La rencontre du siècle
Ecrit par lpbk
C’est ce jour-là que c’est arrivé. Sans que je m’en
rende compte, sans que je l’attende, sans que je le voie venir. C’est arrivé
tout d’un coup. J’ai senti un éclair me transpercer le ventre et c’est là que
j’ai compris que, je ne contrôlais plus rien. On aurait dit que j’avais un
aimant qui me collait à la peau. On pourrait appeler cela un coup de foudre.
Quoi que je dise, quoi que je fasse, cet aimant contrôlait mes sentiments et
mon âme. Plusieurs fois, j’ai tenté de le décoller et l’on aurait dit que
l’aimant était cousu sur ma peau. Ouf… c’est là que tous mes problèmes
sentimentaux ont commencé.
Oui, oui, tous mes problèmes ! C’est débile
non ? Avoir tant de problèmes pour une stupide d’aimant ? Oui, vu
comme ça, c’est complètement imbécile, mais quand je dis qu’un aimant me colle
à la peau, ce n’est qu’une image. Dans le fond, cet aimant est un gars… Eh
oui ! Un gars me colle à la peau comme une sangsue. En fait, je ne devrais
pas dire à la peau, mais au cœur. On pourrait penser qu’avoir un garçon dans
son cœur n’est pas un problème, mais dans mon cas, oui. Surtout quand le gars
en question est déjà pris, parce que oui il est pris. Ça m’a pris du temps à le
comprendre, mais c’est la réalité. En plus, il a un comportement un peu bizarre.
C’est ce jour que tout a commencé. Le fameux coup de
foudre qui a changé ma vie. C’est pour cette raison que je dis que ma vie
ressemble étrangement à un roman de chick-list.
Je travaille depuis environ 3 ans dans un grand bureau
d’avocat. Eh oui, je suis avocate ! Etant première de classe, j’ai réussi
à entrer à l’école du barreau dès ma sortie de l’université. J’ai ensuite
trouvé un emploi chez Arnault & Soucy qui avait besoin d’une jeune recrue
comme moi pour les seconder dans leur cause. La plupart de nos causes touchent
au droit familial. A force de travailler dans ce domaine, on constate à quel
point les couples mariés depuis longtemps se font la guerre pour la garde des
enfants, des animaux de compagnie et des plantes ou pour le partage du patrimoine.
J’en ai vu un couple marié depuis un an qui se chicanait pour la garde de leur
chien, un autre pour la garde de leur poisson rouge. C’est du grand n’importe
quoi ! Parfois, les gens s’inventent des problèmes. Ils ne réalisent pas
la chance qu’ils ont d’être en couple.
J’aimerais tellement, moi aussi, rencontrer l’âme sœur
pour partager ma vie. A 25 ans, je n’ai jamais eu de relations sérieuses. C’est
pathétique non ? Ma vie amoureuse est absente et complètement inexistante.
Je pourrais dire que le chien d’un de mes clients a sûrement une vie plus
remplie que moi. J’ai eu plusieurs amours mais rien qui a duré bien longtemps.
Dès que les hommes se rendent compte de mon intérêt, ils se sauvent en
courant ! La dernière relation que j’ai eue date d’un an. Et sans que je
sache pourquoi, elle s’est terminée.
Ce matin-là, j’étais tranquillement assise à mon
bureau en train de travailler sur un dossier. Je parlais au téléphone avec un
client :
— Oui, oui… oui, je comprends que votre chat est important pour vous. Oui,
je comprends le mal que votre ex vous a fait, mais…
Et là tout d’un coup, la ligne s’est coupée.
— Oh non !!! Merde ! Encore le téléphone qui me fait c…
Ma collègue et meilleure amie passe en arrière de moi
et m’entend blasphémer après le téléphone :
— Oh ! Oh ! Angie, surveille ton langage ! dit-elle, en
riant.
— Ah ! Elie, je ne peux m’empêcher d’insulter cette maudite machine.
Ca fait cinq fois depuis la semaine passée que la ligne se coupe pendant que je
suis avec des clients. Non, mais de quoi j’ai l’air devant eux ? Ca fait
pas tellement sérieux…
— Angie, tes clients ne sont pas sérieux de toute façon…
— Je le sais ! Mais quand même c’est important pour l’image de la
boite. Il faut faire quelque chose avec notre système téléphonique.
— Tu en reparleras au boss !
Mon boss ? Mon patron ? Monsieur Soucy est
plus intéressé par le profit qu’il tire chaque semaine que par nos problèmes de
téléphonie. Monsieur Soucy est réputé pour être un avocat ambitieux et
professionnel. Il a créé le cabinet avec monsieur Arnault, son demi-frère. Ça,
c’est une autre de ses histoires loufoques. Parce que monsieur Soucy a toujours
des histoires incroyables sur sa famille à raconter. Même si ce n’est pas de
nos affaires, on l’écoute. Quand il n’est pas en colère contre nous il nous
parle de son demi-frère, qu’on ne voit jamais, qui a beaucoup été gâté par sa
mère, qui a été aimé plus que lui, bla-bla-bla…
Même si je n’ai aucune envie de lui parler, je
m’exclame :
— Certain !
