Épisode 6

Ecrit par Mona Lys

Episode 6



TERRY


Je me réveille avec une migraine atroce. L’alcool et moi ça n’a jamais fait bon ménage mais je persiste quand même à en consommer. J’avais besoin de boire pour oublier. Ça faisait un an hier qu’elle est partie. Que ma fille est partie. J’ai donc décidé d’aller boire pour faire passer mon amertume. J’avais besoin d’oublier ne serait-ce que pour une journée. Je me lève difficilement pour me rendre à la douche. Je reste là à regarder les deux cabines de douche. J’en avais faites construire deux pour qu’Inès et moi puissions nous laver ensemble. Il y a aussi deux lavabos. Nous aimions tout faire ensemble. C’était notre rituel de nous laver, nous brosser les dents et nous préparer ensemble. C’était notre rituel.


« – Teyo. »


Je tourne la tête et la vois arrêté devant moi en blanc.


– Inès mon poussin.

« – Teyo, tu m’as laissé mourir. »

– Non mon poussin ! Non !

« – Tu m’as laissé mourir. Tu n’es qu’un incapable. »

– Non, non c’est faux.


Je commence à trembler et sa voix ne cesse de sonner dans ma tête. Je ferme les yeux en me tenant la tête entre les mains. Quand j’ouvre les yeux je ne la vois plus mais sa voix résonne toujours dans ma tête. Je tourne sur moi-même ma tête toujours entre mes mains.


« – Tu m’as laissé mourir. Mourir. Mourir. »

– Non pardonne-moi. Inès pardonne-moi. Non ! Non ! NON !


Je cogne mon poing dans la vitre de sa cabine de douche. Elle se brise et ma main se met à pisser sang. Je ne m’arrête pas là. Je continue de donner des coups dans la vitre jusqu’à ce qu’elle se brise totalement. Je ne m’occupe pas de ma main qui est pleine de sang. Je me mets maintenant à cogner dans le mur avec toujours la même main. Je ressens le besoin de me faire mal. Je ne suis qu’un incapable. Un incapable ! Je n’ai pas su sauver ma fille et je ne l’avais pas su avec ma femme. Je suis nul. Je cogne encore et encore à m’en péter la main. Je m’assois ensuite sur le carrelage en me tenant la tête. Là je commence à pleurer. Je demande pardon à Inès et à sa mère. Je leur demande pardon d’avoir été un mauvais mari et un mauvais père. Je ne les méritais pas. Pas du tout. Quand je ressors de la douche il est 11h. Il faut que j’aille prendre l’air avant d’aller travailler.


Les lunettes de soleil plaqué sur mon visage plus une casquette pour cacher ma mauvaise mine, je bois lentement mon café noir dans un petit café non loin de ma maison. J’avais besoin de sortir un peu de ma maison. Il me faut réfléchir à la suite des évènements. Trouver comment faire pour retrouver plus rapidement ce chauffard. Alors que je suis plongé dans mes pensées une ombre vient me couvrir mais je n’y prête pas attention.


– Bonjour monsieur.


Je lève à peine la tête pour voir qui me dérange ce matin. Je vois une jeune fille dont le visage ne me dit absolument rien du tout. Je la regarde attendant la suite de sa phrase. Je n’ai pas l’intention de répondre à sa salutation.


– C’est bien vous je ne me trompe pas. C’est moi qui vous ai raccompagné hier.

– Vous vous trompée de personne.


Je reporte mon attention sur mon café.


– Non c’est bien vous. Je vous ai reconnu grâce à votre casquette avec les initiales. Vous la portiez hier.


Faux. Je ne portais pas cette casquette hier mais une autre qui a à peu près la même couleur. Et puis bref j’en n’ai rien à foutre de qui elle est et de ce qu’elle a fait. Je ne lui réponds toujours pas et sirote mon café.


– Je vois que vous êtes toujours aussi mal poli. J’étais juste venu m’assurer que vous alliez bien vu l’état dans lequel vous étiez hier.

– Vous voulez un oscar ?


Elle ouvre grand les yeux et la bouche choquée par ma réponse. Cette fille vient de me gâcher mon moment de méditation. Je laisse quelque billet sur la table et sors. Alors que je m’apprête à monter dans ma voiture je sens une main se poser sur mon bras.


– Mademoiselle veuillez ne pas le toucher. Lui ordonne Rico.


Je passe mon regard de sa main à elle. Elle me lâche aussitôt.


– Plus jamais, vous n’oseriez poser vos empruntes sur moi.

– Mais je…


Je monte dans ma voiture sans attendre la suite de sa phrase. Non mais cette fille est tarée. Oser me toucher, moi ? Elle vient de me mettre de mauvaise humeur. Je retourne à la maison me changer et je vais au bureau. Il me faut travailler pour décompresser. Quelques minutes après être installé dans mon bureau, Rama fait son entrée avec son bloc-notes.


