Épisode 15

Ecrit par Mona Lys

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JAYDEN


‒ Et qu'a-t-elle dit ?

‒ Justement rien. Elle n'a pu placer un seul mot. Je crois que le choc était beaucoup plus grand que je ne l'ai imaginé.

‒ Que comptes-tu faire maintenant ?


Je me relève de mon siège et tourne dos à Patrick. Depuis hier que j’ai tout avoué à Aaliyah et je me sens toujours autant mal. Je ne sais plus quoi faire. Si je dois la laisser digérer tout ça et attendre qu’elle me parle en premier ou aller la voir pour essayer d’arranger les choses.


‒ Que penses-tu que je dois faire ? Demandé-je à mon cousin en fixant l’extérieur. 

‒ Tu devrais peut-être retourner lui parler. Vous devez parler de toutes façons. 


Je lâche un soupir. Je vais encore devoir l’affronter.


‒ Tu ne me demandes pas ce que tu dois faire concernant Angèle ?


Encore un autre problème à régler. 


‒ J'irai la voir chez elle ce soir.

‒ Que vas-tu faire si elle décide de rompre ?

‒ Je n'en sais rien. Soit j’essaierais de la convaincre du contraire soit je lui donnerais sa liberté pour qu’elle soit heureuse avec un autre.

‒ Et si toutes les deux veulent rester avec toi malgré tout ?


Je le regarde, dépassé. 


‒ Tu vas arrêter de me poser des casse-têtes ?

‒ Mais c’est aussi une éventualité. Supposons que ça se fasse.

‒ J'aurais du mal à laisser Angèle parce qu’elle est une femme en or. Mais… j'aime Liyah. Seulement je ne crois pas qu’un avenir entre nous soit possible. Ce serait insensé qu'elle épouse un homme qui a tué ses parents.

‒ C’était un accident Jay. Un accident. 

‒ Que j’ai provoqué. 

‒ Tu es vraiment décidé à te condamner à vie après tout ce que tu as fait pour te racheter. Tu mérites une seconde chance. Cesse de culpabiliser diantre.


Patrick a raison. J'avais d'ailleurs arrêté de culpabiliser mais lorsque j’ai revu Aaliyah, Tout m'est revenu à la figure. Je m'en suis de nouveau voulu pour l’accident. Mais plus, je m'en suis voulu d’être amoureux d'elle après le mal que j’ai causé dans sa vie. Je désire tellement être près d'elle mais cette situation nous éloigne.


Mon assistante s’annonce et entre dans mon bureau. Elle me tend des documents à signer.


‒ Monsieur il y a une dame qui désire vous voir.

‒ Avions-nous rendez-vous ?

‒ Non. Mais elle dit qu’il s’agit d’une urgence. 

‒ Ok fais-la entrer puisque je n’ai pas grande chose à faire maintenant. 


Elle sort et la seconde d’après une personne fait son entrée. Patrick et moi nous nous regardons surpris.


‒ Bonjour, salut-elle.

‒ Bonjour, répond Patrick. Bon je vais vous laisser. On s’appelle. 

‒ Ouais.


Quand il sort, j’autorise celle qui était la maîtresse de mon père à prendre place. Je fais de même. Je la regarde, attendant qu’elle parle.


‒ Je sais que toi…

‒ Vous. Restons dans le vouvoiement, lui dis-je d'un ton calme.

‒ Ok. Je sais que vous et moi n’avons jamais échangé un seul mot mais si je suis là c’est pour parler d'un sujet extrêmement important. 


Elle me regarde attendant ma réaction. Je continue de la regarder.


‒ Ok. Au fait, c’est concernant l’entreprise de feu votre père. 


Je me carre dans mon siège. Je savais que sa présence avait un rapport avec le testament de mon père.


‒ A une période, la boite avait rencontré des soucis et avec mes économies j’ai aidé votre père à la relever. Il n'en avait pas parlé à votre mère à cause de sa santé fragile. C’est donc moi qui y ai mis de ma sueur pour que cette boite soit là où elle est aujourd’hui. De ce fait donc, je pense que la logique serait qu’elle revienne autant à mes enfants qu’à vous parce que j'y ai aussi contribué.


Je cherche dans mon esprit des mots simples pour éviter de lui manquer de respect mais je n'en trouve aucun. J’ai juste envie de lui rappeler sa place. Celle d'une éternelle maîtresse. 


‒ Désolé mais je ne peux rien faire pour vous. Fallait régler ce détail avec mon père avant sa mort.

‒ J’ai cru que c’est ce qu'il ferait. Je croyais qu’il me donnerait ce qui m'est dû après toutes ces années de ma vie que je lui ai consacrée. 

