Dos au mur
Ecrit par Farida IB
Khalil…
Maman : Al-Amine tu ne trouve pas que tu exagères ? Je peux savoir ce qui te rebute si tant ?
Il lui lance un regard désapprobateur.
Papa : Oum Koulsoum, le moment est vraiment très mal choisi pour parler de ça. Nous venons de passer une terrible semaine tout ce que je veux, c’est me reposer.
Moi : il faut qu’on en parle maintenant parce que je ne veux plus revenir là-dessus.
Papa voix posée : Khalil, je n’ai pas envie de parler de ça maintenant.
Moi : il le faut pourtant ! Papa, nous ne pouvons pas continuer ainsi, je suis vraiment à bout. C’est elle mon choix acceptes-le une bonne fois. Elle vient de te prouver qu’elle est largement au-delà des critères que tu m’imposes bien que ça n’engage que moi. De plus, tu tolères la relation d’Ussama et Khadija, et même le Sultan qui était aussi despotique et conservateur que toi vient de nous prouver qu’il n’y a pas d’inimitié irréconciliable.
Je le suis de près lorsqu’il traverse les couloirs de leurs appartements pour leur chambre. C’est maman qui a ouvert le sujet dès que nous avons franchi le seuil des portes du palais. Donc je les ai suivis pour qu’on en finisse une fois pour de bons, car c’est la toute dernière fois que je vais essayer de négocier avec lui. J’avais déjà pris la décision de me marier avec ou sans son accord.
Je partage un canapé avec maman et papa se met sur un autre en face et pose sa tête contre le dossier.
Papa : je pense toujours que ce n’est pas la femme qu’il te faut, elle a un certain nombre de qualités requises, mais…
Maman le coupant : tu fais erreur parce qu’elle est exactement la femme qu’il lui fallait !
Il la regarde longuement avant de poursuivre d’un ton calme.
Papa : elle n’est pas vierge.
Moi : Khadija ne l’est pas non plus.
Papa : ce n’est pas la même chose, nous avions une dette envers cette dernière ou tu veux que je te fasse un dessin ?
Moi : non mais… (inspiration) Papa tout comme Nahia, Khadija n’a pas été sage à son jeune âge. De même que toi et moi ! Nous avons fait des erreurs qui ont peut-être laissé des traces. Mais papa ce n’est pas sur le passé qu’une femme doit être jugée. Tu reconnais qu’elle a le dîn (croyance et foi) et du répondant, le reste, ce n'est que des détails.
Papa : fiston, tu as une réputation à tenir. Ta mère n’a pas eu d’enfant avant que je ne l’épouse, ta grande mère et ton arrière grande mère non plus.
Maman roulant des yeux : accepte la différence, franchement la religion et le fait de savoir si elle sera une bonne épouse pour ton fils devrait être le cadet de tes soucis. Tu vas rester dans cette logique pour faire rater à ton fils l’occasion d’avoir une bonne épouse qui lui apportera une bénédiction.
Papa soupire débitée : qu’est-ce que tu en sais Oum Koulsoum, qu’est-ce que tu en sais ?
Maman : j’en sais beaucoup plus que tu ne le penses, Khalil a la chance de tomber sur cette fille là. Tu es tellement borné que tu ne te rends pas compte qu’elle a réussi là où toi tu as échoué. Elle a su le remettre sur le droit chemin. Aujourd’hui, il prend au sérieux son rôle de prince comme tu l’as longtemps désiré. Ces dernières années, il a mené toutes les batailles auprès de toi, et même celles que tu ignores. Il dépense d’ailleurs beaucoup de temps et d’argent pour les enfants. Il donne son sang pour sauver des vies. Il parcourt le globe pour aider ceux qui n’ont pas eu la même chance que lui et a même créé plusieurs associations caritatives qui témoignent de sa générosité.
Je la regarde abasourdi, maman qui affronte papa. Il y a des choses qui ont bien changé ici.
