L'autre face

Ecrit par Farida IB


Armel…


Bradley (mon grand frère) : en quel honneur ?


Moi : du bac !


Bradley : je t’ai déjà donné un cadeau.


Moi : considère cela comme un supplément de cadeau.


Il range la pile de dossier qu’il lisait dans un sac à fermoir qu’il glisse dans une armoire avant de s’adosser à son siège, les mains croisées derrière la tête.


Bradley : toi, tu as de ces allures quoi ! Tu ne vas pas te contenter de l’aubaine d’un voyage tout frais payé, non. Il faut toujours que tu en veuilles plus et dans la poche des autres en plus. 


Moi : allez vas-y s’il te plaît ? Après ça promis, je ne te demande plus jamais rien.


Bradley (me jetant un coup d’œil sarcastique) : tu me l’as déjà fait celle là.


Moi : je n’ai jamais été aussi sérieux.


Bradley : Armel, c’est NON !!!


Un non catégorique en plus.


Moi : meuuhhh allez grand, je ne veux pas aller me branler les couilles seul là-bas. C’est l’ennui assuré.


Bradley : eh ben fait avec ce qu’on te donne. Et tu peux toujours te faire des filles une fois sur place. Elles ne te résistent jamais de toute façon.


Moi : perte de temps ! 


Bradley : lol la petite est bonne à ce point ?


Moi (me caressant le menton le sourire en coin) : c’est rien de le dire.


Bradley : c’est simple attend ton retour pour te la faire. Tu ne peux pas aspirer au luxe dans mon argent.


Moi : rhooo grand tu deviens radin.


Bradley : ce n’est pas le cas, qu’est-ce que tu as fait pour moi qui mériterait que je débourse cinq cent balles pour toi en plus d’avoir couvert tes arrières plus d’N fois ?


Moi : je joue au baby-sitter avec tes gosses.


Bradley : ce n’est pas si cher payé, en plus c’est facile pour toi parce que tes neveux t’adorent.


Moi souriant : c’est un atout précieux dans le métier.


Bradley (il secoue la tête amusé) : tu es vraiment décidé hein (oui de la tête) bon, tu l’auras ton billet…


Moi (claquant mes doigts) : yesssss !!


Bradley : mais il y aura une contrepartie.


Moi : toi tu suis trop les traces de ton père, jamais rien sans rien.


Bradley : ton tour arrive, tu verras que nous avons raison d’agir ainsi. Se faire de l’argent ce n’est guère…


Moi (complétant agacé) : ce n’est guère facile, il ne faut pas le dépenser futilement… (roulant des yeux) Je fatigue à entendre ça tous les jours, dis-moi juste ce que je dois faire.


Il me jette un coup d’œil désapprobateur avant de répondre.


Bradley : tu garderas les enfants le week-end après ton voyage. (précisant) La meute ! (c’est-à-dire ses enfants et ceux de son groupe d’amis)


Moi : hmmm qu’est-ce qu’il ne faut pas faire !


Bradley : tu n’as pas le choix petit. Par contre Magnime sera là pour t’épauler avec les filles, toi tu vas juste t’occuper des garçons.


Moi : comme la dernière fois ?


Bradley : yasss.


Moi : si Magnime est de la partie ça me va. Par ailleurs, on se capte toute à l’heure. Je vais lui en toucher deux mots.


Bradley (regard suspicieux) : j’espère que tu ne calcules pas ma belle sœur ?


Moi : quoi ? Jamais de la vie ! Elle et sa copine sont mes frangines.


Bradley : si tu le dis, même s’il faut que tu m’expliques votre ménage à trois là.


Moi : je leur sers de bouclier. 


Bradley : dans quoi ?


Moi (ne voulant pas répondre) : c’est notre truc ! (changeant de sujet) Je viens récupérer le billet quand ?


Bradley : je t’enverrai ça par mail ce soir.


Moi : parfait ! Deal conclut (me levant de ma chaise) je peux maintenant aller voir ma femme et mes enfants.


Bradley : oui c’est ça, va voir ailleurs si j’y suis.


Moi : si je peux emmener une fille avec moi, no problem.


