Épisode 14
Ecrit par Mona Lys
14
AALIYAH
Je ressens des fourmillements qui montent de la plante de mes pieds à mon bas ventre. Je vais encore avoir un orgasme. Je serre fortement entre mes doigts le drap et dans un cri je me libère. Je hurle son nom. Il y prend un plaisir fou. Il me serre contre lui lorsqu’il se vide à son tour. Lorsque nous nous reprenons, il m’embrasse passionnément. Ça fait la troisième fois que nous faisons l’amour depuis qu’il est arrivé à l’improviste. J’étais persuadée que c’était lui alors je savais qu’il se pointerait après le baiser que je lui ai donné. J’ai eu encore plus la confirmation que c’était lui lorsqu’il a débarqué devant chez moi alors que je ne lui ai pas donné mon adresse. Je l’ai retrouvé. Enfin. Je me sens si bien dans ses bras. Si heureuse.
Je me couche sur sa poitrine en profitant de chacune de ses caresses. Nous demeurons silencieux. D’ailleurs nous ne nous sommes encore rien dit. Nous n’avons fait que faire l’amour. Mais il va bien falloir qu’on parle. Seulement par quoi commencer ? Nous restons dans ce silence jusqu’à nous endormir.
Lorsque je me réveille ce matin, je suis seule dans le lit. Je me retourne et je le vois assis dans mon fauteuil en forme de main, à me regarder. Il a enfilé ses vêtements et ses chaussures.
‒ Où vas-tu ? Lui demandé-je en arrangeant ma tignasse désordonnée.
‒ Je rentre.
‒ Reste je t’en prie.
Il me rejoint sur le lit.
‒ Je reviendrai ce soir. J’ai des rendez-vous à honorer.
‒ Ne disparais pas encore s’il te plaît. Nous devons parler tous les deux.
‒ Je sais. Je reviendrai je t’en fais la promesse.
‒ Ok.
Il me pose un baiser chaste sur les lèvres avant de sortir. Je me laisse tomber sur le lit en repensant à notre nuit. C’était la plus belle de toute ma vie. Je l’ai passé dans les bras de l’homme que j’aime. J’ai ressenti des choses dans mon cœur que jamais je n’avais ressenti. Bonté divine, j’ai cet homme dans la peau. Aucun homme n’a pu faire chavirer mon cœur ces dernières années. Lui il revient et chamboule tout. Il est plus beau que je ne l’avais imaginé. Ses lèvres m’ont fait craquer la première fois que je l’ai vu dans le hall de sa boite. Sans citer son parfum, sa voix, son touché.
Mon alarme me sort de ma rêverie. J’ai une séance photo ce matin et je dois faire un tour à ma boutique pour voir comment les choses se passent. Je me prépare et me rends à la boite de cet homme qu’Angèle m’avait présenté à la soirée. Je vais mieux depuis que j’ai commencé à prendre les médocs qui m’ont été prescrits à la clinique.
La séance photo s’est déroulée en trois heures de temps. Je suis restée à ma boutique à faire le point des ventes de la semaine. J’ai eu la chance de tomber sur des filles supers sérieuses qui font très bien leur travail sans piquer dans la caisse. Bref, durant toute la journée je ne cesse de guetter l’appel de Jayden sur mon portable. Jayden. Enfin je connais son prénom. Je l’adore d’ailleurs. Je continue ma tâche lorsque mon portable sonne. Je me précipite de le prendre en espérant que ce soit lui mais c’est plutôt Mira.
‒ Coucou ma puce.
‒ « On déjeune ensemble au restau habituel ? »
Je regarde l’heure sur ma montre.
‒ Ok tout de suite.
Je termine les comptes et je me mets en route. J’arrive en une dizaine de minute. Connaissant mes goûts, elle a déjà commandé mon plat et ma boisson. Je les entame sans perdre de temps. Nous parlons de tout et de rien. Un moment je sens son regard peser sur moi.
‒ Qu’est-ce qui se passe ? J’ai un truc sur le visage ?
‒ Non. Tu m’as l’air juste différente.
‒ Différente comment ?
‒ Je ne sais pas. Il y a un truc qui a changé sur toi. Mais bon je finirai par trouver.
Je bois mon jus en évitant son regard de peur de lui faire découvrir ce que s’est.
‒ Au fait, on passe le week-end ensemble ? Propose-t-elle. J’ai envie de déstresser.
‒ Qu’allons-nous faire ?
‒ Aller à la plage, au ciné, faire une soirée pyjama. Enfin, tout ce que nous avons l’habitude de faire.
‒ Ok pas de souci. J’en ai aussi besoin.
