Épisode 30

Ecrit par Mona Lys

Episode 30



CINDY


Deux ans plus tard


– Wahoo. Votre livre est plein d’émotions et de conseils.


La présentatrice, après avoir fermé mon livre, s’essuie les yeux remplis de larmes à l’aide d’un papier mouchoir qu’on lui a apporté en douce. Nous et tous les spectateurs qui ont répondu présents à l’émission, sommes  émus à l’extrême après la lecture finale de mon bouquin. La majorité des spectateurs sont des femmes et des jeunes filles. Le premier jour de l’émission il n’y avait pas vraiment de monde. Juste une quinzaine mais le deuxième jour, la salle a commencé par être remplie et aujourd’hui, il a manqué des places. Tous sont là pour écouter mon histoire au travers de mon livre. Après le départ des enfants j’ai eu comme une motivation à écrire mon histoire. J’ai hésité au premier abord mais l’envie se faisait tellement grande que j’ai fini par céder. Ça m’a pris du temps pour le terminer surtout que j’étais aussi partagé entre l’ouverture de mon magasin d’articles féminins. Il me fallait réaliser quelque chose afin d’avoir de quoi faire sortir mon livre. Je ne voulais pas  demander des aides pour le faire. J’ai tout raconté dans cette histoire. Tout dans les moindres détails. J’ai voulu non seulement partager mon histoire mais aussi interpeller toutes les personnes qui sont dans ce cas. Hommes comme femmes. Parce que oui, certains hommes sont aussi battus. Peu importe le genre, du moment où l’on est victime de violence physique ou sexuelle, il faut le dénoncer. Nous ne devons plus rester dans l’ombre à encaisser. Nous devons agir pour y mettre fin.


Ecrire ce livre m’a beaucoup aidé à faire moi-même mon deuil. Il me fallait faire le deuil de cette mauvaise épreuve pour pourvoir aller de l’avant. Je pleurais à chaque fois que j’y repensais. Mais ma plus grande tristesse se situait au niveau de mon incapacité maintenant à faire d’autres enfants. Je souhaitais avoir encore des enfants. Mais j’ai fini par accepter la situation en me répétant chaque jour que j’avais déjà les meilleurs enfants que je n’aurai jamais pu avoir. Eux, ils seront ma consolation. Ma plus grande fierté.


– Alors dites-nous, pourquoi le tire “L’autre lui’’ comme titre de votre œuvre ?

– “L’autre lui’’ pour parler de cette autre personnalité de ces hommes-là qu’ils ne nous montrent que lorsqu’ils nous ont pour acquises. Lorsqu’ils nous font la cour, ils sont les plus romantiques mais une fois que nous leur donnons notre amour leur côté obscure se dévoile. Dans mon cas, l’autre lui parle aussi du jeu double des jumeaux que je n’ai pas deviné. Voilà. 

– Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire votre histoire.

– Je veux aider d’autres femmes qui vivent encore ce cauchemar.

– Que voulez-vous  dire à ces femmes qui subissent les violences de leurs hommes ?

– Partez tant qu’il est encore temps. Ça va peut-être choquer que j’exhorte des femmes à rompre et même à divorcer mais mieux vaut divorcer que  perdre la vie. Rien ne sert de penser que vous pourrez changer vos hommes. Vous ne les avez pas créés encore moins mis au monde donc vous ne pourrez jamais les changer. La seule chose qui puisse changer une personne c’est l’amour mais si celui qui prétend vous aimer vous bat, c’est qu’il ne vous aime pas. Un homme amoureux cherchera toujours à protéger celle qui détient son cœur et même quand celle-ci le poussera à bout il trouvera le moyen de se calmer, mais jamais il ne lèvera la main sur elle. Ça commence toujours par une petite gifle de rien du tout. Il vous dira que ça l’a surpris et vous, vous dirai que tout le monde commet des erreurs. Mais comprenez une chose, s’il a pu vous donner une gifle il le reprendra une deuxième fois et comme un adage le dit il n’y a jamais deux sans trois et s’il en arrive à trois c’est qu’il y en aura encore et encore et encore. Chères sœurs, à la première gifle, fuyez !

– Est-ce qu’il est bien de conseiller à une personne de divorcer ? Je veux dire, on entend toujours dire qu’il ne faut jamais se mettre entre un couple.

