Les ennemis alliés
Ecrit par Farida IB
Dans le même temps.
Armel…
Tout est mal qui finit bien.
J’ouvre mes yeux et les pose sur Debbie qui dort sur mon bras, le pouce dans la bouche. Je me redresse et me cale bien en face d’elle pour la contempler des secondes qui deviennent des minutes. J’aime trop faire ça, la regarder dormir. C’est le seul moment où elle ressemble à une fille de son âge, insouciante et mûrissant progressivement. Je lui caresse la joue du dos du doigt et lui fais des papouilles sur le dos jusqu’à ce qu’elle se réveille. Elle se frotte les yeux en baillant avant de les ouvrir.
Moi : ma belle otage, bonjour.
Elle me sourit et se redresse en s’étirant encore et encore. Au fait, je l’ai disons kidnappé hier nuit après notre sortie à la plage avec ses frères et ma sœur. Elle était passée donner un coup de main à ma mère pour un truc que je ne saurai vous dire et j’ai attendu qu’elle la libère pour la glisser subrepticement dans ma chambre. C’est comme cela qu’on s’est retrouvé à faire le manège toute la nuit. Inutile de vous dire que j’ai retrouvé mon intimité, chez les parents.
Elle se tourne vers moi, le coude en appuie contre le lit, la main soutenant la joue et me fait un sourire coquin.
Debbie : bonjour toi (s’étirant encore une fois) mais toi alors, tu m’as cassé cette nuit. Tu as circulé en moi plus que mon propre sang. C’est quoi cet appétit sexuel soudain ?
Moi (sourire en coin) : tu veux quoi, tu m’as manqué. En plus tu ne peux pas nier le fait que je suis un vrai étalon.
Debbie : lol dis merci à Vody oui ! En parlant de ça, je trouve que tu abuses de cette boisson. Ce n’est pas recommandé pour ton âge.
Je roule des yeux en soufflant, elle me regarde en hochant lentement la tête.
Debbie : c’est pour ton bien.
Moi las : arrête de faire ta diététicienne une seconde. Debbie, il faut vraiment que tu apprennes à te détacher de ton rôle de mère par moment. Du moins, quand on est ensemble sois plus ma petite amie que la mère que tu es pour tes cadet (te) s.
Debbie sourire contrit : je ne sais que materner, c’est ce que je sais faire de mieux.
Je réponds en pinçant gentiment son nez.
Moi : être mature c’est aussi savoir faire la part des choses mi amor.
Debbie se moquant : avoue que tu as toujours le seum de notre discussion sur la maturité samedi krkrkr.
Moi (ne cherchant pas à nier) : tu m’as taclé wesh !
Debbie : c’est si rare kiakiakia.
Moi (froissant faussement la mine) : tu te moques de qui là ?
Ça a le don d’enhardir son rire espiègle, elle se lâche complètement hilare. Je la bascule et me met entre ses jambes avant de me pencher au-dessus d’elle et d’étouffer son rire avec un baiser mouillé.
Moi (entre deux baisers) : c’est agréable de te voir rire comme ça (bisou dans le cou) t’as les fossettes qui apparaissent.
J’introduis ma main dans son cycliste et lui pince un téton. Elle l’enlève.
Debbie : anh anh, dégages Bé ! (me repoussant) J’ai eu ma dose cette nuit.
Moi : moi du tout pas, c’est comme si je n’avais…
Ping SMS.
Je risque un œil vers l’écran de mon téléphone quand je prends connaissance du destinataire, je me redresse et le prends pour répondre. Je reprends donc ma place contre la tête du lit pour lire.
Djifa : « Je préfère te dire la vérité, je ne vais pas du tout bien. Je ressens comme un mal-être, difficile à contenir. Habituellement, j’arrive à faire face je revêts un masque quotidiennement. Seulement depuis cette nuit-là, je n’arrive plus à refouler mon mal de vivre. La dépression a pris le pas sur moi. »
Je finis de lire et pousse un soupire triste.
Debbie : c’est qui ?
Moi (le nez dans le téléphone) : Djifa.
J’échange un moment avec cette dernière. Depuis que l’ai laissé chez elle c’est aujourd’hui qu’elle donne enfin de ses nouvelles. Je relève les yeux un instant pour tomber sur Debbie qui fixe ses yeux sur moi.
