Intervention musclée
Ecrit par Farida IB
Khalil…
Nous sommes au lendemain et à l’instar d’hier, je travaille en étroite collaboration avec la miss sur la campagne publicitaire du nouveau produit d’un magasin de vêtements. Quoiqu’aujourd’hui le travail est d’une lenteur incomparable étant donné que nous sommes entrecoupés par les appels incessants de mes frères. Il y a Ussama qui pète une durite sur moi depuis ce matin et jusque-là, j’ignore encore la raison puisque Jemal est injoignable, en plus de Yumna qui m’appelle chaque trente minute parce que Ussama aurait filtré ses appels. Dire que je suis hyper stressé en ce moment est un euphémisme. On connaît tous Ussama pour son calme et son laxisme. De même qu'on sait qu'il est très lent à la colère, mais lorsque ça lui prend il se transforme en un vrai Kamikaze. Néanmoins ça arrive dans les cas les plus extrêmes et c'est pour cela que j'ai du mal à deviner ce que Jemal a pu orchestrer pour réveiller le dragon en lui. (soupir) J’espère ne pas tarder à le savoir.
Je range mon téléphone pour une énième fois et me tourne vers Nahia qui traîne une fois de plus une tête de macaque.
Moi la fixant intensément : vous êtes sûre que ça va ?
Nahia se massant le coup : pas vraiment, mais ça peut aller.
Moi : ok, on peut reprendre si vous êtes prête.
Nahia : ok.
Moi : nous en étions où ?
Nahia faisant des petits yeux : euh, en fait je ne me rappelle plus trop.
Je soupire de dépit et m’adosse contre mon siège, il faut dire qu’on reprend à peu près les mêmes choses à chaque fois et ça commence à être frustrant. Je connais mon cas, mais elle, je ne sais pas ce qui justifie son manque de concentration aujourd’hui et ce n'est pas moi qui vais poser la question au risque de me prendre un râteau. Il est presque midi alors que même les cibles, nous n’avons pas pu déterminer.
Moi : je pense qu’on devrait prendre une pause.
Nahia : volontiers !
Dès lors, elle roule son siège jusqu’au mur derrière et jette la tête par-dessus le siège avant de poser la main sur les yeux. Elle reste ainsi un moment l’air dans les vapes.
Moi (quelques minutes plus tard) : on peut remettre ça sur la semaine prochaine si ça vous dit.
Nahia soupirant : je ne peux pas me permettre ce luxe, j’ai un délai très serré pour finir cette campagne.
Moi : sauf que vous n'êtes pas productive depuis que nous sommes là, ce qui fait que nous travaillons au ralenti.
Nahia : ça ira, j’ai juste besoin de quelques minutes de repos.
Moi : ok, c’est comme vous le sentez.
Il y a comme un flottement qui est interrompu par le bourdonnement de son téléphone. Je le prends sur le bureau et le lui remets. Sitôt qu’elle vérifie l’écran qu’elle affiche un sourire lumineux comme sur les photos d'hier. Le premier vrai sourire qu'elle a acquiescer depuis que je suis là, et je dois dire qu’elle en a un joli. Elle devait penser à sourire plus souvent.
Je fais mon pointu en suivant la conversation avec intérêt.
Nahia : (…) rire… Jamais égalé et jamais égalable (…) Tout sera prêt la semaine prochaine chouquette, je te donne ma parole d’honneur.
Au moins là, on sait que c’est une femme.
Nahia : ah bon ? Je vais voir dès que tu raccroches (…) ça, c’est sûr krkrkr (…) Hmmm je dois faire le ramassage ce soir et si tu veux que ton taf soit prêt à temps il ne vaut mieux pas que je bouge de l’agence. (…) Vous partez à quelle heure ? (...) Je dirai à tanti Awa de passer les récupérer puisque c'est sur sa voie (...) oui oui, je devais passer là-bas de toute façon. (…) Great, j’espère que les couleurs sont bien assorties, je n'ai pas trop envie de gérer des crises de larmes demain. (…) Cool, tu m’envoies donc les photos sur Whatsapp comme ça, on improvisera dans le cas échéant. (…) Top, je vérifie ça et je te fais signe. (…) Safe journey chérie, bisou où tu sais.
Je fronce les sourcils, j’espère au moins que ce n’est pas ce à quoi je pense. Déjà qu’elle résiste à mon charme depuis hier. J'y pense, il y avait bien un gars le soir du jour où je suis arrivé. Ou peut-être qu’elle est bi… Nan !!!
