ELLE A TUE MON FILS

Ecrit par Clay story

 A 75 ans, Sophie pouvait se vanter d’avoir bien vécu. Oui ! Il n’était pas donné à tout le monde de vivre comme elle a vécu, se dit ‘elle. Combien peuvent se vanter d’avoir aimé et d’avoir été aimé en retour par le même être inconditionnellement pendant cinquante huit  longues années ? Elle oui ! Elle pouvait s’en vanter ! Elle avait aimé Ben son mari, et il l’avait aimé en retour jusqu’à ce que la mort  les sépare ! C’était une grâce pensa t’elle avec conviction. Et malgré son chagrin, elle n’allait pas perdre son temps à se morfondre. Non ! Elle venait d’enterrer son amour certes ; mais  elle allait célébrer leur amour en continuant à raconter leur histoire à la jeune génération, à l’enseigner sur les fondements d’un mariage solide. Elle allait continuer à faire vivre leur centre d’aide et d’accompagnement des couples en difficulté, jusqu’à ce qu’ils puissent se voir à nouveau selon la volonté su Seigneur. Tellement de couples avaient été restaurés grâce à eux ; non qu’ils en fussent pour quelque chose, mais c’était la grâce de Dieu, pensa t’elle sous le coup de l’émotion. On les appelait affectueusement Papy Ben et Mammy Sophie. Désormais il n’y aurait qu’elle.

Elle était perdue dans ses pensées quand sa jeune assistante vint lui annoncer l’arrivée du jeune couple qu’elle devait recevoir : Robert et Anne. Selon leurs lettres, ils étaient mariés depuis sept ans mais semblaient déjà ne plus se supporter. Chacun pointait du doigt les défauts de l’autre sans pour autant s’avouer les siens. Elle eut un léger sourire. Ce défaut était commun à la majorité des jeunes couples. Robert en voulait profondément à sa femme. « Elle a tué mon fils madame! Elle était toute ma vie ! J’avais confiance en elle, et elle a tué mon fils !»,  s’était ‘il écrié au téléphone la semaine passée, quand elle l’avait contacté pour le convaincre d’accompagner sa femme aujourd’hui.

Elle se leva, pria un instant et se dirigea vers son bureau afin de les recevoir……

En entrant dans le bureau, Sophie fût premièrement frappée par leur langage corporel, assez expressif qui semblait crier : on n’a plus rien à faire ensemble !

En effet, assis aussi loin de l’autre que le permettait la configuration des canapés de la pièce, ils se tournaient en plus dos ! Ils se levèrent pour la saluer  dès qu’ils la virent et lui présentèrent leurs condoléances pour son mari.

-Nous ne l’avons appris qu’à notre arrivée, sinon on ne vous aurait pas dérangé en pareil moment, lui dit Robert sur un ton d’excuse.

-Non, c’était à nous de reporter le rendez-vous s’il y avait lieu de le faire et ce n’est pas le cas. Vous vous attendiez c’est vrai à discuter avec mon mari et moi. Et je peux comprendre que vous puissiez douter de ma capacité à résoudre votre problème. Et vous auriez raison ! Mais la bonne nouvelle, c’est que même si Ben n’est plus là, le Seigneur qui nous a toujours guidés dans l’accompagnement de couples dans votre situation, est encore là aujourd’hui et il agira certainement pour restaurer votre foyer. Vous n’y croyez pas encore ; mais j’en suis persuadée.

Sur ce elle alla prendre place et les invita à faire de même sur le canapé en face. Quand ils le firent elle prit la parole.

-Ok ! Robert et Anne ! C’est avec joie que nous avons reçu votre courrier nous demandant de l’aide pour votre couple. Les circonstances dans lesquelles vous nous avez écrit n’ont rien de joyeux  pour vous certes, mais pour nous c’est un pas vers la restauration de votre couple. Il n’y a pas de méthodes standards ; nous nous laisserons juste guider par la sagesse divine et aussi l’expérience  acquise au cours de toutes ces années. Alors ; voici vos deux courriers, dit ‘elle en sortant leurs lettres de leur dossier.