Moi : tu la connais, la Djifa de Magnime.
Debbie : tout à fait, ce qui m’intrigue ce sont les différentes expressions sur ton visage dès lors qu'elle t'a écrit.
Moi : elle n’est pas bien en ce moment, je dois d’ailleurs passer la voir dans la journée.
Debbie : ah ok.
La suspicion à peine perceptible dans sa voix me fait lever les yeux sur elle.
Moi : qu’est-ce qu’il y a ?
Debbie : je n’ai rien dit (enchaînant) il faut que je rentre, j’ai une faim de loup.
Moi (faisant un non avec le doigt) : je n’en ai pas fini avec toi madame, tu partiras lorsque je l’aurai décidé.
Debbie plaintive : mais j’ai faim moi.
Moi : d’accord, je t’apporte de quoi assouvir cette faim comme ça, je pourrai assouvir la mienne après (clin d’œil tout en me levant) reste sagement couchée, je vais relativement m’occuper de toi.
Debbie : tu deviens serviable, c’est bien.
Moi : hey ne pousses pas le bouchon trop loin.
Elle rigole au moment où je me dirige vers la porte en laissant mon téléphone sur la table de chevet au passage. Dès que j’ouvre la porte, je perçois comme des voix étouffées dans la cuisine. Je distingue celle de ma mère dans l’immédiat et à mesure que je traverse le couloir, je reconnais celle de Tina qui semble nous avoir gratifiés de l’une de ses visites matinales du lundi pour prendre les bénédictions. C’est elle-même qui le dit. C’est étant à quelques pas de la cuisine que je peux entendre clairement ce qu’elles se racontent.
Maman : tu as suivi toutes mes instructions, j’espère.
Tina le ton rieur : à la lettre. Il était près du paradis et sans s'y attendre, il s’est brusquement retrouvé en enfer.
Maman : bien jouée ma fille, tape ici !
Elles s'entrechoquent leurs mains en riant, je secoue la tête dépassé. Si je veux bien comprendre ma mère participe à ce règlement de compte pour ne pas dire qu’elle en est la principale instigatrice. En vrai, je ne suis pas particulièrement à l'aise avec le fait qu’elle s’immisce dans leur couple de cette manière. Son couple à elle étant un fiasco, elle vit à travers le leur et c’est Bradley qui en paie souvent les pots cassés. Pauvre de lui !
Maman : et comment est-ce qu’il a réagi ?
Tina : ah maman, j’ai confirmé la maîtrise de soi. Il a juste pris une couverture et s’est réfugie sur le sofa. Il est encore couché là-bas soit disant qu’il a pris une journée sabbatique pour s’occuper de nous.
Maman ton perplexe : un lundi ?
Tina : un lundi ! Comme je ne peux pas me le permettre moi, je l’ai laissé avec ses enfants. Ça me fait moins détour ce matin entre le centre de jeux et la crèche.
Maman : absolument ! Dorénavant tu sais ce qui te reste à faire.
Moi entrant : faire quoi ?
Tina tourne un regard penaud dans ma direction, ma mère froisse sa mine directe.
Maman : toi tu écoutes aux portes maintenant ?
Moi : pas du tout (mentant) on vous attend dans toute la maison vous savez ? Mais continuez, faites comme je ne suis pas là. Je suis simplement venu me faire un plateau.
Maman : tchrrrr
Tina : rire* donc le mari, c’est comme ça ? Tu ne préviens même plus avant de partir.
Elle parle pendant que j’ouvre le frigo, dedans il y a tout un menu non entamé encore et deux gâteaux avec l’inscription « Joyeux anniversaire mon amour » et « Joyeux anniversaire papa ». Vous vous doutez bien que la fête n’a pas eu lieu par ici.
Moi (lançant un regard contrit à Tina) : je comptais passer chez vous aujourd’hui.
Tina : oui c’est ça ! Je suis sûre que l’une de mes rivales a profité du peu de liberté que je t’ai donné pour te kidnapper.
Moi : lol on peut dire ça.
Maman me toise, je ne relève pas et prends un peu de tout ce qu’il y a dans le réfrigérateur que je mets aux micro-ondes. Elles reprennent leur discussion en faisant abstraction de ma présence.
Moi (les interrompant à un moment) : maman donc tu incites à la torture de ton fils ?
