Chapitre XXV
Ecrit par Tiya_Mfoukama
Chapitre XXV
-Je ne sais pas trop maman. C’est tentant mais ça dépendra d’Ari. Tu en penses quoi ?
-….
-Ari ?
-….
-Ari, tu es avec nous ?
-….
-Chéri ? Tu…
-Oui j’ai entendu, et non ça ne m’intéresse pas. La coupé-je sèchement.
-Oh Shomari, ta femme te posait simplement une question. La défend ma mère.
-….
Et je n’ai fait qu’y répondre.
J’avise l’heure sur ma montre : 15h20.
Ça fait seulement 45 min que nous sommes ici mais je le perçois comme une éternité. Ça me gonfle. Je voulais pas venir vraiment pas mais je n’avais pas spécialement le choix. Depuis six mois maintenant, je trouve un tas d’excuses pour justifier mon absence aux Brunchs –qui ressemblent plus à des déjeuners – que ma mère a étrangement ré-instaurés depuis la signature des papiers du divorce.
Il semble que ces "moments de retrouvailles nécessaires au maintien des liens familiaux", qu’elle avait arrêtés d’organiser juste après mon mariage avec Mayélà, soient redevenus importants.
S’il n’en tenait qu’à moi, je serais chez moi à l’heure actuellement, probablement dans mon bureau en train de bosser, mais les parents de Peny sont descendus sur Brazzaville depuis maintenant un mois et passent leur dernier week-end avant de remonter. Je les ai évités durant tout leur séjour, je devais au moins faire acte de présence à ce repas pour les voir, même… 45 min.
Maintenant, je pense que c’est bon, j’ai fait ma part, je peux rentrer.
-Je vais devoir vous laisser, il commence à se faire tard et j’ai pas mal de boulot qui m’attend. Fais-je en reposant ma serviette sur la table.
-Comment ? Mais on vient à peine de se mettre à table ! S’exclame ma mère.
-Pas vraiment maman, ça fait 45 min. Non, désolé 47 min maintenant.
-Tu comptes…
-Ari ! Souffle Peny
Ari en a marre de faire semblant, Ari veut rentrer chez lui et ne plus voir aucun d’entre vous pendant un long moment ai-je envie de lui dire.
-Je suppose que tu restes ? Questionné-je Peny
-Je..euh…
- Mais, mais, Shomari … ! Bégaie ma mère
-Bonne fin de repas à tous !
Je sors de table sous les regards tantôt interrogateurs, tantôt stupéfaits des uns et des autres.
Chercher des excuses, encore des excuses et toujours des excuses, me plier à la volonté des autres, commence à m’épuiser. La personne qui y perd le plus lorsqu’on fait les comptes, c’est moi et personne d’autres.
J’ai récemment bien compris que tout cela était avant tout la conséquence des décisions que j'étais amené à prendre. Raison pour laquelle actuellement, j’agis plus en fonction des autres. Tant qu’à marcher dans la merde, autant être celui qui chie.
-Ari ! Ari ! Ari !
-….
Je continue de marcher vers ma voiture et la déverrouille lorsque je suis à 1 m.
-Ari ! Merde ! Ari ! Mais attends !
Grâce aux tintinements de ses talons, j’arrive à l’imaginer sans mal dévaler les marches du perron et accélérer la vitesse de sa marche aussi vite que le lui permettent ses échasses.
Je suis déjà installé sur le siège conducteur lorsque elle prend place à mes côtés sur le siège passager.
-TU FAIS CHIER ! Hurle-t-elle après avoir claqué la portière. Ça te coûtait quoi de donner le change le temps d’un simple repas ?
-Mon temps, mon énergie, ma patience, mon calme, ma salive. Commencé-je à énumérer en mettant le contact... la liste est longue.
-....
-Je continue ?
Elle soupire lourdement avant de détourner son regard.
-... J'en ai assez de tout ça. Ça ne peut plus continuer. Marmonne-t-elle, le regard tourné vers sa vitre.
Elle en a assez mais c'est elle qui a toutes les cartes en main et qui peut tout arrêter, pourtant elle ne fait rien. À croire que cette situation lui plait plus qu'elle ne le prétend.
-C'est ça. Bon, tu veux descendre et rejoin ...
-.......Pourquoi tu restes dans ce mariage ? Demande-t-elle d'une voix atone. Pourquoi...pourquoi, tu persistes dans cette union?
-Je persiste ? Je persiste ? Ah, Ah !