‒ Vous pensiez qu'un homme qui a trompé sa femme serait en mesure de vous combler, vous, toute votre vie ? Vous avez profité de ses biens de son vivant. Si je ne me trompe, l'argent que vous aviez misé dans la boite venait du premier magasin qu'il vous avait ouvert. Donc en gros c’était encore son argent.

‒ C’était l’argent de ma boutique. 

‒ Fallait gérer ça avec lui Madame. Je ne peux rien faire pour vous. Vous n’avez pas respecté ma mère en sortant avec son mari, respectez au moins les dernières volontés de cet homme.


Elle prend une profonde inspiration. 


‒ Ecoutez, je ne veux pas faire d’histoire, reprend-elle. Je veux juste que mes enfants aient ce qui leur ait dû. 

‒ Si leur père ne l'a pas fait, pourquoi le ferais-je moi ?


Elle veut encore en placer une.


‒ Je ne peux rien faire pour vous. Merci de libérer mon bureau.


Son visage change d’expression. Son regard vire à la rage. Je la fixe pour lui faire comprendre qu’elle ne m’intimide pas avec son air menaçant. 


‒ Les choses ne vont pas se passer ainsi. Je vais récupérer ce qui me revient de droit.


Je préfère ne pas lui répondre. Je la regarde sortir. Je n'ai pas du temps à perdre avec elle et ses enfants. 


J’ai fini par me rendre chez Aaliyah après avoir passé toute la journée à lutter contre cette envie. Je veux qu’elle me dise quelque chose concernant cette vérité qui nous sépare tant. Je veux l’entendre me dire qu’elle ne veut plus me voir. Ou qu’elle me dise ce qu’elle désire que je fasse pour me faire pardonner.


Je sonne à sa porte. Quelques secondes après la porte s’ouvre. Elle ne parait pas surprise de me voir. Je peux néanmoins remarquer ses yeux bouffis. Elle a beaucoup pleuré.


‒ Bonsoir Liyah. Est-ce que je peux entrer ? Nous devons parler.

‒ C’est toi qui as acheté cet appartement, tu y as tous les droits.


Elle me tourne le dos en laissant la porte ouverte. Je la suis après avoir refermé. Je prends ensuite place face à elle.


‒ Comment vas-tu ? Lui demandé-je pour briser la glace.

‒ Comme une femme qui vient d’apprendre que l’homme qu’elle aime est responsable du plus grand malheur de sa vie.


J’essaie de la toucher, elle recule dans son fauteuil.


‒ Liyah !

‒ Aaliyah, rectifie-t-elle les larmes dans les yeux.

‒ Je suis désolé. Ce n’était pas volontaire. Ce jour-là…

‒ Je ne veux rien savoir, m’arrête-t-elle dans un sanglot. Je veux juste oublier.


Je me lève et m’agenouille devant elle.


‒ Pardonne-moi alors.

‒ Donc tout ce qui s’est passé entre nous, c’était juste par culpabilité ?

‒ Non. Bien-sûr que non. Oui j’ai voulu réparer mon erreur en te faisant opérer et en te donnant tout ceci. Mais pour le reste, ça s’est fait tout seul. Je ne voulais pas te côtoyer mais les choses se sont passées autrement. J’ai perdu le contrôle.


Elle continue de pleurer en évitant mon regard. J’ai tellement mal de la voir ainsi.


‒ Je ne te demande pas de me donner une chance. Je veux seulement que tu trouves en toi la force de me pardonner.


Elle se lève et part s’arrêter devant la baie vitrée qui donne sur la terrasse.


‒ Je ne te déteste pas. Comment le pourrais-je alors que tu m’as permise de revivre de nouveau et dans de bonnes conditions.


Je me relève, soulagé.


‒ Seulement, comme tu n’as cessé de me le dire, entre nous deux, c’est compliqué. Et ça le sera toujours. Le mieux est que chacun reprenne sa vie de son côté.


J’accuse le coup.


‒ Mais avant, je souhaiterais te rembourser tout ce que ma nouvelle vie t’a coûté. Je me sens redevable envers toi. Pour mes yeux je ne te dois rien parce que tu m’as juste redonné ce que tu m’avais pris, mais pour tout le reste, tu n’y étais pas obligé. Je veux te rembourser.

‒ Je ne veux pas de ton argent Liyah. Tu ne m’es pas redevable.


Je me rapproche de son dos. Je prends le risque de passer mon bras autour de sa taille. Elle frémit.


‒ Je refuse que tu me donnes quoi que ce soit parce que tu avais droit à tout ça. Je veux juste que tu sois heureuse. Que tu m’oublies et refasse ta vie avec un homme qui sera parfait pour toi. 