Maman : parce que tu crois que tu es épargné ? Vous le méritez bien tous les deux, Bradley pour sa bourde et toi pour ton délit.
Tina arque le sourcil intriguée, mais ne dit rien. Maman ajoute.
Maman : est-ce que je dois comprendre par ton retour que tu as réglé le problème ?
Moi évasif : en quelque sorte.
Maman : comment ça ? (silence) En tout cas, j’en discuterai avec ton père pour qu’on décide ensemble de ta punition.
Moi (me tournant brusquement vers elle) : quelle punition encore après tout ce que tu m’as fait subir dernièrement ? Tu ne m’as même pas calculé le jour de mon anniversaire, le jour que tu m’as mis au monde maman.
Tina rit et je hausse les sourcils d’incompréhension.
Maman sourire narquois : la vraie torture, c’est de te faire croire ça. Est-ce que tu sais qui a préparé les plats dont tu t’es goinfré ce soir-là ?
Je jette un regard interrogateur à Tina qui hoche la tête pour confirmer.
Moi interloqué : la vraie sorcellerie ! (fixant Tina) Dis-moi toi tu es dans quel camp au juste ?
Tina parlant vite : le mien !
Elles se tapent de nouveau dans les mains enjouées, elles rient même à gorge déployée. Ça me fout tellement la haine, je vous jure.
Moi maugréant : franchement maman il n’y a pas à être mesquine comme tu l’es, tu peux filer une crise cardiaque.
Maman (essayant de se calmer) : c’est grâce à cette mesquinerie que tu as la chance de faire partie de ce monde et que tu peux te tenir devant moi en ce moment. Ton père voulait se limiter à Bradley, enfin à tes frères. Mais je l’ai dupé et c’est comme ça qu’on se retrouve à avoir le nombre d’enfants que (tapant sa poitrine) moi, je voulais depuis le début.
Moi : hmmm, tu aurais dû l’écouter.
Elle fait un geste évasif de la main avant de reprendre gaiement sa discussion avec son alter ego. Je les laisse dans leur sorcellerie pour retourner à mes coquinerie. En passant devant la pièce qui sert de bureau à mon père, je surprends une conversation. Une conversation téléphonique à ce qui semble et pas des plus saines. En soi, nous ne nous sommes pas revus depuis le Privilège.
Papa : oublie Georges franchement, c’est un petit plaisantin. Dis-moi combien il vous a remis en guise de dot ? Je ferai monter les enchères, je suis prêt à donner le triple(…) plus que tu ne peux l’imaginer. Du peu que je retenu de cette soirée, je la décrirai comme une femme impétueuse, féroce, très belle et pour couronner le tout une plantureuse. Tout ce que j’aime chez une femme et ce cocktail en elle seule me donne l’envie de la siroter jusqu’à la dernière goutte (…) ahah une manière de parler mon ami, une manière de parler(…) si ce n’est que ça, tu peux compter sur ma détermination. Tu me connais bien, je suis un prédateur. Je ne lâche jamais tant que je n’ai pas la main mise sur ma proie.
Cette seule phrase suffit à faire perdre le peu d’estime que j’avais encore pour lui. Plus d’espoir qu’il change malgré l’humiliation qu’il vient de subir et ça, ça m’écœure beaucoup. Un instant, j’étais sur le point de craquer et de faire irruption dans le bureau pour lui dire toutes les horreurs que je pense de lui, mais je me suis souvenu de mes nouvelles résolutions. Entre autres celle de ne pas laisser les actes des autres impacter sur mon humeur.
Alors j’ai poursuivi mon chemin en ruminant dans mon for intérieur. J’étais à quelques pas de ma chambre quand je l’entends m’appeler.
Papa : Armel ?
Moi sans me retourner : mmhm ?
Papa : tu viens quelques minutes ? Nous devons parler.
Je me tourne et mets le plateau en évidence.
Moi : ça peut attendre que je mange d’abord ?
Papa : je n’ai pas beaucoup de temps, ça ne prendra que quelques minutes.
Moi : ok, laisse-moi déposer le plateau et je reviens.
Il est rentré dans le bureau et moi dans ma chambre. Je plisse les yeux en voyant que Debbie s’est endormie. Je secoue la tête amusé et pose le plateau sur ma petite table à manger avant de me diriger vers la porte en faisant le moins de bruit possible.