Bradley : see your life ! Petit on sait que tu es jeune et que tu as encore les reins solides, mais apprends à faire une pause de temps à autre.


Moi : c’est le but de ma démarche avec la miss, une semaine rien qu’elle et moi sans la marmaille. 


Bradley éclatant de rire : parce que c’est elles la marmaille maintenant ? (je hoche la tête) C’est l’hôpital qui se fout de la charité.


On rit brièvement.


Moi : toi par contre tu as besoin d’apprendre à être moins accro à ton boulot. On est samedi après midi, tu devrais être en train de gérer le dossier de ta jolie petite femme. Il faut oublier un peu le travail.


Bradley : j’ai un procès lundi et son dossier à elle, je l’ai déjà géré.


Moi lui souriant : là tu parles !


Je lui envoie ma main en l’air dans laquelle il tape. Je me lève ensuite pour lui dire au revoir. 


Moi : bon je te laisse grand, les frangines doivent s’impatienter de me voir arriver. On ne fait pas attendre les dames.


Bradley (m’emboîtant le pas) : fait gaffe avec ma belle, je t’ai à l’œil. 


Avec la grimace qui va avec.


Moi : lol.


Un mélange d’odeur alléchante de poissons frits et de Kaklo (beignet de banane plantain) nous accueille dès qu’on ouvre la porte. On se regarde avant de hocher la tête en même temps tous les deux pour nous donner le signal.


Moi : le premier qui arrive !


Et c’est parti pour la course vers la cuisine.


Voix agacée de Tina : on ne court pas dans ma maison. Tyler, Tristan arrêtez-moi ça tout de suite ou je vous donne une bonne fessée.


Voix des petits (dans le jardin) : on ne fait rien nous.  


Tina : alors c’est ma grand-mère qui…


Elle se tait et soupire bruyamment lorsqu’elle nous voit en train de se bousculer à l’entrée de la cuisine pour passer.


Tina : ça suffit les gamins là, la petite fait sa sieste.


Moi à Bradley : grand laisse-moi passer. 


Bradley : toi laisse moi passer.


Tina secoue la tête dépassée.


Tina : et si vous alliez vous poser à table, j’ai déjà servi une partie. 


Bradley lui souriant : au nom de Dieu moi, j’ai la meilleure femme au monde.


Tina : tchrrrr tout ça pour de la bouffe.


Bradley : mais non, mais non (pénétrant dans la cuisine) je le pense réellement.


Il y a ce qui me semble un moment de câlin entrecoupé par des rires et des embrassades avec les « arrête les enfants ne sont pas loin ou ton frère peut nous surprendre à tout moment » de Tina par moment. En tout cas, moi je ne vois et n’entends rien tant que je me mets bien avec les douceurs qu’elle a laissées sur la table. Ces deux là donnent le complexe, ils sont trop adorables. J’avoue, c’est mon couple idéal. Avant c’était les parents jusqu’au moment où je me suis rendu compte que mon père est loin d’être un mari modèle. Même jusque là, à l’approche de la soixantaine il n’est pas prêt de l’être. Ça c’est lorsqu’on consacre toute sa jeunesse aux études et au travail et qu’ensuite on ne puisse plus savoir faire la différence entre jeunesse et vieillesse. C’est pour ça que je veux profiter à fond de ma jeunesse comme ça si je me pose, ce sera pour de bons. Je ne vais tout de même pas prendre le gage du bonheur de l’enfant d’autrui et venir la faire souffrir délibérément. Non, j’en ai eu ma dose de voir ma mère souffrir en silence toute ma vie.


Je finis presque le plateau et c’est pendant que je m’abreuve d’un jus de gingembre à l’ananas que le couple me fait en fin l’honneur de sa présence, bras dessus, bras dessous.


Moi (m’essuyant la bouche) : là c’est sûr que j’ai bien mangé, maintenant je vais simplement vous laisser entre vous. (bougeant) Je pense que je suis de trop.


Bradley au tac : en effet.


Tina lui donne une tape discrète.


Tina me fixant : qu’est-ce que tu racontes ? Tu n’es jamais de trop ici. 