-...
-Péneloppe, dès le premier jour où tu t'es présentée à la porte de chez moi, je t'ai clairement dit qu'il ne se passera rien...
-Et on a fini par coucher ensemble. Me coupe-t-elle en reportant son regard sur moi. Tu passes ton temps à dire des choses et à faire leurs contraires.
-Sauf que sur ce fait, je reste constant.
-Sur quel fait? Celui de vouloir divorcer? Tu te moques de moi ? Tu parles constamment de divorce mais tu n'en fais rien !
-Parce que c'est toi qui à les cartes en main. Toi seule peut mettre un terme à ce putain de mariage et tu le sais !
-C'est faux ! Complètement faux et Archi faux et ça TOI tu le sais! Si tu voulais vraiment y mettre un terme, tu l'aurais fait depuis longtemps.
-...
-... Je suis restée parce que je me suis dit que s'il y avait une petite chance même infime pour que tu comprennes à quel point je t'aime et je suis prête à m'investir pour que ça marche entre nous, je devais la saisir. Et je pensais sincèrement que j’avais toutes mes chances. Quand je me suis présentée à la porte de chez toi, je jouais mon quitte ou double. Au début, malgré le comportement que tu avais avec Mayéla, je me disais que j’avais mal fait. Tu te montrais distant, indiffèrent à ma présence mais petit à petit tu t’es rapproché. Et on a recommencé à coucher ensemble... J'y ai vu une ouverture, une possibilité. Un nouveau nous. Mais je me suis leurrée. TU M'AS DUPE ! Tous tes gestes, tes attentions, tes actes, tes paroles m’ont dupée ! Crie-t-elle les larmes aux yeux.
-Je t’ai dupé en quoi ? Dès le début, je t’ai dit que ça ne pouvait être que physique !
-Mais tu savais que ça n’avait pas la même signification pour moi, n’ose pas me dire le contraire ! Hurle-t-elle, levant un doigt accusateur vers moi.
-Et pourtant, je ne suis pas devin. Si je te dis X et que tu comprends Z, c’est ton problème !
Elle abaisse son doigt puis s'enfonce dans son siège, en soupirant.
-... Okay, admettons. Tu peux alors me donner la vraie raison qui te pousse à rester dans ce mariage ?
-Je te l’ai dit, je ne peux rien faire !
-Et pourquoi ça ?
-....
Elle commence à m’agacer là avec ses questions à répétitions, comme si elle ne connaissais pas la vraie raison.
-Tu veux que je te répète quoi que tu ne sais pas déjà ? Que ma mère me bloque à ce niveau ?
-....Encore et toujours une excuse. Murmure-t-elle le regard fixé devant elle. Ça ne te fatigue donc jamais ?Tu veux que je te dise moi la vraie raison ?
Elle se tourne lentement vers moi puis me regarde droit dans les yeux et me dit, sur un ton égal:
-Tu ne peux rien faire parce que t’es un gros lâche dépourvu de couilles ! Surtout lorsqu’il s’agit de responsabilités. Voilà ce que t’es ! T’ es tellement lâche lorsqu'il faut assumer que tu trouves toujours toutes sortes d'excuses et incrimine tout le monde! Pour ce mariage c’est ta mère le souci, pour ton second c’était ta femme même, et pour tous les échecs de ta vie, quelle est ton excuse, qui est le coupable ?
-....
-A un moment donné, il va falloir te comporter en responsable et assumer les conséquences de tes actes. Sinon tu finiras par récolter le pire et je crois que c’est déjà le cas.
C'est complètement con ce qu'elle est en train de dire et je ne sais pour quelle raison ça, m'affecte. Je sens une vague de colère, surment le reflux de la sienne, monter en moi et je me sens obliger de lui dire:
-D’accord mais en attendant, t’es encore collée à mon cul, et c'est ma queue que tu demandes à corps et à crie.
-Parce que je suis éperdument amoureuse de toi. Tu peux pas savoir combien je donnerai pour ne pas être amoureuse d'une personne aussi horrible que toi. Mais ne t’en fais pas, moi mes erreurs je sais les assumer. Lance-t-elle en ouvrant la portière
-Peneloppe…
“Clap”
Elle vient de refermer la portière de la voiture derrière elle.
Merde.