Debbie : tu vas où comme ça ?
Je m’arrête et lui souris.
Moi : tu ne dors pas ?
Debbie : je reposais mes yeux.
Moi : sourire* je vais voir mon père vite fait.
Debbie : hmm ça sent la mauvaise humeur toute la semaine.
Moi : je ne compte pas me laisser faire.
Debbie : justement ! Ça va très vite partir en cacahuète et vous finirai par vous déchirer.
Moi : ça n’arrivera pas t’inquiètes. J’apprends la zen attitude, c’est la parfaite occasion pour tester.
Debbie : ça ne fera que du bien à l’humanité.
Moi : lol ! (voix suave) Profite de ce temps pour recharger tes batteries parce que la suite promet.
Debbie (risquant un œil vers le plateau) : en sus nous avons tout ce qu’il faut pour pimenter la sauce.
Moi sourire libidineux : coquine va !
Elle rit et je vais rejoindre mon père qui m’indique une chaise d’un geste de la main. Je décline l’ordre et me tiens debout face à lui tandis qu’il s’assoit sur le rebord d’un meuble.
Papa (sans tourner autour du pot) : tu ne dis rien aux autres sur l’incident en boîte de nuit, je ferme les yeux sur les vingt millions et en prime, tu auras une rallonge sur l’argent de poche que je te verse chaque fin de mois.
Moi : pardon ????
Attendez, il vient vraiment de me proposer ça !?
Papa (me jetant un coup d’œil) : c’est une grande faveur que je t’accorde là.
Moi rire jaune : tu penses ? C’est ça ta panacée ?
Papa (me jetant un autre coup d’œil) : oui et à tous les coups tu en sors gagnant. Tu as de l’argent plus que de raison et l’équilibre de la famille sera préservé. Ta mère sera anéantie si d’une manière ou d’une autre elle venait à apprendre ce qui s’est passé alors que ça m’a pris du temps pour retrouver sa confiance et reconstruire cette famille.
Je le regarde droit dans les yeux complètement abasourdi, je ne vous dis pas le choc.
Moi : tu fais pitié papa, tu me déçois énormément. Tu…
Papa élevant la voix : Armel, je ne te permets pas de m’insulter.
Moi (dans le même timbre vocal): : tu mérites plus que des insultes ! Seulement, je ne tiens pas à ramasser des malédictions dans le néant.
Papa hurlant : je n'ai pas de leçon à recevoir d'un gamin étourdi comme toi, tu ne me fais pas la morale compris ? Je suis ton père et je fais ce que je veux dans CETTE maison. C’est ma vie, je la mène que je l’entends ne t’en déplaise ! (prenant son souffle) Estime-toi heureux de l’offre que je t’ai fait et en tiens-toi là.
Moi (sans ménagement) : je regrette tellement que tu sois mon père. En ce moment précisément, je voudrais que n’importe qui d’autre soit mon père.
Papa cinglant : sache que c’est réciproque, je regrette un peu plus chaque jour que ta mère m’ait collé ta grossesse. Tu n’aurais jamais dû venir au monde. Et je pèse bien mes mots.
Je souris malgré le gros pincement que j’ai dans le cœur. Il se dirige vers la porte lorsque celle-ci s’ouvre sur ma mère qui arque un regard inquisiteur qui passe de lui à moi.
Maman : tout va bien par ici ? Je vous ai entendu crier.
Papa : ça va, nous avions une petite mise au point entre père et fils.
Maman (refermant la porte derrière elle) : à propos Fulbert, est-ce qu’il t’a restitué tes sous ?
Papa : oui, c’est désormais une affaire classée (me fixant le sourcil arqué) n’est-ce pas, Armel ?
Moi évasif : oui.
Maman l’air sceptique : tu es sûr ? Ton oui, n’est pas très convaincant.
Moi fermement : certain !
Papa : alors qu’on n’en parle plus. Je vous laisse, je vais travailler.
Il sort du bureau et nous nous apprêtions à lui emboîter le pas lorsqu’il rebrousse chemin.
Papa : une dernière chose Armel, demain tu commences le stage dans mon cabinet.
Moi sur un ton dérisoire : je suppose que je n’ai pas le choix ?
