Cheikha Khadija El Tahir

Ecrit par Farida IB


Khadija…


Nahia (plissant les yeux) : tu es amoureuse d’Ussama ? Enfin, il te plaît ? 


Je fais oui de la tête pendant qu’elle se redresse sur le canapé débitée.


Je dois avouer qu’avec Ussama le feeling est tout de suite passé dès lors que je suis arrivée chez les Ben Zayid. Il est jusque là, le seul à s’intéresser à moi. On se parle tout le temps, on rigole ensemble. Enfin, je ne saurai dire si c’est vraiment de l’amour. Tout ce que je sais, c’est que mon corps est parsemé de vagues soudaines de frissons et de sensations étranges lorsque je me retrouve dans le même endroit que lui et quand il n’est pas là, je rêve tout le temps de lui. J’ai peiné à le réaliser et depuis que je me suis rendue compte qu’il n'en ai pas du reste, je me surprends à rêver d’une relation entre nous deux. 


Nahia reprenant : tu es sûr de ce que tu avances ? Enfin, comment est-ce possible ? Tu ne peux pas, enfin c’est le petit frère à l’homme qui a pris ta virginité.


Moi : je la lui ai donnée pour des raisons personnelles.


Elle me dévisage un instant l’air interloqué en attendant que j’ajoute autre chose. Je prends une grande inspiration avant de m’expliquer.


Moi : j’ai depuis eu le profond désir de fuir l'émirat et tous mes projets d’évasions depuis mon adolescence ce sont soldées par des échecs. À chaque fois, on me ramenait de force sur l'ordre de mon père et à chaque fois j’étais retenue prisonnière, battue et droguée pendant des mois au point de devenir méconnaissable. 


Nahia (écarquillant les yeux) : par ton père ?


Moi hochant la tête : oui cet homme qui me fait office de père. Toute ma vie, j’ai subi des violences psychologiques et physiques de sa part. J'étais obligée de me conformer à cette vie merdique de princesse. Une vie qui m‘oblige à rester enfermer dans une prison dorée, une vie rythmée par le protocole. J’avais à ma disposition une centaine de domestiques, une assistance personnelle, une piscine et un spa, mais je me sentais étouffée. Je ne pouvais disposer de mon argent comme je l’entendais et je ne pouvais pas non plus suivre des études de médecine à l’université, mon rêve depuis l’enfance. A cela s'ajoute ses oppressions. Aucune décision ne m’appartenait, c’était le tout-puissant (articulant) mon père qui détenait le droit de vie et de mort sur nos personnes. C’est ainsi que ma mère a trouvé la mort…


Je ferme les yeux et me tais quelques minutes avant de continuer.


Moi : elle a été séquestrée et abattue après notre dernière fuite.


Nahia (se couvrant la bouche) : mais c’est horrible !


Je soupire.


Moi poursuivant : depuis cela, la seule liberté que je pouvais m’octroyer était les visites du prince de Dubaï. Mais toujours est-il que nous étions sous bonne garde. J’étais accompagnée par mon chauffeur et ma dame de compagnie, la mère d’Alisha. Par ailleurs, ce sont elles qui ont mijoté ce plan pour échapper à mon mariage. Hamdan est tout ce dont rêve les filles, cependant l’épouser serait me soumettre à la volonté de mon père et prendre le risque d’être malheureuse a tout jamais à l’instar de ma mère. (réprimant une larme rebelle) Bref, donner ma virginité à un inconnu était ma seule porte de sortie. C’était cela la force de mon père et c’est en cela que la promesse de mariage avec Hamdan prenait tout son sens. 


Elle me lance un regard atterré.


Moi : je sais que c’est abject et mesquin de ma part, mais j’étais avide de liberté et j’en avais marre de tant d'atrocités venant de mon propre père. Khalil n’a été qu’une victime, ça aurait pu être n’importe qui. Et Allah m’en ait témoin, je n’ai jamais voulu le dénoncer à mon père même après plusieurs jours d’isolement et de longues heures d'interrogatoire, sans eau, ni nourriture. Bien que ce furent les jours les plus sombres de mon existence.


