Le mariage

Ecrit par Les Chroniques de Naty

Chapitre 7

 

(Ayana Sy Savané)

 

Nous sommes le 29 Mars aujourd’hui et c’est mon mariage. Moi Ayana Sy Savané je me marie à Aly Diakité et ce sans mon consentement. Cela fait trois jours exactement que le mariage a débuté par la « mise en chambre de la mariée », ensuite il y a eu la mise du henné. La maison est sens dessus sens dessous. Avec toutes mes tantes et cousines qui ont débarquées en vue d’apporter leur soutien à maman. A cela s’ajoute la communauté qui est tout aussi dévouée car c’est la fille de l’Imam Adjoint qui se marie. Ce n’est pas un événement qu’on voit tous les jours, alors les gens s’attendent à ce que tout soit parfait.

Ma belle-famille aussi n’est pas en reste. La mère de mon mari accompagnée de ces sœurs a pris la maison d’assaut.

Jusqu'à présent il n’y a eu ni cris ni scandale. Chaque fois que maman pose les yeux sur moi, je sens son regard implorant. Je peux voir à quel point elle a peur que je ne foute tout en l’air. Elle n’a pas tort d’être inquiète car il ya eu un moment où j’ai eu envie de m’enfuir loin de tout ça pour rejoindre Léon.

Je ne supporte pas tous ces bruits et ces chants. Ces vieilles qui viennent me faire prendre mon bain en débitant des paroles auxquelles je ne comprends absolument rien. Tout ça m’énerve au plus haut point.

C’est bientôt l’heure de la cérémonie religieuse, ma mère aidée par mes tantes s’occupe de moi ; maman pleure depuis que ce mariage a commencé. A croire qu’elle n’est pas heureuse tout comme moi.

—Pourquoi pleures-tu depuis maman ? Demandais-je.

Elle me regarda droit dans les yeux et ses larmes se mirent à couler de plus belle ! Elle me fait de la peine, c’est vrai qu’elle a beaucoup souffert dans ce foyer. Accepter toutes les moqueries et maltraitantes des parents de papa rien que pour être à nos côtés.

Elle ne mérite vraiment pas que je vienne ajouter à sa peine ! C’est une brave femme au grand cœur. Toujours présente pour aider son prochain. Même lorsque papa lui faisait vivre les pires misères, elle restait toujours debout et gardait le sourire.

—Pour rien ma fille. Répondit-elle. Je suis seulement heureuse que tu te marie, même si je sais que c’est contre ton gré. Mais tu sais ma chérie il ya des choses que nous n’aimons pas cependant ces choses nous apporteront un grand bonheur dans notre vie ; et je prie Dieu pour que ce mariage t’apporte autant de bienfaits et de bonheur. Et sache que je t’aimerais toujours, tu es mon enfant et quoiqu’il arrive cela ne changera jamais. Termina-t-elle.

Cette ultime confession me fit pleurer aussi.

—Oh maman pardonne moi ! Je te demande pardon pour toute cette souffrance que j’ai eu à t’infliger ces derniers temps.

—Eh c’est un mariage ou bien des funérailles ? Gronda la sœur de papa. Et toi Khadîdja arrête maintenant, tu vois bien que tu fais pleurer la mariée ; il ne faut surtout pas que tu gâche son maquillage  que je me suis donner tant de mal à réaliser.

Maman essuyant ses larmes en s’excusant.

—Pardonnez-moi ! J’arrête de pleurer. Sois heureuse mon enfant et que Dieu t’accompagne dans ta nouvelle vie et qu’il te protège du mauvais œil.

—Amine répondit-on en chœur.

Je porte pour l’occasion une belle robe blanche richement brodée de fil doré, Avec de petits cristaux de perle. Elle m’a été offerte par la mère d’Aly, et selon ses dires nous seront habillés dans le même ton.

Comme si tout ça m’intéressait !

