CHAPITRE XVII : Ton absence... ma douleur

Ecrit par dotou

La joie de Cadia ne tarda pas à exploser lorsque Dean lui apprit la nouvelle.

- Je suis la plus heureuse des mères, s’écria-t-elle.

 Même Ali ne put voiler son émotion. Lorsqu’il serra sons fils dans ses bras, celui-ci remarqua qu’il tremblait d’émotion contenue.

- Est-ce que je connais cette jeune femme qui a bien voulu me rendre grand-père ?

- C’est Norma, déclina Dean en riant.

- Norma ? Avec toutes les femmes qui pendent à tes bras ces derniers temps, j’avoue que je ne me retrouve pas.

- Tu exagères papa !

- Nous allons pallier cette insuffisance et cela dès demain soir, intervint Cadia. Je vous invite à dîner tous les deux. Il me tarde de connaître celle qui deviendra ma belle-fille.

- Il n’y aura pas de mariage maman, avoua Dean une voix légère.

- Pardon ?!! S’écria Cadia dont l’enthousiasme baissa d’un cran.

- Tu es entrain de nous dire que tu ne veux pas épouser cette jeune femme ? Attaqua Ali.

- Oui. Je ne veux pas me remarier.

- Mais tu vas avoir un enfant ! Argumenta Cadia.

- Oui maman.

- Et cette Norma, qu’en pense-t-elle ?

- On en a déjà discuté.

- Mais comment allez-vous élever cet innocent, s’exclama Cadia de plus en plus choquée. Si tu es arrivé à l’enceinter, c’est que tu ressens forcément quelque chose pour elle.

- Evidemment !

- Alors épouse-la.

- Il n’en est pas question maman. S’il te plaît, arrêtons cette discussion, nous ne serons sûrement pas les premiers à avoir un enfant hors des liens du mariage.

- Ali, essaie donc de raisonner ton fils !

- Cadia, il aura le temps de se rendre compte que ce n’est pas la meilleure solution. Ce n’est pas à un gaillard de trente sept ans que je vais commencer à donner des leçons de morale.

- Nous venons dîner ici demain soir, et je vous en prie, pas un seul mot ayant trait au mariage, conclut Dean en prenant congé d’eux.

Cora apprit la nouvelle quelques jours plus tard en téléphonant à ses parents. Malgré elle, elle ne put s’empêcher de demander le nom de l’heureuse élue, ayant finalement appris son divorce. Renseignement que lui fournit de bonne grâce sa mère qui semblait porter une grande estime à la future mère. Après avoir raccroché, la jeune fille s’affala dans un fauteuil. Au-delà de tout ressentiment, elle était réellement heureuse pour Dean. Elle imaginait l’effet que cela peut faire de savoir que dans quelques mois on aurait un enfant à soi, à choyer. Elle s’avoua qu’elle désirait connaître ce bonheur. Tenir dans ses bras son enfant. Sans vraiment s’en rendre compte, elle imagina cet enfant de Dean et lorsqu’elle en prit conscience, elle en fut profondément troublée. Elle sut alors que malgré le temps et l’espace, elle ne l’avait jamais totalement oublié.

En quittant ses parents, Dean se rendit directement chez Norma. Ce fut Olga, la femme de ménage qui vint lui ouvrir. Dean l’avait fait recruter la veille pour qu’elle puisse s’occuper de la maison de Norma. Celle-ci ne s’était pas opposée lorsque Dean le lui avait proposé. Elle se sentait plutôt mal en ce début de grossesse et heureusement que son travail n’exigeait pas d’elle des heures régulières. La jeune femme avait l’impression qu’elle allait s’évanouir à tout moment, ses seins avaient quasiment doublé de volume et leurs mamelons d’une sensibilité énervante. De plus, les nausées dites matinales ne l’épargnaient pas et ce, à tout moment de jour comme de nuit. Dean la trouva dans la douche où elle vomissait. Son air fatigué l’alarma.

- Toujours ces nausées, Norma ? S’enquit-il en la prenant par les épaules pour la ramener vers la chambre où elle se jeta sur le lit.

- Je me sens si fatiguée. Je me demande où certaines femmes trouvent le courage d’avoir plusieurs enfants.

- Dans quelques semaines tu te sentiras mieux. Il paraît que ce sont les trois premiers mois qui sont les plus pénibles.

- Si tu voyais mes seins, on dirait des obus prêts à exploser.

- Oublie donc tous ces désagréments et pense plutôt à ta joie lorsque tu tiendras cet enfant dans tes bras.

- Tu as raison ; je me plains beaucoup alors que je porte en moi un merveilleux cadeau.

- Je te préfère ainsi, plus optimiste.

- Mais dis-moi, je ne t’attendais pas avant ce soir.

- Je voulais avoir de tes nouvelles. Tu te sentais si mal hier soir lorsqu’on s’est séparés.

