De tout mon être

Ecrit par Plénitudes by Zoé

Chapitre 11 : De tout mon être.


**** Sabine ****


Je roule les cheveux au vent, enfin j‘aimerais bien mais la sécurité avant tout alors j’ai mon casque, mes gants, mes bottes et mon blouson de motard, Nath me les avais laissés dans l’appart sans que je ne le sache, sûrement quand j’étais allée changer de chaussures. Chaque jour je bénis le Seigneur pour la vie de cet homme extraordinaire dont je suis la côte. Je me souviens encore lorsque je faisais partie du monde et que je recherchais par moi-même l’homme de ma vie, jamais je n’aurais pu imaginer que laisser le Seigneur décider pour moi me ferait rencontrer un homme qui serait au-delà de mes espérances. C’est toujours comme ça avec Lui, je m’imagine des choses déjà extraordinaires mais Il trouve toujours le moyen de me surprendre et de faire comme je n’aurais même pas pu imaginer. Il est tellement agréable et apaisant de se confier en l’Éternel. Cette chanson me revient souvent dans des moments comme celui-ci où je ressens le besoin de L’adorer. 

Dieu Tout Puissant, Quand mon cœur considère 

Tout l’univers créé par Ton pouvoir

Le ciel d’azur, les éclairs, le tonnerre

Le clair matin ou les ombres du soir

(De tout mon être, alors s’élève un chant

Dieu Tout Puissant, que Tu es grand) bis

Quand par les bois ou la forêt profonde,

J’erre et j’entends tous les oiseaux chanter

Quand sur les monts, la source avec son onde

Livre au zéphyr son chant doux et léger

(Mon cœur heureux s’écrie à chaque instant :

Ô Dieu d’Amour, que tu es grand !) bis

Mais quand je songe au sublime mystère 

Qu’un Dieu si grand ait pu penser à moi

Que Son cher Fils soit devenu mon frère

Et que je suis, l’héritier du Grand Roi

(Alors mon cœur redit la nuit, le jour :

Que tu es bon, Ô Dieu d’Amour) bis

Quand mon Sauveur, éclatant de lumière

Se lèvera de son trône éternel

Et que laissant les douleurs de la terre,

Je pourrai voir les splendeurs de son ciel

(Je redirai dans son divin séjour :

Rien n’est plus grand que Ton Amour) bis.


Ce chant me met toujours en joie et me remplit d’émotion aussi, la larme à l’œil tout ça. Enfin ce n’est pas vraiment le moment de pleurer si je ne veux pas causer un accident. Je me demande quand même ce que Nath a prévu pour ce week-end. C’est la toute première fois que nous ferons un voyage à deux, dans le souci d’éviter la tentation et de rester dans la sanctification jusqu’à notre mariage, même si pour l’instant, ça reste un truc abstrait, je ne sais même pas quand nous parlerons sérieusement de mariage parce qu’avec lui qui est toujours parti dans un pays en guerre quelque part et moi qui mène mes combats ici avec mon rythme de vie qui ne convient pas forcément à une vie de famille. Sans parler du fait que je me fais légèrement du souci pour Nath et son moral, il ne m’en parle pas mais je sais que parfois il n’arrive pas à dormir à cause des horreurs qu’il a vues et parfois commises, avant de rencontrer Jésus. Mais c’est une tout autre histoire. Bon là il vaudrait mieux que je rentre parce qu’à force de réfléchir je vais finir par devenir un danger de la route.

Je me gare au parking en bas de l’immeuble et monte au troisième étage, ils ont enfin réparé l’ascenseur, ça me facilite vraiment la vie. Ça me fait penser à Marla qui s’en plaignait tout le temps, j’espère que tout va bien chez elle.


**** Marla ****


Pâques c’est après-demain et je ne sais même pas où je vais aller à l’église. C’est un peu normal vu que je n’allais pas vraiment à l’église à Lomé alors me voici en train de me dire que rater deux dimanches consécutifs ce n’est pas si grave et que j’irais à mon retour en France dans 4 jours. Les cours commencent le mercredi donc ça sera un peu juste mais c’est faisable. Je vais à la boutique à côté pour prendre un truc sucré à grignoter, je porte des sandales et sors de la maison. En chemin, une dame du quartier m’apostrophe, ce qui m’étonne parce que nous n’avons jamais eu une discussion autre que nos bonjours et bonsoirs. Je m’arrête donc et après les salutations d’usage :

Elle : Je voulais te parler par rapport à ta mère.

