Le râteau
Ecrit par Gioia
***Melvin EHIVET***
C’est mon anniversaire bientôt mais comme j’ai mis Ludo dans les
problèmes je me fais petit. Je vais avoir douze ans. Un grand garçon
maintenant, prêt pour affronter les pépins de la vie y compris l’amour. J’ai
prévu écrire une lettre à Cora pour lui avouer mes sentiments et lui demander
de devenir ma copine le jour J. Je ne suis peut-être pas le plus friqué de la
classe mais je suis sincère et en plus je sais que les filles aiment les
poèmes. Et le verbe je l’ai parce que j’aime beaucoup le rap. J’ai trop hâte
d’être à vendredi le jour J pour lui faire la totale. Ça sera dément !
Rien à dire, la journée de classe était barbante. À la fin des cours
j’étais avec Alexis et comme d’habitude je lançais des coups d’œil rapides vers
Cora.
– Bro ferme un peu ta bouche tu vas nous noyer dans ta bave
tellement tu meurs pour la go.
Paniqué j’ai porté la main à mes lèvres puis je l’ai poussé en colère
parce que je ne bavais pas.
– Tu es trop teubé.
– Lol toi aussi fait doucement quand tu la reluques. Regarde
comment ton pantalon est bombé. En tout cas je te comprends elle a de ces
nibars là.
– Ne parle pas d’elle comme ça couillon.
Mais il continuait à rire. Mon frère et ses camarades venaient de
sortir de classe et comme d’habitude ils avaient une tête d’enterrement. J’ai
entendu dire qu’il y a deux semaines de ça la maman de Gueye a lavé proprement
Mr Adou. Depuis il leur partage des -5 à tout va au point que la moyenne la
plus élevée de la classe actuellement c’est 9. Il a convaincu d’autres profs
qui se sont ralliés à lui et les notes des élèves sont en chute libre. J’ai
entendu d’autres dirent que ça va poser beaucoup de problèmes vu qu’ils vont en
première et doivent choisir leur spécialité pour la terminale. Mais j’y connais
rien moi. Je suis juste en cinquième. Je sais seulement que Ludo a intérêt à passer
sa classe s’il ne veut pas que papa le tue.
– Melvin, on y va, me dit-il le visage serré.
Je n’allais pas perdre mon temps à argumenter que je suis avec Alexis
déjà qu’il ne fait que me tolérer ces jours-ci. Je l’ai suivi et j’ai entendu
une fille l’interpeller, ce qui me fait le regarder avec surprise. C’est bien
la première fois qu’une fille prononce le nom de mon frère.
– Merci pour ce soir Ludo. Mais tu devrais arrêter de te porter
volontaire pour aller au tableau. Tu as déjà -20 d’accumulés en maths.
– Ouais bon on verra. Te fais pas de soucis pour moi. On se parle
demain.
– Attends, tu rentres déjà ? Votre chauffeur ne vient pas ?
– J’ai des trucs à faire.
– On vous dépose alors ? Kate est là.
– Ce n’est pas nécessaire Blair.
– Ne dis pas non. Moi aussi je ne veux pas avoir de dette envers
toi.
– Oui on vient, dis-je avant que cet idiot de Ludo ne fasse encore
son fier. Qui va se taper une heure de marche pour rentrer à la piaule ? Mes
mollets sont déjà trop musclés pour mon âge. Même les moustiques ne s’y
intéressent plus quand j’étudie dehors. Il a attaché son visage mais nous a
quand même suivis. Kate la grande sœur de Blair était très belle. À la voir on
pouvait sentir qu’elle transpire le blé.
– C’est permis de parler hein, plaisante-t-elle après un lourd
silence bien que Blair ait fait les introductions.
– Elle est cool ta Mini Cooper.
– C’est une Mazda MX 5 miata.
– Effectivement. Tu t’y connais en voiture Ludovic ?
– Ici et là, dit-il avec désinvolture. Depuis quand il s’y connaît
lui alors qu’on n’a même pas de moto ? me questionnai-je
intérieurement.