Papa : certes, mais…
Maman (sur un ton sec et énervé) : non mais à un moment pense au bonheur de ton fils ! Le problème, c’est que ça fait des années que vous êtes au même point et ça met en péril l’équilibre familial. Je suis contrainte d’attendre tous les trimestres pour voir mon fils. À un moment, c’est bon quoi !
Je fronce les sourcils et jette un coup d’œil à papa qui la regarde les sourcils froncés.
Papa : Koulsoum laisse-nous seuls.
Elle soupire de frustration avant de se lever pour s’en aller, papa se redresse et me regarde droit dans les yeux.
Papa : trouve-toi n’importe quelle femme Émirienne et qu’on en parle plus.
Moi m’insurgeant : je ne veux pas n’importe qu’elle femme, c’est elle qui fait battre mon cœur.
Papa : c’est mon dernier mot.
Moi me voulant conciliant : papa essaie de te mettre à la place de son père, imagine-toi que c'est Yumna qui se fasse ainsi rejetée, personne n'est à l'abri.
Papa : je n’ai pas besoin de l’imaginer parce que Yumna n’osera jamais causer un tel déshonneur à notre famille.
Je soupire et me passe la main dans les cheveux.
Moi : ok, j’ai choisi celle avec qui je désire partager le restant de ma vie, si tu n’es pas d’accord alors je ne me marierai pas et bien entendu que je ferai ma vie loin d’ici. Tu peux garder le trône pour Ussama ou Yumna.
Je me lève et sort en trombe des appartements, ce n’est que lorsque Yumna pousse un petit cri de douleur que je remarque sa présence derrière la porte.
Moi : tu fais quoi là ?
Yumna : je venais voir papa, le moment est mal choisi n’est-ce pas ?
Moi : oui, où est Nahia ?
Yumna : elle doit être avec Cartia et Khadija.
Moi : va lui dire de préparer nos affaires, on s’en va.
Yumna surprise : mais vous venez d’arriver.
Moi brusque : Yumna, je ne veux pas me faire répéter.
Yumna : oh ?
Elle fait volte face et je continue d’avancer toujours aussi en colère et me calme directe lorsque j’entends maman m’appeler.
Maman : Khalil où est-ce que tu vas ?
Moi soupirant : je rentre à Lomé, je ne veux plus rester ici une seule seconde.
J’attends qu’elle me rejoigne.
Maman : calme-toi, la colère ne résoudra rien.
Moi : maman j’en ai marre que papa fasse le buté…
Maman (sur un ton de reproche) : Khalil !
Moi : je ne sais plus comment me comporter vis-à-vis des parents de Nahia, elle en souffre même si elle me le fait jamais savoir.
Maman : ton père finira par changer d’avis crois moi.
Moi : quand ? En attendant le temps poursuit sa course.
Elle pose une main sur mon bras et me lance un regard attendri.
Maman : garde la foi mon chéri, patientes-toi encore un peu et fais des douas, de toute manière si Allah a destiné que vous vous mariez cela se fera quoi qu'il arrive.
Je soupire et la suis à la cuisine, elle me serre un verre d’eau que je bois goulûment après m’être assis.
Moi : maman comment tu sais pour mes œuvres caritatives ?
Maman : je m’informe qu'est-ce tu penses ? (je souris) Vous m’avez tous abandonné tes frères et toi et quand ton père s’absente de son côté pour ses affaires diplomatiques, ce sont les journaux et magazines qui me tiennent compagnie. Tous les médias font bonne presse de toi.
Moi : ce n’était pas dans ce but que je le faisais, quoiqu’avec les medias sociaux de nos jours on ne peut plus vivre sa vie tranquille. (sautant du coq à l’âne) Quelqu’un a pensé à joindre Ussama depuis hier ? On a quand même des fiançailles à fêter.
Maman ravie : mâcha Allah, tu ne veux plus partir ?
Moi : non, de toutes les manières je devais me rattraper avec Jemal.
Maman : tu lui enverras un cadeau de ma part.
Moi : ok
Nahia pénètre la cuisine avec Sana dans les bras.
Nahia à moi : il paraît que nous repartons.
Moi : plus maintenant.
Nahia : chouette ! Je n’ai pas envie de me séparer de ces joues d’amour.