*****
“
Entends le chant d’amour d’un enfant racheté,
Je prendrais mes faibles mots, pour te dire quel Dieu merveilleux tu es,
Je ne pourrais pas, te dire combien je t’aime, alors entends mon coeur”
Les yeux clos, je sens des larmes perler sur mes paupières puis lorsqu’elles deviennent trop lourdes, je les sens couler le long de mes joues et s’écraser sur ma poitrine. Je ne les essuie pas, pas cette fois. Elles sont libératrices, et apaisent mon coeur. Je me sens beaucoup plus légère, de plus en plus en paix avec moi-même.
Je me suis laissée affecter, puis détruire à petit feu, sans vraiment en avoir conscience. Au sortir de mon divorce, j’étais tellement brisée et dévastée que je ne pensais pouvoir me relever, puis une rencontre m’a rappelée que lorsque je suis affaiblie, complètement abattue, et que je pense ne plus pouvoir avancer, il y a un Dieu qui peut me restaurer, qui peut porter mes fardeaux et qu’il me suffisait simplement de me tourner vers lui. Après l’avoir oublié pendant tant d’années, j’appréhendais le retour vers lui. A tort.
-Mayéla ?
-Hum ?
-Ca va ? Me demande Kala.
-Hum, hum.
-Okay, je vais avancer la voiture et on se retrouve devant ?
-D’accord, je vais vite récupérer Wani.
Nous nous au seuil de la salle où se tient le culte de prière, et alors que Kala part vers la sortie, je me dirige vers la pièce aménagée pour les enfants n’allant pas encore à l’école du dimanche. Il y a un tas de jouets, disposés dans tous les coins de la salle, et c’est sur l’un des jouets, un cheval à bascule, que je retrouve Wani.
-Wani tu viens ?
-....
Elle ne semble pas faire cas de ma présence. A 20 mois, cette petite à déjà un caractère bien trempé et je sens que ça va être dur de la dompter mais pour le moment, je profite encore de sa petite frimousse, ses babillages, et ça démarche robotique.
-Je vais te laisser.
-....
-Je vais te laisser et monter dans la voiture de maman Kala.
A ces mots, mademoiselle se lève plus vite que son ombre et vient enfin se ruer dans mes bras.
S’il y a bien une chose qu’elle aime après la nourriture, c’est bien les voitures. et plus précisément celle de sa maman Kala et celle de son père. Elle y a une place, bien marquée que personne ne peut s’amuser à vouloir prendre.
Une fois que je l’ai récupérée, nous prenons la sortie et retrouvons Kala devant l'église, qui nous récupère.
-Tu nous déposes puis tu fais quoi après ? Lui demandé-je en route
-Euh, bah...euh. Je pensais rester avec vous. Balance-t-elle en me zieutant. Ça te dérange ?
-Non, pas du tout. C’est chez toi également.
-Okay.
Elle reporte son attention sur la route et je la regarde du coin de l’oeil.
Elle agit bizarrement depuis quelques temps. Elle est quasiment tout le temps en vadrouille, presque jamais chez elle. Elle peut débarquer très tard le soir puis décider de dormir à la maison au dernier moment. J’ai un peu peur parce que lorsqu’elle agit de cette façon, elle se comporte comme la Kala d’avant. J’ai peur qu’elle replonge dans ses anciens travers et foute en l’air son couple qui semble vraiment être sur une bonne voie. D’accord, elle ne m’en parle pas beaucoup -de sa relation de couple -mais, à travers ses yeux et ceux de Serge, je sens qu’il y a quelque chose qui s’est créée. Ils ont pris le temps de se connaître et de poser doucement mais sûrement chaque pierre à l’édifice de leur vie à deux. Je ne voudrais pas que tout soit remis en cause.
De retour à la maison, je m’enferme dans la cuisine pour nous concocter à toutes les trois un bon petit plat dominical. Je passe plus de temps qu’il n’en faut parce que je savoure ce moment. Depuis un certain temps, le dimanche, je le passe chez mes parents avec ma fille. On se retrouve pour un moment de partage et tout le monde profite de la présence, des éclats de rire, de la joie des uns et des autres pour se ressourcer autour d’un plat préparé par maman.
Ce week-end, ils sont partis à Pointe-Noire pour un mariage, d’où ma présence dans ma cuisine, qui n’est pas non plus pour me déplaire. Ça me manquait ces petits moments en tête à tête avec moi-même. Ces instants où je laisse mon esprit créer ou revisiter, des plats, des pâtisseries et toutes sortes de choses ayant trait au culinaire. J’oubliais à quel point ça me détendait…
-C’est prêt dans combien de temps ? Me demande Kala en entrant dans la cuisine, suivi de Wani qui marche sur la pointe des pieds.