- Tu t’inquiètes trop. Tu me surveilles comme du lait sur le feu. Je ne suis pas malade, juste enceinte.

- Tu n’es pas heureuse de me voir ?

- Evidemment que oui !

- Alors ne te plains plus si tu me vois débarquer ici à chaque instant.

- Ta sollicitude ces derniers temps m’étonne. Depuis que tu sais que je porte ton héritier, tu ne me lâches plus des yeux.

- Pourquoi parles-tu ainsi ? Reprocha Dean blessé. C’est d’abord à toi que je pense en venant ici et non à l’enfant que tu portes.

- Excuse-moi, répondit la jeune femme contrite.

- Mes parents ont exprimé le désir de te connaître. Je leur ai fait la promesse qu’on dînera avec eux demain soir.

- Si cela ne les gêne pas de me voir déverser ma bile à tout moment, je ne m’y oppose pas.

- Ils comprendront.

Après une pause, la future mère reprit :

- Tu sais Dean, j’ai beaucoup réfléchi ces derniers jours. J’ai fini par comprendre que mon rêve le plus cher était de me voir mariée avec toi et vivre sous le même toit que notre enfant. Tu ne trouves pas que ce serait la solution idéale ?

- Norma, on a déjà discuté de cela et je croyais classée cette histoire de mariage ! Répondit son interlocuteur d’une voix dure.

- Comment peux-tu te montrer aussi cruel ! Je porte ton enfant et te rends-tu compte de ce que cela veut dire ?

- J’en suis bien conscient. Norma, tu auras de moi tous les égards qui reviennent de droit à la mère de mon enfant ; mais, je ne veux pas me marier une fois encore. Ce serait aussi catastrophique que la dernière fois.

- Qu’est ce qui te dit que notre union sera un échec ? Tu aimes encore ton ex-femme ?

- J’ai une grande estime pour elle, mais de l’amour, non !

- Pourquoi l’avais-tu alors épousé ? Voulut savoir la jeune femme.

- Je ne veux pas en discuter, répliqua sèchement son interlocuteur.

- Mais qu’as-tu donc à la place du cœur ? S’écria Norma. N’as-tu jamais aimé quelqu’un dans ta vie, excepté toi-même ? Réponds, Dean ! Ne me regarde pas comme si je proférais une aberration.

- Ne me pousse pas à bout !

- Je ne comprends pas Dean. Je sais qu’avant de me rencontrer, tu as eu une multitude d’aventures, tu t’es même marié, mais as-tu jamais aimé une seule d’entre elles toutes ?

- Jamais aussi fort que je le voudrais.

- Mon Dieu ! Ne me dis pas qu’à ton âge tu n’as jamais aimé !

Poussé dans ses derniers retranchements, il s’écria :

- Oui j’ai aimé. Si tu savais à quel point j’aime cette femme. Je l’aime au point où rien que de me rappeler d’elle m’est une torture.

Norma accusa le coup et observa son visage soudain désespéré.

- Qui est-ce Dean ? Pourquoi ne pas faire ta vie avec elle si tu l’aimes tant ? Voulut savoir la future mère, oubliant pour le moment sa propre peine.

- Je l’ai perdue. Si tu savais ce que c’est que de perdre la seule personne qu’on aime ? A cause d’elle je ne peux plus aimer. Tu t’en rends compte ? Mon cœur est pris Norma. Et ni toi, ni aucune autre femme ne pourra me la faire oublier.

- Elle est décédée ?

- Non.

- Mariée alors ?

- Non plus.

- Je ne comprends pas alors pourquoi tu te laisses souffrir à ce point au lieu de te déclarer à elle.

A ces mots, Norma qui essayait de rejoindre un siège chancela. Aussitôt Dean reprit possession de ses sens et s’élança vers la jeune femme qu’il aida à s’installer.

- Je suis désolé de te choquer. Je n’aurais jamais dû te dire tout cela dans ton état. Pardonne-moi Norma. Je t’en prie, ne m’en tiens pas rigueur. De toutes les femmes que j’ai fréquentées ces dernières années, tu es celle qui a pu apporter du baume à mon cœur déchiré. J’ai pour toi une grande estime mais ne me demande pas ce que je ne peux jamais t’offrir. Je ne voudrais pas te faire souffrir, mais il vaut mieux que tu saches. Ne pense plus à tout cela, mais plutôt à ta santé.

Il n’attendit pas longtemps avant de prendre congé de Norma. Ce soir-là, installé à son bureau, il froissait feuilles sur feuilles, incapable de se concentrer. Mélancolique, il sortit de son portefeuille la photographie de Cora qui jamais ne le quittait.

- Si tu savais combien je t’aime Cora, murmura-t-il dans sa solitude.

Mais le regard rieur de la jeune fille sur la photographie semblait le narguer. N’y tenant plus, il laissa éclater sa douleur et libéra des larmes qu’il retenait depuis longtemps.

Le Droit d'aimer