Je me regarde dans le miroir une dernière fois et il faut avouer que je suis belle! Tata Fatima m’a bien maquillée en effet et la robe me va très bien. Faut reconnaitre que ma belle-mère a bon goût ; ça me change des jeans et autres petites robes que j’ai l’habitude de porter.

Apres que tout le monde se soit mis sur son trente et un, direction la mosquée. Les griottes chantaient à tue-tête ! Elles faisaient les éloges de tous ceux qu’elles voyaient. Elles ne pensent qu’à se faire des sous, quitte à raconter n’importe quoi.

Arrivée à la mosquée, je me fais escortée par mes marraines jusqu’à la place qui m’est réservée, à coté de mon mari.

J’évitais de regarder Aly quand je m’assis. Mais les effluves de son parfum me titillais les narines alors je tournais la tête dans sa direction et nos yeux se croisèrent.

C’est vrai qu’il est beau dans son boubou blanc. Ça lui donne un air de roi, ce qui contraste avec sa coupe de cheveux. Il a les cheveux coupé ras ;

Je me rappelle l’avoir déjà vue plusieurs fois habillé en boubou, mais là c’est différent ; il a quelque chose en plus qui fait que je n’arrive pas à détacher mon regard de son visage et lui non plus ne semble pas vouloir cesser de me regarder.

Mon cœur battait la chamade et mes mains deviennent moites.

Eh mais qu’est ce qui m’arrive ? Pourquoi suis-je autant subjuguée par son regard ? Non non et non ! Je ne peux pas me permettre de tomber sous son charme ! Je le déteste, je le déteste et je ne l’aime pas ! Voilà c’est mieux ainsi !!! Essayais-je de me persuader.

Il a fallu la voix de l’imam pour nous ramener dans le présent. La cérémonie pouvait enfin commencer.

—Salam Aleikoum chers frères et sœurs. Au nom de Dieu le Tout Miséricordieux le Très Miséricordieux !  Nous sommes ici aujourd’hui pour la célébration du mariage d’Aly Diakité et de D’Ayana Sy Savané. Qu’Allah mette sa baraka dans ce mariage. Mais avant toute chose, j’aimerais savoir si les deux époux sont consentants pour ce mariage ?

Silence de mort.

—Oui répondit Aly.

Quant à moi je ne répondis pas ; et ce n’est pas l’envie qui m’a manqué. Mon silence fut interpréter comme un Oui !!! Comme le dit l’adage qui ne dit mot consent. Pourtant dans mon cas le silence n’était pas un oui mais plutôt une rage folle que je camoufle en gardant la tête baissée; je suis en colère contre papa pour ce mariage sordide dans lequel il vient de me jeter.

Je me tournais pour regarder Aly et je jurais silencieusement de faire de sa vie et de celle de sa famille un enfer à partir d’aujourd’hui.

La cérémonie continua dans la joie et la bonne humeur. A la fin l’imam nous prodigua des conseils quant à la bonne marche de notre couple. Il nous recommanda la communication, l’entente, la tolérance et la confiance. Dieu devra être au centre de notre vie, et ne jamais ouvrir la porte aux mensonges ni aux voisins et parents jaloux et envieux.

Lorsqu’elle prit fin, le cortège retourna à la maison où un déjeuner était servi.

Dans l’après-midi, les rites coutumiers pouvait commencer. Cela prit des heures et des heures ! Cette journée a été la plus fatigante de toute ma vie. On me trainait de main en main, les vieilles me chuchotaient des conseils à l’oreille. Tout ceci m’épuisa au plus haut point et la seule chose que je voulais à l’ instant présent était de m’endormir.

—On ne dort pas ici Ayana cria une voix.

—Oui réveille-toi ! C’est le jour de ton mariage et cela n’arrive qu’une seule fois dans la vie. Alors profites en bien ! Répondit une autre voix.

Elles éclatèrent toutes de rire.