Nahia : alors qui l’a fait ?


Moi : Alisha, elle a tout avoué à mon père pour me libérer. 


Nahia : mais si ça n’avait pas été le cas, tu serais morte.


Moi : au moins je vous aurais épargné. Toi, Khalil et son père.


Nahia : ne dis pas ça. Je n’aurai peut-être pas eu la même idée que vous, mais la fin justifie les moyens, dit-on. (ton de compassion) Je suis désolée que tu aies dû subir tout ça. 


Moi : ne le sois pas, ça fait désormais parti de mon passé. Le plus important c'est la paix du cœur et je l'ai retrouvé. La seule chose qui me reste à faire c'est de rattraper le tir par rapport aux Ben zayid et je pourrai vivre ma vie sans stress ni angoisse.


Nahia me lançant un sourire tendre  : je te le souhaite en toute sincérité. Par contre tu vas devoir m'expliquer cette histoire d‘attirance envers Ussama. J'ai dû mal à l'assimiler.


Moi : je ne saurais te l’expliquer, je sais juste que mon corps réagit avec ferveur en sa présence. Chose que je  n’ai jamais ressentie auparavant, même avec son frère.


Elle met quelques secondes de trop avant de répondre.


Nahia : après tout, c’est cela l’amour. Il ne demande la permission à personne avant de s'incruster. 


Moi soupirant : qu’est-ce que je dois  faire ?


Nahia : tu veux la vérité ?


Moi : oui


Nahia : c’est à éviter de toute urgence, une relation entre vous deux serait malsaine. Ce serait de l’inceste et aucun membre de sa famille ne serait d’accord avec vous. Il vaut mieux taper l’œil dessus. 


Je soupire en sachant pertinemment qu'elle a raison. On sait tous que c’est du leurre, cet amour naissant devra rester platonique, car si nous franchissons la barrière, ça va être mauvais, mauvais pour tout le monde. Et Dieu seul sait combien de fois, j’évite les conflits en ce moment. Ça m’a pris des années pour sortir des griffes de mon père donc je veux tout sauf que retomber dans les mêmes travers.


Mon père, ce dictateur, une longue histoire. Au fait, depuis que je suis toute petite, il m'a toujours mis à l’écart de ses sentiments. C’est un homme assez tyrannique qui aime mener son monde à la baguette et c’est ainsi que je le subis depuis la mort de mes grands parents paternels et de ma mère. Il y a quinze ans qu’elle est morte, abattue par les officiers de mon père pour avoir tenté de fuir avec moi vers Jeddah, la ville d’où elle était originaire. Elle était la servante de ma grande mère et mon père en avait fait son esclave sexuel jusqu’à ce qu’elle ne contracte une grossesse et que son père l’oblige à l’épouser. Il l’a toujours détesté pour cette raison et pour lui avoir conçu une fille. C’est devenu pire après leur départ. Il était passé du simple tyran au tortionnaire paranoïaque sans scrupule. Ce qui fait que j'ai toujours voulu rester en retrait avec un grand effroi de subir le même sort que ma mère. C’est ma hantise  même jusqu'à présent. L'idée de quitter les Emirates un jour ne m'abandonne pas.


Alisha me rejoint un moment plus tard après que Nahia m’ait laissé en prétextant la fatigue. 


Moi d’entrée de jeu : je pensais qu’on s’était mise d’accord sur le fait que tu n’importunerais plus la pauvre fille ?


Elle me toise en prenant place où Nahia était assise.


Alisha : elle n’est qu’une salle voleuse de mec, Khalil te revient de droit.


Moi : Khalil n’est pas une part de gâteau et pour la millième fois Alisha, je ne veux pas de lui. (farouche) Je ne veux pas épouser cet homme.


