu. Moi, je ne sais plus où je suis entre ces camps. J’aime Karim, c’est indéniable mais ce qu’il a fait… Ma tête me fait mal à force de réfléchir.

Je décide de consulter mes deux mères : tata Bintou et maman Djenebou.

Maman Djenebou est rentrée chez elle ce matin, c’est donc au téléphone que nous discutons environ 2 heures de temps. Quant à tata Bintou, c’est assises autour d’un plat d’alloco que nous avons discuté. Conclusion : reste avec ton homme car on n’abandonne pas son foyer à la première difficulté ; s’il t’aime c’est l’essentiel.

 

KARIM

Un footing près à la plage m’a permis de remettre mes idées en place.

En rentrant, dans le salon, je vois que Maya a pris ses aises. Elle porte un peignoir et est couchée dans le canapé, un bol de friandises près d’elle et regarde la télévision. Dès qu’elle m’aperçoit, mademoiselle ouvre son peignoir, me donnant le loisir d’observer sa nudité. Avant, j’aurai ressenti quelque chose mais maintenant le seul corps qui arrive à déchainer le feu en moi, c’est celui de Safi. Je la toise puis continue ma route jusqu’à ma chambre. Ah, si le ridicule tuait !

 Dans la pénombre, je distingue une forme, une ombre sur mon lit.

-Qui est-ce ? demande-je surpris.

-Si on m’avait dit que toi aussi, tu ressentais de la peur, je n’aurai pas cru.

Ma Safi. J’appuie l’interrupteur. Elle est assise sur le bord du lit et me fait signe de m’assoir près d’elle. Ce que je fais.

-Karim, dis-moi, pourquoi je suis encore ici ? Parce que moi-même je ne peux pas me l’expliquer.

-Surement parce que tu m’aimes mon amour.

-Toi tu m’aimes ?

-Comme un fou.

-Alors, pourquoi tu me fais souffrir ?

-Mon amour, c’était une erreur. Avec ta …

-Ce n’est pas ce que je veux entendre. Ce qui s’est passé entre vous, est déjà fait. Je veux juste savoir si un jour j’aurai à avoir autant mal pour t’avoir aimé.

-Jamais plus, je te le jure.

-Alors, c’est compris. Je te pardonne Karim.

J’enfouie ma nez dans le creux de son cou et lui caresse le visage.

-Merci mon amour. Merci…. Tu sens tellement bon.

-J’en peux pas en dire autant de toi. Répond-elle en riant.

-Bébé, je sens le mâle, le viril. Je ne peux pas sentir les fleurs, je suis désolé. Il en est hors de question.

-Viens, allons sous la douche !

En nous levant, je la soutiens lorsque je sens qu’elle s’accroche à moi désespérément.

-Eh ! Tu vas bien.

-Oui, juste un petit vertige, je suis fatiguée.

-Tu as mangé quoi aujourd’hui ?

-Tout ce qui me passait sous le nez. Ne t’inquiète pas, je vais bien. C’est plutôt toi qui m’as tellement fatigué l’esprit.

-Je suis désolé. Je lui donne un baiser sur le nez.

-Alors, cette douche, on la prend ?

Nous prenons notre douche ensemble comme des enfants. On rit, on chante, on se lance dans des karaokés avec les tubes de dentifrice. Le reste de l’après-midi et cette nuit fuirent dédiés à notre réconciliation. Nous avons fait l’amour encore et encore et parlé. C’est repus et comblés que nous nous sommes endormis.

 

MAYA

Je suis en rage. Ces deux-là se moquent bien de moi. Je me demande pourquoi elle est encore là cette imbécile. Et ce Karim, malgré tout ce que je fais, il ne m’accorde aucune attention.

Le comble c’est qu’ils s’affichent devant moi. Nous sommes à table pour le petit déjeuner et ils sont en train de se parler comme des gamins attardés. Je m’adresse à Bintou.

-Bintou ?

-Oui Maya.

-Je veux manger du riz avec de la sauce feuille ce midi. Et assure toi que la viande que tu vas utiliser soit bien fraiche.

-Un « s’il te plait » serait bien venu.

Je sais qu’elle ne m’aime pas mais c’est la domestique et elle me doit obéissance. Je me prépare à lui lancer une réponse sanglante lorsque Safi prend la parole.

-Maya, tu pourrais être polie. Essaie de faire preuve de savoir-vivre s’il te plait.

-A une boniche ? Crie-je.

-Tata Bintou n’est pas là pour tes caprices. Elle est ici pour s’occuper de moi alors si tu ne lui donnes pas du respect, je te jure que tu vas te mettre à la cuisine toi-même.

-Karim, tu la laisses me parler comme ça ?

Je le vois sourire mais il ne dit rien.

-Karim, tu vas accepter qu’on parle ainsi à la mère de ton enfant ?