Je pose un baiser d’adieux dans ses cheveux au niveau de sa nuque. Je sors de là avant de ne plus pouvoir résister à cette folle envie de l’embrasser. Maintenant tout est clair entre nous. Aucun avenir n’est possible pour tous les deux.


Après chez Aaliyah, je me rends maintenant chez Angèle. Je lui dois d’être sincère avec elle. Nous nous sommes rencontrés en France lors d’une conférence pour chef d’entreprise. Le courant est vite passé entre nous et j’ai voulu essayer avec elle vu qu’aucune autre n’avait réussi à me sortir Aaliyah de la tête. Les choses se sont vites enchainées et nous avons commencé à parler mariage. Je mentirais si je disais qu’étant avec elle je ne pensais plus à Aaliyah. Mais au moins, avec elle je me sentais bien. Raison pour laquelle j’ai voulu faire d’elle ma femme. Mais voilà que la vie a remis Aaliyah sur mon chemin.


Je ne voulais pas lui faire de mal. Elle ne le mérite d’ailleurs pas. Angèle est une femme pleine de douceur, qui ferait le bonheur de n’importe quel homme. C’est le genre de femme ambitieuse que souhaite avoir tous les hommes. Je m’en veux de l’avoir trahit. Je ne sais pas si sa cousine l’a déjà tenu informé de ce qu’elle avait vu.


A peine je sonne que la porte s’ouvre sur elle.


‒ Enfin tu as assez de couille pour te présenter devant moi.

‒ Bonsoir Angèle.

‒ Est-ce vrai que tu as couché avec Aaliyah ?


Je pousse un soupir.


‒ Oui. Mais je…

‒ Tu m’as fait organiser une rencontre avec mes parents pour ensuite me tromper avec mon amie ? Jayden comment as-tu osé ?

‒ Est-ce qu’on peut parler tranquillement à l’intérieur s’il te plait ?

‒ Que vas-tu me dire ? Que tu as eu le coup de foudre pour elle à votre première rencontre ?

‒ C’est plus complexe que ça. Laisse-moi au moins t’expliquer et après tu prendras la décision que tu voudras.


Elle me permet d’entrer. Je prends la parole après que nous nous soyons installés.


‒ Aaliyah et moi nous nous sommes connus il y a cinq ans. Je ne vais pas entrer dans trop de détails mais sache juste qu’il y avait un truc entre nous mais j’ai préféré m’éloigner d’elle parce que je ne la méritais pas. Quand nous nous sommes revus, les choses se sont enchainées sans que je n’aie le contrôle sur quoi que ce soit.

‒ Même le fait de savoir que nous avons commencé les démarches de notre mariage ne t’a pas motivé à ne pas coucher avec elle.

‒ Elle et moi c’est plus qu’une histoire de sexe.

‒ Tu es donc amoureux d’elle ?


Je me masse le visage, las de tout ce tourbillon.


‒ Angèle !

‒ Est-ce que tu l’aimes ?

‒ Ça n’a pas d’importance parce que tout compte fait entre elle et moi il n’y aura jamais rien. J’ai été con, je le reconnais et j’accepterais toute décision que tu prendras.

‒ Dans ce cas sors de chez moi et que je ne te vois plus. La pire trahison que tu pouvais me faire était de coucher avec celle que je considère comme une sœur.

‒ Ok. Je suis encore désolé Angèle.


Je pars sans attendre. Je viens au pays en étant engagé et près à me marier, et voilà que je vais retourner de nouveau seul comme il y a cinq ans et encore pour la même raison. Aaliyah. Je conduis, la tête complètement dans les nuages. Que vais-je bien pouvoir faire de ma vie sentimentale ? Je n’arrive pas à me défaire d’Aaliyah mais je ne peux non plus être avec elle. Je ne vais quand même pas vivre ainsi indéfiniment. A moins que je sois appelé à payer pour le restant de ma vie cet accident que j’ai causé. Est-ce parce que j’ai tué un couple que ma vie amoureuse a été maudite ? La vie a-t-elle mis Aaliyah sur mon chemin uniquement pour que je ne puisse jamais l’oublier encore moins me remarier ni même connaitre l’amour ?


Je reviens subitement à moi lorsque je remarque que la voiture va de plus en plus vite sur la voix. J’appuie sur le frein mais rien ne marche.


‒ Qu’est-ce qui se passe ?


Je continue de lutter pour stopper la voiture mais rien y faire. Elle va de plus en plus vite. J’évite du mieux que je peux les quelques voitures que je rencontre. Je cherche une solution lorsqu’un énorme camion surgit de nulle part devant moi. Je fais une manœuvre dans le but de l’éviter mais c’est peine perdue. Je percute un côté du camion et ma voiture se retrouve à faire plusieurs tonneaux. C’est la dernière chose dont je m’en rends compte avant de sombrer.


Plus qu'un regard