Alisha (moue dégoûtée) : parce que tu es bête, tu ignores la chance inestimable que tu as. Toutes les filles de ce pays tueraient pour être à ta place.


Moi haussant l’épaule : malheureusement pour elles, son cœur est déjà pris.


Alisha : tchuipp par cette moins que rien ? Elle n’a aucune chance parce que son père ne sera jamais pour qu’il épouse une étrangère.


Moi : et en quoi ça te concerne ? En rien ! Elle au moins elle ne cherche pas à s’incruster dans la vie d’un homme pour se faire un nom.


Elle me lance un regard noir, regard que je soutiens.


Moi : oui et je dois te dire que ce n’est pas en te comportant comme une peste que Jemal fera de toi sa femme. Ça ne te ressemble pas, tu Vaux mieux que ça.


Alisha me toisant : je ne niaise pas moi, je ne suis pas comme toi, la conne de service. Je suis Alisha Merchant, et ce que je veux, je l’obtiens toujours. Jemal (tapant dans sa paume) il est bien encrée ici.


Elle chipe et me toise avant de s’en aller, je la regarde partir en soupirant. Alisha ce n’est pas une méchante fille, mais sa cupidité et son sens de la justice lui font souvent défaut. Autant, je rêve d’une vie simple qu’elle rêve de se faire un nom dans la haute sphère. Nous avions respectivement douze et dix ans lorsque sa mère est venue travailler dans la résidence principale de mon père. Elle m’avait tout de suite pris sous son aile et nous sommes devenues très proches très vite, au point je la considère comme ma sœur aînée. Sa mère est la seule figure maternelle qui me reste, elle m’a toujours traitée comme sa propre fille. C’est grâce à elle que je sais lire et écrire et que je peux me vanter d’avoir un bon niveau scolaire. 


Dringg Drrinngg.


Moi décrochant : marhaba (salut).


Ussama : ma’a s-salamah (salut) ça va ?


Moi d'un ton enjouée : oui, si tu appelles pour savoir si tu peux venir me chercher, c’est oui.


Ussama le ton rieur : d’accord, mais je t’appelle pour te proposer un tour en ville qui pourrait finir chez le marchand de glace. Ça te dit ?


Moi : bien sûr que ça me dit.


Ussama : ok, je serai là dans moins d’une heure.


Moi : ok shoukran (merci).


Ussama : afwan (de rien) !


On se raccroche et je ne peux m'empêcher d'acquiescer un sourire béat.  Cette ornière s’est subtilement glissée entre nous. Il me fait faire des tours en ville à chaque fois que l'occasion se présente à nous,  histoire de faire un peu de tourisme et je dois dire qu’il fait un bon guide. Il nous est déjà arrivé de dîner à Zuma, de marcher le long de la plage de sable blanc du Park Hyatt en parlant de la pluie et du beau temps. Grâce à lui, je maîtrise déjà quelques circuits et mon carnet des bonnes adresses s'emplit chaque jour. 


Il est 16 h lorsqu’il est venu me chercher pour Baskin Robbins (glacier) d’où nous emportons des yogourts glacés aux fraises que nous mangeons plus tard le long du circuit de Yas Marina. Pendant qu’on marche, on parle de son boulot, de ses frères, de tous les défis qu’ils se sont lancés sur ce circuit et d’autres jeux bidon qu’ils laissaient leur sœur gagner. En parlant de ça, j’ai remarqué à quel point ils sont protecteurs envers elle, et même l’un envers l’autre. Ils tiennent sûrement cela de leur père que je trouve très bienveillant soit dit en passant. Je me demande parfois pourquoi Khalil l’avait si tant diabolisé à notre rencontre. Tout le contraire du mien. Il est vrai que la puissance naturelle qui émane de lui suffit à faire perdre assurance à tous ceux qui se retrouvent devant lui, mais derrière ce portrait se cache un homme au grand cœur très soucieux du bien être de son entourage. C'est de cela dont je parle avec Ussama qui part d'abord dans un fou rire avant de me répondre.