– Bonjour monsieur. Vous avez reçus trois appels de…

– Faites-moi un résumé.

– Euh ok monsieur. Trois appels de personnes voulant vous rencontrer. Un rendez-vous dans 45 minutes avec Monsieur Alain SONDÉ. Il y a le DAF qui désire vous voir et…


Je l’interromps en levant le doigt vers elle. Ma mère m’appelle.


– Bonjour maman.

– « Bonjour chéri. S’il te plait tu peux m’acheter poulets formés avec cauchisson. »

– Saucissons. Tu veux des saucissons ? Je croyais que tu n’aimais pas ?

– « Oui mais j’ai vu ça à la télé et j’ai envie de gouter encore pour bien voir le goût. »

– Pourquoi tu ne demandes pas à l’une de tes servantes d’aller te les acheter ?

– « Ah je veux que mon fils m’envoie quelque chose c’est mauvais ? Ou bien parce que tu es boss tu ne… »

– Ça va maman, c’est compris j’arrive.


Je raccroche et me lève.


– Annulez le rendez-vous de toute à l’heure.

– Mais…

– Vous voulez que je me répète ? 

– Euh non monsieur. Désolée.


Je vais faire les courses de ma mère comme prévue et les rapporte chez elle. Cette femme a toujours eu le don de me ramener les pieds sur terre. Malgré mon nouveau statut elle continue de me traiter comme le gamin que j’étais. Mais ça ne me dérange pas de la servir. Elle est ma mère et l’être le plus cher à mes yeux. Je la trouve assise sur la moquette dans son salon en train de manger du placali avec je ne sais quelle sauce. Je n’ai jamais maitrisés tous les noms des sauces. Il y en a trop. Je donne les courses à sa servante qui va les ranger. Je l’embrasse sur le front et m’assois dans le fauteuil.


– Je t’ai apporté tes courses maman.

– Merci chéri. Tu veux manger aussi ?

– Non merci.

– Tu as déjà mangé ?

– Non pas encore.

– Et puis tu dis tu manges pas ? MATOU OOH. Hurle-t-elle en appelant la nounou d’Inès.

– Oui tantie.

– Pardon faut servir placali à mon fils.

– Non maman. Matou juste un peu de riz s’il te plait.

– D’accord monsieur.

– Enlève ta veste et tes chaussures et viens t’asseoir prêt de moi. Faut pas salir ma moquette.


C’est moi qui vais salir sa moquette alors que c’est elle qui mange une sauce gluante là-dessus ? Ma mère ! Je fais comme elle a dit et m’assois près d’elle.


– J’aime quand tu es simple comme ça chéri.

– Je sais.

– Je fais ça pour ne pas que tu naka oublier d’où on est vient. Tu es riche mais faut pas être orgueille.

– Orgueilleux.  

– Orgueilleux, se corrige-t-elle. On dit quoi ça va ?

– Oui maman.


Elle me regarde en souriant et je lui pose un baiser sur la tempe. Matou apporte mon plat que je déguste. C’est d’ailleurs chez ma mère que je mange convenablement parce que de toutes les façons elle m’y obligera. C’est à 13h30 que ma mère me libère enfin. Je retourne au travail continuer ma maquette. Il n’y a que l’architecture qui puisse me faire déstresser. Quand je commence à dessiner un croquis ou façonner une maquette, j’oublie tout. Absolument tout et je peux travailler 24h d’affiler sans m’arrêter.


Je prends enfin la route de la maison après une dure journée de travail. Il pleut et bien que la pluie n’étant pas forte les rues sont désertes. Alors que Rico me conduit à la maison je vois de loin une jeune fille qui marche seule sous cette pluie. Je me dis qu’avec ce genre de comportement comment se plaindre après de viol. Elle pouvait tout simplement s’abriter plutôt que de se la jouer aquwawoman non !? Nous l’éclaboussons en passant près d’elle puis quand elle se met à hurler contre notre voiture je reconnais la voix. Enfin je l’ai déjà entendu. Je regarde en arrière et je reconnais le même vêtement quoi que trempé de la jeune fille du restau et qui m’a aidé hier nuit. Bof rien à foutre de toutes les façons. Ce n’est pas moi qui ai dit à la pluie de tomber donc je ne vais pas l’aider. Je n’ai pas non plus besoin qu’elle vienne mouiller ma voiture. Mais j’ai bien envie de lui faire payer son insolence.


– Rico, fais demi-tour et éclabousse à nouveau cette jeune fille.


Rico me regarde bizarrement par le rétroviseur mais obéit. Il dépasse la fille en marche-arrière et repart en l’éclaboussant encore plus que la première fois. Elle se met encore à hurler.


– Boss, je crois c’est la jeune fille qui vous a ramené hier nuit.

– Rien à foutre.


Ça lui apprendra de poser ses mains sur moi la prochaine fois.    



T.Y: Ce coeur à conq...