Maman (braquant les yeux sur le bébé) : c'est peut être votre tour la prochaine fois.
Moi : je ne vois pas comment, les seuls futurs mariés ici, c’est Ussama et Khadija.
Maman : tu n’en sais rien !
Nahia : vraiment !
Moi (lançant un regard en biais à Nahia) : on verra bien.
Maman changeant de sujet : amène-moi la puce que je la salue un peu, elle m’a trop manqué.
Pendant qu’elle prend le bébé Khadija, Yumna et Cartia envahissent la cuisine. Je les laisse donc entre femmes et monte me reposer. Ussama arrive le lendemain et nous informe qu’il a pris par Oman et qu’ils ont convenu de célébrer les noces après les études de Khadija. Nous nous sommes quand rendus là-bas deux jours plus tard pour les présentations officielles et les pères ont tenu à préciser qu’ils ne sont pas mariés donc ils n’ont pas le droit de forniquer !
À notre retour Nahia et moi, nous retrouvons avec mes potes et leurs femmes chez Salim pour un brunch. Pendant que les femmes s’appliquent à la cuisine, avec les gars, nous installons les meubles à la terrasse en charriant Jemal sur sa décision brusque de se marier. Sois dit en passant nous avons quand même pu rattraper leurs fêtes et j’ai profité pour mettre le paquet sur les cadeaux de la fille. Elle a quand même réussi l’exploit de mettre la corde au cou à Jemal ! Il a fallu que je les voie de mes propres yeux pour croire à cette histoire. Le plus fou, c’est que le frangin a l’air amoureux et heureux.
Jemal répondant à Salim : beh Abdallah avait tout vrai, quand c’est la bonne, on n’hésite pas à passer aux choses sérieuses.
Je prends une nappe dans la corbeille à linge qu’il m’aide à dérouler.
Salim le fixant d’un air sceptique : je n’en reviens toujours pas, bien que j’aie été ton témoin.
Moi : moi, je commence à peine à y croire.
Jemal pendant qu’on étale la nappe : rhoo les mecs n’abusez pas.
Moi : oui oui, bon raconte moi encore l'histoire de votre rencontre. Donc tu l’as vu d’emblée ça t’est apparu comme une évidence ?
Salim : vraiment kiakiakia…
Jemal : rhooo ça ne s’est pas du tout passé comme ça (racontant) nous nous sommes rencontrés lors d’une soirée et elle devait seulement " pimenter " ma soirée, mais en discutant avec elle j’ai tout de suite accroché. Puis un jour, j'ai attrapé un virus qui m'a cloué au lit pendant plusieurs jours. Elle a fait plusieurs heures de route toute seule pour venir s'occuper de moi, alors qu'elle devait repartir à 4 h du matin le lendemain pour le travail. Elle l'a fait quand même avec le sourire, et c'est là que j'ai su que c’était elle.
Moi sceptique : toutes les filles désespérées le font, elles sont aux petits soins.
Jemal avec ferveur : non Chirine est loin d’être une manipulatrice (sourire en coin) c’est une fille adorable, discrète et surtout facile à vivre.
Salim : lol Jemal tu la connaîs à peine, d’ici là elle va nous sortir ses griffes comme sa copine.
Jemal : même pas.
Il attend qu’on sorte des chaises du débarras pour reprendre.
Jemal : Chirine n’est pas Alisha parce qu’avec elle ma mère et ma sœur ont tout de suite adhéré. Ça fait juste six mois qu’on se connaît, mais elle me comprend mieux que personne. Quand je n’ai pas le moral, elle sait le déceler immédiatement et elle sait me rendre le sourire. Elle est toujours là pour moi, d’une gentillesse extrême. Elle m’a accordé sa confiance et moi en retour, je fais de mon mieux pour être à la hauteur.
Nous nous arrêtons de marcher et le regardons les yeux et la bouche ouverts.
Moi : bein dis donc ! La vie est pleine de surprises, Jemal qui en pince pour une fille !
Jemal me donnant une tape sur la nuque : go casse Khalil.
Salim me regardant : on attend plus que toi, c’est là qu’on va tout donner.
