Le chemin de la guérison

Ecrit par Farida IB



Ussama…


Je sors de ma chambre en sifflotant, je me suis levé tout heureux ce matin d’affronter cette semaine qui promet d’être fastueuse pour le simple fait qu'il paraît que les cours du pétrole ont nettement progressé vendredi. Cette hausse ne pouvait pas mieux tomber, ça m’évite de justesse tous les remaniements que j'avais prévu faire. Entre autres, licencier quelques ouvriers.

Je sors de mon ascenseur pour me retrouver dans les appartements des parents toujours en sifflotant et en saluant gaiement tous ceux qui se trouvaient sur mon passage. Je foncé dans la cuisine d’où je peux entendre Yumna piailler comme elle sait si bien le faire. Depuis la discussion avec Khalil avec le concours de l’arrestation de son bourreau, elle est redevenue elle-même. C’est bien de la voir si joyeuse, mais elle a recommencé à casser les pieds, même plus qu'avant.


Je la trouve avec ma mère et la gouvernante. Elle prend son petit-déjeuner et les deux autres s’affairent devant les fourneaux.


Maman : on ne sifflote pas dans ma maison.


Moi faisant une grimace : désolé ! Bonjour !


Elles répondent toutes au moment où je m’approche de ma mère à qui je fais un bisou sur le front avant de la serrer dans mes bras pour un petit instant câlin. 


Maman : on dirait que mon bébé est heureux ce matin.


Moi : rhoo oumi !


Maman : c’est exactement ce que je disais !


Moi : je ne suis pas un bébé !


Maman : tout prouve que tu es heureux mon bébé, partage ta joie avec nous.


Je lève les yeux au ciel et desserre l'étreinte dans l'intention de m'installer à table et quand je me retourne, je tombe sur les regards goguenard de Yumna et la gouvernante que j'ignore royalement.


Moi (m’approchant d’elle) : frangine


Yumna (pendant qu’on se fait la bise) : frérot


On se sourit au moment où je prends place sur la chaise en face d’elle. Elle ne dit rien et me regarde avec insistance.


Moi arquant le sourcil : quoi ?


Yumna : je n’ai rien dit.


Moi : justement, quand tu ne dis rien, c’est mauvais signe.


Wassila (la gouvernante) : ça, c’est vrai krkrkr…


Moi : en plus toute à l’heure, on pouvait entendre ta voix depuis l’île de Yas.


Yumna (se massant les tempes) : là je médite.


Moi : lol.


Maman : je te sers quoi fiston ?


Moi évasif : un peu de tout ce qu’il y a.


Quand je relève ma tête, elles avaient toutes leurs yeux braqués sur moi.


Moi : quoi ??


Maman : à toi de nous le dire.


Yumna : il est amoureux.


Je roule des yeux.


Moi : tout doit toujours tourner autour de l'amour pour toi.


Yumna (balayant l'air d'un revers de main) : sinon quoi d'autres ? 


Maman : Ussama si une fille t’intéresse et que ton intention est de l’épouser, tu nous le dis pour qu’on aille voir ses tuteurs. Je ne tolérerai pas le Haram (l’illicite) dans ma maison. Après votre père viendra dire que c’est moi qui vous autorise à dévier des principes de l’islam. 


Yumna : atchoum !


Je lui lance un regard en biais.


Moi (m’adressant à ma mère) : aucune fille ne m’intéresse pour le moment.


Yumna : hmm et Cartia ?


Moi haussant l’épaule : c’est une amie (elle écarquille les yeux.) oui une amie, fin je la considère comme ma sœur. J'envisage me trouver une femme, mais pas elle.


Maman : que c’est ma fille ou celle de ton père ?


Yumna : vraiment ! (faisant mine de réfléchir) Donc, carrément, tu prévois te trouver une femme ? 


Moi simplement : mouais !


Yumna (affichant nettement sa surprise) : j’ai raté quoi ? 


Je lui fais de gros yeux sous le regard curieux de maman.