Moi : Je vous écoute

Elle (attitude compatissante) : Écoute, ne prends pas mal ce que je vais te dire mais il fallait que je te vois par rapport à cette situation. Lorsque vous êtes arrivés dans ce quartier, ta mère n’était pas du tout comme ça et je me demandais ce qui a bien pu se passer.

Moi : Je ne sais pas quoi vous dire Madame

Elle (soupirant) : Je te propose de venir avec elle dans mon église pour une séance de délivrance à l’occasion de la pâque.

Moi : Moi je n’y vois aucun inconvénient mais elle, je ne crois pas qu’elle accepterait. Je n’ai aucune influence sur elle pour l’obliger à venir mais je vais lui en parler.

Elle : Essaie quand même on va voir. Sinon il y a aussi des personnes de mon village spécialisées dans l’alcoolisme si tu veux.

Moi (pressée de mettre fin à la conversation) : Merci de votre sollicitude. Passez une bonne journée

Elle : Merci, toi aussi.

Ce que cette femme ignore c’est que les gens qui se disaient spécialisées dans ce genre de choses ont défilé dans cette maison, envoyés par la famille de ma mère pour essayer de trouver une solution. Mais malgré tout ce qu’ils ont réclamé comme argent pour acheter je ne sais quoi qui devait aider ma mère à aller mieux, tout cela n’a servi à rien. Et des femmes qui m’arrêtent dans la rue pour soit se plaindre de ce que ma mère leur fait subir, soit proposer des solutions (l’une d’elles m’a dit de l’envoyer dans l’hôpital psychiatrique de Zébé, une autre de l’enfermer à la maison pour qu’elle n’ait plus accès à l’alcool mais ça n’a donné que des fenêtres brisées dans la bagarre). Je comprends que ça part d’une bonne intention mais j’ai fini par comprendre qu’elles le font plus dans le souc de tranquilliser leur conscience, pour pouvoir se dire : « J’aurais essayé ». Mais ça n’aide pas vraiment. 

J’ai l’impression que je suis là depuis une éternité, j’évite tous mes amis d’ici depuis le jour où elle a chassé l’un d’eux et m’a copieusement insulté devant lui. Je me suis isolée, plus que d’habitude en tout cas et tous ceux à qui je parle de ma situation ne comprennent pas. Ça me sidère de me dire que de toutes les femmes qui ont eu des problèmes de couple, ma mère a décidé de faire de nous ses ennemis au lieu de se retirer de la situation pour essayer de s’en sortir, elle préfère rester une éternelle victime-persécutrice se justifiant par la douleur qu’elle ressent. Ma rancœur envers elle grandit de jour en jour et je ne sais pas comment arrêter sa croissance. Je la sens s’installer au fond de moi tel un monstre visqueux dont les tentacules courent à travers mes veines pour faire de moi un être haineux et méfiant. 

Tous ceux qui sont au courant de cette situation se focalisent sur notre mère. Mes frères et moi sont des laissés pour compte. Normal, c’est notre mère, nous devons nous taire et subir comme le feraient de bons enfants obéissants, nous devons être tels des robots, capables de tout supporter sans jamais craquer et lui être entièrement dévoués car elle est malade, ce n’est pas de sa faute. Si nous craquons, c’est un scandale, de bons enfants ne devraient jamais se comporter ainsi peu importe si elle nous pousse tellement dur et nous presse si fort que c’est notre sang qu’elle récolte. Moi je dis bullshit ! S’il n’en tenait qu’à moi, je serais partie depuis longtemps et on n’entendrait plus jamais parler de moi dans cette famille. La seule chose qui m’en empêche, c’est ce que m’a dit une fois Esther : « Elle est plus calme quand tu es là ». Alors je prends sur moi et je supporte.

Le Fardeau des Autre...