-Robert, je vais vous remettre la lettre de votre femme et vous la lirez à haute voix. Anne vous ferez de même ; et après nous discuterons. Devant leurs regards étonnés, elle expliqua.

-Le pourquoi est simple. Souvent  les crises dans les couples sont dus au fait que les partenaires ne s’écoutent pas, ne communiquent pas. En lisant la plainte de votre femme vous serez forcé de l’écouter et elle de même.

Robert déplia la lettre de sa femme et commença à la lire d’un ton délibérément détaché.

Chère Mammy Sophie,

Je vous écris suite à notre conversation téléphonique d’avant-hier où vous m’aviez demandé de mettre par écrit mon problème tel que je le vivais.

Je suis mariée depuis sept ans à Robert et ensemble nous avons eu deux enfants : une fille de cinq ans et un garçon qui aurait eu trois ans aujourd’hui. Mais il nous a quitté à 11mois et mon mari m’en tiens pour responsable.  C’était un accident, un stupide accident, une seconde d’inattention et la catastrophe ! J’ai perdu mon bébé. Jamais il ne pourra m’en vouloir plus que je m’en veux moi-même. L’entendre dire que ce n’était pas de ma faute m’aurait sans doute aidé. Mais il n’a jamais prononcé cette fameuse phrase. Il ne me jamais dit qu’il me tenait pour responsable, mais il n’a jamais dit que je ne l’étais pas non plus. Depuis on a perdu notre complicité. On dirait qu’il ne me supporte plus. On se parle à peine, il mange rarement à la maison, et il ne me touche plus. Je le soupçonne même d’avoir une maîtresse. Je suis à bout mammy Sophie. Je pense que s’il n’y avait pas ma fille, j’aurais mis un terme à tout ceci pour retrouver mon fils. Je ne sais plus quoi faire !

Aidez-moi !

Anne

Robert  aurait bien voulu garder le même ton  jusqu’à la fin de la lecture, mais au fur et à mesure qu’il évoluait dans la lecture, toute la colère accumulée depuis ces deux dernières années commençait à prendre le dessus. A la fin, il explosa, bondissant du canapé!

-Un accident ? Un stupide accident ? Elle a tué mon fils madame ! Rien de plus, rien de moins ! Et ma fille aussi aurait pu mourir ! Je lui avais interdit d’aller à cet anniversaire. Si elle avait obéi, elle n’aurait pas eu cet accident, et mon fils ne serait pas mort.

-Il était aussi le mien, t’en souviens-tu ? lui demanda Anne en sanglotant. Dès qu’il a été conçu il a été à moi. Il a grandit en moi, et pendant tout ce temps, il a été à moi. Il est né au bout de 32 heures de travail où j’ai atrocement souffert dans mon corps et dans ma chair ; tu en étais témoin ! Penses-tu que je l’aurais mis sciemment en danger ? Oui je t’ai désobéi ! Oui je me suis rendu à l’anniversaire de ta mère alors que tu me l’avais interdit ! Je l’avais pourtant fait dans ton intérêt. J’estimais que……

-Je me fiche complètement de ce à quoi tu pensais, dit Robert en la coupant. Tu n’avais pas à y être, c’est tout !

Sophie s’adossa au canapé et les observait sans les interrompre. C’était sans doute la seule vrai conversation qu’ils avaient depuis deux ans et elle se garderait bien de les interrompre, à moins que cela ne soit nécessaire.

-Tu étais malheureux d’en vouloir à ta mère. Tu avais besoin d’elle, mais ton orgueil t’empêchait de lui pardonner. Tu avais besoin d’elle Rob et tu as toujours besoin d’elle.

-Faux ! Je n’ai jamais eu besoin d’elle et tu n’avais pas à t’en mêler ! Ma mère est un tsunami ; elle détruit tout sur son passage ! La preuve, elle nous a détruit tu ne vois pas ? Et c’est toi qui lui as permis de le faire !