Moi : c’est gentil. (me levant de table) J’aurais aimé resté un peu, mais je suis attendu quelque part.


Tina : je peux mettre mon doigt à couper que c’est l’une de mes rivales.


Moi sourire en coin : pas cette fois et tu n’as aucune rivale. Enfin pas officiellement.


Tina : c’est censé me rassurer ça ?


Moi : pas vraiment.


On rit tous les deux puis je vais passer quelques minutes avec mes neveux à les écouter me raconter leurs derniers scoops avant de prendre congé. Je m’apprêtais à démarrer quand j’entends Bradley crier à tue-tête,


Bradley : Armel tu es mort dans le film, tu as fini le plateau…


Bon ils vont gérer ça entre eux là-bas moi je suis parti. N’est-ce pas qu’il se gavait d’amour ? Qu’il boive de l’eau fraîche dessus krkrkr.


 …….


Je laisse le soin au voiturier de garer ma caisse et pénètre le lounge bar où j’ai rendez-vous avec Magnime et Djifa. Il faut déjà que je vous dise que ce sont seulement mes bonnes grandes. Enfin Magnime c’est parti de l’union entre sa sœur et mon frère puis au fil du temps, j’ai intégré partiellement le groupe d’amis qu’elles forment avec deux autres mecs avec qui ils ont fréquenté. Il nous arrive de chiller ensemble, mais c’est avec les filles que j’ai plus d’affinité. Bon, vous savez ce que c’est. J’avais laissé entendre que je suis pour elles une sorte de bouclier. Je suis en fait celui qui empêche d’autres mecs de les approcher dans certains endroits et quand il le faut, je joue au docteur love. C’est Magnime qui m’aperçoit en premier et se lève en tendant ses bras vers moi.


Magnime : c'est qui ça, mon petit frère par alliance  !!


Moi (en la prenant dans mes bras) : ma grande sœur par alliance !


On se fait la bise.


Djifa soupir : de grâce, les gars ne commencez pas.


Moi : nous sommes dans un pays libre à ce que je sache. 


Magnime se décale pour me faire de la place entre elles. Je m’assois et me tourne vers Djifa qui fait sa mine des mauvais jours. 


Moi à elle : ok dis tout à tonton Armel.


Magnime sourit et elle grimace ce qui ressemble à un sourire. Une serveuse arrive à ce moment là avec le cocktail qu’elles m’ont commandé d’avance et de la chicha destinée à Djifa. 


Moi plissant les yeux : jeune fille depuis quand tu fumes ce genre de bêtise ? Ça ne fait pas joli joli une fille qui fume.


Djifa haussant l’épaule : ça me détend.


Je plisse les yeux que je tourne vers Magnime dans le genre « tu m’expliques ? ».


Magnime : c’est pour ça que je t’ai fait venir, elle nous fait une déprime. Jean-Jacques (son petit ami) a cassé avec elle.


Moi : oww oww ! 


 Djifa (lancée) : un lâche, il n’a même pas été capable de me le dire en face. Il m’envoie un texto avec l’émoji « dans les vapes » (ton scandalisé) un émoji ! 


Moi : c’est pour ça que tu te mets dans cet état là ? 


Djifa (faisant les gros yeux) : Armel, c’est quatre années de ma vie perdues. Quand je pense qu’il m’a couru après pendant plusieurs années à me chanter combien il était différent des autres hommes.


Moi : en même temps ce n'est pas comme si tu en as vu d'autres inh, euhh enfin.


Magnime me lance un regard réprobateur qui me fait taire.


Djifa (continuant) : je lui ai tout donné (comptant du doigt) de mon être, mon temps, mon argent, ma confiance ! Vous vous rendez compte ? Je lui ai fait confiance.  


Moi (roulant des yeux) : les femmes ! Toujours à se victimiser et incriminer les hommes quand c’est fini. C’est jamais votre faute hein ?


Magnime (sur un ton de reproche) : Armel tu n’aides pas là !


Moi calmement : je suis certain qu’il y a eu quelque chose qui l’y a poussé. Il ne peut pas se lever un bon matin et prendre cette décision alors qu’il vient de te présenter à sa mère.


Magnime hochant la tête : pas faux.