Papa : tu supposes bien.
Maman (à moi) : considère cela comme ta punition.
Papa : bien dit chérie.
Il s’en va sans plus, maman me suit pendant que je m’éloigne du bureau en ronchonnant.
Maman : arrête de bouder ces stages, tu t’y feras vite. Les stages sont toujours un excellent moyen d’explorer le monde du travail. Qui sait si ça va te donner envie de devenir de la graine d’avocat comme ton père. Ça vous rapprochera peut-être plus tous les deux.
Moi (tournant un regard furieux vers elle) : rêve toujours maman, ça n’arrivera jamais ! Jamais !
Elle lève les yeux au ciel et me suit toujours alors que je suis devant ma porte que je suis sur le point d’ouvrir.
Moi : j’ai besoin de mon intimité, maman.
Maman : un jour Elli, un jour tu vas me dire ce que tu caches si tant dans cette chambre.
Moi lui souriant : je te le dirai au moment opportun.
Maman : oui, c’est ça tchhrroumm.
J’attends qu’elle s’éloigne un peu avant d’ouvrir pour voir Debbie adossée au montant du lit, les bras croisés sur ses genoux repliés. Elle me lance un regard neutre pendant que je referme la porte. J’ai eu le temps de constater qu’elle a fini la moitié du plateau.
Debbie : ça s'est bien passé ? Parce que sinon il vaut mieux pas que j'en rajoute.
Je lève le sourcil parce qu’il y a quelque chose dans sa voix qui m’interpelle, comme de la contrariété.
Moi : ça va, je gère.
Debbie se redressant : ok well, je voulais juste m’en assurer (se levant) je te laisse quand même à tes occupations.
L’intonation tendue dans sa voix cette fois me confirme qu’il y a quelque chose de pas net par ici.
Moi (lui barrant le chemin) : tu vas où ? Ce n’est pas ce qu’on avait prévu.
Debbie (me bousculant d’un ton agressif) : et bien, j’ai changé d’avis.
J’arrive à saisir sa main et la retiens fermement.
Moi : Debbie dit moi ce qui se passe encore.
Debbie : il n'y a que tes putes te réclament.
Moi perdu : quoi, qu’est-ce que tu racontes ?
Elle va prendre mon téléphone et me montre le fil de ma discussion avec Sacha. Enfin ses nombreux messages qui sont restés sans réponse depuis samedi.
Moi : tu as fouillé mon téléphone ?
Debbie : je ne cherche pas l’AVC rassure-toi, j’ai cru que c’était important parce que ça n’arrêtait pas de sonner et c’est pour tomber sur ta pétasse qui insiste pour te rencontrer. D’abord, elle c’est qui ? Elles sont combien au juste dis-moi ?
Moi soupirant : Debbie, tu n’as pas à fouiller mon téléphone.
Debbie criant : là n’est pas la question Armel !
Moi : heppepp baisse d’un ton ! Si tu as bien lu, tu verras que c’est elle qui me harcèle depuis peu.
Debbie : nan nan ne joue pas la carte de l’innocent avec moi, elle ne t’aurait jamais écrit si tu n’avais pas échangé ton contact avec elle.
Moi soupire lasse : eh vas-y Deborah ne rend pas fou, le moment est vraiment mal choisi pour une scène. Je ne suis pas d’humeur pour ça.
Debbie me ramassant : je m’en fous royalement de tes humeurs compris !? Tu peux t’énerver, tu peux même tout casser comme tu sais si bien le faire, ce n’est pas mon souci ! Mais tu vas me dire c’est qui cette Sacha et avec quelles autres bitch tu me trompes.
Moi pétant un câble : MAIS TOI QU’EST-CE QUE TU ME VEUX A LA FIN ? JE SUIS LA AVEC TOI, J’ESSAIE DE FAIRE LES CHOSES BIEN LÀ ! TU VEUX ME FAIRE UNE SCÈNE ALORS QUE C’EST ELLE QUI M’A ÉCRIT, TU AS BIEN VU ! QU’EST-CE QUE TU VEUX QUE JE FASSE PUTAIN ! Elle saoule elle à me prendre la tête pour des conneries pareilles.
Elle me jauge du regard pendant des minutes avant de sortir en trombe en claquant la porte. Je me saisis d’un pion à côté que je frappe furieusement contre celle-ci. Ça, c’est le coup de grâce pour bien gâcher ma journée en beauté.