Jemal ajoutant : comment ça va être chaud !!! En fait tu as pu parler à tonton comme prévu ?
Moi soupirant : ce n’est toujours pas bon.
Salim : rhoo le Cheikh nous casse le feeling lui aussi.
Jemal : tu aurais dû me laisser l’épouser depuis le temps, mon père n’est pas si compliqué. (avisant nos regards) Les gars, je plaisante.
Moi : mouais très drôle.
On bavarde encore de tout et de rien lorsque Salma nous rejoint, elle a un nouveau bidon qui se fait déjà voir. Elle arrive et se place à côté de Salim.
Salma : les gars, vous avez fini ? Nous allons bientôt passer à table.
Jemal se léchant les lèvres : on n’attend que ça.
Salma : alors viens nous aider à mettre la table.
Jemal se levant : avec plaisir ma chérie.
Salma sourit et le suit, je me tourne vers salim.
Moi : au fait félicitations pour ton nouveau trophée.
Salim se caressant la barbe : ça a vraiment été un travail de longue haleine.
Moi riant doucement : n'est-ce pas ?
On éclate de rire ensemble, finalement nous mettons tous la main à la pâte pour apprêter la table ensuite nous nous installons pour manger dans une ambiance bonne enfant. Jemal et sa femme demeurent les vedettes du jour, le couple de l’année (rire). Nous les abandonnons après la prière de l’après-midi pour une balade digestive sur le passage souterrain de la corniche. J’ai un bras autour de son épaule pendant que nous discutons au calme de nos projets en cours. Nous avons implicitement décidé de ne plus aborder le sujet « accord de mariage » en ce qui concerne sa famille elle dit qu’elle gère donc life goes on ! N’en déplaise à mon père.
Nahia me prenant de court : ça me plairait bien qu’on s’installe à Abu-Dhabi, enfin si tout se passe bien.
Moi : c’est vrai ? Tu va abandonner ta famille ?
Nahia : bon nous n’allons pas partir d’un seul coup non plus et je ferai surement de temps en temps des tours pour les voir.
Moi : c’est une idée qui me plaît bien, mais tu as pensé à Nabil ?
Nahia : bah on verra comment s’arranger avec son père, de toute façon l’un de nous deux devra faire cette concession tôt ou tard. Tu ne peux pas osciller indéfiniment entre deux cieux.
Moi : ce n'est pas faux, le seul problème qui prédomine c'est l'agence. (elle arque le sourcil) on la délocalise elle aussi ?
Nahia soupirant : nous aviserons tonton Lil.
Moi souriant : j’aime quand tu m’appelles comme ça, ça sonne sexy.
Nahia : lol.
Nous rentrons plus tard à la maison pour croiser mon père dans l’un des couloirs du palais. Nous nous saluons brièvement puis il passe simplement sa route.
*** Quelques jours plus tard ***
Yumna…
J’interromps ma discussion avec Elias pour répondre au valet de mon père, j’attends qu’il ressorte de ma chambre pour pousser un long soupir.
Moi revenant à mon coup de fil : bAbe il faut que je te laisse, mon père veut me parler.
Il soupire parce qu’on sait tous les deux de quoi il retourne.
À coup sûr, il veut me parler de mariage, comme si moi, j’avais dit ici que je voulais épouser quelqu’un. Depuis que je suis rentrée ça n’arrête pas. Les propositions tout aussi intéressantes les unes que les autres fusent de partout. Ils viennent pour apprécier le produit pour lequel ils ont eu à négocier. Désolée de m’exprimer en ces termes, mais c’est l’impression qu’ils donnent réellement. Chacun vient étaler sa fortune comme s’il s’agissait d’une vente aux enchères, ils ne s’intéressent pas vraiment à ma personne encore moins à ce qu’ils peuvent m’apporter en tant qu’époux. Et là, je ne parle pas de sentiments ! Je les décline poliment parce que je ne suis pas folle de dire à mon père que je me suis éprise d’un fi dine (non-musulman) et surtout que j’ai perdu mon innocence avec ce dernier. J’envisageais leur dire la vérité avant mon retour à L.A pour que papa arrête de se donner la peine jusqu’à ce que je l’entende défendre mon honneur avec fermeté devant Khalil. Je dois avouer que ça m’a un peu secoué sur le coup, mais bon le mal est fait. J’assume jusqu’au bout.