Maman (se tournant vers elle) : pourquoi est-ce qu'il ne devrait pas y songer ? Il en a l’âge, il a même dépassé l’âge. Tous ses amis sont mariés, il n’y a que vous les enfants de cette famille qui nous privez de cette Sunna et nous faites partager vos péchés indirectement.


Moi roulant des yeux : maman ne commence pas.


Maman lancée : ça devient inquiétant qu’aucun de vous ne parle de mariage ni de faire des petits enfants. Je sais que je peux compter sur vous deux pour ne pas tomber dans l’illicite comme votre frère, mais tous les jours mes espoirs s’amenuisent. Khalil se plaît dans le Haram, ça fait deux ans qu’il est rentré et ne pense même pas à se caser. Pourtant, ce n’est pas des femmes bien qui manquent dans cette ville, je l’ai même aperçu avec quelques-unes. Et votre père qui n’a rien trouvé d’autres que de l’éloigner une fois de plus, 


Yumna : il peut bien en trouver où il est nan ?


Maman : une étrangère ? Elle peut faire l’affaire si elle est docile parce qu’avec le caractère fougueux de ton frère, il lui faut une femme soumise et pieuse.


Yumna (soupire agacée) : en gros une femme comme toi et toutes les autres d’ici. (maman hoche la tête.) En tout cas, il y a des femmes musulmanes là-bas aussi et celle avec qui il travaille n’est pas mal.


Maman : Bahia ?


Yumna : Nahia maman, en plus il…


Je me racle la gorge, elle comprend et se tait. 


Moi intervenant : maman, c’est à Khalil de décider avec qui il veut être.


Maman : mais ça tarde, s’il faut l’attendre, j'aurai le temps de faire pousser un arbre dans le désert. D’ailleurs, je connais des filles de bonnes familles qui seront de bonnes épouses pour lui, il me suffirait de les étudier de près pour en choisir la meilleure.


Yumna éclatant de rire : ce sera une perte de temps. Tu connais ton fils, on ne lui impose rien.


Maman : je vais quand même me gêner. Vous vous rendez compte que vous avez tous atteint l’âge de la maturité et personne ne pense au mariage ? C'est votre père que vous mettez dans l’embarras et c'est moi qui subis les conséquences.


Moi : t’inquiètes maman nous allons y penser, de toute façon ça nous pend au nez.


Yumna (me fixant avec un petit sourire) : hmmm !


Maman (se tournant vers elle) : quoi ? Tu devrais toi aussi y penser, d’ailleurs je vois qu’Abdallah et toi vous vous entendiez bien, je…


Yumna la coupant net : n’y pense même pas ! Que ça ne vous traverse même pas l'esprit de me donner en mariage à qui que ce soit, quelque prince ou fils d’une grande autorité qu’il soit.


Maman : nous n’avons jamais dit cela, l'essentiel pour moi c'est que tu  épouse un homme bien qui respecte notre religion.


Yumna : je suis prudente mum, je saurai trouver celui qu’il me faut.


Maman soupirant : si tu le dis (changeant de sujet) quelqu'un a vu Abdallah ce matin ?


Yumna : sûrement en train de faire sa marmotte, je n'ai jamais vu un homme aussi paresseux.


Abdallah entrant : c’est pour avoir la force de te conquérir ma bien aimée.


Yumna (faisant la moue) : conquérir qui ? 


Abdallah : toi évidemment !


Il lance un bonjour collectif auquel nous répondons.


Abdallah : laisse tomber même, tu fais trop le malin. (désignant maman) Voilà ma vraie femme, elle sait bien s’occuper d’un homme elle. 


Yumna (se levant de table) : c'est au Cheikh je te laisse.


Elle débarrasse son assiette dans l'évier.


Yumna : bon moi, je retourne réviser.


Abdallah : femme attention à ne pas faire péter ton cerveau un jour, tout le temps en train de réviser.


Maman : vraiment !


Yumna : il le faut bien que je l'utilise contrairement à d'autres. 


Abdallah : exemple.


Yumna : qui se sent morveux se mouche, bon, j’y vais.


Moi (me levant à mon tour) : moi aussi.


Abdallah (nous regardant tour à tour) : c’est quoi, c’est moi qui vous chasse ?