En les écoutant Sophie devint nostalgique. Elle les comprenait plus qu’ils ne pouvaient le croire. Elle avait aussi perdu un enfant. Sa fille aînée Déborah. C’est déjà terrible de perdre un enfant, mais penser que cela aurait pu être évité était pire. Elle en avait longtemps voulu à Ben. Elle était même persuadée de ne pouvoir jamais lui pardonner. Mais quand on comprend que dans un couple, la rancune est une prison dans laquelle on s’enferme soi même au bonheur, il devient plus facile de lâcher prise.

Revenant à eux, elle constata qu’ils s’étaient à nouveau enfermés dans le silence. Robert semblait toujours en colère et Anne en larmes.

Elle prit la parole et leur dit :

- Vous n’en êtes peut-être pas encore conscients, mais vous venez de faire un grand pas tous les deux. Un grand pas vers un mieux-être de votre couple. Car vous venez de communiquer. Vous avez plus parlé en ces quelques minutes que vous ne l’avez fait durant ces dernières années. Maintenant Anne ; vous allez lire la lettre de Robert.

Elle la lui remit et Anna la déplia et commença à la lire. Elle la débuta d’une voix assurée, mais au fur et à mesure qu’elle progressait dans la lecture, sa voix commença à trembler et les larmes recommencèrent à couler.

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Chère Mammy Sophie,

Nous n’avons parlé que quelques minutes au téléphone et pourtant vous avez réussi à gagner ma confiance. Me voilà donc entrain d’essayer d’écrire la lettre que vous avez demandé ; de mettre par écrit mon  problème avec ma femme tel que je les ressens. J’avoue que je ne sais vraiment pas par où commencer. Je suis rempli de colère et je lui en veux terriblement. Et c’est terrible d’en vouloir à ce point à un être qu’on a aimé par-dessus tout. Elle était non seulement mon âme sœur, mais elle était aussi ma mère et ma sœur. Elle était tout ça pour moi et bien plus encore. Pourquoi a-t-elle tout gâché ainsi dites le moi ! Pour cette femme qui m’a mis au monde et qui ne s’est jamais soucié de moi ! Je ne voyais aucune raison de tisser des liens avec cette femme alors que elle par son amour avait pris sa place dans mon cœur. Je lui ai interdit d’aller la voir et elle m’a désobéi.  Les conséquences de sa désobéissance ont été désastreuses. Mon  bébé  madame ; mon fils ; je me voyais déjà entrain de  lui apprendre toutes ces choses qu’un père apprenait à son fils…….Je lui en veux madame ! Et ça me détruis !

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Arrivée à ce niveau elle s’effondra sur ses genoux et commença à sangloter de plus belle. Elle fit face à son mari, prit appui sur ses genoux  et commença à l’implorer en sanglots.

-Pardonne-moi Robert….. Pardonne-moi mon chéri….. Tu es aussi tout pour moi. Ton silence me tue à petit feu. Je suis désolée, vraiment désolé de t’avoir désobéi ce jour. Pardonne-moi s’il te plaît ! Je m’en veux tellement aussi de la mort de mon bébé, j’en fais des cauchemars toutes les nuits et me réveille en sanglots….. Je suis en vie mais je ne vis plus. Sans toi, sans ton sourire, je ne vis plus Robert. Pardonne-moi !

Robert était ébranlé. La voir ainsi s’humilier, brisée et misérable à ses pieds lui fendait le cœur. Il voulait de tout son cœur la prendre dans ses bras et la consoler. Lui dire qu’elle n’était pas responsable…Mais il n’arrivait pas à lâcher prise ; c’était plus fort que lui. Néanmoins il lui était insupportable de la voir ainsi. Il lui prit les mains et elle leva les yeux vers lui. Ils se fixèrent un instant et  il finit par rompre le silence.

-Lève-toi et va t’asseoir s’il te plaît.

Déboussolée, Anne obéis quand même et alla s’asseoir.

Mammy Sophie prit alors la parole en s’adressant à Robert.