– Il n’est pas bon de demander à une personne de divorcer. Lorsqu’une de vos connaissances vient vous expliquer ses problèmes de couple donnez des conseils sans parler de divorce. MAIS, je dis bien MAIS, vous avez tous les droits de dire à une personne de divorcer lorsque sa vie est en danger. Car, lorsqu’elle mourra, vous vivrez dans le regret. Mieux vaut dire à une personne de divorcer pour sauver sa vie que de lui demander de préserver son mariage pour qu’elle y passe à la fin.

– Nous l’avons bien noté. (Elle se met à sourire) Mais maintenant dites-nous où en êtes-vous avec Kendrick ? Ne pensez-vous pas qu’il mérite une chance ? Surtout que vous avez deux magnifiques enfants avec lui ?


J’éclate de rire. Je savais qu’elle allait finir sur ce sujet.


– Il n’y a rien de neuf de ce côté. Je prends encore mon temps. Rien ne presse.

– C’est bien dommage. Nous aimerions que votre histoire finisse par un happy end. Nous souhaitons que vous rencontriez le véritable amour. Vous le méritez.

– Merci ! Je ne dirai pas non à l’amour s’il se présentait.

– Nous sommes ravis de l’entendre. (Se tournant vers les caméras) Voilà l’émission tire à sa fin. Nous avons reçu sur trois émissions Madame  Cindy YAPI auteur de l’œuvre “L’autre lui’’. Nous espérons que vous avez pris  plaisir à  nous suivre et que vous avez pu tirer une ou des leçons. Notre auteur fera son dernier jour de dédicace de ses livres tout à l’heure. Voilà, l’heure et le lieu sont affichés au bas de vos écrans. Vous pouvez encore vous y rendre pour vous procurer le livre en intégralité. Notre souhait est de voir tous les couples heureux et des femmes heureuses aux bras de leurs hommes. Mais comme Cindy l’a dit, mesdames, au premier coup, FUYEZ ! Merci de nous avoir suivi. Passez une bonne fin de journée.


Les caméras arrêtent de tourner. Des gens du public viennent me saluer et faire des photos mais je m’éclipse très vite pour me rendre sur le lieu de la dédicace. J’ai fait des dédicaces dans les grandes surfaces durant ces deux dernières semaines et c’est aujourd’hui l’apothéose. C’est épuisant mais lorsque je vois tout le monde qui se déplace je suis revigorée. Je rejoins Estelle dans les coulisses et nous prenons la route.


– Tu as été magnifique.

– Merci ! J’avais vraiment le traque d’exposer ma vie mais finalement je ne le regrette pas.

– Ton témoignage aidera beaucoup de femmes j’en suis certaine.

– Ouais.


J’en suis maintenant à mon centième livre dédicacé. Les gens ont répondu massivement pour ce dernier jour. Je signe et prends des photos souvenirs. Je suis fière de moi je dois l’avouer. En deux ans j’ai pu reconstruire ma vie. J’ai une grande boutique de vêtements, lingeries, chaussures, sacs à mains. Enfin tout ce qui est en rapport avec la femme. J’en ai un très bon rendu. J’arrive à payer mon loyer, régler mes factures, épargner et apporter aussi de l’argent aux enfants pour qu’on leur achète des cadeaux de ma part. Je sais que Kendrick les pourrit à en mourir mais je veux aussi être active dans leur vie. Pas une seule fois les enfants ne se sont plains. Au contraire, ils ne veulent même plus revenir tant ils se plaisent au Congo avec leur père, grands-parents et leurs deux tantes folles à lier. Charlène et Parfaite sont dingues. À chaque fois que je discute avec elles au téléphone, elles me font pleurer de rire. J’avais oublié ce que ça faisait de rire aux larmes. Mais maintenant,  j’ai retrouvé toutes ces choses dont j’avais perdu le goût.


Enfin je signe le dernier livre. Je pousse un ouf de soulagement et jette un coup d’œil sur ma montre. Il est 18h. J’ai passé quatre heures de temps à signer. Je n’ai rien senti en tout cas. Je range mes affaires lorsque j’entends des cliquetis de talons. Quand je relève la tête, je vois Loraine et Roxane accompagnées d’une magnifique femme dont la beauté fait envier.


– Coucou Cindy, entame Loraine. Roxane t’a dégoté un gros contrat.

– Ah bon ?

– Oui ! Répond Roxane. Je te présente une amie, Vicky HAMILTON BEYNAUD. Je lui ai parlé de ton livre, elle l’a lu, l’a aimé et a pris l’avion depuis Washington pour venir te rencontrer.