Elias : tu comptes lui en parler quand ?
C’est à mon tour de soupirer.
Moi : c’est compliqué, encore plus avec l'arrivée de mon frère.
Elias : tu as dit qu’il y a une accalmie !
Moi : oui, mais il y a quand même une tension dans l’air qui ne dit pas son nom. Maman boude le boss, je n’ai pas envie d’en rajouter une couche.
Elias : c’est toi qui vois, je suis prêt à me présenter devant lui. Je peux même me convertir au besoin.
Moi : lol ça ne se passe pas comme ça, tu ne peux pas te reconvertir à cause de moi.
Elias : tu importes pour moi.
Moi : sans le moindre doute, mais si tu veux embrasser l’islam, tu dois le faire par conviction profonde et intime.
Elias : justement, depuis des années je m’informe, je m’instruis et j’ai commencé à m’y intéresser réellement.
Ce qui est vrai.
Moi : ça reste à vérifier.
Elias : bon, est-ce que tu as une autre solution à me proposer ?
Moi plaisantant : partir au bout du monde et vivre notre amour au calme.
Elias ton réprobateur : Cheikha !
Moi : on en discutera demain de vive voix, tu viens toujours me chercher hein ?
Elias : sans faute.
Moi : ok, je dois te laisser sinon mon père risque de venir me chercher lui-même et ça risque de partir en clash.
Elias : ce ne sera pas mal qu’il te donne la fessée parce que tu deviens un tarpin impertinente. Par ta faute, j’ai fait une insomnie hier.
Moi ricanant : c’était pour te donner le ton de la semaine krkrkr…
Elias : je n’attends que ça.
Moi : moi aussi.
Elias : à toute ma belle.
Moi : bye pumpkin !
Il éclate de rire au moment où je raccroche, je fais un tour dans l’armoire et prends un hijab avant de sortir de la chambre. Je sors de la chambre pour me retrouver à attendre que papa finisse sa réunion pour me recevoir. Au bout d’une heure, je tape du pied et me décide à rejoindre les filles au balcon du premier. Nous passions une chic soirée entre filles histoire de nous dire au revoir avant que je ne me lève pour répondre à l’appel d’Elias. Khalil et Nahia s’en vont, Khadija retourne à Singapour et j’ai raccourci mon séjour de mon côté. À l’allure où vont les choses, je risque de me voir contrainte de choisir un homme parmi ces prétendants étant donné que mon père lorsqu’il a une idée derrière la tête, il ne lâche pas tant qu’il n’a pas obtenu gain de cause. Je n’en ai parlé à personne pour le moment, mais je compte faire un détour à Bronx pour terminer mes congés avec Elias et ça promet d’être toute une semaine (clin d’œil !).
Je les trouve avec maman qui pose un plateau de petits gâteaux sur le guéridon. Elle se relève ensuite et me lance un regard plein de sous-entendus pendant que les filles font pareilles.
Cartia : ce n’est pas trop tôt !
Nahia renchérissant : nous commencions à nous inquiéter.
Moi (reprenant ma place près de Khadija) : vous inquiétez de quoi ? J’ai été retenu par papa, il a envoyé quelqu’un me chercher alors qu’il n’est pas disponible pour me recevoir.
Maman : en tout cas, il faut dire à cet homme avec qui tu passes ta vie au téléphone de venir voir tes parents.
Nahia et Cartia me lancent un regard entendu.
Moi biaisant : oumi qui a dit qu’il s’agissait d’un « il » ?
Maman : pas besoin d’être un devin pour le savoir, à chaque fois que (articulant) cette mystérieuse personne t’appelle, tu deviens rouge comme une tomate.
Les autres pouffent de rire.
Moi faisant la moue : ce n’est pas vrai !