-Il n’est pas facile de lâcher prise n’est ce pas ? Croyez-moi quand je vous dis que je comprends ce que vous ressentez. J’ai aussi perdu un enfant. Ma fille Rebecca. Elle avait seulement huit mois quand elle nous a quittés. Elle est tombée du haut des escaliers alors que je l’avais laissé à la surveillance de son père, et elle n’a pas survécu. Il a eu un moment d’inattention et le pire est arrivé. Je lui en ai voulu, je l’ai haïs longtemps je vous l’avoue.  C’était plus facile de lui en vouloir que d’accepter la réalité en face et de faire mon deuil. Je me servais de la haine pour fuir la douleur. Et je pense que c’est ce qui vous arrive Robert. Il faut que vous vous confrontiez à votre douleur, que vous la laissiez vous submerger. Ce n’est qu’après cela que vous pourrez guérir et accepter ce drame que vous avez vécu comme ce qu’il est : un drame.

Au fur et à mesure qu’elle avançait dans son monologue, Robert se sentait dépouillé, mis à nu…..compris. Des souvenirs de son fils commencèrent à défiler dans sa tête. Des souvenirs qui lui étaient tellement douloureux qu’il aurait voulu crier ; il se voyait crier mais aucun son ne sortait. Il commençait à transpirer et ses mains commencèrent à trembler. Alors il se leva et sortit précipitamment de la pièce avant de perdre le contrôle.

Anne voulut l’arrêter, l’empêcher de s’en aller, mais mammy Sophie l’en empêcha.

-Laissez-le Anne ! Il a besoin d’être seul.  Il reviendra. Je ne pourrai vous dire quand exactement, je ne sais le temps qu’il lui faudra pour évacuer tout ça ; mais ne vous inquiétez pas ;  il est sur la bonne voie. Je vais vous reprendre la lettre, Vous la finirez à son retour. Mais je ne pense pas qu’il revienne de suite, ni aujourd’hui. C’est pourquoi je vous conseille de rentrer. Mais quand il reviendra, il sera enfin prêt à discuter avec vous, à s’ouvrir à vous ; écoutez-le et pardonnez ! Car tout comme il a à vous pardonner, vous aurez également des choses à lui pardonner. En attendant soyez forte ! C’est bientôt la fin !

Anne acquiesça et prit son sac, mais ne semblait pas se décider à partir. Mammy Sohphie se leva et la prit dans ses bras et elle recommença à couler des larmes:

-Ne vous inquiétez ma chérie. Tout ira bien ! Encore un peu de temps et à ma place, ce sera votre chéri qui vous serrera fort dans ses bras.

A ces mots, elle eu un bref sourire, acquiesça de la tête et se détacha de mammy Sophie.

-Merci beaucoup pour tout mammy Sophie. Je vous appelle dès que j’ai des nouvelles.

Cette dernière lui sourit et acquiesça de la tête et elle s’en alla.

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Allongée sur le transat et occupée à ressasser ses souvenirs, mammy Sophie n’entendit pas son téléphone qui vibrait. De nature un peu rêveuse,  elle se réfugiait souvent dans son monde intérieur quand elle était seule. Pour cela elle préférait la douce vibration du portable à la sonnerie, car selon elle, elle permettait un atterrissage à la réalité plus doux.  Le hic, c’est que tu  rates souvent les appels ; lui disait souvent son mari. La lumière du téléphone qui clignotait attira en fin de compte son attention. Elle se leva et alla le prendre sur la table basse sur laquelle elle l’avait déposé plus tôt. C’était Anne.

-Anne, ma chérie, lança t’elle en décrochant.

-Bonjour mammy Sophie ; oui ça va mieux, répondit ‘elle à la question de cette dernière. Il est revenu hier soir. Et on a discuté jusqu’au petit matin. Je ne dirai pas qu’on s’est réconcilié mais pour la première depuis deux ans, j’ai retrouvé le Robert que j’aime et qui m’aimait aussi. Alors je vous appelais pour fixer un rendez-vous comme prévu.

-Ok ; dans l’après-midi 16h, ça vous va ?

-Oui oui mammy Sophie. Merci de nous recevoir si vite. Je vais informer Robert. A tout à l’heure alors.