Elle me fait des propositions de sorties, d’activités que l’on pourrait faire.
‒ Bonjour les filles.
Nous levons les yeux vers Angèle qui vient d’arriver au bras de… Jayden. Nos regards se croisent.
‒ On peut se joindre à vous vu qu’il n’y a apparemment plus de table ?
‒ Ok allez-y, accepte Mira.
Le couple prend place, Jayden juste en face de moi. Ils passent leurs commandes. Cette situation me met mal à l’aise d’autant plus que je me rends maintenant compte que j’ai couché avec le fiancé de mon amie. J’avais complètement zappé ce détail. Je l’ai en quelque sorte trahi en sortant avec son homme. Mais en même temps, ce n’est complètement pas de ma faute. Cet homme me donnait des insomnies durant ces cinq années de sa disparition. Je me suis donc laissée emporter par mes sentiments. Ça n’a rien de personnel.
‒ La semaine prochaine, Jayden et moi irons au Maroc pour rencontrer les parents.
Je suspends mon geste. Je relève la tête et mon regard croise le sien.
‒ On pourra enfin commencer les courses pour le mariage, youpii !!! Se réjouit Mira. Je suppose qu’Aaliyah et moi seront tes demoiselles d’honneurs ?
‒ Bien-sûr. Mais attendons d’abord de voir ce que diront les parents.
‒ Ils vont accepter. Ils n’ont jamais été compliqués.
‒ Aaliyah tu pourras venir avec nous ? Me demande Angèle. La dot risque de se faire aussi là-bas.
J’aime Angèle, mais à cet instant précis je ne peux m’empêcher d’être triste du fait qu’elle va se marier à l’homme que j’aime. Je ne peux me réjouir pour elle.
‒ Excusez-moi je dois m’en aller, dis-je en me levant.
‒ Où pars-tu ? Tu n’as pas terminé ton déjeuner, me fait remarquer Mira
‒ Je viens de me rappeler d’un rendez-vous important. Félicitations à toi Angèle. Je verrai mon programme.
Je sors du restau comme si j’avais le feu aux fesses. Je laisse écraser une larme sur ma joue lorsque je démarre. Maintenant que je le retrouve, il va se marier. En plus à la cousine de ma meilleure amie qui est aussi mon amie. Ce n’est pas juste. Alors là non.
Je vais ouvrir la porte à Jayden qui a respecté sa parole de revenir.
‒ Bonsoir, salut-il en rentrant.
‒ Salut.
Je referme la porte et le rejoins dans le salon. Nous nous regardons sans parler.
‒ Tu vas donc te marier avec Angèle, finis-je par briser le silence en m’asseyant.
‒ Oui !
‒ Après notre nuit ?
Il s’assoit.
‒ Liyah !
‒ Pourquoi es-tu parti ? Cette nuit-là. Pourquoi as-tu fui ?
Il reste silencieux un moment.
‒ Je n’étais pas celui qui devait te prendre ta…
Il ne termine pas sa phrase.
‒ Mais tu l’as pourtant prise entièrement hier nuit.
‒ Les choses ne devaient pas se passer de la sorte. On ne devait normalement plus se revoir.
‒ Pourquoi me fuis-tu ? Qu’ai-je fait pour que tu m’évites autant comme la peste ?
‒ C’est compliqué.
‒ Explique-moi donc.
‒ Liyah !
Il se lève et me donne dos.
‒ Il y a certaines choses qui… Ce n’est pas toi le problème. C’est moi.
‒ Si tu me dis de quoi il s’agit je pourrais certainement te comprendre.
‒ Je ne crois pas.
Il me fait face.
‒ Ce qui s’est passé cette nuit, j’ai adoré. Je ne crois pas avoir autant aimé faire l’amour à une femme. Mais tu vois, beaucoup de chose sont en jeu, en l’occurrence mon futur mariage avec Angèle.
‒ Tu vas épouser une femme que tu n’aimes pas.
‒ Je l’aime.
Je me lève. Je me rapproche de lui en le fixant droit dans les yeux.
‒ Si tu l’aimais tu n’aurais jamais passé la nuit avec moi. Je ne sais pas ce que tu fuis, mais tu sais pertinemment que ce qu’il y a entre nous est quelque chose de fort. Tellement fort que cinq années n’ont pas suffi pour briser cette alchimie entre nous. Un seul regard a suffi pour que nos cœurs se retrouvent. Je ne t’avais jamais vu mais juste un contact, un seul et j’ai su que c’était toi. Alors dis-moi si ton amour pour Angèle est plus fort que ça.
Il me fixe d’un regard troublé.