Je souris à ma dernière pensée pour tomber direct sur son regard inquisiteur.
Moi lui rendant son regard : quoi ?
Nahia les yeux fixés sur son mobile : je me demandais juste si ça vous arrive souvent de sourire bêtement comme ça.
Je me passe la main sur le visage et prends une grande inspiration. Et dire que j’avais cru un instant qu’elle était revenue à de meilleurs sentiments vis-à-vis de moi. Je détourne mon regard vers les tableaux encastrés dans le mur en face. En réalité, je n’ai pas le moral pour des prises de tête.
Ensuite, elle fixe son téléphone le sourire aux lèvres. Je l’imite dans son geste dans l'intention de rappeler Jemal qui répond toujours aux abonnés absents. Je remets le téléphone dans l’une des poches de mon Caftan tout en suivant ses faits et gestes du coin de l’œil. À un moment donné, elle affaisse ses épaules en entrainant sa tête avec puis se pince la lèvre inférieure. Ce geste a le don de susciter des pensées pas très avouables dans mon cerveau jusqu’au moment où je remarque ses lèvres tremblotantes et ses yeux qui brillent.
Moi cherchant son regard : Nahia ?
Une larme perle sur sa joue.
Moi me rapprochant d’elle : qu’est-ce vous avez ? Pourquoi pleurez-vous ?
Là, elle éclate en sanglots. Je la regarde perplexe un moment puis me rapproche encore plus dans l’idée de la prendre dans mes bras et la bercer. Elle se lève de façon précipité et sort du bureau comme si elle avait le feu à ses trousses.
Oh mais qu’est-ce qui vient de se passer ?
Je me mets à m’imaginer toutes sortes de scénario et l’idée qui revient le plus c’est qu’il soit peut-être arrivé quelque chose à un membre de sa famille ou à son entourage. Je prends mon mal en patience en attendant son retour. Elle revient une dizaine de minutes plus tard, fouille dans son sac à main et sort un voile qu’elle porte avant de refermer le sac pour se diriger à nouveau vers la porte sans me prêter un seul regard.
Moi largué : où est-ce que vous allez ? Je pense que vous me devez une explication par rapport à ce qui s’est passé toute à l’heure.
Nahia se tournant vers moi furieuse : je ne crois pas vous devoir une quelconque explication.
Moi (encore plus perdu) : je sais, toutefois, je pense qu’il serait opportun que vous en parliez.
Nahia attrapant le poignet de la porte : je dois me rendre à la mosquée.
J’arque un sourcil parce que depuis que je suis là, elle ne l’a jamais fait.
Nahia comprenant : oui mosquée, nous sommes vendredi.
Je me tape le front avant d'acquiescer un sourire contrit. Je dois avouer que je ne me souviens plus du tout du jour où j’ai mis le front à terre.
Nahia regard goguenard : je pensais que lorsqu’on est arabe, la prière est comme une seconde nature pour soi. (sarcastique) Il serait plus judicieux pour vous de changer de nationalité voir même de continent et je vous suggérerais l’Europe parce qu’il est clair que vous n’avez rien d’un Arabe.
Sans plus attendre, elle sort du bureau en me laissant pantois. Non mais j’aurais tout vu avec cette petite. En plus d’être bisexuelle, elle est bipolaire et c’est elle qui se permet de me faire la morale sur l’accomplissement des prières. C'est sans doute l'hôpital qui se fout de la charité !!!
Nahia…
Khalil (téléphone) : là, c’est bad !
Je cale mon dos contre le siège et me mets à masser mes tempes. Ça n’a pas arrêté aujourd’hui, il en est à son millième coup de fil.
(…)
Khalil soupirant : et dire qu’on n’avait jamais prêté attention à ce détail de sa vie.
(…)
Khalil : je n’aurais jamais pu imaginer ça de lui. Frangin toi-même vois le produit. (intonant) C’est impensable, stupéfiant, incroyable !
Je lui lance un regard perplexe en remarquant sa mine contrariée.
(…)
Khalil (soupire débité) : je sais par Yumna qu’il filtre ses appels, moi, il m’a admonesté directement en ignorant que c’est toi le réel instigateur.
(…)
Khalil : lol ça c’est vrai, mais s’il faut condamner quelqu’un, ce sera toi. C’est toi qui as eu cette brillantissime idée.