Elle se contente de soupirer.


Moi : bon, ce n’est pas l’heure de chercher le pourquoi du comment…


Djifa d’un trait : je lui ai parlé de Marc (son fils, enfin c’est compliqué).


Magnime et moi la fixons les yeux et la bouche ouverts.


Moi : tu as fait ça ?


Elle hoche lentement la tête.


Magnime : non puce mais pourquoi ?


Elle soupire et se met à claquer ses doigts.


Djifa : il le fallait, j’ai ressenti le besoin d’être honnête avec lui. Je me devais de l’être après qu’il m’ait présenté à sa mère et je dois avouer que c’était la première fois pour moi de me sentir aussi à l’aise de parler de ce pan de ma vie.


Moi : et tu as bien fait, quoique tu aurais dû le faire il y a longtemps.


Djifa (remuant la tête) : je n’étais pas prête, cet enfant, je commence à peine à l‘assumer. Au fait, je n’ai jamais su quelle place il devait occuper dans ma vie. Il y a quelques mois encore, je le considérais comme mon petit frère. (prenant son souffle) C’était mon subterfuge pour ne plus penser à cet avènement horrible et voir ma mère lui faire subir toutes sortes d’atrocités depuis sa plus tendre enfance ne me disait absolument rien jusqu’à ce qu’on a failli le perdre… 


Elle s’interrompt et cligne plusieurs fois des yeux, je crois pour refouler les larmes qui commençaient à briller dans ses yeux. 


Djifa : … cette réalité est bien trop transcendante. Marc est mon fils, qu’il soit de mon (voix tremblante) père…


Là, elle se prend à sangloter amèrement. Je la prends par le bras   et la ramène contre moi en lui frottant doucement le bras. Magnime nous rejoint de l’autre côté et entreprends de lui masser  le dos. Elle pleure un moment avant de reprendre.


Djifa : j’avais cru qu’en lui avouant que j’ai été violée par mon père à douze ans et que de ce viol est né un enfant, il ferait preuve de compréhension et m’apporterait un soutien sans me juger. (essuyant une larme à l’œil) Je me suis bien fourvoyée (sanglots) il m’a dit que je le dégoûtais ainsi que toute ma famille (hoquetant) toutes sortes d’horreur.


Il y a un blanc pendant lequel on la laisse pleurer en silence. C’est Magnime qui reprend la parole lorsqu’on la sent plus calme. 


Magnime : je suis désolée chérie.


Djifa (sourire pâle) : ne le sois pas, ce n’est pas de ta faute.


Moi : ça va, tu tiens le coup ?


Elle acquiesce de la tête en se redressant.


Moi : c’est bon de l’entendre, on va dire que c’était un moment de faiblesse. 


Elle sourit et Magnime lui tend un mouchoir en papier.


Moi : écoute tu as été brave tu sais, comme jamais. Si ton Jean-Jacques là ne peut pas faire preuve de compassion après tout ce que tu lui as raconté, c’est qu’il ne vaut pas la peine que tu souffres pour lui.


Magnime ton enjoué : yeah vas-y prêche !!


Moi : lol (sérieux) je ne vais pas te demander de zapper dessus parce que je sais à quel point, il était important pour toi. Toutefois la Fafa qui déprime et qui fume de la chicha, je veux que tu la laisses ici dans ce bar. Je veux voir Fafa, celle qui a la joie de vivre. Toi, tu es la fille des montagnes et crêtes de Badou (ville) la ville qui donne le tournis, à faire pâlir plus braves et vaillants hommes comme moi.


Djifa (pointant un doigt menaçant sur moi) : heiy n’en profite pas non plus.


Moi hilare : au moins ça marche.


Tout le monde rit.


Moi : maintenant tu sais ce qu'on va faire ? (non de la tête) Nous allons t’accompagner faire le plein de glaces et de tes bonbons préférés puis tu iras pleurnicher dans ta chambre ce soir. MAIS ! Demain, je veux que tu passes dans un centre d’esthétique et qu’après tu me tapes tes plus belles snap, du tic toc sur whatsapp, bref tu vas mener ta best life. Du moins en apparence.