-Bientôt, bientôt. Quoi t’es pressée ? Tu veux rentrer ?
-Non, j’ai juste très faim.
-Okay. Attends cinq minutes et… Non Kala !
Je me retourne à temps pour la surprendre en train de se servir des bananes que j’ai préparées, et les partager avec Wani.
-Vous ne pouvez pas attendre ? Soupiré-je dépassée.
-on dirait que non.
-Vous êtes en train de réduire vos parts, j’en ai fait exactement pour quatre personne pas plus. Si à table vous vous retrouvez avec moins dans vos assiettes, il ne faudra pas vous plaindre.
-Quatre ? On est trois je te signale.
-Oui mais…. Je pensais qu’on allait appeler Serge, je suppose qu’il va lui aussi vouloir manger. Sachant que tu es avec nous depuis vendredi soir, je doute qu’il ait de quoi manger.
-...euh..ouais.
Elle enfourne plusieurs bananes dans sa bouche, puis gonfle ses joues pour amuser Wani.
Elle veut subtilement détourner la conversation vers un autre sujet, mais si les fois précédentes, je l’ai laissé faire, aujourd’hui je compte bien discuter avec elle et ne pas la suivre dans son détournement.
- Tiens Wani…
-Dis-moi, il y a un souci entre Serge et toi ?
-Hein ? Non. Non, pourquoi ? Les bananes on va les manger avec quoi ? Si c’est du poulet, j’espère que tu as émincé beaucoup d’oignon, tu sais que j’aime ça.
-Pourquoi tu fais ça ?
-Quoi donc?
-Tenter de détourner la conversation quand je te parle de Serge.
-Mais non..
-Ces derniers temps, dès que je te parle de lui ou de votre relation, tu détournes la tête et cherches à dévier le sujet vers un autre. Je ne disais rien avant parce que je pensais que tu allais finir par me parler et m’expliquer ce qu’il n'allait pas mais non. Tu ne dis rien. Je ne veux pas te forcer mais… Si tu veux parler, tu sais que je suis là.
Elle acquiesce de la tête puis continue de manger ses bananes pendant que je me concentre de nouveau sur ma préparation.
Le silence règne dans la pièce pendant plusieurs minutes, puis elle finit par le briser en se raclant la gorge avant de me dire d’une voix légèrement hésitante:
-Je...je crois que je suis amoureuse de Serge.
Je fais volte face, agréablement surprise par ses propos, sauf que le visage neutre qu’elle empreinte m’empêche de sauter de joie.
-C’est plutôt une bonne nouvelle non ?
-Non.
-Non?
-Non…. J’ai peur qu’il finisse par se rentre compte de l’erreur monumentale qu’il a faite en m’épousant... Lorsqu’il en sera conscient, j’ai peur qu’il finisse par me laisser. Chaque jour qui passe, je suis un peu plus attachée à lui..... Il a cette manie de rentre magnifique un geste banal, de me faire fondre juste avec quelques mots, ou un regard.... Je deviens plus que dépendante de lui…. J’essaie de prendre mes distances, pour ne pas empirer mon cas, parce que je sais que tôt ou tard, il partira. Et si je ne t’en parle pas, c’est à cause de…. Enfin tu vois. Je veux pas te prendre la tête avec mes soucis alors que toi tu te relèves à peine d’un divorce qui t’a terriblement affecté.