(…)
Khalil : Go casse Singh ! Essaie de lui parler et tu me tiens au courant.
Il raccroche et me retourne le regard interrogateur avec lequel je le fixais.
Khalil : qu’est-ce qu’il y a ?
Moi : est-ce que vous m’avez entendu parler ?
Khalil voix rauque de colère : ne commencez pas s’il vous plaît.
Moi sur la défensive : pardon, de ne pas rabattre vos humeurs sur moi.
Il prend une grande inspiration avant de revenir prendre la place qu’il occupait à côté de moi.
Khalil calmement : un jour Adja, un jour, je trouverai le moyen de rabattre votre clapet.
Moi le défiant du regard : c’est une menace ?
Khalil : une simple promesse !
Il me tend la main, je devine que c’est pour sceller l’accord donc je l’évite sciemment. Il se rétracte et acquiesce un sourire narquois.
Khalil : on en était où ?
Moi : aux tons.
Khalil : et vous m’attendiez, c’est ça ? Voilà que vous ne pouvez déjà plus vous passez de moi.
Moi : il me fallait de la concentration et avec vos coups de fil à tout-va ce n’était pas gagné.
Khalil : il n’y a rien de mal à ravaler sa fierté de temps en temps pour accepter une vérité de La Palice.
Je roule des yeux en sachant pertinemment qu’il a raison. Travailler avec lui est un véritable palliatif pour moi depuis hier. Pour être honnête tout le travail repose sur lui parce que mon cerveau beugue depuis le début de la semaine. J’avoue que j’étais perplexe lorsqu’il m’avait fait la proposition, mais on sent que le gars s’y connaît. Il a de la créativité, de la réactivité et du pragmatisme, en plus d’avoir un œil de lynx. Les exemplaires des affiches que j'ai fait imprimer ce matin sont juste TOPISSIME. Néanmoins, ce n’est pas moi qui vais lui dire cela, comme qui dirait Murielle, on ne l’appelle pas Gari (farine de manioc) c’est pour qu’il commence à gonfler dans mon bureau ici lol. (dédicace)
Cet après-midi nous étions plus motivés donc nous avons roulé la tempête. Il faut dire que prier m’a redonné du pep et je préfère ne pas évoquer les évènements avant cela pour éviter de remettre mon moral en berne. C’est à un doigt de finir le spot que je mets fin à la séance de travail puisqu’il fallait partir chercher les enfants à l’école. J’ai également pour corvée de ramener tous les enfants de la famille dans la grande maison en prélude de la rencontre de demain. C’est une initiative de mon père qui a pour but de réunir tous les membres de notre famille dans la convivialité et la gaieté à chaque fin de mois. Du coup je ne vois même pas pourquoi le suce-boule en chef que j’ai comme fils en a parlé à son nouvel ami.
Je démarre en direction de l’école des enfants en silence, Khalil pianote sur son téléphone et moi, je suis dans mes pensées. J’appréhende un peu mon passage à la maison ce soir, je ne sais pas ce qu’Amou et sa belle-mère iront encore inventer. Hier, j’étais trop éreintée et bougonne pour supporter de nouvelles remontrances donc j’ai préféré rentrer chez moi. Et comme je m’y attendais, j’en ai pris pour mon grade avec les parents. Là, si je veux éviter une descente musclée de pa’a ou pis ma’a chez moi, j’ai intérêt à me conformer à leur règle à n’en point finir.
Le problème avec mon père et ma mère, c’est qu’ils sont restés égaux à eux-mêmes malgré le temps qui passe, toujours aussi intransigeants et fermés à la communication. De ce fait le dialogue entre nous n’existe pratiquement plus, notamment avec le caractère rebelle que je me suis forgée ces dernières années. Ce n’est pas pour me féliciter et contrairement à ce que pensent les autres, Murielle n'en est pour rien. C’est juste que la vie m’a fait perdre tellement d’illusions qu’à un moment j’en avais marre d’être la serpillière que tout le monde pouvait utiliser et jeter à sa guise. Je me suis mis à dos tout le monde si tant et bien que mamie Catherine est la seule dans la famille à qui je m’ouvre complètement et encore avec ses nombreuses maternités Amou n’a plus vraiment du temps à m’accorder. Il faut d’ailleurs reconnaître que mamie est la seule à m’apprivoiser en même temps qu’elle a toujours le mot pour me réconforter.