Magnime : weh j’aime bien l’idée, elle est subtile. 


Djifa : ok mais... (recommençant à se tortiller les doigts)  on n’est pas encore la fin du mois et…


Moi comprenant : t’inquiètes c'est moi qui invite.


Djifa (sourire lumineux) : c'est que toi tu sais comment me faire plaisir. (passant son regard de Magnime à moi) Merci beaucoup les amis, je me sens beaucoup mieux là. Et toi le petit coquin, quand je pense que c’est toi le gamin ici mais c’est fou l’impact que tu as dans nos vies. Nous avons toujours plus besoin de toi que toi de nous. 


Moi : tant mieux si je peux servir, on y va ?


Magnime : le temps de régler la note (posant une liasse de billets sur la table) c’est fait allons-y. 


Moi (lorsqu’on arrive à la voiture) : avant qu’on y aille (elles stoppent leurs gestes et me regardent) on se fait toujours un chill en teub n’est-ce pas ? Vous me l’avez promis.


Elles en synchro : attends la fin du mois !


Moi : ça c’est même quel genre de grandes sœurs vous faites ? Vos autres sœurs ont des sugar daddy et tout, ça ne vous dit rien inh ? 


Magnime : tsuiipp !


Djifa : pousse là-bas, sugar daddy mon œil.


Je m’installe au volant amusé, elles s’installent à leur tour et nous mettons le cap sur le Champion (supermarché) où elles font les emplettes à leur guise. On arrive au rayon frais et je décide de prendre des flans feuillets pour mon amoureuse, c’est son dessert préféré en ce moment. Je prends aussi des glaces pour Marianne tout en cherchant une au chocolat et à la cannelle pour maman. Juste au moment où je parviens à la trouver, une main plus habile que moi vient me l’arracher.


Moi : hoo, c’est à moi ça.


Voix de fille : beh plus maintenant.


Je me relève prêt à en découdre avec la personne lorsque je tombe sur l’une des merveilles du monde pour ne pas dire LA merveille du monde. Mon visage se détend d’un coup.


Moi (me raclant la gorge) : tu peux la prendre, je vais fouiller pour voir si je trouve une autre.


Elle (haussant l’épaule) : tant mieux.


Elle tourne les talons avant que je puisse ajouter autre chose. Je suis sa progression jusqu’à ce qu’elle disparaisse dans un autre rayon. C’est l’arrivée des filles qui me sort de ma contemplation. 


Djifa (me poussant le menton narquoise) : fermes ton clapet, tu vas avaler une mouche.


Magnime riant : vraiment ! Toi, on ne peut pas te laisser une seconde sans que tu ne te retrouves avec une fille.


Moi en ce moment, j’étais comme dans une dimension parallèle. La fille revient dans mon champ de vision cette fois en compagnie d’un monsieur qu’elle appelle pépé.


Moi (la dévorant du regard) : elle est canon !


Djifa ton agacé : avec toi, elles le sont toutes.


Elles passent le reste du temps des courses à me charrier à propos. Je les laisse chacune chez elle plus tard. Quand j’arrive à la maison, je vais à la recherche de maman que je retrouve dans leur chambre.


Moi (passant ma tête par la porte) : je peux ?


Maman : tu es déjà là.


Moi (mettant le sachet en évidence) : je t’ai ramené tes desserts préférés.


Maman souriant de toutes ses dents : c’est vrai ?


Je m’approche du lit où elle est allongée en hochant la tête, je m’assois à côté d’elle et lui tend le sachet.


Maman : merci fiston, c’est quand tu es cet Armel avenant et prévenant que tu es mon fils préféré.


Moi : lol je n’ai pas besoin d’être ton fils préféré. Du moment où j’ai une place dans ton cœur, ça me suffit largement. Ton amour me suffit.


Maman : qui a dit que je t’aimais ? Tu me donnes trop du fil à retordre. 


Moi : ce sont les risques du métier.


Elle rit pendant que je la regarde intensément.


Moi : qu’est-ce que tu es belle maman quand tu ris. 


Elle arrête de rire et se met à me scruter du regard. 


Maman : dis-moi, tu veux combien ? Ou qu’est-ce que je dois encore plaider auprès de ton père ?


