<< La voie à suivre >> Chapitre 15

Ecrit par Le Kpetoulogue

Chapitre 15


Il était 5h du matin quand, dans la chambre de Yohan, son téléphone se mit à sonner avec insistance. Étant profondément endormi, il ne l’entendait pas jusqu’à ce que son père entre dans sa chambre et le réveille avec une forte tape dans le dos. Yohan se réveilla en sursaut.

Yohan : « AAAIIIIIEEEEEEuuuuh … tchaii le vieux ??!! J’ai fait quoi encore la nuit-là ?? »

Son père : « Tu n’entends pas ton téléphone sonner depuis tout à l’heure ?? Tu dors on dirait quelqu’un qui est mort. Toi, si un voleur rentre dans ta maison pendant que tu dors, il va même partir avec ton âme »

Yohan : « Tchai … mais ce n’est pas une raison pour me réveiller comme ça. J’aurais pu avoir une crise cardiaque »

Son père : « Tchrrr décroche-moi ton téléphone là-bas avant que ta sonnerie ne réveille tout le quartier. Je ne sais pas laquelle de tes gos t’appelle à cette heure-là, mais j’espère pour toi que tu n’es pas allé enceinter l’enfant de quelqu’un là-bas hein »

Yohan : « MOI ??? Je ne sais même pas comment on fait enfant »

Son père : « Tchrrr »

Après que son père soit sorti de sa chambre, Yohan décrocha finalement son téléphone.

Yohan : « Ouais allô ? Y a quoi ?? »

Leila : « Mais depuis tout à l’heure, je t’appelle, tu peux pas décrocher ?? »

Yohan : « Chez toi là, il n’est pas 5h du matin ? Ou bien toi, tu vis dans un Abidjan parallèle ? À 5h du mat, on dort. JE DORMAIS »

Leila : « Han haan, je pensais que tu étais en train de prester dans un bar là, comme on est samedi aujourd’hui là »

Yohan : « Vas droit au but s’il te plaît »

Après avoir raccroché, Yohan éteignit son téléphone et se laissa retomber sur son lit en grognant. Il se frotta le dos, tentant d’apaiser la douleur qui ressentait encore.

Yohan : « Le vieux-là est ce qu’il sait même que sa gifle peut coucher un éléphant ? Tchai, il m’a limé comme si j’étais pas son propre enfant. »

Plus tard dans la matinée, Yohan débarqua enfin chez Leila aux environs de 10h. Dès qu’elle ouvrit la porte, elle lui lança un regard accusateur.

Leila : « Depuis tout à l’heure, c’est maintenant que tu arrives, Yohan ?? »

Yohan : « Ahii ? Y a quoi ? Je suis là, non ? D’ailleurs même, j’ai pas mangé hein, j’espère qu’il y a au moins un peu de café au lait ici. »

Leila : « Tchrrr… On ne reste pas ici, suis-moi. »

Intrigué, Yohan insista pour savoir ce qui la tracassait, mais Leila resta muette comme une tombe. Elle l’entraîna à l’extérieur, et quelques minutes plus tard, ils se retrouvèrent… au Zoo d’Abidjan.

Yohan : « Attends, attends… On est venus chercher quoi ici ?? Avec tous les animaux qu’on a déjà à l’université, fallait encore voir ceux du zoo ?? »

Leila : « Hum… C’est important de communier avec la nature. »

Yohan : « Hum… bien sûr. »

Leila : « Tchrrr, arrête de parler, entrons vite. »

Yohan haussa les épaules. Après tout, une visite du zoo tout frais payé, ça ne se refusait pas. Tandis que Leila semblait chercher quelque chose … ou plutôt quelqu’un … lui, profitait pleinement de l’excursion. Peut-être un peu trop, car lorsqu’il regarda sa montre, il était déjà 14h.

Yohan : « Tchaii, Leila ? On compte camper ici ou bien ? J’ai tellement traîné avec les animaux du zoo que je connais tous les affairages du moment. Tu vois la gorille là-bas ? Djaaa, elle n’aime pas son gars, elle dit qu’on lui a envoyé le plus vilain de sa tribu. Et l’antilope là ? Son passe-temps, c’est de critiquer tous les lions et panthères. D’ailleurs, la panthère-là dit qu’un jour, elle a surpris le chef des singes en train de tromper ses 4 femmes. »

Leila : « Hummm, Yohan ???!!! »

Yohan : « Quoi ? Tu me crois pas ? Moi, je vais inventer ça pourquoi ? »

Leila : « Tchrr… WOUUU, CACHE-TOI, CACHE-TOI !! »

Yohan : « Hein ? Ahi ?? »

Avant qu’il ne puisse poser plus de questions, Leila l’attrapa par le bras et l’entraîna derrière un mur. Il fronça les sourcils, perplexe, jusqu’à ce qu’il aperçoive Myriam et Luqman passer tout près d’eux.