C’est sur cette pensée que je me gare sur le bas-côté de l’école juste à temps pour voir sortir les élèves.
Laïla (arrivant la première) : bonsoir tata, bonsoir tonton Lil. Tata, je peux m’asseoir avec lui ?
Naïla débarquant à son tour : c'est normalement mon tour donc c’est à moi d'être à côté de lui.
Je plisse les yeux, depuis quand elle a ce genre de lubie elle ?
Moi coupant l’affaire court : vous voyez bien que cette place est déjà occupée, allez…
Khalil m’interrompant : elles peuvent s’asseoir toutes les deux ça ne me dérange pas.
Moi dubitative : vous risquez d’être coincés.
Khalil : ce n’est pas grave, c’est pour quelques minutes seulement.
Moi : nous avons un grand tour à faire aujourd’hui, je dois embarquer ma sœur et mes petits cousins à la maison.
Khalil haussant l’épaule : je ne vois toujours pas d’inconvénient à cela.
Moi pas du tout d’accord : je ne veux pas de problème avec la police.
Khalil : on peut s’arranger sur ce côté, elles n’auront qu’à baisser leurs têtes lorsque nous les apercevrons.
Moi soupire résignée : ok comme vous voulez.
Les filles (d’un geste de la victoire) : yessss !!
Ils se coincent comme ça, la chance même qu’elles sont aussi grosses que moi. Les garçons s’installent derrière à leur arrivée et nous démarrons avec leur bavardage. Même Nabil a l’air mécontent que ce soient les jumelles et non lui qui soit assis avec leur tonton Lil. De ce fait, je me demande ce qui leur prend d’un coup, comme s’ils s’attendaient à sa venue au Togo tchuiipp !!
C’est Zeina que je passe prendre en premier, j’échange quelques minutes avec sa mère avant de reprendre ma place devant le volant. Quand elle sort finalement de la maison, le regard de Khalil reste accrocher à son visage jusqu’à ce qu’elle monte avec les garçons.
Zeina (pendant que je démarre) : bonsoir bonsoir, bonsoir sœur Nahia… Euh, c’est lui tonton Lil ?
Je lui jette un coup d’œil perplexe, comment elle sait ça elle ?
Naïla lui répondant avec enthousiasme : oui tata
Zeina : waoohh il est plus beau que dans votre description.
Tssuiipp en quoi même ?
Je me rends compte que je l’ai pensé tout fort en remarquant le silence soudain autour de moi.
Laïla : si, tata, il est beeaauuuuu.
Moi faisant la grimace : même pas.
Nabil faisant la grosse voix : la mauvaise foi !!!
Je lui lance un regard sévère avant de me retourner pour voir le sourire en coin de Khalil. Je tchipe.
Moi : je vois qu’on a déjà passé le mot. Si c’est pour lèguèdètiser sur ma vie que vos parents vous ont offerts des téléphones, je vais les faire confisquer.
Les filles : non steuplaaaiittt.
Moi : tchhuiipp.
Ils discutent gaiement le long du trajet, enfin ça se passe entre questions et excitations auxquelles Khalil répond patiemment. Par contre, il n’a pas arrêté de jeter des coups d’œil à Zeina donc à un moment, j’ai décidé de le taquiner un peu.
Moi : je sais, on sait tous que ma sœur est belle, mais à un moment arrêtez de la regarder comme une sucette.
Il ouvre la bouche pour parler, mais finit par se gratter la tête.
Khalil au bord de l’admiration : c’est que, c’est qu’elle est (donnant l’air de chercher le mot adéquat) elle est…
Moi petit sourire : à couper le souffle.
Il sourit gêné. Nous arrivons chez le couple Hamed en un temps record, là, je descends et vais chercher nos nouveaux vêtements de sport que Tina devrait lui laisser cet après-midi. Nous revenons avec les quatre gamins qui rejoignent les autres. Finalement, c’était bien d’avoir les jumelles devant, je ne sais pas comment on se serait arrangés. Je présente Khalil à tanti Awa qui me charrie un peu en langue avant qu’on ne mette le cap sur la maison. C’est dans un vacarme total que je bifurque dans la ruelle menant vers la maison. Je gare à quelques secondes près et dès que je coupe le moteur, les enfants accourent vers la maison très pressés de voir leurs nouveaux maillots. Je récupère mes affaires et m’apprête à descendre lorsque Khalil me lance.