Moi jurant entre mes dents : fais chier !!!!
[…]
Je viens d’arriver à la terrasse sur le Boulevard du Mono où j’ai rendez-vous avec Bradley. Le tableau de bord affiche 17 h 20 ce qui veut dire que j’ai accusé vingt minutes de retard. C’est fait exprès pour l’emmerder parce que je sais à quel point, il a horreur qu’on le fasse attendre. Je sors du véhicule que je verrouille avant de le chercher du regard. Je le repère vers le fond et m’y rends à la traîne. À vrai dire, je n’avais pas envie de sortir de la maison aujourd’hui surtout de le voir lui. Sauf qu’il a passé la journée insisté, il veut me parler. Je me suis finalement dit pourquoi pas ? Ça va peut-être me changer les idées, en plus c’est lui qui invite.
En dehors de lui, j’ai également accepté de croiser Sacha ici même, je lui ai donné rendez-vous dans une heure environ. Il faut que je mette fin avec elle aujourd’hui forcément. Ras le bol qu’elle soit sur mon dos à longueur de journée et plus particulièrement cette journée.
Autant vous dire que c’est un mauvais lundi pour moi. D’abord il y a la discussion avec mon père qui m’a entièrement dévasté, la dispute avec Debbie qui m’a fait péter une durit et ma mère qui a achevé de me dégoûter avec un interrogatoire digne de l’agent 007. Elle voulait savoir ce que Debbie faisait dans ma chambre si tôt le matin et quand est-ce qu’elle y était rentrée sans qu’elle ne s’en aperçoive. Pourquoi est-ce qu’on hurlait et pourquoi elle est sortie de la maison comme une voleuse en passant par la seconde entrée qui l’obligera à faire le tour de la ruelle. Enfin bref, je ne me souviens plus du reste. J’ai dû lui raconter une histoire à dormir debout pour qu’elle me laisse tranquille. Elle n’y a pas cru évidemment, mais ce n’est fichtrement pas mon problème.
Là, je suis debout devant Bradley et son air torturé du moment, les mains dans les poches de mon pantalon, la mine bien serrée.
Moi : bonsoir ! Tu voulais me parler, je suis là.
Bradley soupire déconcerté : bonsoir ! Je t’en prie assois-toi.
Moi m’asseyant : j’espère que ça ne va prendre du temps, j’ai un rencard dans pas longtemps.
Bradley : je ferai vite, tu ne veux pas commander quelque chose ?
Moi : oui un cocktail avec des amuses-gueules s’il te plaît.
Il appelle un serveur qui prend la commande lorsque j’ajoute.
Moi : pas n’importe quel amuse gueule, je veux des canapés et des verrines, et un peu de toasts aussi.
Je me retiens de rire devant la tête qu’il fait. Ce n’est pas qu’il est radin en soi. Son totem, c’est de dépenser pour des futilités.
Le serveur : bien reçu monsieur (à Bradley) vous voulez autre chose monsieur ?
Bradley : non merci, ça ira.
Le serveur s’éclipse et je le regarde avec un sourcil interrogateur. Il prend une grande inspiration avant de se lancer.
Bradley : je t’ai fait venir ici afin de m’excuser pour ma conduite inqualifiable de la dernière fois. Je te demande pardon de t’avoir offensé, je me suis rendu compte bien après de ma connerie et je regrette sincèrement.
Moi : c’est bon, je ne t’en veux plus. Je te le répète, je n’oserai jamais convoiter la femme d’autrui. Et plus encore ta femme ! C’est contre mes principes et pour tout te dire, tu es loin du compte si tu penses ta femme capable d’un tel vice. Pour le peu que je sais d’elle, elle n’est pas fourbe. Et crois-moi le jour où elle aura envie d’aller voir ailleurs elle te le dira sans ciller.
Bradley : je le sais t’inquiètes (se passant la main sur le visage) j’ai vraiment déconné sur ce coup.
Moi : certainement et tu n’as pas fini d’en payer le prix.
Bradley : ça c’est sûr, ça fait des jours qu’elle me fait manger des plats soit trop salés soit trop piquants. L’ironie, c’est qu’elle s’arrange pour préparer mes plats préférés du coup, je me sens obligé de les finir. Je ne suis pas loin de contracter des ulcères.