Mammy Sophie acquiesça et raccrocha. Elle était vraiment heureuse de savoir Robert de retour. Ces deux dernières semaines, elle avait eu à calmer Anne plusieurs fois, car elle désespérait de ne pas avoir de ses nouvelles. Elle avait fini par développer un attachement particulier à ce couple. C’était le premier qu’elle recevait seule sans son mari, après le décès de ce dernier et comme par hasard ils avaient en commun  le même drame : la perte d’un enfant.

Elle était vraiment contente de les aider à le surmonter ; pensa t’elle en reprenant sa place sur le transat.

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(16h à la Fondation.)

Mammy Sophie était entrain de lire ses nouveaux courriers quand Robert et Anne entrèrent dans le bureau.

-Alors comment va mon couple préféré, s’exclama-t-elle en guise d’accueil.

Robert et Anne se jetèrent un regard et Robert fini par répondre.

-Mieux madame.

-Heureuse de l’entendre, dit mammy Sophie en les invitant à prendre place. Elle rangea son courrier et lança à Robert.

-Alors Robert, ça va mieux ? Décidé à aller de l’avant ?

-Hum… Oui madame. Je suis plus serein. J’ai passé les premiers jours dans un motel à broyer du noir. Et je n’arrivais pas vraiment à lâcher prise. La douleur était là, mais j’étais aussi rongé par la colère. Au bout de quatre jours, j’ai pris conscience que je n’y arriverais pas ainsi. Je me suis souvenu de tout ce que vous avez dit, sur l’importance de s’ouvrir, de communiquer. Alors j’ai décidé d’aller me confronter avec ma mère parce que j’étais rempli de colère envers elle. Je tenais Anne pour responsable, mais ma mère encore plus. Nos relations n’ont jamais été bonnes. Elle m’a abandonné à l’âge de cinq ans pour aller refaire sa vie avec un autre homme.  Je ne l’ai plus revu jusqu’à mon mariage avec Anne.  Elle avait voulu s’expliquer mais je ne l’ai jamais laissé le faire. Après  la mort de mon fils, je lui en voulais encore plus…. Alors je suis allé la voir chez elle. Je me suis défoulé sur elle, de toute ma colère, de mes ressentiments, de mes peurs et des mes angoisses, des blessures profondes qu’elle m’avait causée. Cela m’a fait du bien madame. Je me suis senti plus léger. On a fini par avoir une conversation normale. Je ne vous dirai pas que je ne lui en veux plus, mais je ne suis plus rempli de colère envers elle, et je me sens vraiment mieux, léger. J’ai pu enfin relativiser les choses et accepter le drame qu’on a vécu. Alors j’ai compris ce que voulait ma femme. J’ai compris pourquoi elle a tenu à aller à cet anniversaire alors que je le lui avais interdit. Elle avait raison quand elle disait que ma colère envers ma mère me rendait malheureux. Je ne le savais pas moi-même madame. Elle me connaît si bien….. Elle ne voulait que mon bien et je lui ai fait tant de mal madame….. A mon retour, je lui ai tout expliqué de ma rencontre avec ma mère. Je lui ai dit que j’avais compris et que je ne lui en voulais plus. Ensemble nous avons parlé de notre fils, nous nous sommes rappelés de lui, de tous ses beaux souvenirs que nous avions de lui ? Nous avons pleuré, mais nous avons aussi ri….Nous ne l’oublions pas, et il aura toujours sa place dans notre cœur, dans notre mariage ; mais nous sommes prêts, je suis prêt à aller de l’avant.

Il se tut un instant et se leva. Anne coulait silencieusement des larmes. Mammy Sophie n’intervint pas. Elle lui laissa le temps de se reprendre. Après un moment il revint s’asseoir et reprit.

-Il y a une chose que je n’ai pas osé faire madame. J’y ai pensé et repensé. Mais à chaque fois que j’étais sur le point de le faire, je n’osais pas. Je ne pouvais le faire sans qu’elle sache tout ce que j’ai fait madame. Mais je n’ose pas lui avouer car je sais qu’elle en souffrira. Mais je sais qu’on ne peut repartir sur de bases saines sans qu’elle le sache.