‒ C’est trop compliqué Liyah. Trop compliqué.
Il me dévie et marche d’un pas pressé vers la porte.
‒ Je t’aime Jayden.
Il se fige.
‒ Je suis tombée amoureuse de toi sans t’avoir jamais vu. J’ai énormément souffert de ton absence. J’ai cru que le peu que nous avions partagé ensemble à ton appartement suffirait pour que tu restes près de moi après mon rétablissement. J’ai cru que c’était autant fort pour toi que pour moi, pour que tu nous donnes une chance. Mais apparemment, ce n’est pas le cas. Tout ceci n’a pas compté pour toi. C’est “trop compliqué’’ pour que tu puisses m’aimer.
Je vais lui ouvrir la porte.
‒ Tu peux partir. Je t’ai attendu pendant cinq ans pour rien. Pars, je ne te retiendrai pas.
Nous nous jaugeons du regard. Je prie qu’il ne parte pas. Qu’il reste avec moi et qu’il ne reparte jamais. Je ferme les yeux de déception lorsqu’il fait un pas vers la porte qu’il claque la seconde qui suit. Il est parti.
‒ Je t’aime aussi Liyah.
J’ouvre les yeux de surprise. Il est là. Il se rapproche de moi.
‒ Je n’ai jamais cessé de penser à toi. Tu m’as hanté pendant ces années loin de toi. Je t’ai dans la peau.
‒ Jay !
Il capture mes lèvres dans une tendresse qui fait chavirer encore plus mon cœur. Il me soulève rien qu’avec un seul bras comme si je ne pesais absolument rien. Il nous conduit dans la chambre où encore une fois nous nous aimons. Nous finissons entrelacés et repus dans le lit.
‒ Restes avec moi ce week-end s’il te plaît, lui demandé-je en promenant mes doigts sur son torse.
‒ Ok. Je crois que j’en ai aussi besoin.
*Mona
*LYS
Le week-end a été merveilleux. Nous n’avons pas fait que faire l’amour. Nous avons discuté, il a aussi travaillé à partir de mon ordinateur. Je le regardais faire et je craquais encore plus pour lui. Maintenant que le week-end tire à sa fin, j’ai peur qu’il parte et ne revienne plus. Nous n’avons pas vraiment parlé de nous. De la suite des évènements. Je ne veux voler le mec de personne. Mais je veux aussi vivre mon histoire d’amour. Il est le seul homme que je veux dans ma vie. Je n’ai d’ailleurs pas pu tomber amoureuse d’un autre à part lui. Je ne crois pas que j’y arriverais. J’ai besoin de lui.
‒ Tes photos sont très belles, me complimente-t-il en fixant mon ordi.
‒ C’est grâce à toi si je fais sensation avec mes yeux bleus.
‒ Je n’ai rien fait d’extra.
‒ Si. Tu as changé ma vie.
Il lève les yeux sur moi, assise près de lui sur le lit dans sa chemise. Il glisse son pouce sur mes lèvres.
‒ Ta petite frimousse m’avait manqué, me dit-il.
‒ Je ne suis plus ce petit ange innocent d’il y a cinq.
‒ Pour moi tu l’es toujours.
Je me rapproche de lui. Je lève ma main et je commence à parcourir son visage du bout de mes doigts.
‒ J’aimais quand tu faisais ça, le regard perdu dans le vide.
Je souris.
‒ Ça m’a manqué de dormir et de me réveiller dans tes bras, lui répondé-je en arrêtant mon manège. J’ai tellement rêvé de revivre nos moments.
‒ Moi aussi.
‒ Alors que fait-on maintenant ? Qu’adviendra-t-il de nous deux ? Je veux dire, Il y a Angèle.
Il détourne son regard.
‒ Tout est contre nous Liyah.
‒ Tout ? Je ne vois pourtant rien d’autre que ta relation avec Angèle.
‒ Il y a un autre truc que je t’ai caché.
‒ Quoi ?
La sonnette retentie.
‒ Je reviens.
Je pars ouvrir pensant qu’il s’agit de la jeune fille qui vient m'aider pour le ménage les week-ends. Mais je sursaute lorsque je vois devant ma porte Mira.
‒ C’est toi ?
‒ Oui c’est moi. Tu ne réponds ni à mes appels ni à mes messages. Je suis donc venue voir si tu n’étais pas morte.
‒ Je… je vais bien. Mais je suis un peu occupée là. Je t'appelle plus tard.
Je veux refermer la porte lorsqu’elle la bloque d'un coup de main.
‒ Woh qu’est-ce qui se passe ? Tu me chasses ?
‒ Non. Je suis juste très occupée en ce moment.
