CHAPITRE XXII

Ecrit par Samensa

KARIM

-Mais tu es fou ma parole ! Me crie Safi en aidant mon père à se relever.

-Mon Dieu ! Karim ! Crie ma mère.

Safi aide mon père à s’assoir tandis que moi je fulmine de colère. Cet homme devant moi me dégoute.

-S’il vous plait, calmons-nous. Ce n’est rien de grave. Dit mon père.

-Rien de grave ? Qu’est ce qui s’est passé ? Lui demande ma mère.

-Oui papa, raconte à tout le monde ce qui se passe.

Je m’assois tranquillement sous le regard accusateur de Safi. Oui, qu’il nous explique ce qui se passe. Il parait tout à coup confus et desserre sa cravate.

-Bon comme tu ne veux pas parler, moi je vais le faire.

-Non ! Il n’y a rien à raconter !

-Ça suffit ! Vous n’êtes plus des enfants. Quelqu’un peut prendre la parole et s’exprimer ?... S’il vous plait !!

-Papa, à toi l’honneur. Dis-je avec une pointe de sarcasme.

-Eh ben… Je …

-Tu ? Demande ma mère.

-Eh ben, je fais affaire avec … « zeus ».

Des expressions de surprise se peignent sur tous les visages.

-Depuis quand ? Demande ma mère.

-Je vous demande pardon, je ne voulais pas …

-J’ai dit depuis quand ?!? Elle hausse le ton.

-Ca fait une quinzaine d’années maintenant.

Maman Djénébou manque de s’écrouler sur le sol tant elle semble affectée par ce qu’elle vient d’apprendre. Tout comme nous tous d’ailleurs. Mon père travaille pour la mafia depuis des années. C’est plus qu’un coup de massue qu’il vient de nous donner.

-C’est pas possible. Donc pendant tout ce temps, vous saviez à qui nous avions affaire et vous n’avez pas levé le petit doigt pour nous aider ?

Ma petite femme vient de prendre la parole.

-Je ne pouvais pas. Je risquais de mettre en danger mes affaires.

-Vos affaires ? Mais votre fils était en danger.

-Je ne pouvais pas savoir où tout cela allait nous mener. L’erreur de Karim a été de tomber amoureux de vous.

-Je t’interdis de dire ça papa !

-Si tu ne t’étais pas entiché d’elle, cette histoire ne serait pas allée bien loin.

J’essaie de parler mais Safi m’interrompt d’un geste de la main.

-Je peux comprendre que vous ne m’aimiez pas, ce qui m’étonne puisque vous n’avez jamais rien laisser paraitre. Mais du moment où je vous ai donné des petits enfants, vous auriez pu nous aider. Pour eux. Ou bien, eux aussi sont une erreur ?

Comme il ne dit rien, elle continue.

-M. Cissé, avec tout le respect que je vous dois, j’ai besoin d’une réponse. Nous en avons tous besoin.

-Il risquait de me ruiner si jamais je lui disais que mon fils était celui qui voulait envoyer son fils en prison.

-Et qu’est ce qui a changé aujourd’hui ?

-Il sait qui est Karim pour moi. Il m’a appelé pour me parler de cette affaire et je compte tout résoudre en lui promettant que vous n’allez plus poursuivre Marc.

-Papa, je ne sais pas ce qui me déçoit le plus. Le fait que tu sois un mafieux ou le fait que tu ais croisé les bras tout ce temps.

Je jette un regard circulaire autour de moi. Bintou tient ma mère pour la réconforter tandis que Safi a le regard dans le vide. Je la sens au bord de la crise ; elle se fait violence pour ne pas craquer.

-Je vous demande pardon. Comprenez-moi, je ne pouvais pas permettre de perdre ce que j’avais perdu tout ce temps. Karim je suis tellement désolé. Ma chérie, je regrette. Safi, je…

-Non, de grâce, taisez-vous !

Et voilà, elle a craqué.

-Vous n’êtes qu’un sale égoïste doublé d’un menteur. Vous êtes diabolique. Quand je pense que vous vous pointez ici, faisant semblant de vous inquiéter pour nous, jouant avec MES enfants. Quel homme êtes-vous pour vouloir sacrifier votre fils pour de l’argent. Karim est votre fils unique, nom de Dieu !

Ma mère éclate en sanglot en répétant « ce ne peut pas être vrai, je rêve ».

-Je vous assure que s’il était arrivé quelque chose à Karim durant son voyage au Nigéria… Moi, je vous aurais tué !... Karim, gère ton père !

Elle quitte la pièce avec tata Bintou et maman Djénébou.

-Mon fils, crois-moi, je suis désolé.

-Papa, règle tout ça. Je ne veux plus t’entendre ni te voir.

Je le laisse à mon tour pour aller voir ma mère. Cette dernière est anéantie. Heureusement que Bintou et Safi sont auprès d’elle pour la soutenir.

SAFI

Le père de Karim a fait fort. Niveau hypocrisie, il n’a pas d’égal. Le Monsieur se pavanait ici tous les jours, appelant ses contacts pour soi-disant trouver des solutions. C’est tout simplement un sorcier. Il est actuellement au Nigéria pour rencontrer son collègue mafieux. Tout mon souhait, c’est qu’il règle tout. Il nous doit bien cela. Surtout à son fils et à sa femme. La pauvre dame ne s’en remet toujours pas. Je n’ose pas imaginer ce que c’est que de découvrir que l’homme avec qui on a passé sa vie est un fieffé menteur.