-Ah Maya s’il te plait ! Me dit Safi. Arrête de nous rabattre les oreilles avec cette histoire d’enfant. On t’a dit que quelqu’un est stérile ici ? Et puis, on ne t’a pas appelé ici. Si tu trouves qu’on te maltraite, tu peux toujours t’en aller. On n’a pas besoin que tu sois sous nos nez pour qu’on s’occupe de cet enfant.

Bintou et Karim pouffent de rire. Moi, je suis bouche bée. D’où lui sort ce courage de me parler comme ça ? Décidément, je l’ai sous-estimée. Je me lève de table, humiliée.

 

MIKE

-Toc toc ! Bonjour ici !

-Mais quelle surprise Safi ! Allez entre.

Je me lève pour aller la serrer dans mes bras et lui tire la chaise pour qu’elle s’asseye.

-C’est une surprise vraiment ! Que me vaut cet honneur ?

-Karim m’a permis de sortir alors j’ai tout de suite pensé à venir voir mon commissaire préféré.

-Merci, c’est gentil… Tu es resplendissante.

-Merci Mike.

Elle se lève et arpente la pièce pour regarder les tableaux accrochés. Je l’attire à moi par derrière pour lui parler à l’oreille.

-J’ai déjà contacté des personnes pour t’héberger.

Elle se dégage avec force.

-A propos de ça, ce n’est plus la peine. Je reste avec Karim.

-D’accord. Fis-je déçu. Comme tu veux.

-Et je te demanderai d’arrêter ce genre de démonstration avec moi. Je ne suis pas à l’aise avec ça et Karim n’aimerait pas.

-Karim ? Mais, qu’est-ce qu’il a à avoir avec cela ? Tu es assez grande pour décider qui tu veux voir.

-On est ensemble Mike.

-ça veut dire quoi « on est ensemble » ?

-Je sors avec Karim.

Cette déclaration me fait l’effet d’une massue.

-Depuis quand ?

Comme elle ne répond pas, je reformule ma question.

-Tu couchais déjà avec lui avant l’anniversaire ?

Je vois à sa mine outrée que ma manière de lui parler l’a choqué et je vois aussi que oui, ils couchaient ensemble depuis bien longtemps. Elle m’allumait alors qu’elle sortait avec un autre. Pétasse, c’est le mot qui me vient à l’esprit !

-Pardon ? Tu m’as traité de quoi ?

Ah ! J’ai dû penser à haute voix. Autant lui dire ce que je pense d’elle.

-Tu m’as allumé alors que tu couchais avec lui !

-Non, je me comportais comme une amie !

-On s’embrasse entre amis maintenant ?

-C’était une erreur. Et je t’ai toujours repoussé.

-L’excuse des putes !

-Waouh ! Faut le voir pour croire. En tout cas, je pense avoir pris la bonne décision car tu me montres enfin ton vrai visage, et tu n’es pas le genre d’homme que je veux dans ma vie.

De toute ma colère, je lui assène une gifle. Je mesure l’ampleur de ma bêtise lorsque je la vois couchée par terre. J’essaie de m’approcher d’elle pour m’excuser mais elle me jure qu’elle criera dès que je poserai la main sur elle. Elle se lève et sort précipitamment de mon bureau. Mon Dieu, qu’est-ce que j’ai fait ?

 

MAYA

En traversant le commissariat, je me masse discrètement le dos. Dans ma chute, j’ai cogné le bord de la table et ça fait un mal de chien ! Même dans la voiture, je garde aussi la tête baissée car je sais qu’il y a forcément des traces. Ali me regarde bizarrement à travers le rétroviseur, il n’est pas dupe. Je prie seulement pour qu’il ne dise rien à Karim car je crains sa colère.

A la maison, je m’enferme dans la chambre, celle de Karim que nous partageons dorénavant. J’applique de la glace sur mon visage espérant que ça arrangera les choses. Quant à mon dos, je n’ai qu’à ne pas me mettre nue devant Karim aujourd’hui. Difficile mais pas impossible.

Je m’arrête devant le grand miroir de la coiffeuse et me place de dos. Bon sang ! Je suis même blessée et ce n’est pas du tout joli.

Surprise, je cris lorsque la porte s’ouvre avec fracas sur Karim. Je baisse rapidement mon t-shirt et court me jeter dans ses bras, le cœur battant. Il est rentré trop tôt. Ali.

-Mon amour, tu rentres tôt aujourd’hui !

Il soulève doucement mon vêtement. Notre position lui permet d’avoir une vue de mon dos à travers le miroir.

-Safi, qui t’a fait ça ?

 

MARC

Jamais l’air ambiant n’a été si bon. Je respire à plein poumon comme si cet air disparaitra dans peu de temps. Dans le trou où j’étais, j’ai vécu des choses inimaginables. Cet avocat s’est arrangé à me neutraliser durant mon séjour mais c’est fini maintenant. J’ai réussi à en sortir, à m’évader et il va regretter d’être né cet enfoiré.

Qu’il s’apprête car j’arrive !

 

 

 

 

MON AVOCAT, MON PROT...