Ussama : je vois que tu ne l’as pas connu dans ses heures de gloire.  Actuellement, on évite de tomber dans ses mauvaises grâces. On s’étonne d’ailleurs qu’il n’ait pas encore pété un câble par rapport à votre histoire. 


Moi : il faut connaître le mien pour savoir apprécier le tien.


Ussama : il est si mauvais ?


Moi : tu n’en as pas idée, mon père à la place du tien aurait fait castrer Khalil. Je me souviens d'un jeune homme qui s’est aventuré à la résidence Ave pour objectif de me déclarer sa flamme, il a été surpris par un garde qui l’a directement dénoncé à mon père. Son exécution a eu lieu le lendemain même devant tout le peuple pour servir d’exemple aux éventuels soupirants. 


Il s’arrête de marcher le regard craintif.


Ussama : mais c’est extrêmement méchant, choquant et infâme.


Moi : j’en ai vu d’autres, tu sais…


Je lui fais le récit de ma vie.


Moi concluant : donc après ma dernière fuite au cours duquel j’ai été arrêtée, menottée et battue par la suite je n’ai plus rien retenté jusqu’à ce que la mère d’Alisha ne mette ce plan sur pied. L’enjeu était qu'il me fasse sortir d’Oman de sa volonté propre.


Ussama : mais ça ce sont de graves déclarations condamnables aux regards de la loi.


Moi soupirant : quelle loi ? C’est lui le sultan, c’est lui qui fait la loi.


Ussama secouant la tête : pas dans tous les émirats, il ne fait pas le poids devant l’émir et si cette information fuite et tombe dans les mains des ONG, ils ne feront qu'une bouchée de lui.


Moi prise de panique : n’en parles à personne s’il te plaît, il me tuerait.


Il hoche la tête, mais n’ajoute rien un moment pendant lequel il semble réfléchir.


Moi : tu penses à quoi ?


Ussama : au fait, je me disais qu’on peut lui faire courber l’échine par rapport à mon père grâce à ces informations, on peut les utiliser contre lui.


Moi : en quoi faisant ?


Ussama : des menaces, rien que des menaces.


Moi perplexe : je suis prête à tout tenter pour me sortir de cette affaire, mais je ne dois être mêlée ni de près ni de loin.


Ussama : pas de soucis, nous allons d’abord en parler à mon père.


Moi : tu es sûr que c’est une bonne idée ?


Ussama : oui et s’il le faut, on fera intervenir l’émir. C’est un bon ami à mon père au même titre que son fils et mon frère. 


Je hoche simplement la tête.


Ussama : au fait, notre coup aura pour but d’ôter l’épée de Damoclès sur la tête de mon père. Ça ne changera rien pour Khalil et toi.


Moi haussant l’épaule : si éventuellement le titre de ton père n’est plus menacé, je ne vois pas pourquoi on se marierait ton frère et moi. Il suffirait que je m’exile un moment ensuite, je pourrai décider quelle direction donner à ma vie.


Ussama blême : tu veux partir ?


Moi : rien me retiendra ici de toute façon.


Ussama : et tu irais où dans ce cas ? Tu peux rester au palais aussi longtemps que tu voudras, tu y seras plus en sécurité.


Moi lui souriant : c’est gentil, mais…


Ussama ton suppliant : reste s’il te plaît, je veillerai personnellement sur toi. Ton père ne sera plus un problème, je t’en fais la promesse.