Yumna narquoise : non, on libère les lieux pour sa majesté.


Abdallah (rictus au coin des lèvres) : pour une fois, que tu le reconnais !!


Voix de papa depuis le couloir : on ne déjeune plus dans cette maison ?


Maman ton paniqué : yaaa Allaaaah, il s’est déjà réveillé.


Yumna et moi nous tournons vers elle pantois. Elle se met à préparer des plateaux pendant que la gouvernante sert Abdallah.


Yumna (sortant de sa stupeur) : ton mari est rentré ?


Maman : cette nuit.


On s’échange un regard Yumna et moi.


Maman l'air déboussolée : Yumna, Wassila, aidez moi à porter les plateaux aux salons au fur et à mesure.


Wassila : d’accord tout de suite Madame.


Yumna : mais maman papa est rentré et tu n'as rien dit ?


Maman : parce que vous ne m’avez pas demandé.


Moi : ah ! C’est toi…


Je suis interrompu par l’arrivée de papa dans la cuisine.


Papa : chérie pourquoi le petit-déjeuner n’est pas encore servi ?


Tous les regards se convergent vers lui et les bouches largement  ouvertes. Attendez, il a bien dit chérie ? Bon laissez-moi me rasseoir d’abord.


Maman : on t’apporte ça tout de suite (criant) Wassila appelle les autres.


Papa : non laisse, je mange ici.


Maman le regarde perplexe.


Yumna (brisant le silence) : bonjour papa, on ne savait pas que tu étais rentré de voyage. 


Papa zen : bonjour Cheikha,


Moi : bonjour papa.


Abdallah (qui a arrêté de manger) : bonjour mon oncle.


Papa : bonjour, vous avez bien dormi ?


Nous répondons avec des voix à peine audibles.


Papa : Cheikha tu allais quelque part ?


Yumna : non non.


Papa : assois-toi donc pour qu’on mange.


Yumna : euh papa, j’ai déjà pris mon petit-déjeuner.


Papa : alors tu t’assois pour nous tenir compagnie.


Yumna (prenant place hésitante) : d’accord.


Moi (m'eclaircussant la voix) : j’ai fini et je dois me rendre au travail, est-ce que je peux y aller ?


Papa : mais bien sûr, d’ailleurs, tu devais y être depuis. Tu fais quoi à traîner à la cuisine à cette heure ?


Moi (me levant prestement) : j’y vais.


Je sors de la cuisine et file comme si j’avais le feu aux fesses. J'attends d’être à bord de ma voiture pour envoyer un texto à Yumna. 


Moi écrivant : tu me diras s’il faut que je trace sur Dubaï ce soir.


J’envoie le message et démarre en étant conscient du fait que la réponse ne viendra pas de si tôt. Je conduis en pensant au procès qui m’attend ce soir lorsque mon téléphone sonne, c’est Cartia. Je pousse un soupire agacé, ce faux-semblant commence vraiment à me peser même si je dois avouer qu’elle réussie son pari de me guérir de ma phobie. Enfin, ça reste encore à vérifier car il faut le dire Cartia, c’est une fille que je connais depuis  fort longtemps et que j’ai toujours côtoyée. Toutefois, je reste lui devoir une fière chandelle pour sa méthode éprouvée. Contrairement à Yumna, elle y va avec beaucoup de tact et de douceur et ça fonctionne plutôt bien dans la mesure où j'arrive à deviser avec  ses copines sans une once de gêne et de peur. Ce qui me reste à faire, c’est de tenter l’expérience par moi-même, ce que j’envisage sincèrement de faire. 


L’appel se coupe au bout d’un moment, je décide de la rappeler pile poil au moment où elle appelle à nouveau. Le temps de garer dans le sens opposé, je reçois la notification d’un message, c’est encore elle. Je n’ai pas le temps de le lire qu’elle rappelle. Non mais, si c’est cela le copinage bah mieux je cesse ce combat contre ma phobie.


Moi décrochant : salam, j’étais au volant.


Cartia : ah ok, bonjour chéri


Je lève les yeux au ciel.


Moi : bonjour comment tu vas ?


Cartia le ton rieur : je suis sûre que tu as fait une grimace.