Moi : rires maman, je suis sincère. Cette grossesse te rend super belle.


Maman (l’air sceptique) : ummhh huumm merci.


Moi : je suis un peu plus sérieux, je te trouve belle et bien gardée. Mais cependant préoccupée, je dirai plus embarrassée.


Maman levant le sourcil : tu crois ?


J’acquiesce lentement.


Maman (caressant son bidon) : tu sais, tomber enceinte à mon âge ce n’est pas tout miel tout sucre tous les jours.


Moi : j’imagine, tu tiens le coup ? (elle hoche la tête) C’est dans quelques mois, ça va aller vite. 


Maman : oui, merci mon chéri.


Moi : c’est moi, je vais te laisser te reposer un moment. Je dîne au restau ce soir, tu veux que je vous ramène quelque chose ? Comme ça, tu n’auras pas à préparer ce soir.


Maman : oui bien sûr, ça me serait d’une grande aide. Ton père ne dîne pas avec nous ce soir de toutes les manières.


Je la fixe un sourcil levé, on parle tous les deux en même temps.


Nous : réunion d’affaires !


Maman : tu sais ce qu’il en est.


Moi : sans commentaire, bon je vais y aller.


Maman : d’accord, soit prudent.


Moi : comme toujours !


J’attends d’être à la porte pour ajouter.


Moi : dis maman (elle a le regard dans ma direction) tu pourrais peut-être intercéder pour moi auprès de papa pour qu’il me file l’une de ses cartes pour le voyage. La gold de préférence.


Maman : je savais qu’il y avait quelque chose derrière toute cette gentillesse. (secouant la tête) Toi tu es vraiment l’enfant de ton père.


Moi : une meilleure version de lui en tout cas.


Maman secouant vigoureusement la tête : non la pire !!


Moi (faussement indigné) : tu ne penses même pas ce que tu dis.


Maman avec conviction : oh que si !! 


…….


Je me retrouve à attendre mon vol sur l’esplanade de l’aéroport avec Bradley et maman. Je suis leur discussion d’une oreille distraite étant occupé à échanger avec Keyla qui patiente dans la salle d’attente. C’est la voix dans l’interphone qui met fin à tout ça.


Bradley : on dirait que c’est l’heure.


Moi : on dirait oui (pendant qu’on se fait une accolade) tu veilles sur la vieille.


Bradley : je le ferai, amuse-toi bien.


Moi : vite fait.


Je vais vers maman qui me sert à l’étouffée. Je me redresse et essuie sa larme sur la joue. Elle est dans cet état depuis que nous avons quitté la maison, à croire que je vais au front. Lorsqu'elle consent finalement à me lâcher, je leur fais un dernier au revoir de la main et fais volte face vers le hall d’entrée pendant qu’ils vont dans la direction opposée. À un moment de ma progression, j’entrevois le reflet de la fille d’hier à travers la porte vitrée. Je me retourne sur le coup et la vois en pleine conversation avec le même monsieur et une dame. Je bloque quelques secondes face à elle espérant attirer son attention et comme j’ai une bonne étoile, elle avance vers moi avec le monsieur qui lui sonne d’appeler son grand ami pour obtenir un rendez-vous ou quelque chose du genre. J’attends que le monsieur fonce à l’intérieur pour lui parler.


Moi : c’était bien la glace choco-cannelle hier ?


Elle : forcément, son goût est unique.


Moi : ma mère trouve aussi.


Elle lève le sourcil, mais n’émet pas de commentaire.


Elle : tu voyages, n’est-ce pas ?


Moi : malheureusement oui.


Elle : et bien si tu ne veux pas rater ton vol tu dois te bouger sur le champ.


Moi : euhhh...


Sur ce, elle s’en va sans autre formes de procès. J'encaisse ma déchéance et vais retrouver Keyla qui commençait à s’impatienter.


Keyla : mais qu’est-ce que tu faisais ?


Moi : désolé, un contretemps. (me saisissant de son sac à main) on y va ma belle ? 


Keyla : oui, je suis toute excitée.


Moi : moi aussi.







Le maître du jeu