– En tout cas si tu veux faire fort chez Blair il te faut
connaître les petites voitures. Elle est obsédée par la Mini Cooper.
– Kate enfin !!!!! dit-elle en tapant l’épaule de sa sœur.
– Ludo c’est uniquement un camarade de classe.
Venez me voir comment il dit ça comme si la canon assise devant là
c’est juste une chaussure. Mon frère là aussi il est encore vivant ? Ou
il joue pour l’autre équipe ? (Être gay). Bref on venait d’arriver à la maison et j’ai un poème à
écrire. Si Ludo veut finir vieux garçon, je le laisse dedans.
***Ludovic EHIVET***
Ce petit con de Melvin a de la chance. Comme par hasard le chef de
chantier a décidé de nous payer hier et son anniversaire c’est dans deux jours.
J’ai décidé de manquer la dernière heure de sport aujourd’hui pour aller lui
chercher un cadeau. Alors que j’allais quitter l’école Blair m’interpella
encore. Va savoir ce qu’elle me veut cette fois.
– Ludo, tu vas où ?
– J’ai demandé à partir plutôt.
– Tu es malade ?
– Non.
– Quelqu’un de ta famille l’est ?
– Blair non, écoute je suis pressé là. On se voit demain, dis-je
en sortant, mais elle m’a suivi.
– Je viens avec toi.
– Je vais chercher un cadeau d’anniversaire pour Melvin et je vais
beaucoup me promener donc…
– Super !!! Attends je vais demander à la vie scolaire.
– Blair.....
Elle gambadait déjà pour retourner à l’intérieur de l’établissement et
revenait quelques minutes plus tard avec son sac. Va savoir comment elle a eu
la permission si rapidement alors que moi j’ai demandé le matin et c’est
seulement en aprèm qu’on me l’a donné.
– Alors il est où ton chauffeur ?
m’interroge-t-elle.
– Je n’ai pas de chauffeur, lui dis-je simplement. Aucune envie de
mentir aujourd’hui.
– Bon je sais qu’Abidjan mall est proche en voiture du lycée mais
à pied ça doit être loin non ? Personnellement je préfère Playce Marcory ou Cap Sud pour mes achats.
J’ai été deux fois à Cosmos aussi avec maman et c’est bien. Mais on ne peut pas
se rendre à pied là-bas.
– Je vais au marché de Cocody.
– Le marché ? C’est de la bouffe que tu vas lui offrir comme cadeau ?
demande-t-elle sceptique.
– Est-ce que c’est qu’on ne vend que la nourriture au marché ? Suis-moi
au lieu de me fatiguer avec le bavardage.
– Oh mais attend, on ne va pas marcher quand même, proteste-t-elle.
– Quand est-ce que j’ai dit qu’on allait marcher ? Les
taxis existent.
– Ce n’est pas dangereux ? On n’est que des enfants Ludo,
et si on nous faisait du mal en chemin ?
J’ai bien regardé son visage et il n’y avait aucune trace d’humour
hein. Je lui ai juste pris la main et on a commencé à marcher.
***Blair GUEYE***
Ludovic m’en bouche un coin. Il nous a fait traverser la route sans crainte
alors que les voitures sortaient dans tous les sens. En plus il a stoppé un
taxi et discutait le prix avec le chauffeur comme un adulte. Le monsieur a dit
qu’il prendrait 1000 CFA ce qui m’a étonné parce que ça ne valait rien et
Ludo a dit non 500 CFA par personne. Et le monsieur a en plus accepté.
– Ummm, Ludo où est la ceinture ? demandai-je
après m’être assise.
– Y’a pas oh petite sœur, accroche-toi seulement, je conduis bien,
répond le chauffeur.
– Tu peux attraper mon bras si tu as peur, rajoute Ludo.
Je hoche la tête, la peur au ventre quand même et à peine cinq minutes
de conduite, le chauffeur qui disait bien conduire, fait une manœuvre qui me
fait presque bondir de ma place. J’aurais pissé sur moi mais lui trouve ça
drôle.