Moi parlant vite : même pas.


En disant Astgafirulah dans mon cœur.


Cartia : j’appelle pour prendre de tes nouvelles comme toi, tu ne penses jamais à le faire.


Moi : je t’ai envoyé un message ce matin.


Cartia : les messages c’est bien, mais un vrai amoureux a envie d’écouter la voix de sa chérie le matin.


Moi coupant court : j’ai pris note, je te rappelle une fois que je serai au bureau. 


Cartia : tu dis ça et…


Moi : promis Cartia, je t’appellerai, on ira au club ce soir.


Cartia : dis wallah !


Moi riant : je passe te prendre chez toi, je te dirai quand je quitte le bureau.


Elle raccroche, pas sans avoir crié dans mon oreille hystérique. Je travaille toute la journée en appréhendant ma soirée à la maison. Yumna m’a rapporté que papa n’a pas mentionné notre assise jusque-là et qu’il garde toujours sa bonne humeur. Ça me met encore plus en émoi parce qu'il ne faut jamais se fier aux états d'âmes de Monsieur mon père, mais bon il n'y a rien d'insurmontable. À 16 h, je fais le tour de mes stations services pour un petit contrôle avant de me rendre chez Cartia. Je la retrouve au pivot où j’ai pour habitude de venir la chercher, elle monte et attend que je remonte la vitre teintée avant de se tourner vers et de me faire un large sourire.


Moi : salam


Cartia : masalam, pour une fois, tu as tenu ta promesse.


Moi (faisant le fier) : je suis un homme de parole !


Cartia : on t'a déjà vu ici ! Tu as dit qu’on va au club.


Moi : oui, chez ton oncle. 


Cartia : chouette !


Moi souriant : mets ta ceinture biquette, nous allons décoller.


Cartia (bouclant sa ceinture) : qu’est-ce qui te rend si joyeux ce soir ?


Moi : j’ai passé une excellente journée.


Cartia : ah ouais ? Dis tout à maman.


Moi : lol


Je lui parle du cours de pétrole et de mon projet d’ouvrir une industrie paragazière, elle m’écoute attentivement en suggérant quelques points qu'elle a promis mettre sur papier. En fait, elle a étudié le droit des affaires, en ce moment elle cherche à ouvrir son cabinet. Je me gare lorsque  l’enseigne du club se met en évidence devant nous et laisse la caisse à la charge du voiturier puis en pénètre le club ensemble. On se dirige vers la table des potes de Khalil que j’ai repéré dès notre entrée pour les saluer.


Salim (qui me voit en premier) : Ussama Ben Zayid ?


Jemal : Cartia ?


Nous nous lançons un regard amusé.


Moi : bonsoir les grands.


Salim : bonsoir mon bon petit, ça fait un bail.


Moi : j'étais en déplacement.


Salim : ah oui Khalil m'en a parlé, et tes affaires ?


Moi : Macha Allah tout va bien.


Cartia à Jemal : on dirait que tu as vu un fantôme.


Jemal : il y a de quoi, ça fait belle lurette qu'on s'est vu toi et moi et c'est pour te voir en compagnie d'un autre fantôme. Macha Allah, frère, je vais parier en bourse ce soir.


Salim : Haram !


Il lève les yeux au ciel avant de se tourner vers moi.


Jemal : je suis sûr que c’est ma sœur qui t’a entraîné ici de force.


Cartia : même pas, c'est lui qui m’a invité.


Jemal la fixant surpris : il t’a invité ? (levant sa tête vers moi) Tu l’as invité ?


Moi : oui


Jemal taquin : petit tu invites ma sœur sans demander ma permission ?


Salim : Jemal laisse les enfants.


Jemal : laisse moi apprendre les bonnes manières au frérot, il est nouveau dans le domaine.


Je baisse la tête penaud, il grimace d'un coup de douleur sans raison.


Salim : arrête de niaiser, tu ne vois pas que tu l'embarrasses ?


Jemal : mais je plaisante !


Cartia : très drôle ! 


Elle vient de se rendre compte qu'elle avait penser tout haut.