Anna le regardait, intriguée et un peu perdue. De quoi parlait ‘il ? se demandait ‘elle.

Mammy Sophie avait compris.

-Voulez vous qu’elle finisse la lecture de la lettre ? lui demanda-t-elle simplement.

Il acquiesça et Anne semblait de plus en plus intriguée. Quand mammy Sophie lui remit la lettre, ses mains tremblaient. Elle voulait savoir de quoi il parlait, mais redoutait aussi de le savoir.

Mammy Sophie reprit alors en s’adressant à elle.

-Anne, vous vous souvenez de ce que je vous ai dit il y a deux semaines après le départ de Robert ?

Elle se tût un instant comme pour se souvenir et dit :

-Oui ; vous aviez dit que je devais ouvrir mon cœur et pardonner. Que j’avais autant à lui pardonner que lui à moi.

Mammy Sophie lui sourit.

-Oui Anne ; et tant que vous serez ensemble, il en sera toujours ainsi. Vous aurez toujours des choses à vous pardonner mutuellement. Et tant que vous vous aimez, vous arriverez à le faire. Lisez maintenant ! C’est le dernier paragraphe.

Anne commença la lecture.

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Je ne sais pas si c’est pour la punir ou pour chercher du réconfort, mais depuis quelques mois, je me suis mis à la tromper avec d’autres femmes. (Elle fit une pause et le regarda. Elle reprit) Ce n’était jamais rien de sérieux et quand je finissais avec ces femmes je me sentais tellement misérable de lui faire ça, mais……………. Comment vous l’expliquer ? ……. Je me sentais tellement seul au monde. Je n’avais qu’elle, vous comprenez ? Je n’ai jamais su m’ouvrir aux autres. Je gardais tout pour moi avant de la rencontrer. …..

J’ai tellement mal madame ! Et elle me manque beaucoup ! Mais en même temps je n’arrive pas à lui pardonner.

Voilà mon problème madame !

Robert

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Quand elle eut finit la lecture, Anne replia lentement la lettre et se mura dans le silence ;  se contentant d’observer un point imaginaire sur le mur en face, les yeux larmoyants.  Un lourd silence s’installa dans la pièce. Après un court instant qui paraissait aux yeux de Robert comme une éternité, il finit par le rompre en s’adressant à elle.

-Dis-moi quelque chose s’il te plaît ma chérie. Parle-moi ! Crie sur moi ou frappe-moi si ça te soulage mais dis-moi quelque chose s’il te plaît ! Mon silence et mes ressentiments nous ont faits tellement de mal. Ne refait pas la même erreur que moi s’il te plaît ! Parle-moi ! Je suis vraiment désolé.  

Au fur et à mesure que Robert parlait, les larmes qu’elle s’évertuait à ne pas laisser sortir, commencèrent à couler. Elle se leva finalement et lui fit face. Robert en fit de même. Ils se regardèrent un moment et Anne finit par dire :

- C’est trop facile Robert. C’est vrai que je m’en doutais ; mais me le voir confirmer cela, c’est trop dur.  Ce n’était pas qu’une fois Robert, mais plusieurs fois. Pendant que moi je me morfondais dans la culpabilité,  et me désespérais de te voir t’éloigner de moi, toi tu te consolais dans les bras d’autres femmes ! C’est trop dur, souffla t’elle entre deux sanglots.

Elle se détourna et se précipita vers la sortie. Mais plus rapide qu’elle Robert l’arrêta au niveau de la porte et la prit de force dans ses bras. Elle essaya en vain de l’en empêcher luttant de toutes ses forces. Mais il la maintint fermement et ne la relâcha pas. Elle finit par se laisser aller en sanglotant de plus belle. Ils restèrent un moment ainsi et Robert glissa doucement à genoux devant elle sans la lâcher en la serrant à la taille.

-Pardonne-moi ma chérie. Je suis sincèrement désolé de t’avoir fait passer par tout cela. Je m’en veux énormément. Pardonne-moi ! Si tu le fais, jamais plus je ne te décevrais !