Khalil…


Je marche en desserrant ma cravate pendant que je monte les marches de l’entrée officielle du palais. C’est maintenant que j’arrive chez moi depuis notre descente d’avion et pour cause cette nouvelle affaire de paparazzis. Je dois une fière chandelle à mes potes qui s'en sont chargés comme des pros et c'est bientôt passée aux oubliettes.   C'est la pire chose qui pouvait m'arriver après la mésaventure avec Khadija qui me pend au nez actuellement. C’est à croire que le sort s’acharne sur ma personne dernièrement, tout va dans mon désintérêt par rapport à Nahia et ça ne me plaît pas alors mais pas du tout. J’essaie de faire fi de sa décision de mettre un terme à la relation, mais je dois avouer qu'au fond, j’ai vraiment peur que les choses restent en l’état si je ne trouve pas une solution définitive.


Au moment où j'arrive en haut,    l’objet de mon cauchemar arrive presque en courant dans les escaliers en m'appelant. Je me retourne furieux.


Moi : pas maintenant s’il te plaît.


Khadija : je voudrais vous parler le cheikh et toi.


Moi fronçant les sourcils : si ça concerne cette histoire de mariage…


Ussama surgissant de nulle part : écoute ce qu’elle a à te dire, c’est important.


Je lance un regard appuyé à Ussama qui se contente de hocher la tête plusieurs fois.


Moi soupir las : ok, il est où le cheikh ?


Ussama : en réunion sûrement.


Moi (à Khadija) suis-moi.


On se suit jusqu’à la grande salle de conférences, je tape à la porte et entre sans attendre le retour. Sitôt papa libère ses conseillers de nous laisser avant de prendre une mine sévère en s'adressant à moi. Il attend qu’on soit devant lui pour me balancer la couverture d’un magazine people au visage.


Papa : c’est quoi ça ?


Moi : on peut en parler plus tard s'il te plaît ? 


Papa élevant la voix : tu vas m’expliquer ce que c’est que ce chiffonnier ?


Moi : problème réglé papa, Khadija voudrait te parler et apparemment, c’est important.


Il tourne un regard interrogateur vers elle et elle hoche la tête pour confirmer, ses traits s’adoucissent direct.


Papa (lui désignant une place) : vas-y je t’écoute. 


 Elle s’assoit en même temps que moi sur les sièges juxtaposant le sien avant de prendre la parole pour nous informer de son plan après nous avoir raconté une histoire rocambolesque qui nous laisse dans un état de sidération.  C’est papa qui sort  de sa torpeur en premier.


Papa : est-ce que tu te rends compte de la portée des aveux que tu viens de faire ? Ce sont des graves accusations qui peuvent te porter préjudice si elles s’avèrent fausses.


Khadija : je détiens des preuves de ma dernière séquestration et il y a des gens qui peuvent témoigner.


Il y a flottement.


Papa bref : bien ! C’est une possibilité, mais je ne peux pas utiliser cela contre lui.


Moi : papa, nous n’avons pas d’autres choix…


Il me lance un regard réprobateur m'intimant de me taire puis se tourne vers elle à nouveau.


Papa : ta sécurité j'en fais dorenavant mon affaire, par contre nous allons nous en tenir à la l'injonction de ton père qui reste la meilleure alternative jusqu’ici. C’est pour ton honneur et je tiens à ce que mon fils répare ses torts envers toi.


Moi : sauf votre respect Votre Altesse, je ne veux pas me marier à votre fils.


Papa plissant les yeux en me fixant : c’est toi qui l’obliges  à prendre cette décision ?


Khadija répondant : absolument pas, je viens de vous relater les raisons qui m’ont poussé à faire ce que nous avons fait. Je suis la principale fautive et je veux en assumer l’entière responsabilité.


Papa (regard insistant sur elle) : tu es bien consciente de ce que ça implique pour toi n’est-ce pas ?


Khadija : parfaitement sûre, votre Altesse. Je veux simplement vivre loin de mon père.


Papa : tu n’as pas d’inquiétude à te faire par rapport à cela. Tu sais que tu peux rester ici aussi longtemps que tu le souhaites. Je vais réfléchir à la solution proposée, par contre, tu épouseras mon fils dans le cas échéant. 