Yohan : « Han han… je vois. »

Leila : « Hehe… quelle coïncidence, non ? Je ne savais pas qu’on allait croiser Myriam et Luqman ici. »

Yohan : « Hum… bien sûr. C’est le destin, hein ? … Tchrr »

Ce qui avait commencé comme une simple visite du zoo tournait maintenant à une mission d’espionnage en bonne et due forme. Cachée derrière les arbres, Leila observait chaque geste de Myriam avec une concentration quasi militaire. Yohan, se contentait de la suivre dans son délire.

Ils aperçurent Luqman et Myriam près de l’enclos des lions. Quand l’un des fauves rugit, Myriam poussa un cri et se blottit immédiatement contre Luqman, l’air terrifiée.

Leila : « Tchrrr, regarde-moi ça ! Elle va me faire croire que ce lion-là lui fait peur ?? Ils ont pris un chien baoulé perdu, ils lui ont mis un collier de paille et maintenant c’est censé être un lion ? Ça-là, ça fait peur, Yohan ??? »

Yohan : « Ha, même si lion a maigri, ça reste lion des. Meme s’il dit miaou, moi je m’évanouis hein »

Devant la cage des singes, Luqman et Myriam s’arrêtèrent un moment. Myriam, visiblement ravie, tendait de la nourriture aux primates qui s’agitaient avec enthousiasme.

Leila, toujours en mode espionnage intensif, fronça les sourcils.

Leila : « Attends… est-ce que c’est autorisé de nourrir les animaux ? C’est interdit, non ? Allons la dénoncer ! »

Yohan : « Ahii ?? Sérieusement ?? »

Leila : « Mais oui ! Elle sait même pas ce qu’ils mangent, et elle veut les nourrir ? Elle va leur faire du mal ! »

Yohan : « Ahii, Leila… c’est… c’est des bananes qu’elle leur donne hein. Banane… »

Leila : « Et alors ? Est-ce qu’elle sait quel type de banane les singes mangent ?? Tchrr. En plus, ça se trouve, les singes-là sont en carême, et elle vient les tenter comme une vraie diablesse ! »

Yohan, abasourdi, regarda Leila s’éloigner d’un pas décidé.

Yohan : « Ha ouais… on dit que l’amour rend bête, mais la jalousie se défend pas mal non plus… »

Leila : « MAIS VIENS NON ?? TU FAIS QUOI ENCORE LÀ-BAS ?? »

Yohan : « Wouéééh eeh ?! J’arrive oOh… hum… qui m’a envoyé ici ce matin même ? »

Ainsi, pendant toute la visite, Leila ne cessa de critiquer Myriam, qui, elle, semblait bien profiter de sa sortie avec Luqman. Tout était prétexte à critique : son rire, sa façon de marcher, la manière dont elle remettait ses cheveux en place… Pourtant, Myriam n’avait qu’un seul but : séduire Luqman et lui faire passer un bon moment.

Mais malgré ses efforts, elle sentait que quelque chose clochait. Il souriait, certes, mais il ne semblait pas aussi enthousiaste qu’elle l’aurait espéré.

Myriam : « Tu n’aimes pas être ici ? »

Luqman : « Je n’aime pas trop le concept des zoos. Enfermer des animaux, les priver de leur liberté juste pour notre plaisir, ce n’est pas vraiment mon truc. J’ai eu l’occasion d’aller dans des safaris, c’était nettement mieux. »

Myriam : « Safari même ? Hahaha, et on va faire safari où dans ce pays-là ? Le zoo déjà, ils ont du mal à nourrir les animaux, et toi tu parles de safari. »

Luqman : « … Effectivement, tu as raison. »

Myriam : « Bon, on peut aller au restaurant si tu préfères ? »

Luqman : « C’est toi qui décides. Je te suis. »

Quelques instants plus tard, ils étaient installés dans un restaurant. Ce que ni Myriam ni Luqman ne savaient, c’est que Leila et Yohan les avaient discrètement suivis et étaient entrés juste après eux. Enfin… c’est ce qu’ils croyaient. Car depuis le zoo, Luqman avait remarqué leur petit manège, mais il avait choisi de les ignorer.