Toujours en pestant contre nos soucis technologiques,
je me rends au bureau de mon patron. Pendant que j’essaie d’expliquer la
situation à mon supérieur immédiat, j’entends du bruit dans la salle à diner.
Je ne m’occupe pas trop de ce qui se passe dans l’autre pièce et après une
dixième chicane avec mon patron sur l’entretien de notre système téléphonique,
je sors de son bureau en furie et je passe devant celui d’Elie. Je m’arrête
quand je vois qu’elle n’est pas seule. Je l’entends discuter avec un
garçon :
— Je suis désolée, j’ai encore perdu mes clés…
— Philippe, ça fait trois fois cette semaine.
— Je sais ! J’ai encore perdu les clés de mon appartement. Tu es la
seule qui a un double de mes clés.
— Tu sais que tu n’es pas possible, toi ? Une chance que je vis juste
à côté de chez toi ! Mais je t’avertis, c’est la dernière fois ! Et
ne me demande pas non plus de t’aider à faire de l’ordre dans ton appartement,
parce que t’a encore perdu ton téléphone !
— Euh… C’est que…
— Non pas encore !
Les deux amis rient. Je ne vois pas avec qui mon amie
discute, mais je vois bien qu’elle a l’aie d’avoir bien du plaisir à discuter
avec lui. Ça doit être une autre de ses conquêtes. En tout cas pour une fois sa
conquête semble avoir du charme et il a une belle voix. Je hoche la tête et je
poursuis ma route jusqu’à mon bureau. Je m’assois sur ma chaise en soupirant.
Au même moment, Elie arrive dans mon bureau en trombe :
— Angie ! J’ai trouvé une solution à ton problème de téléphone !
— Ah oui ? Laquelle ?
— Mon voisin pourrait nous le réparer. Il s’y connait, il vient d’être
embauché dans une compagnie téléphonique.
Son voisin ? Elle ne m’a jamais parlé de
lui !
— Ah bon… pourquoi pas ? Et il pourrait venir quand, ton technicien
hors pair ?
— Bien, tout de suite ! Il est ici en ce moment.
Quel hasard ! J’avais raison, c’est sûrement une
de ses conquêtes.
— Ah bon ! C’est lui ton voisin avec qui tu discutais tout à l’heure.
Dis-je, avec des yeux moqueurs.
Et c’est là que Philippe Chouinard arrive dans mon
bureau tout souriant en disant sûr de lui :
— Oui, c’est moi qui peux faire des miracles !
Je le regarde et tout d’un coup, sans savoir pourquoi,
je sens une chaleur montée accompagnée de papillons dans le ventre. Je le
regarde dans les yeux, je le fixe sans pouvoir parler.
— Angie ? C’est ça ? demande-t-il toujours avec son beau
sourire.
Je ne réponds pas, sous le choc. Je suis incapable de
parler. Mon amie intervient :
— Angie ? Je te présente mon voisin, Philippe Chouinard !
— Enchanté, Angie ! dit-il en me tendant la main.
Là, il est temps que je sorte des limbes ! C’est
ridicule comme situation ! Il faut que je le ressaisisse. Je me lève de ma
chaise pour lui serrer la main, mais en me levant je m’enfarge dans mes lacets
comme une idiote, je trébuche en m’allongeant par terre.
— Aïe !
Je suis tombée en pleine face et je pense que je me
suis cognée la tête, car je sens que celle-ci tourne comme une toupie. Elie
arrive à ma rescousse :
— Angie ? Est-ce que ça va ? Mon Dieu !
Elle s’accroupit vers moi et je me tourne pour être
sur le dos par terre et je réponds :
— Oui… Oui… j’ai mal à la tête…
— Mon Dieu ! Tu saignes, Angie ! Je pense que tu t’es fendue la
tête en tombant… Et tu as cassé tes lunettes… Il faut aller à l’hôpital !
Philippe s’accroupit à son tour et ajoute :
— Je vais vous accompagner !
Je hoche la tête en rétorquant :
— Non, non ce n’est pas nécessaire… je suis correct… aïe ! J’ai mal à
la tête…
— Bon, Angie, on va tout de suite à l’hôpital ! dit Elie, en panique.
Mon amie panique toujours pour rien !
— Je vais t’aider à te relever, s’offre le beau Philippe avec un
magnifique sourire.
Pas question qu’il me prenne en pitié. Je me suis
ridiculisée, je vais m’arranger moi-même !
— Non ! Non ! Je suis capable ! dis-je décidée.
Je tente de me relever et je sens que je ne vais
vraiment pas bien et tout d’un coup, tout devient noir. Je perds connaissance.