Elle entre de force. Elle plisse ensuite les yeux en me scrutant longuement.
‒ Tu me caches quelque chose.
Son regard glisse sur mon corps. Elle ouvre grand les yeux.
‒ Oh mon Dieu je comprends maintenant. Tu es avec un homme.
Je baisse les yeux. Zut j’ai oublié que j'avais la chemise de Jay sur moi.
‒ Écoute je t’appelle…
‒ Tu as enfin sauté le pas. Mais c’est génial. Tu as enfin oublié ton fameux bienfaiteur.
‒ Mira va-t’en s’il te plaît.
Je la ramène vers la porte par le bras.
‒ Dis-moi il est bon au lit ? Sûrement que si, sinon tu ne m'aurais pas zappé ce week-end. J’ai hâte de savoir qui s’est.
‒ Mira bye.
Je m’apprête à fermer la porte lorsque…
‒ Liyah ça va ?
Je ferme les yeux quand je vois le regard choqué de Mira. Elle l'a vu.
‒ Jayden ? Toi ? Ici ? Avec Aaliyah ?
Son regard passe sur nous à tour de rôle. Elle rentre de nouveau, la bouche grande ouverte.
‒ Aaliyah dis-moi que c’est faux.
Je me mords la lèvre.
‒ Aaliyah dis-moi que tu n'as pas osé faire ça à ma cousine.
‒ Mira…
Bam je reçois une gifle cinglante.
‒ Mira arrête ! Tonne Jay.
‒ Comment tu as pu me faire une chose pareille, toi ma meilleure amie, ma sœur de cœur, continue Mira sans se soucier de Jay.
‒ Je suis désolée. Mais laisse-moi t’expliquer.
‒ M'EXPLIQUER QUOI ? QUE TU BAISES AVEC LE FIANCÉ DE MA SŒUR ?
‒ Ce n’est pas ce que tu crois.
‒ Oh oui que c’est ce que je crois. C’est bien ce que je crois. Et tu sais ce que je crois ? Que tu es une pute. Rien de plus. Tu me dégoûtes.
Elle me bouscule en sortant. Je laisse une larme.
‒ Je suis désolé Liyah.
‒ Pas grave. Ça devait finir par arriver. Si nous devons être ensemble elles doivent le savoir.
Je n'entends aucune réponse. Je lève les yeux et je vois le doute sur son visage.
‒ On sera ensemble n’est-ce pas ? On va leur expliquer toute histoire et leur présenter nos excuses pour qu’on puisse enfin être ensemble, hein ?
Il ne répond pas.
‒ Jayden !
‒ Ce n’est pas si simple que ça. Liyah, même si nous nous aimons, nous ne pouvons être ensemble.
‒ Mais pourquoi ?
‒ C’est compliqué.
‒ ARRÊTE DE ME DIRE QUE C’EST COMPLIQUÉ ET DIS-MOI ENFIN CE QUI SE PASSE.
‒ Nous ne pouvons être ensemble.
‒ POURQUOI DIABLE ?
‒ PARCE QUE C’EST MOI QUI AI TUÉ TES PARENTS.
Je reçois un choc violent.
‒ Quoi ? Dis-je d'une voix sourde.
Il fait un tour sur lui-même.
‒ Il y a huit ans, continue-t-il doucement, j’occasionnais un accident très grave, je tuais un couple et je rendais aveugle leur unique fille. Je conduisais à une vitesse anormale sous l'effet de la colère. C’est moi qui ai tué tes parents et t'ai rendu aveugle pendant trois ans.
Je me laisse tomber dans le fauteuil la bouche ouverte et les yeux hagards. Mes larmes coulent sans que je n'y puisse rien. Je n'arrive pas à croire ce que je viens d'entendre. Ce n’est pas possible. L'homme que j’aime. C’est lui qui m'a rendu orpheline. Mon Dieu !
‒ Dis quelque chose Liyah, souffle-t-il.
Que dois-je dire ? Que puis-je dire ? J'ai l’impression que le sol s’est dérobé sous mes pieds. Je glisse du fauteuil au sol sans pouvoir en placer une. Mes oreilles sifflent, mon cœur bat à tout rompre. Mon esprit s'est envolé vers d'autres cieux. Je n’arrive plus à réfléchir. J'entends juste ses pas s'éloigner vers ma chambre. Je les entends revenir et se diriger vers la porte. Je reviens brusquement à moi lorsqu’il referme la porte derrière lui en s'en allant. Il est parti. Je ne sais pas quoi faire dans cette situation si ce n’est pleurer.
Pourquoi ça ? Pourquoi lui ? Pourquoi maintenant ?