– Waho ! J’en suis flattée. Bonsoir madame.

– Bonsoir Cindy.


Elle me tend la main avec de longs doigts magnifiquement manucurés. Je la serre avec joie. Le sourire qui étire ses lèvres donne encore de l’éclat à sa beauté. Elle est vraiment belle cette femme. Vicky HAMILTON BEYNAUD. Elle doit être mariée à un Ivoirien, à moins qu’il y ait des BEYNAUD dans d’autres pays.


– J’ai tenu à venir vous rencontrer en personne. Je souhaiterai vous aider à toucher plus de monde. Je veux faire produire une grande quantité de votre œuvre pour la  vendre aux Etats-Unis. Vous et moi avions approximativement le même combat et je serai enchantée de vous aider.

– Oh mon Dieu ! Fais-je émue. J’en suis honorée. Je n’en reviens pas.


Je suis submergée d’émotions. Je les remercie toutes à tour de rôle. Elles finissent par rire tant je ne cesse de les remercier.


– Je crois qu’il y a deux autres personnes qui désirent avoir une dédicace, me siffle Loraine avec un sourire tandis que leur amie part répondre à un appel.

– Oh mon Dieu je suis épuisée. (Regardant Estelle) Pourrais-tu leur dire d’attendre à la prochaine qui aura lieu d’ici la fin de l’année s’il te plaît.

– Tu pourrais leur faire se plaisir s’il te plait, répond-t-elle en souriant bizarrement.

– Pourquoi tu souris comme ça ? Je jurerais que tu trames quelque chose.

– Arrête tes choses-là et vas faire les dédicaces.


Je les regarde toutes qui sourient à pleine dents. Elles ont quel problème ? Je décide de regarder le point derrière moi qu’elles regardent et que vois-je.


– Oooohhhh ! Mes bébés !!!


Je regarde les filles, n’en revenant pas.


– Surprise !! Fait Estelle.


Je cours vers mes enfants qui courent aussi se jeter dans mes bras. Je suis tellement heureuse de les voir que j’en pleure. Mes enfants sont là. Je leur fais plein, plein, plein de bisous.


– Maman c’est bon, se plaint Nael. Nous sommes grands maintenant.


Je me sépare d’eux pour regarder mon fils.


– Euheu, regardez-moi les choses des Congolais. On t’a dit à Kin que quand on grandit on ne fait plus de câlin à sa maman ?

–  Iyo, kasi na misu ya batu té (Si, mais pas en public).

– Ehiii. Nan-i nde azui mwana na nga ya mobali oyo alobaka te pona ko pesa nga oyo ? (Qui a échangé mon garçon si timide pour me donner celui-ci ?)

– C’est papa ! Rigole ma petite Lena en pointant du doigt un poing derrière elle.


Je suis la direction de son doigt et c’est à ce moment que je vois Kendrick, arrêté en retrait, les bras croisés sur sa poitrine. Lui aussi, tout comme les enfants, a changé. Ils sont devenus tous encore plus beaux qu’avant. C’est maintenant que je vois la ressemble des enfants à leur père. Ils ont les mêmes yeux, le même nez mais surtout le même sourire. Je fais un sourire à Kendrick auquel il répond et je me reconcentre sur mes enfants. 


– Comme vous avez grandi mes loulous. Je suis tellement heureuse de vous voir.

– Nous aussi maman, répond Lena.

– Bon nous allons rentrer pour que vous me racontiez tout ce qui s’est passé au Congo. Allez saluer vos tatas.


Je me relève pour rejoindre Kendrick tandis que les enfants vont vers les femmes.


– Que faites-vous là ? Je croyais que les vacances c’étaient dans encore un mois.

– Oui mais bon ils avaient vite fini donc j’ai voulu qu’on vienne maintenant. Charlène se chargera de me faire venir leurs relevés de notes. Ils passent tous deux en classe supérieure.

– Ça ce sont mes enfants, dis-je toute fière.