—En plus cette nuit est une nuit vraiment spéciale pour toi ma fille ! Gloussa ma tante en me faisant un clin d’œil. Aujourd’hui ton championnat en tant que femme commence ; et je t’ai préparé une petite valise contenant quelques petits secrets avec lesquels tu vas rendre ton mari fou. Assure-toi de le marquer pendant la première semaine que vous passerait ensemble.

Elles éclatèrent encore de rire en se tapant dans les mains.

Les pauvres si elles savaient que j’avais déjà goutée au fruit défendu, je crois qu’elles se tueraient.

Il est à présent temps de partir ! Le moment où on m’accompagne chez mon mari est enfin arrivé. A partir de cet instant je ne suis plus la fille de mes parents, j’ai une nouvelle famille qui passe avant la mienne et dont les besoins et les envies sont bien plus importants que les miens. Un homme que je dois satisfaire à chaque fois que le besoin se fera ressentir, sans hésiter, sans rechigner et sans broncher. La bonne épouse soumise et docile. Qui ne réplique pas lorsqu’on lui parle ; qui écoute au lieu de parler ; qui exécute sans jamais se poser de question.

Mais moi je ne suis pas ce genre de personne, encore moins ce genre d’épouse. Dans un foyer les conjoints discutent ensemble pour trouver des solutions aux problèmes qui se présentent. L’homme n’a nullement le droit d’imposer sa volonté. J’ai toujours vécue dans ce climat d’être supérieur à être inférieur, de sexe fort à sexe faible ; et je me suis juré que ma vie de couple ne sera jamais pareille. Car pour moi le mariage  n’est pas une relation de maitre à élève ou encore de père à enfant. Mais plutôt de mari à femme, de partenaire à partenaire.

Lorsque nous arrivons chez Aly, sa famille était là à nous attendre. Il ya un vacarme pas possible ; les griots savaient qu’ils auraient beaucoup d’argent car tonton Abdoul, le père de mon mari est un homme immensément riche et très généreux. Cela dit ils s’en donnaient à cœur joie en chantant ses louanges et celle de ses aïeux comme s’ils les avaient déjà connus. Ah cupidité quand tu nous tiens!!!

Après les salutations d’usage, le frère de papa qui m’accompagnait prit la parole.

—Nous vous donnons notre fille, parce que nous savons pertinemment que vous êtes une famille digne de confiance et que vous pourrez très bien vous occupez d’elle. Nous savons également qu’elle sera mieux traiter ici plus qu’elle ne l’était chez ses parents ; car vous êtes des gens justes. Le mariage n’est pas un jeu, et ce n’est pas seulement l’union entre deux personnes mais plutôt entre deux familles, deux communautés distinctes. Et par cette union, nous devenons une seule et même personne. Voici votre femme ! Prenez soin d’elle ; nous vous la donnons devant Dieu et les hommes, elle vous appartient ; c’est la vôtre maintenant elle est l’une des vôtres et traitez la en tant que telle. Corrigez la si elle est en faute, c’est un enfant et elle ne connait rien de la vie, conseillez la, surveillez la et éduquez la plus qu’elle ne l’est déjà. Que Dieu le tout Miséricordieux ait pitié de nous tous. Salam Aleicoum, j’en ai fini.

Quelques femmes versèrent des larmes après sa longue tirade. C’est vrai que ses paroles sont émouvantes mais moi je n’avais vraiment pas la tête à m’apitoyer. Je pensais plutôt à comment me sortir de ce mariage. Je comptais tellement leur mener la vie dure qu’ils finiront par me chasser.

Quand tout le monde fut partir, il ne restait plus que mon mari et moi ainsi qu’une vieille dame qui constatera demain de ma pureté.

Elle avait pour l’occasion recouverte le lit d’un drap dont la blancheur était impeccable. Elle sera bien surprise de ne pas y voir une seule tache de sang demain. J’imagine déjà le scandale.

J’étais assise sur le lit, lorsqu’Aly sortit de la douche une serviette enrouler autour des riens…

Esclave de mon cœur