Nous débarquons par la suite et en quelques marches, nous voilà dans un
coin bien animé qui m’est inconnu. Les gens déambulaient de partout et ça
criait, Approchez ! Regardez ! Moins cher ! Fouillez, gagnez ! Des vêtements et accessoires étaient étalés sur des couvertures sur
le sol et accrochés à des portes.
– Euh Ludo on fait quoi ici ? Et pourquoi les articles sont
entassés comme ça ?
– Tu ne sors jamais ou bien ? il m’interroge avec un air
ennuyé. C’est le commerce des yougou yougou. La friperie, rajoute-t-il. Je
viens chercher une chaussure pour Melvin. Tu connais le gars là. L’Afro-Américain
qui a une mâchoire musclée et fait des chaussures. Ken quelque chose ou Jésus
je sais plus.
– Yeezy de Kanye ? dis-je avec humour à cause de sa description.
– Ah voilà. Melvin parle toujours des chaussures Yeezy et je me
suis dit que je peux lui trouver une ici.
– Tu penses trouver ça ici ? dis-je dubitative devant les
articles qui ne m’inspiraient pas trop confiance.
– On trouve tout dans yougou yougou.
On a marché un bon moment et étonnamment on a vraiment trouvé des Yeezy
mais ça sentait le fake à plein nez. Le voilà qui soulève encore une paire.
– Non Ludo ça ne ressemble pas au vrai. Ça n’essaie même pas,
dis-je tout en secouant la tête.
– Blair, on ne va pas y passer la soirée là. Depuis tu refuses
tout, s’agace-t-il.
– Il faut au moins trouver le meilleur rapport qualité prix.
On a continué à fouiller et j’ai commencé à y prendre goût tellement
c’était vivant comme atmosphère. Finalement on est tombé sur une paire qui
faisait si vrai qu’on ne saurait dire la différence si on mettait les
authentiques à côté. Et je parle par expérience ; j’en ai cinq.
S’en suivit une longue négociation avec le vendeur. Il ne voulait pas laisser à
moins de 15 000 CFA, ce qui était une aubaine mais Ludo criait que c’est 10 000 francs
ou rien.
– On va prendre à 12 000 CFA et c’est tout, dis-je pour trancher.
– Blair, fit-il en me tournant les yeux. Chef désolé du
dérangement on part même, dit-il en me tirant par la main alors que je disais
mais et Melvin.
Le vendeur a crié « les enfants revenez prendre oh » à ma grande surprise. Il nous
a fait donc parler pendant dix minutes non-stop pour accepter 10.000 ?
– En tout cas petit frère faut épouser la petite hein !
Vous faites une bonne paire en négociation.
J’ai ri et Ludo aussi. Je suis trop jeune pour penser au mariage et
quand ça sera le moment c’est mon chéri Arthur que je vais épouser.
De retour à l’école, c’était déjà la fin de la journée scolaire. Chacun
a regagné son domicile. La dernière pensée que j’ai eue en me mettant au lit
c’est qu’il est vraiment gentil ce Ludo. C’est un bon aîné comme Kate l’est
avec moi.
***Melvin EHIVET***
Voilà ! Ma lettre est enfin prête et c’est la veille de mon anniversaire.
J’ai demandé à Alexis de me ramener une enveloppe pour que je la mette dedans.
J’ai même dessiné des fleurs dessus et je l’ai vaporisé un peu le parfum de
maman histoire de rendre ça spécial.
– Tu veux pas me faire lire bro ? me demande
Al à la fin des classes.
– Non est-ce que c’est à toi ?
– Fais pas ton relou. Montre-moi ton game non.
– Al laisse-moi. Quand j’aurais Cora, je pourrais te montrer comme
tu es mon bon petit, dis-je en lui tapotant la tête.
Il a poussé un juron et poussé ma main alors que je riais. Son grand
frère Arthur et Sébastien le grand de Vincent se sont rapprochés de nous.
– Les jeunes vous faites quoi ici ? Allez nous
chercher à boire, dit Seb.
Celui-là je ne peux pas le blairer. Il aime faire son important et
commander tout le monde tout ça parce qu’il est en terminale. Je ne voulais pas
y aller mais ils aiment trop créer les problèmes donc Alexis et moi sommes
revenus avec des boissons pour eux.