Nous tournons vers eux pour les regarder fièrement. Je suis hyper heureuse de les voir. Je m’étais entendu avec Kendrick pour me les ramener définitivement pendant les grandes vacances. Mais ils sont venus avant et ce n’est pas pour me déplaire. Nous prenons tous le chemin de la maison sauf Loraine, Roxane et leur amie qui vont dans une autre direction. Estelle aussi nous a faussé compagnie pour aller se préparer pour son rencard. Oui, elle a enfin commencé à fréquenter quelqu’un et c’est vraiment sérieux de ce que j’ai pu constater. Il veut même déjà aller faire le kôkôkô. Je suis super heureuse pour elle mais surtout pour moi. Je me sens maintenant accomplie. Je peux maintenant subvenir aux besoins de mes enfants et des miens. Déjà que je gagne un bon revenu avec ma boutique j’aurai encore des droits d’auteur grâce à mon livre et ceux pour toute la vie et même après ma mort. Je suis fière du chemin que j’ai fait.


Pendant le trajet Kendrick décide que nous nous arrêtions à une pizzéria pour diner. Tant mieux parce que je n’avais pas cuisiné non plus. Nos pizzas prêtes nous les dévorons pendant que les enfants me racontent tout ce qui s’est passé durant ces deux ans au Congo. Je suis morte de rire par moment. Je surprends de temps en temps le regard de Kendrick sur moi. J’en suis un peu intimidée mais fais genre. 


Nous arrivons enfin dans l’appartement de trois pièces que je loue à la Riviéra Palmeraie. Les enfants sont subjugués par la maison. Il n’y a pas encore si longtemps que je me le suis procuré. Quand j’ai quitté la maison d’Estelle je me suis pris un petit studio le temps d’économiser. Je laisse les enfants sautiller partout et pars prendre une douche rapide avant de les rejoindre à nouveau au salon devant la télé. Mon cœur se gonfle de joie indescriptible d’être de nouveau avec mes enfants. Ce sont les seuls que j’aurais donc tout mon amour de mère, je le déverse sur eux. Alors que je suis perdue à les regarder, on sonne à la porte. M’attendant surement à Estelle j’ouvre sans prendre la peine de regarder. Je beugue quand je vois la personne devant la porte.


– Bonsoir maman !

– Bonsoir ma fille. Je suis désolée de venir te voir à cette heure. C’est juste que j’aie tellement repoussé ce moment et quand j’ai appris que mes petits enfants étaient rentrés j’ai décidé de venir pour faire d’une pierre deux coups. Est-ce que je peux rentrer ?

– Oh désolée maman. Oui vas-y. C’est juste que je suis un peu chamboulée.


Elle rentre avec le petit garçon qui doit être le fils de Kennedy. Quand Kendrick voit sa mère il se lève, surpris. Il la regarde attendant surement ce qu’elle va dire.


– Tu ne viens pas embrasser ta mère mon chéri ?


Il tique. C’est la première fois qu’elle l’appelle ainsi. Il ne se fait pas prier et embrasse sa mère fortement. Celle-ci se met à pleurer.


– Je te demande pardon mon fils. Pardon pour ne pas avoir été une mère pour toi.

– Je t’en prie ne me demande pas pardon. Un enfant n’a rien à pardonner à sa mère.


Il la serre encore plus fort avant de la lâcher. Il demande aux enfants de l’enlacer. Ils obéissent et leur présente le petit qui s’appelle Kennedy Junior comme son défunt père. J’ai un pincement au cœur en voyant l’enfant. C’est moi qui l’ai privé de son père. Il grandira donc sans. Je me sens un peu coupable pour le petit. Kendrick demandent aux enfants de nous laisser discuter avec leur grand-mère. Je leur montre la chambre de Lena dans laquelle ils vont en tirant avec eux le petit Kennedy. Il m’a l’air bien timide.


– Deux années sont passées, commence maman Anne et j’ai pris le temps de bien réfléchir. Tu avais raison Ken quand tu as dit que notre famille devrait être unie. Jamila, après la naissance du petit, l’a abandonné entre mes mains pour retourner dans son pays et jusqu’à aujourd’hui je n’ai plus de nouvelles d’elle. Etant seule avec l’enfant, je me suis rendue compte qu’on ne peut pas vivre sans sa famille. Entre la solitude et la peur de ne pas être à la hauteur avec le petit comme je l’ai été avec son père, j’ai pris la décision d’être une meilleure grand-mère en intégrant ma famille dans sa vie. Il a le droit de connaitre ses cousins, son oncle et tous les autres membres de sa famille dont tu fais partie Cindy.


Elle marque une pause, boit l’eau que je lui avais apportée et reprends.