Cartia marmonnant : on vous laisse les grands, Ussama vient.


Moi : ok


Jemal : oh, mais vous allez où ? Joignez-vous à nous pour nous tenir compagnie. Ussama ça ne te dit pas de prendre la place de ton frère le temps d’un instant ?


Moi : euhhh…


Salim fronçant la mine : mais tu as quel problème Singh ?


Cartia avec un rire de gorge : il doit sûrement être en manque de petite amie.


Jemal lui lance un regard noir qui le fait taire. 


Moi (pendant que Cartia me presse le bras) : une prochaine fois peut-être.


Salim : vas-y oublie ce guignol.


Moi : ok.


Jemal : en tout cas petit doucement avec ma cousine.


Je me gratte la tête gêné, Cartia fait une pression sur mon dos pour me faire bouger de là. On se retrouve à trois tables plus loin d’où on peut observer Jemal se frotter la nuque à cause de la claque qu’il vient de se  prendre. Cartia passe ensuite nos commandes et passe la demie heure qui suit à pester contre lui. Je l’écoute distrait par la silhouette de la fille assise à la table avoisinant la notre, je la regarde à la dérobée jusqu’à ce que la serveuse apporte nos commandes. C’est lorsqu’elle se retourne pour parler à la serveuse que son visage et le souvenir de notre rencontre apparaît nettement dans ma tête. Il s’agit bien de la fille qui m’a ramené mon portefeuille perdu, plus précisément la fille qui a déclenché ma phobie. Il fallait que je tombe sur elle aujourd’hui, quelle galère !!!


Cartia (me sortant de ma rêverie) : tu veux lui parler ?


Moi évasif : non, enfin parler à qui ?


Cartia : la fille qui accapare ton attention depuis vingt minutes.


Moi (la regardant penaud) : je euhh… Je la connais.


Elle lève le sourcil.


Moi : bon, c’est un peu exagéré de dire que je la connais. En fait elle m’a ramené mon portefeuille égaré une fois.


Cartia : ah, ok, je pense que tu devrais lui parler. 


Moi sceptique : tu veux que je parle à une fille alors que je suis assis avec toi ?


Cartia : lol no panic, je reste focus sur l'objectif. Voilà, tu as l’opportunité de vérifier si réellement, tu as vaincu ta peur.


Moi méfiant : tu ne vas pas me faire des histoires ou quelque chose comme ça ?


Cartia : Ussama, je joue à la petite amie jalouse tout juste pour te mettre dans le bain. Là, c’est la première fois que je te vois montrer de l’intérêt pour une femme depuis le début de cette thérapie et c’est l’occasion rêvée pour nous deux de vérifier si j'ai été efficace comme ça, j’en fais mon métier.  


Je me retiens de rire.


Cartia : vas-y, si tu réussis cette épreuve, tu devras me payer mes honoraires. C'est le travail d'un psy que j'ai fait.


Moi (commençant à être nerveux) : hmm ok 


Cartia (au bout d’un moment)  : ok, tu veux un bisou avant d’y aller.


Moi horrifié : mais nan !!


Cartia : la face que tu fais !! Je plaisante, aller vas-y !


Je me lève avec les pieds qui tremblent, rhooo ça ne va pas recommencer.


Cartia (me retenant par le bras) : hey avant de paniquer rappelle-toi que c’est juste un être humain, de sexe féminin comme moi, comme ta maman, ta sœur. Tu n’auras juste qu’à la saluer poliment ensuite, tu essaies de placer deux mots. Si ça marche que tu prends trop la confiance, tu fais une blague comme avec mes copines qui adorent tes blagues soit dit en passant (clin d’œil).


Je hoche lentement la tête.


Cartia (me pressant le bras) : vas-y, ne me déçois pas.


Je reprends confiance en moi et me lève malgré mes pieds qui flageolent. Je me retrouve derrière elle après quelques minutes d’hésitation et profite du fait qu’elle soit de dos pour lancer une salutation rapide. Elle se retourne d’abord d’un air dubitatif avant me fixer les sourcils froncés.


Elle : hey, c’est toi (faisant mine de réfléchir) le palais du cheikh, voilà !