Okay, je m’attendais pas à ce qu’elle m’en dise autant, mais au moins c’est sorti. Je reconnais être légèrement troublé surtout concernant la fin de ses propos, sauf que je ne montre rien et vais me placer en face d’elle après avoir baissé le feu de ma casserole, puis lui dis, sur un ton faussement réprobateur:
-D’accord, alors premièrement, non, ce n’est pas une mauvaise nouvelle comme tu le prétends. C’en est même une bonne. J’avais hâte d’être à ce jour où je t’entendrai dire que tu es amoureuse de Serge mais malheureusement, tu viens de faire perdre deux étoiles à ce jour avec ton pessimisme légendaire, propre à la nouvelle Kala. Deuxième, je ne sais pas en quelle langue il va falloir te le répéter mais “ Serge t’aime”, il t’aime toi, la Kala d’hier, la Kala d’aujourd’hui et probablement la Kala de demain. Il a connu le pire de toi et pourtant il t’a épousé en t’offrant le meilleur de lui. Aujourd’hui, tu ne peux pas le priver de son droit à voir le meilleur de toi sous prétexte que tu as peur. Si un jour ça doit finir entre vous, ça finira mais il faut savoir profiter de chaque jour. C’est ces petits jours, ces petits moments, ces petites attentions qui vont créer tes souvenirs d’hier, ceux que tu chériras dans quelques années. Même si mon mariage était loin d’être une référence, je sais que l’amour vaut la peine de miser son coeur. J’ai pas gagné, ce n’est pas pour autant que ce sera ton cas. Et troisièmement, oui je me relève d’un divorce douloureux, oui j’ai pendant une période été anéantie, mais tu veux que je te dise, en vous regardant Serge et toi, je me dis qu’un jour, quand je serai prête, j’essaierai de nouveau, parce que je suis pas certaine qu’une vie sans amour, que cette amour soit tourner vers ses enfants, sa famille ou ses amis, vaille la peine d’être vécue. Puis je vis par procuration pour le moment alors faites-moi rêver tous les deux !
Elle vient dans mes bras, me serre fortement pendant un long moment.
-Merci
-Je t’en prie.
-Shomari est vraiment un gros con !
-Kala ! Crié-je en la repoussant légèrement.
D’un signe de tête je lui montre Wani.
Je ne veux pas qu’elle entende de mauvaises choses sur son père et que leur relation soit biaisée.
Ce qu’il s’est passé entre lui et moi ne regarde que lui et moi, elle n’a pas à en subir les conséquences, où à prendre partie.Les histoires où les parents se tirent dessus et se traitent de tous les noms sans se soucier de la présence de l'enfant qui assiste à tout et qui dans certains cas est sollicité pour intervenir, je n'en veux pas. Je n'en veux pas pour ma fille et rien que pour ça, même si j'ai des grieffes à l'encontre de Shomari, je ne pourrais jamais les exposer devant, elle.
-Oups désolée. Nini, tu peux te boucher les oreilles?
Wani obtempère et se met les mains sur les oreilles en chantonnant “oh les crocodiles” comme le lui a appris Elodie.
“Oh yé crocro, oyé crocro, oyé crocrodiiii, oyé crocro oyé crocro oyé crocrodiiii”
Pauvre de ma fille
-Voilà, elle ne m’entendra pas dire que si je pouvais juger, je dirais que son paternelle est un gros chien qui ne méritait pas le quart du bonheur que lui a apporté ta présence dans sa vie, ni le magnifique cadeau que tu lui as fait en lui donnant le droit d’être appelé papa. Mais je ne peux juger, seul Dieu le peut, donc je lui laisse ça.
-Tu es un cas Kala. Soufflé-je en secouant ma tête.
-Huum oui, je peux te l’accorder. Maintenant, je vais rentrer chez moi et aller faire l’amour à mon mari parce que ça me tue d’être au pain sec surtout quand je sais tout le plaisir qu’il peut me procurer. Crie-t-elle les yeux clos.
-KALA !
“Oh yé crocro, oyé crocro, oyé crocrodiiii, oyé crocro oyé crocro oyé crocrodiiii”
-Oh, quoi ? Wani a les oreilles bouchés et tu veux vivre par procuration, je te donne de la matière !
-Sors de cette cuisine, espèce d’obsédée. Y’a deux minutes t’étais prête à renoncer à tout ça non.
-Et tu peux pas savoir à quel point ça m’aurait fait mal mais surtout chier qu’il fasse l’amour à une autre.
-Oh que si, je sais très bien. Murmuré-je un sourire en coin.
-Merde ! S’exclame-t-elle la main sur la bouche. Pardon Mayéla, je voulais pas dire ça.
C’est marrant de voir comment les gens empruntent toujours un visage dramatique lorsqu’ils se rendent compte que leurs blagues peuvent concerner un pan de ma vie assez complexe. C’est encore plus marrant quand ce sont les membres de la famille et les amis. Ils se sentent fautifs de ne pas avoir fait preuve de retenu. Sauf qu'à un moment, il faut arrêter, ils ne vont pas se retenir pour tout quand même.
Je peux aujourd’hui parler de l’échec de mon mariage sans toute la tristesse et la peine qui m’animaient il y a encore huit mois, la blessure et certes toujours ouverte mais doucement je la soigne. Mais si tout le monde continue à faire comme si elle était encore ouverte, on avance difficilement.