– Il n’est pas obligé de savoir ce qui s’est passé. En tout cas pas tant qu’il ne sera pas mature sinon ça aura un mauvais impact sur lui. C’est vrai j’ai mal pour la mort de mon fils, mais Cindy ma fille, en écoutant les trois émissions qui étaient consacrées à la lecture de ton livre, j’ai eu mal entant que femme. Je me suis rendue compte de combien tu as souffert. J’ai acheté le livre et j’en ai pleuré. Oui je savais que mon fils te battait mais le lire avec tous les détails m’a fendu le cœur.


Elle se nettoie le visage avec le bout de son boubou. Sans que je le vois venir, elle se met à genou.


– Cindy je te demande pardon.

– Oh maman pardon ne fait pas ça, dis-je en la relevant. Ne mets pas la malédiction sur moi en t’agenouillant devant moi.


Elle se rassoit en pleurant.


– Tu es forte ma fille. Tu es courageuse. Moi je n’aurai pas supporté cela. Kennedy t’a enlevé tes trompes et tu es restée avec lui malgré tout. Il n’a pas su profiter de ta patience et ce qui devait arriver est arrivé. Ne parlons plus de ça. Pensons maintenant à l’avenir des enfants. Je ne veux pas qu’il y ait la haine entre eux comme cela a été avec leurs pères. Je les veux unis. Et pour ça j’ai besoin de vous. J’ai déjà parlé avec Luzolo et sa femme. Nous nous sommes entendus. Plus jamais de rivalité dans notre famille. Cindy, tu fais partie de la famille même si tu te maries à un autre dans le futur. Merci de m’avoir écouté.


Kendrick et moi nous regardons. Je peux lire de la joie sur son visage. Il serre sa mère contre lui en posant un baiser sur sa tempe.


– Je n’ai rien contre toi maman et ce depuis belle lurette. J’ai commencé à fréquenter une église et là-bas on m’a appris le pardon. C’est grâce à Dieu si j’en suis là. Le petit Kennedy est aussi mon fils. Ma maison lui sera toujours ouverte. Il n’a pas à payer pour les erreurs de son père. Je suis heureuse que vous m’ayez aussi pardonné la mort de votre fils.

– C’était de la légitime défense ma chérie. Je ne peux t’en en vouloir.

– Merci maman.


Elle ouvre ses bras pour que je vienne lui faire un câlin. Je ne m’y gêne pas. Elle demande la route et quand je vais chercher le petit je le retrouve endormi avec ses frères sur le lit. Je referme doucement la porte et le sourire aux lèvres, retourne au salon.


– Je crois que je vais te l’envoyer demain. Ils dorment tous.

– Humm l’enfant-là, rigole maman Anna. Partout où il voit un lit, il dort en même temps. Bon je m’en vais oh. Ken, je t’attends demain. Ça fait longtemps qu’on n’a pas causé.

– C’est compris maman.


Elle nous embrasse et s’en va. Je sens un poids me quitter. Après avoir fait la paix avec ma mère l’année passée, c’est maintenant au tour de la grand-mère de mes enfants. Avec l’aide de Kendrick, je ramène les garçons dans la chambre de Nael et Lena dans la mienne. Je vais ensuite m’arrêter au balcon pour profiter un peu de la vue et de l’air frais. Kendrick m’y rejoint.


– Tu as fait du beau boulot avec les enfants. J’en suis vraiment heureuse.

– Je n’ai fait que mon devoir. J’ai décidé de vivre ici en Côte d’Ivoire près de vous. Je ne supporterai pas d’être loin des enfants après avoir passé deux ans avec eux.

– Ça leur fera plaisir.

– Je veux aussi rester pour toi.


Je baisse les yeux. Mon cœur se met à battre la chamade. Ça fait deux ans que je n’ai pas pensé à l’amour ni même accepté de parler à un homme qui a des vues sur moi et voilà que Kendrick le fait aujourd’hui.


– Est-ce que tu crois que maintenant j’ai une chance ? Me demande-t-il en glissant ses mains dans les poches de son jeans.


Je ne dis rien tant les idées s’entremêlent dans mon esprit.


– Je t’aime toujours princesse. Je me suis juré de ne point fréquenter d’autres femmes que toi. Je ne veux aucune autre. Tu détiens toujours mon cœur. (Il me tourne face à lui) Cindy, je veux passer le reste de ma vie avec la mère de mes deux enfants. Peu importe que nous n’en ayons plus. Deux ça me suffit. Bébé je t’aime. Redonne-nous cette chance qui nous rendra tous heureux.