Pendant que Leila continuait son espionnage intensif, Yohan, lui, n’avait qu’une chose en tête : manger. Il attrapa aussitôt le menu, cherchant ce qu’il allait commander.

De son côté, Leila observait attentivement Myriam. Elle voyait clair dans son jeu : Myriam cherchait à séduire Luqman, et elle n’y allait pas de main morte. Assise face à lui, elle s’était légèrement penchée en avant, offrant une vue stratégique sur son décolleté.

Leila : « Regarde-moi ce comportement honteux… Je suis sûre que ses seins sont fake. Ce n’est pas normal qu’ils soient aussi gros. »

Yohan : « Euh… c’est pas aussi gros que ceux de Prisca hein. Moi je pense qu’ils sont vrais. »

Leila : « Et cette jupe ? On dirait un string ! Elle n’a même pas honte. Elle croit vraiment que c’est comme ça qu’elle va l’avoir ? Pff… aucun homme ne se laisserait berner par ça. »

Yohan : « Ah… mais il y a beaucoup de gars dans le restaurant qui la regardent hein. »

Leila : « Yohan Tu es de mon côté ou de son côté ?? Soutiens-moi non ? »

Yohan : « Te soutenir dans quoi exactement, Leila ?? Qu’est-ce qu’on est en train de faire exactement ?? Tout ça, c’est pourquoi ?? »

Leila était prise au dépourvu. Elle ne savait pas quoi répondre aux questions de Yohan. Tout ce qu’elle savait, c’est qu’elle ressentait une impulsion incontrôlable à surveiller Luqman et Myriam. Elle voulait s’assurer que rien ne se passait entre eux. Que Myriam ne gagne pas.

Leila : « Mais… rien… c’est une coïncidence seulement. »

Yohan : « Donc on s’est retrouvés au zoo par coïncidence, et ici aussi, dans ce restaurant, par coïncidence ? »

Leila : « Ahi oui kai. Ce n’était que des coïncidences. »

Yohan : « D’accord o0w. »

Il savait très bien que ce n’était pas une simple coïncidence. Mais il n’avait pas envie de se lancer dans un débat sans fin avec elle.

Pendant ce temps, à la table de Luqman et Myriam, la tension était palpable. Myriam s’impatientait. Elle avait tout essayé : les regards envoûtants, les sourires séducteurs, la proximité physique subtile. Tout cela aurait suffi à faire fondre n’importe quel gars. Mais Luqman restait de marbre.

Myriam : « Qu’est-ce qu’il y a ? Je ne suis pas ton genre de femme ? »

Luqman : « Là n’est pas le problème. C’est plutôt ce que tu cherches qui ne m’intéresse pas. »

Myriam : « C’est-à-dire ?? »

Luqman : « Tu me considères comme un trophée, un défi à relever, juste pour flatter ton ego. Mais moi, je ne suis le jouet de personne. »

Myriam : « Hum, moi je veux bien être ton jouet. Tu pourrais faire de moi absolument tout ce que tu veux. Ça ne te tente pas ? Je pourrais te faire vivre des choses que tu n’as jamais connues… »

Sa voix était douce, son regard brûlant. Elle savait jouer de ses charmes et elle y mettait toute son énergie. Mais Luqman n’était pas dupe. Il voyait clair dans son jeu.

Luqman : « Je pense que tu n’as pas compris ce que je voulais dire par "je ne suis le jouet de personne". Je ne veux pas être un passe-temps pour booster ta réputation. »

Myriam : « Eh bien, peut-être que par la suite, je pourrais tomber amoureuse de toi. »

Luqman : « Ça m’étonnerait. »

Myriam : « Pourquoi ? »

Luqman : « Je ne connais pas l’amour … a ce jour je doute l’avoir ressenti un jour … enfin pas ce genre d’amour … mais du peu que je sais, ce n’est pas un jeu. Ce n’est pas un challenge, ni une conquête à ajouter à une liste. Tu cherches à impressionner les autres, pas à construire quelque chose de réel. Est-ce que tu sais vraiment ce que signifie aimer quelqu’un ? Aimer profondément, sincèrement ? Je ne pense pas. Alors ne joue pas avec ce mot. »


Myriam ouvrit la bouche pour répliquer, mais aucun mot ne sortit. Elle n’avait jamais vraiment réfléchi à ça. Pour elle, l’amour avait toujours été une sorte de compétition. Qui pouvait avoir le mec le plus convoité, qui pouvait rendre les autres jalouses. Mais Luqman venait de lui poser une question à laquelle elle n’avait pas de réponse. Certes, Myriam n’avait aucun sentiment pour Luqman, mais elle n’arrivait pas à accepter qu’il lui résiste. C’était presque une insulte. Aucun homme ne lui avait jamais tenu tête. Ils tombaient tous à ses pieds sans qu’elle n’ait à lever le petit doigt. Mais lui… Lui, il la défiait. Et cela l’agaçait au plus haut point.