– Arthur, tu peux lire une lettre que Melvin a écrite pour une
petite là ? Histoire de s’assurer qu’il va tout tuer.
– Hey !!! m’indignai-je à la proposition d’Al.
– Ah ça tu sors les talents hein. C’est qui la petite ?
– Ce n’est personne, murmurai-je gêné à Arthur.
– Fais pas le con ayii ; tu sais le nombre de filles
que mon frère a eu ? Au moins il peut te dire les gbè si ta lettre sent le roussi, insiste
Al.
Et il n’a pas tort. Arthur c’est le gars le plus populaire du lycée. Il
a tout pour lui ; l’argent, le look, la classe. Et moi je n’ai aucune expérience avec
les filles. Ce n’est pas mon loser de frère qui aurait pu m’aider sur ce coup
donc j’ai flanché et lui ai remis ma lettre que lui et Sébastien ont lue.
(Les fautes à suivre sont intentionnelles)
Cora ma merveiyeuse et belle boté
Tu ai le soleil qui illumine ma journée. Quan tu souris je suis éblouyi
par tes dents blanches comme celles de la fille dans la pub pour Coca-Cola. Je
sais pas comment ma vie était avant que je te croises dans le couloir au bahu
mais je suis sûr que c’était mort ; aujaurdui avec toi dans mon
monde, je connais le mot bonneur babay. Tu as pries toute la place dans mon
cœur et le reste est fade fase à toi. Tu es le feu qui brule en moi ;
l’eau pur qui me dezalter. Je veux que tu sois ma princesse comme je suis un
prince. Et quan on sera grands je ferai de toi ma reine. Resoi plein de bisous
partout. Ton petit cœure Melvin.
– C’est parfait comme ça, approuve Arthur et il me donne le pouce
en plus.
– Exactement, renchérit Seb tout en me massant les épaules. Tu as
tout tué le grand, je te félicite. Laisse-la lire d’abord et ensuite tu
l’embrasses
– Juste comme ça ? Elle ne doit pas accepter d’abord ?
– Mais non pas besoin. La chaude déclaration va tellement la
mettre dans tous les sens qu’elle ne pourra pas parler, m’explique Arthur.
– En plus les filles sont timides, tu sais. Il faut prendre les
devants comme un vrai homme, continue Seb.
– D’accord merci les grands. Vous me sauvez la mise, dis-je
soulagé. Moi comme un con j’allais attendre demain qu’elle me donne un bisou et
rater ma chance. L’expérience franchement y’a que ça de vrai.
– Tu vois que je t’avais dit, fait Al quand nous retournons en
classe.
– Ouais merci mon pote.
Je suis rentré plus excité qu’une puce. J’ai tellement hâte que ça soit
demain là que j’ai à peine dormi. Je me suis réveillé et me suis assuré de bien
peigner mes cheveux. Puis j’ai pris du chewing-gum dans la poche du pantalon à
Ludo pour ce soir !
Comme je m’y attendais, personne ne m’a souhaité joyeux anniversaire à
la maison. Mon père m’a grondé et traité de bon à rien parce que je n’avais pas
bien ciré la chaussure qu’il devait porter pour aller à une de ses foutues
marches. Mais bof je m’en fous. Aussi longtemps que je m’en souvienne, il ne se
rappelle que des mois plus tard et il te dit ah tu vieillis hein. Ludo et maman
s’en rappellent normalement mais bon comme j’ai déconné ils ont dû m’oublier.
Mais pas grave ! J’ai Alexis et bientôt la plus importante Cora sera mienne !
– Alors tu es bien frais ce matin hein bro !! Joyeux anniversaire !!!
Tu vas l’avoir, me dit mon pote alors qu’on s’asseyait en classe.
– Merci gars, répondis-je heureux.
Ça a été dur de rester tranquille pendant la journée et finalement je
n’ai pas tenu. À la pause du midi, je me suis avancé vers elle. Elle était avec
son amie Abigaïl comme d’habitude accoudée contre un mur et jouant avec ses
tresses.