Khalil : je ne dirai pas non à un rafraîchissement pour rendre l’attente moins pénible.
Moi sarcastique : ok, à vos ordres chef.
Pendant ma progression, je peux sentir son regard derrière mon dos. Nul besoin de me retourner pour savoir qu'il louche sur mes fesses. J'arrive au salon et fus chaleureusement accueillie par la ribambelle, autant dire que pour une fois, ils sont tous d’accord sur la couleur et la taille de leurs maillots. Je me rends ensuite dans la cuisine pour trouver les deux dames affairées devant la paillasse. Amou prépare les bibis des bébés et mamie est occupée à décorer des cupcakes. Je lance un bonsoir à peine audible avant de plonger mon nez dans le réfrigérateur.
Mamie : bonsoir, pourquoi tu n’es pas passée par ici hier ?
Moi : j’étais un peu indisposée.
Amou : dis plutôt que tu voulais nous éviter.
Moi soupire lasse : Amou ne commence pas s’il te plaît.
Je sors des canettes de sucreries et des cartons de jus et entreprends de chercher un plateau sur lequel les poser dans le placard.
Amou : tu l’as au moins déposé avant de venir ?
Moi (posant les boissons sur un plateau en bois) : tu sais bien que c’est impossible.
Mamie : donc il est dans ta voiture en ce moment.
Moi : oui, c’est à lui que j’apporte ces boissons (les lorgnant) au moins une preuve de courtoisie.
Mamie : laisse ça, viens préparer le dîner.
Je lui jette un coup d’œil perplexe.
Moi : après vous viendrai me dire que je le traite comme un paria.
Elle garde le silence en rangeant les ustensiles qu'elle a utilisé dans l'évier. Quand elle finit sa besogne, elle se nettoie les mains avant de sortir de la cuisine en faisant fi de mon regard interrogateur.
Amou (dès que nous sommes seules) : tsuiipp !! Mais tu manges quoi chez toi pour être devenue si sauvage ?
Je lui fais les gros yeux.
Khalil…
Je suis étendu sur le siège incliné vers l’arrière en répondant aux messages de Melissa qui me fait un rapport en temps et en heure de leur escale à Paris. C’est à ça que je suis occupé depuis que je me suis retrouvé à nouveau seul devant cette maison. Je sais déjà qu’elle ne reviendra pas de si tôt donc il me fallait trouver le moyen de rendre le temps d’attente moins ardu. Mélissa parle chiffon un moment avant de m’envoyer une photo d’elle dans un dessous sexy, même très sexy couchée dans sa cabine.
Moi : « Oucchh mademoiselle l’hôtesse, vous serez punie à votre retour pour avoir essayé de corrompre l'imagination de Monsieur le passager »
Mélissa : « si c’est pour me punir comme l’autre fois, je ferai pleins d'autres bêtises comme celle-ci »
Elle m’envoie une photo de ses seins nus au taquet.
Moi m’empressant de répondre : « Tu trouves le moyen de raccourcir ton voyage ou je porte plainte contre toi pour détournement d’attention et outrage à hei hei »
Au moment où je clique sur l’icône d’envoi, j’entends cogner sur la vitre de mon côté. Je redresse le siège et baisse la vitre pour tomber sur une dame blanche d’un certain âge. Je fronce les sourcils parce que je ne l’ai vu sortir de nulle part, la dame s’abaisse à ma hauteur acquiesçant un sourire tendre.
La dame (accent flamant) : bonsoir,
Moi : euh bonsoir.
La dame : jeune homme venez s’il vous plaît.
Le regard bienveillant avec lequel elle me fixe et son sourire avenant dissipe mon hésitation en un clin d’œil. Enfin, elle m’a fait le même effet que lorsque je fixe ma mère dans le fond de ses yeux. En fait, elle a des yeux vert noisettes qui la rendent irrésistible tout comme ma mère. Elle nous fait entrer dans la somptueuse villa où miss se terre souvent, je la suis au pas jusqu’à un vaste salon coquettement décoré. Je retrouve en plus de la troupe de toute à l’heure, des triplés calées sur les cuisses des plus grandes. Dès qu’ils me voient, les grandes posent les bébés dans le canapé et ils me sautent dessus en manquant de me faire tomber.
Eux content : tonton Lil !!
La dame : heeppeepp faites attention à ne pas le faire tomber.