Khadija hochant la tête : si, et tu fais apparaître ton plus beau sourire comme si cette personne pouvait te voir, ça ne peut que…
Je lui donne un léger coup de coude, elle comprend et se tait. Maman nous regarde tour à tour avec insistance.
Maman : c’est un homme n’est-ce pas ? C’est à cause de lui que tu refuses ceux que ton père te présente ?
Moi : ils ne m’intéressent pas.
Maman plissant le front : tous ?
Moi : oui tous, d'ailleurs je ne veux pas qu’on me présente des hommes. (m’emportant) Non mais ohh nous sommes au 21e siècle, qui fait encore ce genre de choses ?
Maman ton dur : jeune fille, tu baisses d’un ton avec moi.
Je soupire rageusement.
Moi reprenant plus calme : franchement, je n’ai rien demandé à papa. (haussant le ton) Je suis capable de choisir mon partenaire parce qu’après tout, c’est moi qui vais finir ma vie avec lui. Il ne va pas m’imposer un homme ou refuser mon choix à l’instar de mes frères !!
Maman arque un sourcil interrogateur, Nahia et Cartia se regarde sans rien dire et Khadija me lance un regard stupéfait.
Maman calmement : je ne me souviens pas qu’il t’ait imposé un homme.
Moi : mais c’est ce qu’il est en train de faire, il accepte de recevoir tous ces soupirants pour quoi et pourquoi maintenant ?
Maman : parce que tu es en âge de te marier.
Je soupire bruyamment et me lève du divan.
Moi : de toute façon, tu le défends toujours ton vieux mari. Je préfère me casser d’ici avant de me disputer avec toi.
Maman : Yumna !!
Je quitte le balcon pour le bureau de papa, c’est lorsque je me retourne pour refermer la porte de l’appartement de Khadija que je constate la présence de maman derrière moi.
Maman : Yumna qu'est-ce qui te prend ? Pourquoi tu deviens insolente à chaque fois qu’on te parle d’un homme ?
Moi exaspérée : parce que j’ai déjà quelqu’un !
Maman arquant le sourcil : c’est qui ?
Moi me rendant compte de ma bêtise : …
Maman : je veux que tu me le présentes dans le plus bref délai.
Je lui lance un coup d’œil en cherchant quoi lui répondre, au même moment Khalil et papa débarque dans le couloir accompagnés de deux autres messieurs. Papa ralentit lorsqu’ils arrivent à notre niveau.
Papa : tu m’attends dans mon bureau.
Moi : d’accord.
Je n’attends pas qu’ils partent pour me défiler.
Maman me lançant : cette discussion n’est pas terminée.
Je me retourne à demi et hoche la tête sans rien dire. Dans le bureau de papa, je m’installe dans l’une des chaises en face de la sienne. Il arrive cinq minutes plus tard et s’installe à son tour à peine qu’il commence.
Papa : je pensais que tu étais là pour quatre semaines.
Moi mentant : oui, mais on m’a appelé d’urgence à l’hôpital.
Papa : ok, est-ce que tu as pris le temps de réfléchir à toutes ces propositions qu’on t’a faites dernièrement ?
Moi : papa ça peut au moins attendre que je finisse mon internat ?
Papa : je t'ai laissé assez de temps Yumna. Tu as dépassé l’âge des rêves innocents, il est temps que tu te maries.
Moi soupirant : je me marierai papa, mais je veux choisir moi-même mon conjoint.
Papa fronçant les sourcils : comment ça ? Personne ne te convient parmi tous ceux qui ce sont présentés ? Même le fils d’Adnane ? (Premier ministre d’Arabie Saoudite).
Moi : non ! Je ne vois pas comment deux personnages qui ne se connaissent pas vont s'unir. C'est pour amener ça où ?
Papa en colère : Yumna n’abuse pas de ma patience. Je t’ai concédé beaucoup de choses, mais sur ce point je ne fléchirez pas. (menaçant) Tu as deux mois pour me présenter un prétendant de ton choix, un homme pieux et Arabe !!!