– Bonjour les filles. Cora, je peux te parler un moment s’il te plaît ?
– Coucou Melvin bien sûr.
– Euh seuls s’il te plaît, faisais-je plus pour Abigaïl.
– Lol tu veux la demander en mariage ou quoi ?
– ça va Abi. Donne-nous un moment, la convainc Cora.
– Tiens voilà, dis-je en lui présentant la lettre quand nous
étions seuls. Je l’ai écrit pour toi.
Elle a pris mais je n’ai pas eu le courage de rester. J’ai fui pour
rejoindre mes amis. Le bisou attendra la sortie. J’aurais le temps de bien
arranger mon haleine avec le paquet de chewing-gum. Durant la pause je jetais
des coups d’œil rapides dans sa direction et elle souriait toujours. C’est bon
signe ça ! Les heures suivantes étaient si longues. Je n’écoutais rien de ce que
disait le prof d’anglais. J’ai même roupillé un peu. C’est mon camarade qui m’a
donné un coup sur le côté pour me ramener sur terre.
Plus que trente minutes avant la fin. Beaucoup étaient sur leurs cells
en cachette. Les murmures commençaient déjà comme d’hab quand l’heure de fin
s’approche. J’entendais des choses ici et là sans trop piger.
– hahahaa ; regarde les fautes là et ça part chercher fille.
– oh la honte, en plus la fille se tape des barres de malade.
Moi je n’ai pas de téléphone donc je me contentais de regarder la
montre. Enfin c’était la fin. En me levant, j’ai remarqué que les regards
étaient braqués sur moi et ça chuchotait.
– Dis Al j’ai un truc au visage ? le
questionnai-je.
– Non rien pourquoi ?
– Je sais pas j’ai l’impression qu’on me cible.
– C’est le stress gars. Tiens je t’ai ramené des menthes que j’ai
piquées dans la chambre de ma sœur. N’oublie pas comme je t’ai dit tu ne mets
pas les dents quand tu embrasses hein. Tu suces les lèvres et la langue tu
l’enfonces dans sa bouche dès qu’elle ouvre.
– Reçu cinq sur cinq.
Elle est sortie avant nous. Je l’ai repérée direct quand j’étais
dehors. Elle était avec son groupe d’amies en train de rire. Je mâchais mon
chewing-gum rapidement pour sortir toute la menthe quand j’ai entendu la voix
de la grande sœur d’Alexis.
– Dans votre famille vous n’êtes pas fichu d’être un peu
intelligents ? Ton frère est nul en maths et toi le français ? dit-elle
sur un ton dérisoire.
– Hahahaha et avec ça tu te dis prince, mon ventre. Tu crois que
ma sœur a quoi comme avenir avec un tocard ? se moque Miriam,
la sœur de Cora.
– Je te dis, rigole bien fort Clarence ; je suis
prince et je vais faire de toi ma reine quand je serais grand. Avec ce français
c’est planton que tu finiras mon cher.
– Mais ça va pas ? Qu’est-ce qui te prend Clarence ?
– Ah tais toi ! elle retourne à Al. Tu ne sais que marcher avec les inutiles ?
J’espère que ton français n’est pas aussi minable sinon j’en touche un mot à
papa dès qu’on rentre !
– Même s’il voulait je ne pense pas qu’il aurait pu faire pire, Miriam
continue de se moquer.
Au loin, mes yeux tombent sur les deux grands qui avaient lu ma lettre
et rassuré que j’allais tout tuer. Ils se tapaient des barres et j’ai revu le
visage de Cora qui avait un cellulaire en main qu’elle passait à ses amies.
Elles riaient à se nettoyer les yeux. Ce que les camarades de classe disaient
tout à l’heure, l’attitude de tout le monde bref tout me revenait et me faisait
du sens. J’ai baissé la tête, et prié que le sol m’engloutisse maintenant.
– Bro, je viens de voir mon cell. Je comprends pas tu as changé la
lettre après la lecture des grands ?
Je me suis retourné et je lui ai collé une droite. Il m’a trahi le
salopard !
– Ho mais tu es fou, Clarence me hurle dessus après m’avoir
poussé. Tu te prends pour qui pour taper mon petit frère ?