Moi : papa...


Papa (me lançant un regard en biais pendant qu'il s'adresse à elle) : tu peux disposer.


Elle acquiesce et s’incline respectueusement avant de se lever et de sortir de la salle. Je me tourne vers papa en prenant un ton sérieux.


Moi : si on considère que ce problème est réglé, je peux te soumettre mon désir de me marier ?


Il relève brusquement sa tête et me regarde.


Papa : tu veux te marier ?


Moi : oui.


Papa : si je veux bien comprendre, il y a quelques minutes à peine, tu ne voulais pas entendre parler de mariage et là, tu veux te marier.


Moi : tout à fait, je ne veux pas épouser cette fille. J’aime une autre et c’est elle que je veux.


Papa : tu aimes une autre (rire sans joie) tu penses avoir le choix ? Cette fille, comme tu le dis, ne serait pas un problème aujourd’hui si tu avais su garder tes couilles entre tes jambes. (criant) Voilà où ta vie de débauche nous a mené ! Et là, tu as failli m’entraîner dans tes abysses. Si ça ne tenait qu’à moi, tu aurais épousé cette fille dès l’instant où nous avons quitté la maison de son père. Non mais grandit à la fin Khalil, la vie n’est pas un jeu. Combien de fois je me suis saigné à t’inculquer des valeurs ? Combien de fois t’ai-je rappelé à l’ordre parce que tu es mon aîné et que tu es appelé à me succéder ? 


Je soupire seulement.


Papa : et dire que j’ai voulu suivre ta mère dans un délire que tu serais devenu le fils exemplaire que j’ai toujours clamé. 


Moi : et c’est le cas.


 Il me lance le journal de nouveau.


Papa : en voilà un exemple de ton changement.


Moi parlant vite : c’est elle que je veux épouser.


Il me regarde comme si je venais de dire l’horreur du siècle.  


Papa : tu… Quoi ? Elle, ta collègue de to go ? 


Moi : oui Nahia.


Papa ton catégorique : n’y penses même pas.


Moi sur le même ton : c’est tout réfléchit.


Papa : jamais tu n’épouseras cette fille.


Moi avec conviction : je vais le faire que tu le veuilles ou non.


Papa hurlant : sors de mon bureau !!


Je n’attends pas de me le faire répéter avant de sortir furax de la salle. Colère qui s’estompe dès que mes yeux se posent sur le profil de la personne adossée contre le mur tout près de la porte de mon appartement.


Moi refermant la porte : comment tu es venue ici ?


Elle me montre son déguisement et je souris pendant qu’elle s’éclaircit la voix.


Nahia : j’ai parlé avec Khadija.


Moi : oui elle…


Nahia (me stoppant d’un geste de la main) : ce qu’elle a dit joue beaucoup en ta faveur, mais ce n’était pas ça le réel problème. Tu t’es tellement battu pour me mettre en confiance et tu sais combien de temps ça m’a pris pour me lâcher (oui de la tête) voilà qu’au premier tournant tout est remis en cause, je me demande ce qu’il en sera pour le restant de nos vies.


Moi la fixant : tu me fais confiance ? 


Elle me regarde genre.


Moi rectifiant : tu veux bien me faire confiance à nouveau ?


Nahia acquiesçant : il n’y aura plus de filles qui ressurgira de ton passé pour ajouter son grain de sel.


Moi : aucune.


Nahia : et ton père ? Je vous ai entendu…


Moi la coupant : il fera avec !


Elle me lance un regard perplexe, mais ne dit rien pendant un moment au bout duquel elle soupire.


Nahia : une dernière chose, ça m’a blessé que tu aies voulu me cacher cette histoire. On était bien d’accord de toujours tout partager, tout.


Moi : je sais, je suis désolé. (sans transition) On peut reprendre à zéro ?


Elle acquiesce d’un signe de tête.





 


Le tournant décisif