Moi titubant : moi, oui, aéroport.


Elle : voilà ! Le portefeuille, comment tu vas ? (me dévisageant) Tu es toujours aussi beau gosse hein.


Moi : bien, mer… Merci.


Elle : j’espère que ton portefeuille, tu l’as bien enfoui dans ta poche aujourd’hui. Je ne suis pas prête à me lancer dans une folle course poursuite de nouveau.


Je pâlis.


Elle souriant tendre : détends-toi, c’est juste une blague.


Moi : ah euh ok.


Elle au tac : mes parents m’ont prénommé Youri.


Moi (ouvrant les yeux) : mais c’est le prénom…


Elle m’interrompant : d’un garçon, je sais, et je suis un garçon manqué.


Moi souriant : c’est joli, c’est original.


Elle : merci


Il y a un petit flottement.


Moi reprenant : moi c’est Ussama.


Elle : enchantée Ussama, ça me fait plaisir de mettre une voix sur ce visage. La dernière fois j’ai pensé que tu étais sourd-muet.


Moi sourire contrit : pas du tout, je…


La sonnerie de mon téléphone me ralentit dans mon élan, je le sors de ma poche et décroche automatiquement. C’est Yumna.


Moi : salam, il y a un problème ?


Yumna : calmos, tu es où là ?


Moi : au club, papa demande à me voir ?


Yumna : oui, mais il veut simplement que tu rentres tôt pour qu’on dîne (articulant) en famille.


Moi intrigué : il veut simplement dîner ? Il n’a pas parlé d’une réunion ?


Yumna : oui et non, tu es avec Cartia n'est-ce pas ?


Moi : oui (enchaînant) j’arrive tout de suite.


Yumna : prends ton temps, nous en avons encore pour trois heures au moins à la cuisine avec tout ce que maman prépare. Elle a transformé l’affaire en festin, un géant festin.


Moi : raison de plus pour que je rentre tôt.


Yumna : c’est toi qui vois, à toute.


Moi : à toute frangine.


La conversation se termine sur cette note et je me tourne vers la Youri.


Moi : je dois y aller, on me cherche à la maison. Merci pour le portefeuille la fois dernière.


Youri : au plaisir beau gosse.


Je lui fais un sourire timide avant de faire volte face pour tomber sur le sourire ravi de Cartia.


Cartia (dès que j’arrive à son niveau) : tu as réussi !


Moi (reprenant ma place) : un peu oui.


Cartia : je suis trop heureuse, je pense que je vais ouvrir une agence.


Moi pouffant de rire : agence de courtage ? Associe-toi à Yumna alors vous ferez un carton dans ce domaine.


Cartia : mouais, je vais y penser.


Moi : tu es même sérieuse kiakiakia…


Cartia boudant : tu ne l’étais pas toi ?


Moi : tu penses réellement ouvrir une agence matrimoniale à Abu-Dhabi ?


Cartia : c’est vrai inh, je risque d’être bannie du pays.


Moi : du continent, tu veux dire.


On rit.


Moi (me calmer) : désolé de raccourcir notre soirée, mais mon père me cherche.


Cartia : j’espère que ce n’est que partie remise. 


Moi : en effet.


Cartia : trop bien ! Tu me raconteras ton échange avec la beauté plus tard.


Moi : je suis obligé ?


Cartia : ça fait partie de la thérapie.


Moi : mouais, c’est ça, avoue que c’est pour assouvir ta curiosité.


Cartia (se cachant le visage) : j’avoue oui.


Je règle l’addition et nous passons d’abord saluer Salim et Jemal pour leur dire au revoir. Je la laisse avec l’une de ses amies qu’elle vient de croiser pour donner le top au voiturier. Pendant que je patiente devant le club, je sens une présence derrière moi et me retourne machinalement pour tomber sur Youri. 


Youri (me tendant quelque chose) : c’est ma carte de visite, il y a mes contacts dessus. On ne sait jamais.


J’acquiesce la tête et fixe mon regard vers le côté d’où elle s’en est allé jusqu’à ce qu’elle disparaisse de mon champ de vision.






Le tournant décisif