Arthur se rue sur moi, me plaque au mur et me soulève par le col mais
j’avais tellement la rage que je m’en foutais. Ils se sont tous moqués de moi.
Mais pour Al ça fait mal. Lui c’est mon meilleur ami.
Il me regardait surpris tandis que sa sœur faisait office de bouclier
devant lui. Je l’entendais dire à son frère de me déposer. Et mon frère à moi
alors il est où ? Les surveillants et tout ? Personne ne venait à mon aide et ils continuaient à me charrier. J’ai
fermé les yeux, attendant la douleur d’un poing quand une petite voix a dit « Arthur
laisse le ».
– Il a tapé Alexis ! s’insurge Clarence.
– ça doit être un malentendu. Ils sont amis et Melvin est un bon
garçon. N’est-ce pas Alexis ? dit Blair.
– Oui ! je ne comprends pas, j’ai rien fait.
– tout c’est un malentendu pour toi B, tu me saoules ! lui
répond son amie.
– Arthur laisse l’enfant tout de suite sinon je vais chercher un
prof !
– Attend, c’est moi Arthur que tu me menaces B ? Tu
es sérieuse ?
– C’est un petit Arthur, s’il te plaît, dit-elle les yeux
larmoyants.
Arthur pousse un juron et me laisse tomber au sol. J’ai juste ramassé
mon sac et je suis sorti en trombe sans me retourner pendant que les gens
répétaient les phrases du poème qui m’a pris toute une nuit à écrire.
– Melvin attend......Melvin, j’entends Blair crier derrière moi.
– Quoi ? dis-je la gorge nouée, mais je serrais mon ventre pour retenir mes
larmes. Hors de question que ça sorte devant une fille !
– Viens on te dépose. Ton frère a demandé à partir une heure
plutôt.
Bien sûr me dis-je intérieurement. Jamais là quand on a besoin de lui.
Je l’ai suivi et en descendant de la voiture elle m’a souhaité joyeux
anniversaire, rajoutant qu’elle espère que la journée finira mieux pour moi.
J’ai juste pu acquiescer de la tête parce que si j’osais l’ouvrir, la
larme allait suivre. Je suis rentré à la maison avec l’objectif de filer dans
notre chambre et ne plus jamais en sortir mais Ludo et maman étaient sur la
terrasse avec une banderole collée sur le mur qui disait joyeux anniversaire.
– Allez viens « l’anniversaireux », dit mon frère en me montrant la main quand je ne bougeais toujours
pas de l’entrée.
J’ai foncé dans les bras de mon grand frère en pleurant comme un bébé.
Ce n’est pas très masculin mais je ne pouvais pas m’arrêter.
– Ayii c’est le goût de la surprise ?
– Le sable.... snif.
– C’est ça lol.
– C’est l’émotion arrête de l’embêter, maman prend ma défense sur
un ton blagueur.
Quand j’ai quitté ses bras, j’ai vu qu’ils avaient cuisiné mon favori,
du riz gras avec des cuisses de poulet et Ludo m’a donné un muffin avec une
bougie dessus.
– Bon ce n’est pas douze bougies mais tu vas devoir faire avec
hein, me taquine Ludo.
Je me suis déshabillé avant d’attaquer. On a mangé, dansé et joué tout
en riant. Ensuite maman m’a donné un t-shirt très beau et Ludo des yeezy. Ma
gorge s’est nouée à nouveau. Ludovic ne connaît même pas Kanye West. Il ne
regarde jamais la TV vu qu’il est régulièrement dehors à faire des petits
boulots. Et c’est lui que j’ai traité de loser qui m’a offert des pompes
pareilles.
– Si tu continues à pleurer je vais raconter ça demain.
– Je pleure parce que je suis un con alors que toi et maman vous
êtes les best.
– Hey, dit maman en tapant ma tête, aucun de mes fils n’est con.
Joyeux anniversaire fiston. On t’aime, elle continue et m’embrasse.
J’ai pris mon câlin et demandé d’autres. Au diable, faire le mec pour
aujourd’hui.