Mammy Sophie se leva alors et s’approcha d’eux. Elle était aussi émue.

Robert ; celui qui trouve une bonne femme a trouvé le bonheur. C’est une grâce qu’il obtient de la part du Seigneur. Son cœur lui fait confiance et elle lui fait du bien tous les jours de sa vie. Il l’aime comme sa propre chair et la protège de tout mal.

La femme n’est point sans l’homme, ni l’homme sans la femme. Ainsi, ils ne sont plus deux mais une seule chair, unie par l’amour.

Et l’Amour Anne ; il est patient, il est plein de bonté, il ne cherche pas son intérêt, il excuse tout, il supporte tout, il ne perd pas espoir et ne périt jamais ! Il est toujours là ; alors laissez-le vous submerger !

Au fur et à mesure qu’elle parlait, Robert et Anne ne cessèrent de hocher lentement la tête comme si ses paroles les touchaient au plus profond de leur âme, comme si elle avait le pouvoir de guérir leurs blessures, d’effacer leurs rancœurs…. Toujours est ‘il que quand elle eut fini, ils se sentirent légers. Anne se mit aussi à genoux et yeux dans les yeux, ils communiquèrent en silence. Elle n’avait plus besoin de lui dire « je te pardonne » ou lui de lui dire « pardonne-moi ». Ils savaient que c’était déjà derrière eux. La colère, la rancœur, la peine…., toutes ses émotions négatives avaient  laissé place à une profonde  sérénité, qui telle une passerelle fit ressurgir du plus profond de leur cœur, leur amour qu’ils croyaient perdus. Il les submergea et rien n’eût plus d’importance.  Il les submergea et inonda leur cœur de joie et de tendresse. Alors ils se jetèrent dans les bras l’un de l’autre en riant et pleurant à la fois. 

Au bout de quelques instants, quand ils furent un peu plus calme, ils se levèrent enfin, rempli de reconnaissances pour cette femme qu’ils ne connaissaient pas, il y a encore quelques semaines et qui leur avait permis de se retrouver, de retrouver leur amour. Oui, ils se sont aimés, mais grâce à elle, ils s’aimèrent à nouveau.

-Merci, lui dirent ‘il à l’unisson et Anne alla se jeter dans les bras de mamy Sophie.

Robert moins câlin se contenta juste de répéter avec une voix brisée par l’émotion :

-Merci de tout cœur mammy Sophie. En venant vous voir, je n’y croyais vraiment plus.

Mammy Sophie était émue. C’était la première fois qu’il l’appelait ainsi ; et elle en fût troublée. Mais plus que tout elle était reconnaissante à Dieu de l’avoir guidé à restaurer ce couple qui était le premier qu’elle recevait seule sans son cher mari. Preuve qu’elle n’avait pas encore achevé son ministère.

L’instant d’émotion passée, elle leur donna encore quelques conseils avant de les laisser partir, avec la promesse de revenir lui rendre visite de temps en temps.

 Après, leur départ, elle mit un peu de l’ordre dans ses affaires et s’apprêtait à partir quand son  téléphone sonna. C’était un numéro qu’elle ne connaissait pas, mais elle en avait l’habitude. Elle décrocha :

-Allo ?

-Allo ? Mammy Sophie ? demanda une femme à l’autre bout du fil entre deux sanglots.

-Oui c’est moi. Que puis-je pour vous ?

La femme à l’autre bout du fil continuait à pleurer sans répondre. Ayant l’habitude de ce genre d’appel elle dit simplement.

-Calmez-vous ma chérie et parlez-moi ! Quelque soit le problème, nous trouverons une solution.

FIN DU PREMIER EPISODE

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 RDV DIMANCHE PROCHAIN POUR UN NOUVEL EPISODE. MAIS CETTE FOIS CI CE SERA SCINDE EN DEUX PARTIES : UNE PARTIE LE DIMANCHE ET LA SUITE LE JEUDI ! BISOUS !

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ILS SE SONT AIMES