Myriam : « On dirait que tu ne veux vraiment pas que ta pote Leila devienne présidente du conseil, hein ? »

Luqman : « Est-ce une tentative de chantage ? »

Myriam : « Non… Je disais ça juste comme ça. »

Luqman : « À vrai dire, qu’elle gagne ou pas, cela ne changera rien à mon quotidien. C’est son ambition, pas la mienne. Moi, je lui offre juste mon aide, rien de plus. Et je pense avoir déjà pas mal contribué en acceptant ce rendez-vous avec toi. »

Myriam serra discrètement les poings sous la table. Elle était en train de perdre du terrain. Il lui restait une dernière carte à jouer. Elle espérait que celle-ci suffirait à le faire flancher.

D’un geste lent, elle sortit un gloss de son sac et l’appliqua sensuellement sur ses lèvres. Puis, feignant la maladresse, elle le laissa tomber au sol.

Myriam : « Oops… »

Luqman se pencha pour ramasser le tube qui avait roulé sous la table. C’est à ce moment précis qu’elle écarta légèrement les jambes. Ce qu’il vit lui coupa le souffle. Myriam n’avait rien porté sous sa jupe. L’espace d’une seconde, il se demanda si elle était sérieuse. Elle lui offrait une vue aussi directe  sur son intimité … c 'était inattendue.

Lorsqu’il se redressa, impassible, et lui tendit son gloss, elle plongea son regard dans le sien.

Myriam : « Alors ? Ce que tu as vu t’a plu ? »

Luqman éclata de rire. Un rire profond, amusé, presque admiratif devant tant d’audace. L’atmosphère venait de changer. Subtilement. Myriam le sentit immédiatement. Ce sourire… Il avait l’air anodin, mais elle y décela autre chose. Une lueur dans ses yeux. Un éclat de malice. Une touche de vice.

Luqman : « Tout à l’heure, tu as parlé de Nirvana… Je n’ai aucun doute que tu as su y mener certains hommes. Mais toi… l’as-tu déjà atteint ? »

Myriam haussa un sourcil, intriguée.

Luqman : « Je ne parle pas d’un plaisir ordinaire. Je parle d’un plaisir pur, absolu. Un plaisir si intense que son souvenir te hantera sans jamais pouvoir être pleinement retrouvé. Un moment où le temps se dissout, où l’instant présent devient tout, où le futur est à la fois une attente insoutenable et une promesse exquise. Ce ne sera pas un plaisir de quelques minutes. Ni même de quelques heures. Ce sera un vertige dont tu ne voudras jamais redescendre. Ton corps sera mis à rude épreuve. Tu seras essoufflée comme jamais. Epuisée. Peut-être même incapable de le supporter. Je te ferai redécouvrir tes sens d’une manière que tu n’aurais jamais imaginée. Mais… il y a un prix à payer. Parce que si cela devait arriver, au-delà de cet instant que nous partagerons, tu n’auras rien à y gagner. À la moindre rumeur, je nierai tout contact avec toi. Et ta réputation, elle, risque d’en pâtir. Alors, le jour où tu devras choisir entre ce Nirvana que je te promets et ton besoin d’être la plus populaire de cette université… fais-moi signe. »

Les mots de Luqman résonnèrent dans l’esprit de Myriam comme une douce torture. Elle avait voulu provoquer son désir, mais c’était elle qui se retrouvait piégée. À chaque mot, elle avait imaginé des scénarios… des sensations…

Certains hommes exagèrent leurs exploits, se vantent sans fondement. Mais Luqman… Il parlait avec une assurance troublante. Ses mots sonnaient justes. Et cela la rendait folle. Et maintenant, c’était elle qui brûlait d’envie de savoir… Si tout cela n’était que des paroles… Ou si, effectivement, Luqman disait la vérité. 

A Suivre …


La voie à suivre