Je m’abaisse à leur hauteur pour la cérémonie des bisous avant de lever la main dans laquelle Nabil tape tout excité.
Moi : ça va vous ?
Ils répondent à la queue leu leu.
La dame désignant un fauteuil : faites comme chez vous, je reviens.
Je hoche la tête alors qu’elle passe la porte. Il y a l’une des jumelles qui m’entraîne vers les triplés, bon, je ne sais plus trop laquelle.
Elle : tonton Lil vient voir nos frères (les désignant d’un geste de la main) lui, c’est Chahid, Bahidja et Nahissa.
Moi lui souriant : content de faire leur connaissance.
Elle répond à mon sourire toute contente. Je prends les deux fillettes que je pose sur chacune de mes cuisses après m’être assis avant de poser le garçon entre elles. Les autres forment un cercle autour de moi, chacun voulant toucher mes cheveux. Ils me racontent leur journée à bâtons rompus, je les écoute avec toute l'attention requise. Ce qui me surprend d'ailleurs. Il faut dire que côtoyer les enfants n'a jamais été ma tasse de thé, mais ceux-ci sont tellement attachants que c’est tout uniment que je trouve mes marques parmi eux.
La dame revient avec un plateau de gâteaux qui sentent divinement bon ainsi que des rafraîchissements.
La dame (posant le plateau) : mais laissez le jeune homme respirer, c’est quoi votre problème ? Aller oust !
Ils se dispersent en boudant et reprennent leur place d’avant. Alors qu’elle me sert le jus d’orange pour lequel j’ai opté, une autre jeune dame fait son apparition tout sourire suivie de Nahia qui a repris sa mine des mauvais jours.
Nabil à la jeune dame : tata, c’est lui tonton Lil.
La jeune dame : bonsoir monsieur, moi c’est Amouchka, la sœur de Nahia.
Moi répondant à son sourire : enchanté de faire votre connaissance, vous pouvez m’appeler khalil.
La jeune dame souriant : je n’y manquerai pas, alors soyez le bienvenu dans notre pays. Ma belle-mère et moi avons pensé (lorgnant la miss) qu'il etait plus que temps de faire les présentations.
Khalil : tout à fait, merci. J'aime bien votre pays.
La jeune dame : ça fait plaisir de l'apprendre.
La miss roule des yeux.
La dame me tendant la main : appelez-moi mamie.
Moi sourire franche en saisissant sa main : tout le plaisir pour moi d'avoir fait votre connaissance.
La sœur prenant l’un des triplés : bon, je pense que vous avez déjà fait connaissance avec les enfants, ne vous inquiétez pas vous retiendrez leurs noms plus tard (je souris) les autres ne vont pas tarder à rentrer. Mettez-vous surtout à l’aise.
Pendant ce temps, la miss leur lance des regards meurtriers auxquels elles ne prêtent pas attention. Je regarde la scène amusé en buvant mon breuvage. Elle finit par s’éclipser vers la même porte par laquelle elle est rentrée. Au fur et à mesure, on me présente son beau-frère ensuite sa mère, c’est Adja le père qui arrive le dernier juste à temps pour le dîner. J’accepte la proposition de sa mère de manger avec eux. La soirée se passe dans une bonne ambiance ponctuée de questions auxquelles je réponds dans la mesure du possible. Ses parents s’essayent à un moment donné en arabe, ce qui amuse la galerie. Enfin à part la miss qui a fait grise mine toute la soirée.
Qu’à cela ne tienne, elle a une incroyable famille qui m’a tout de suite mise à l’aise. Les femmes, fin, en dehors de votre copine m’ont fait la courbette toute la soirée. À la fin du repas, le père réitère l’invitation à la rencontre de demain que j’ai accepté sous le regard désapprobateur de sa fille.
Au moment de partir, nous sommes escortés par tous les membres de la famille. Les parents nous laissent au portail, Nahia, sa sœur et la belle-mère de celle-ci s’entretiennent en aparté quelques minutes pendant que les enfants me font la conversation. Elle revient plus tard le visage tendu comme un string et s’installe dans la voiture en silence. Elle démarre en trombe dès que les autres regagnent la maison.
Moi avec enthousiasme : tu as une famille formidable.
Nahia ton glacial : je sais !!
Je ne dis plus rien, je ne veux pas qu’elle me gâche le moment enrichissant et inoubliable que je viens de partager avec sa famille.