Je me concentre sur mon téléphone pour contacter une personne que je dois vraiment remercier.

-Allô ? Me répond t-on à l’autre bout du fil.

-Bonjour Victoire, c’est Safi… Safi Dupré.

-Ah ! Tu n’avais pas besoin de préciser le nom, je savais. Alors ?

-Euh, j’ai appris ce que tu as fait pour Karim. Je voulais juste te remercier.

-Ce n’est pas nécessaire. Ton chéri l’a déjà fait.

-Non, je pense que c’est nécessaire. Sans toi, il n’aurait pas survécu. Merci beaucoup Victoire.

-Je t’en prie. Je vous souhaite tout le bonheur du monde.

-Merci. A toi aussi.

- Bon, on ne va pas faire copine-copine au téléphone hein !

-D’accord. Je souris. Au revoir.

-Bye.

Qui aurait cru ? Moi en train de remercier Victoire. La vie est pleine de surprise, n’est-ce pas ?

-Eh bébé !

Karim qui vient d’entrer dans la chambre s’assoit dans le lit près de moi.

-Il y a eu une bataille avec les enfants ? Tes vêtements sont tout tachés.

-Eh ben, ta fille a décidé de vomir tout son biberon sur moi et ton fils de me faire pipi dessus.

- Oh désolée papa. J’éclate de rire.

-J’ai une bonne nouvelle pour toi.

-Ah bon ?

-Mon père vient d’appeler… On est enfin libre mon amour.

-…

-Dis quelque chose.

-J’ai attendu ce moment si longtemps que je ne sais quoi dire Karim.

-Crie, chante, danse !

-J’ai juste envie que tu me prennes dans tes bras. Dis-je en sentant mes larmes pointer.

-Viens là. Il m’attire à lui. Je t’aime. Si tu ressens le besoin de pleurer, vas-y mon bébé. Je veux être le seul sur qui tu puisses le faire sans crainte.

Nous restons enlacés pendant un bon moment avant qu’il ne prenne la parole.

- Fais-toi belle ce soir chérie, on sort.

-Où ?

-Ah non, ça c’est une surprise.

 

Karim m’a devancé au restaurant pour je ne sais quoi faire. Le chauffeur me conduit jusqu’à une plage privée. En lieu et place d’un restaurant, une table est dressée au bord de l’eau sur une plateforme en bois sous une tente faite de tissus blancs. Des bougies dans des vases posés sur le sol forme une allée jusqu’à la plateforme. De loin, je vois que le cadre est magnifiquement décoré: chandelier, rideaux de fleurs, lanternes suspendues. Et la vue est à couper le souffle. Mon homme lui, ne coupe pas le souffle, il l’arrache. Je souris comme une adolescente quand je le vois tiré à quatre épingles dans son costume noir. Heureusement que j’ai opté pour une jolie robe rouge longue, qui traine carrément et échancrée dans le dos. Mon maquillage aussi est top. Je suis donc à la hauteur. C’est donc sereinement que je descends de la voiture.

Karim vient jusqu’à moi et me conduit jusqu’à la plateforme en me prenant la main. En fond sonore, joue l’une de mes musiques favorites, « Thinking out loud » de Ed Sheeran.

-Me ferais-tu l’honneur de m’accorder cette danse ?

-Bien sûr.

On commence à danser doucement. Je  me mets à sourire, le cœur en train de fondre, lorsque Karim se met à chanter les paroles.

-Depuis quand tu chantes ?

-Qu’est-ce que je ne ferai pas pour toi ?

Il resserre son étreinte, je suis si bien à cet instant. Seuls dans notre cocon avec ce refrain que je connais par cœur et qu’il me chante doucement à l’oreille.

 

And darling I will be loving you til seventy 

And baby my heart could still fall as at twenty three

And I’m thinking about how people fall in love in mysterious ways

Maybe just the touch of the hand

Oh me I fall in love with you every single day

And I just wanna tell you I am

So honey now take me into your loving arms

Kiss me under the light of a thousand stars

Place your head on my beating heart

 I’m thinking out loud maybe we found love right where we are

 

Oui, je suis dans ses bras.

Oui, nous sommes sous des milliers d’étoiles.

Oui, j’ai la tête sur sa poitrine, sur son cœur. Je le sens battre.

Et ce moment est juste magique.

-Safi, je crois que je suis tombé amoureux de toi le premier jour, dans cet hôpital. Mon cœur le savait déjà mais je n’ai pas su l’écouter.

-Tu étais bien dur avec moi pour quelqu’un d’amoureux.

-Mais il fallait bien que je te montre que je suis l’homme avant de te montrer que je suis dingue de toi et que je me ramollisse comme maintenant… moi en train de chanter pour toi.

-Très drôle.

-Sérieusement Safi, merci. Merci de m’avoir accordé le privilège d’entrer dans ta vie et d’être ton premier homme. Merci pour ces deux merveilleux enfants que tu m’as donné. Merci d’avoir donné une nouvelle direction à ma vie.

-Je pense que je t’ai plus donné de fils à retordre.

-Non, tu es plutôt mon paradis sur cette terre.

-Merci à toi Karim de m’avoir sauvé la vie. Je t’aime mon cœur.

-Je t’aime aussi.

Nous avons fini de danser puis nous sommes passés à table. Tout en prenant notre repas, nous discutons de tout et de rien, riant aux éclats, nous caressant tendrement.

Karim Cissé, je t’ai et je te garde.

MON AVOCAT, MON PROT...