-T’en fais pas, je sais. T’as le droit de faire des blagues dessus et il se peut que je te réponde, comme là. On va pas en faire un drame … Bon va réunir tes affaires, je vous fais un take away.
-.... Je peux rester tu sais.
-Et priver mon beau frère de ses choses? Naaan. Vas-y, va jouer les bordelles ! Montre lui ta dernière botte, Wani et moi allons nous faire une petite séance cinéma.
-hihi. Okay.
“Oh yé crocro, oyé crocro, oyé crocrodiiii, oyé crocro oyé crocro oyé crocrodiiii”
-Wani… Wani….Wa… Mewani arrête ! Et puis on dit crocodile, et non crocrodiiii
Elle me regarde en fronçant des sourcils puis se remet à chanter:
“Oh yé crocro, oyé crocro, oyé crocrodiiii, oyé crocro oyé crocro oyé crocrodiiii”
Soupir.
Non mais cette petite, il va vraiment falloir que je commence à la corriger pensé-je en me tournant vers ma cuisinière.
Je mets de côté les parts de Kala et Serge puis les emballe et les lui remets sur le pas de la porte lorsque Wani et moi lui disons au revoir.
Je vais ensuite nous préparer deux plateaux repas que nous consommons devant des dessins animés.
“Toc, toc, toc”
Je suis assez étonnée d’entendre que l’on toque au portail puisque je ne suis pas sensée être là. Je veux faire semblant de ne rien entendre pour profiter du moment avec ma fille, mais guidée par la curiosité, je me lève pour connaître l’identité de la personne qui toque.
-Qui est-ce ?
-Ouvre et tu verras ?
Je souris en reconnaissant la voix.
J’en connais une qui va être contente.
Je déverrouille le portail puis ouvre la porte, un sourire aux lèvres.
-Coucou toi, ça fait longtemps!
-Dixit la femme qui ne donne jamais de ses nouvelles.
-Je t’ai appelé hier et tu n’as pas décroché !
-Tu m’as appelé parce que la bienséance veut qu’après six appels sans réponses, on rappelle au moins une fois son interlocuteur.
-Ouch. Désolée. Murmuré-je faussement attristé
-Tu peux l’être, même si je sais que tu ne l’es pas. Bon où est la femme de ma vie, je lui ai rapporté quelques friandises. Dit-il en brandissant un sac.
-Et bien, tu sais parler à ta femme.Elle est devant un dessin animé. Lui dis-je en m’écartant de la porte.
Je suis encore dans la petite cour, en train d’arranger les jouets de Wani lorsque j’entends “ TITI A WANI”.
Je souris en bousculant la tête puis les rejoins quelques minutes plus tard, et trouve Wani blottie dans les bras de Thierry.
-Bon, tu m’explique ce que tu as fait à ma fille pour qu’elle soit dingue de toi ? Demandé-je en allant m’asseoir avec eux
-Je sais pas, mais soit certaine que si je savais, je ferais de même sur toi pour que tu sois tout aussi dingue de moi.
-Thierry…
-Quoi, c’est pas interdit d’espérer….Vous êtes parties tôt de l’église ou je me trompe ?
-Oui, on est parties assez vite, je n’avais rien préparé et on avait tous faim. D’ailleurs tu veux manger ?
-Je ne sais pas trop. Répond-il en faisant une moue.
-C’est du poisson.
-Dans ce cas !
Je me lève pour aller dans la cuisine, et préparer un plateau pour Thierry.
Nous nous sommes rencontrés il y a huit mois lorsque je déménageais. C’était le soir où le chauffeur du pick-up qui avait servi à mon déménagement, m’avait demandé de faire un détour chez un de ses clients.
Sur le coup, je n’ai pas trop prêté attention mais nous nous sommes revus quelques jours plus tard. Il s'avérait que nous fréquentions la même église sans nous connaître, enfin sans que je ne le connaisse. Lui m’avait d’après ses dires reconnu le soir de mon déménagement. Nous avons sympathisé et fini par être de bon amis. C’est lui qui m’a rappelé que je n’étais pas seule et que j’avais un Dieu sur qui déposer mon fardeau.
Enfin bon, je suis bien contente de l’avoir laissé entrer dans ma vie. C’est un ami hors pair.
-Yéyéla!!!
Rectification, c’est un ami hors pair, sauf quand il m’appelle Yéyéla.
GGrrggh ça m’énerve !
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Deux suites comme annoncé ! Parole tenue !
Des bisous en pagaille <3 <3 <3 ;)