– L’amour, c’est le dernier de mes soucis en ce moment.


Il affaisse ses épaules de découragement. Il remet ses mains dans ses poches après m’avoir lâché.


– Ok. Je ne vais plus insister. Je resterai donc en Côte d’Ivoire pour les enfants. Passe une bonne nuit.


Il me pose un baiser sur le front et tourne le dos.


– Attends Kendrick. (Il s’arrête sans se retourner) Je ne suis pas encore prête pour le mariage. Mais… je crois que j’ai aussi besoin du père de mes enfants à mes côtés.


Il se retourne cette fois avec un mélange de surprise et de joie sur son visage.


– Je crois que ça ferait aussi plaisir aux enfants d’avoir leur deux parents unis.

– Tu veux qu’on soit ensemble pour les enfants ?

– Si, enfin non, enfin pas seulement pour eux, mais aussi pour moi. Enfin tu…


Il m’interrompt par un baiser. Comme ça faisait longtemps. Je ne le repousse pas. C’est agréable de ressentir de nouveau cette sensation. Je me sens rassurer dans ses bras. Je crois même que tout à l’intérieur de moi est entrain de reprendre vie.


– Nazui mokano yako zipa yo na bolingo ébelé ébelé tii eko zangisa yo ndenge yako pema (Je te promets de te couvrir de beaucoup, beaucoup, beaucoup d’amour à t’étouffer), souffle-t-il près de mes lèvres.

– Woh tout de suite les gros mots, fais-je en le repoussant légèrement. Nous ne serons pas vraiment, vraiment ensemble. Il n’y aura pas de sexe et pas de mariage maintenant. Je veux profiter de ma vie avant de me remettre dans un mariage.

– Je serai patient bébé.

– On verra bien.

– Je t’aime Cindy.


Je souris juste. Il me serre très fort dans ses bras ce qui me réchauffe face à cet air frais. Je ne suis certes pas encore prête à me marier mais je finirai par y arriver. J’aime toujours Kendrick et ça ne me ferait pas de mal de retenter le coup avec lui. Cette mauvaise expérience ne doit pas conditionner ma vie. Ce n’est pas parce que j’ai été victime de violence une fois que je ne croirai plus au vrai amour. Toute femme qui a été victime de grosse déception peut encore retrouver l’amour. Tous les hommes ne sont pas pareils, donc tous les hommes ne sont pas violents. Je devrais peut-être donner une chance à Kendrick. Comme Loraine me l’a dit une fois, pourquoi aller condamner un autre homme à supporter une femme stérile alors que je peux rester avec le père de mes deux seuls enfants qui m’aime et que j’aime ? Elle a peut-être raison. Ce qui est sûr le vrai amour, j’y goûterai. Et ce qui est encore sûr et CERTAIN c’est que plus JAMAIS un homme ne lèvera la main sur moi. PEUT-ÊTRE que le premier coup je ne pourrai l’empêcher MAIS je ne permettrai pas que LES AUTRES COUPS SUIVENT.


Chères sœur, ne risquez pas vos vies pour des hommes qui n’en valent pas la peine. Oui on peut faire des sacrifices par amour et supporter des choses par amours. Mais maman, on ne condamne pas sa vie à souffrir pour un homme qui ne nous donne pas de la valeur. Vous ne devrez pas vous obliger à rester avec un homme qui vous humilie sans cesse, un homme qui vous fait plus souffrir que  vous rendre heureuse. Les épreuves difficiles (les disputes y comprise) dans un couple ne doivent pas être plus fréquentes que les moments de joie, de partage et d’amour. Sinon vous n’êtes pas dans une relation, mais dans un calvaire. Pendant que vous vous tuez pour un homme, il y a un autre qui vous attend pour vous rendre heureuse. On peut donner des chances à un homme sur certaines choses. Mais jamais on ne donne de nouvelles chances à un homme capable de cogner une femme. Ça commence toujours par un coup et ça fini par des hospitalisations, pire, la morgue. Arrêtons d’être naïves. L’amour ne donne pas des coups de poing.


MESDAMES, AU PREMIER COUP, PRENEZ VOS CLIQUES ET VOS CLAQUES ET DÉGAGEZ. BOKO KENDE LIFELO PNA YANGO TE (VOUS N’IREZ PAS EN ENFER). MERCI !




~~~FIN~~~


L'autre Lui