Il tape du poing sur la table du bureau et se lève pour sortir. Je retourne auprès des filles et me mets à tourner en rond pour évacuer ma colère pendant qu'elles émettent chacune leur opinion sur l'explication que je viens de leur donner.
Nahia : tu vas te retrouver dans la même situation que nous.
Moi : j'ai bien peur que oui parce que je ne compte pas le laisser prendre mon bonheur en otage.
Cartia : attends au moins qu'il donne son accord à Khalil et Nahia.
Moi : si je ne me retrouve pas mariée à un de ses gosses de riche avant cela.
Khadija : je ne sais pas pourquoi tu les boudes. J'ai aperçu le fameux Adnane, il n'est pas mal du tout.
Moi faisant la moue : dans quoi même ? Elias est mille fois beau que lui.
Khadija intriguée : c'est qui Elias ?
Cartia : son copain ?
Khadija me regardant : tu as un copain ?
Cartia précisant : américain !
Khadija ouvre seulement les yeux.
Nahia : c'est simple soit tu choisis de rester avec Élias et tu te mets ton père à dos, soit, tu te conformes à ce qu'il a dit.
Moi m'arrêtant de marcher : dans l'un ou l'autre des cas, je suis cuite.
Cartia : comment ça ?
Moi : je me suis donnée à Elias.
Elles parlent toutes en même temps.
Cartia : depuis quand ça ?
Khadija : dis wallah !
Nahia : tu n'as pas fait ça ?
J'acquiesce la tête en fixant Nahia.
Nahia : tu devais d'abord le présenter à ta famille, c'est sur ça qu'on sera entendu.
Moi : ils ne l'accepteront jamais de toute façon.
Nahia : maintenant que tu as couché avec lui si ?
Je ne réponds pas.
Nahia : tu as vraiment foiré sur ce coup, prépare-toi à subir les foudres de ton père et tu l'aurais bien cherché !
Je soupire simplement.
Khadija : ça ne va donc jamais s'arrêter ?
Cartia : vraiment les enfants du Cheikh votre vie n'est jamais simple. Dans tous les cas, je prends mon tabouret et des popcorns en attendant que ça pète.
Sur le coup elles réussissent à semer le doute en moi, doute qui engendre plus tard dans mon lit une crainte par rapport au devenir de ma relation avec Elias, de l'inquiétude et la peur vis-à-vis de la réaction de papa. Je m'endors le cœur rempli de honte, de tristesse, de remords et de regrets. Très tôt le lendemain, c'est dans le même état d'esprit que je me joins à Khadija et Ussama pour escorter Nahia et Khalil à l'aéroport. Je m'enferme ensuite dans la chambre toute la journée pour éviter de croiser ma mère et devoir lui donner des explications. Le soir Ussama nous dépose à notre tour Khadija et moi et j'embarque pour New-York comme prévu, mais au bord de la confusion. Je n'arrive pas à choisir entre quitter Elias ou rester subir les conséquences. C'est pour cela qu'à la sortie du terminal, j'avance vers lui hésitante alors qu'il me regarde en souriant. Un sourire qui ravit mon cœur, mais je me compose un visage neutre. Il fronce les sourcils avant que j'arrive à sa hauteur.
Elias : qu'est-ce qui se passe ? Tu n'es pas contente de me voir ?
Moi : si.
Elias : alors pourquoi tu fais cette tête ?
Yumna : j'ai eu un long vol.
Elias : je te ferai un massage.
Moi forçant le sourcil : je suis partante.
Il prend mes affaires et va les ranger dans le coffre avant de revenir vers moi.
Elias : on y va ?
Moi : euh oui oui.
Elias regard aigu : tu es sûr que ça va ?
Moi : oui, t'inquiète on y va.
Elias : parfait.
On monte ensemble et il se penche pour m'embrasser sensuellement. Je réponds comme une assoiffée. C'est lui qui met fin au baiser.
Elias : tu m'as manqué.
Je soupire intérieurement en pensant que ça va être difficile de me défaire de lui. Rien que sa voix remet les pendules à l'heure.
Moi : tu m'as manqué aussi babe.
Elias : là, je te retrouve.
Je lui fais mon plus beau sourire.