Moi éclatant de rire : krkrkrkr cheh ! (Bien fait ! Un mot que j’ai piqué à la pote à Eddie)
Bradley : mouais c’est ça, moque toi bien de moi. Ton tour arrive.
Moi hilare : en attendant que ça arrive je vais apprendre à riposter.
Bradley : elles s’en sortent toujours vainqueur tu sais ?
Moi : en tout cas règle ça vite grand.
Il se passe la main sur le visage en soufflant.
Bradley : en réalité je ne sais pas comment m’y prendre, il y a avait un antécédent entre nous avant que ma bourde ne vienne s’ajouter.
J’arque le sourcil.
Bradley expliquant : elle trouve que je les délaisse un peu trop dernièrement elle et les enfants.
Moi hochant la tête : elle a raison.
Il plisse les yeux.
Moi : oui, tu as tout le temps le nez fourré dans ton travail, même à la maison.
Je me tais en attendant que le serveur finisse de disposer le couvert.
Moi reprenant : je dois ajouter qu’avec l’âge tu es devenu ennuyant, beaucoup trop sérieux. C’est même pas que tu es si âgé. Tu n’as que 32 ans et ton seul hobby, ce sont les procès.
Bradley me jetant un coup d’œil : c’est pour qu’on puisse rouler sur l’or.
Moi sans transition : mais ça n’a aucun sens si tu ne peux pas en profiter avec eux. Il y a un temps pour tout grand. Écoutes, du peu que j’ai retenu de nos discussions pendant mon court séjour chez vous, ta femme parle beaucoup de toi au passé. Ça veut simplement dire qu’elle puise les bons souvenirs du passé pour survivre au présent. Je peux t'assurer qu'elle finira par s'en lasser un jour et partira malgré tout l’or que tu pourras lui offrir.
Il soupire.
Moi : trouve du temps pour ta famille, c’est tout ce qu’il a de plus précieux dans la vie.
Il me regarde un moment sans rien dire avant de reprendre sur le ton de la confidence.
Bradley : je dois te confier que j’ai toujours admiré ta double personnalité. D’habitude, tu es une tête en l’air. Mais quand tu veux, tu es sage, tu es de bon conseil.
Moi touché : je le prends comme un compliment, c’est si rare qu’on m’en fasse.
Il rit.
Bradley : j’aime aussi la complicité que tu partages avec Tina et l’oncle que tu es pour mes enfants. Tu combles souvent le vide que je laisse.
Moi : c’est un peu mon devoir et sans vouloir te vexer, je sais m’y prendre avec les femmes mieux que toi.
Bradley : lol n’abuses pas frérot.
Moi : mais bien sûr, c’est toi qui m’as tout appris sur les femmes, la drague et tout mais, l’élève a dépassé le maître.
Bradley amusé : je dois reconnais oui.
On rigole.
Moi : je suis là si tu as besoin d’un coup de main pour régler la discorde. Que dis-je, nous devons nous allier parce que Tina elle a le soutien de maman.
Bradley les yeux écarquillés : nannn ??
J’acquiesce de la tête et il croise ses mains sur sa tête comme si je venais de lui annoncer le deuil. Au même moment, je reçois une notification du message de Sacha qui m’informe de son arrivée. Je relève la tête pour la voir de l’autre côté de la route.
Bradley : je comprends tout maintenant, ah je suis mal !
Moi souriant doucement : plus que mal !
Je lève les yeux et fais un signe de la main à Sacha qui me cherche des yeux.
Moi : bon grand ce n’est pas comme si je te chassais, mais mon rencard est là.
Il se tourne par réflexe pour voir Sacha qui avance vers nous.
Bradley : la fille avec des escarpins ? (oui de la tête) Elle est canon !
Moi : et très chiante aussi.
Bradley se levant : tu sais comment tu les gères toi-même (posant un billet sur la table) ça doit suffire pour l’addition. Tu n’as même pas touché à ta commande.
Moi : dix mille ? Et l’argent pour l’essence ? En plus, j’ai une invitée là.
Bradley : tu as fait comment pour venir ? Ce n’est pas à moi de payer tes rencards.
Moi : c’est pour le coup de main précieux que je vais te filer pour récupérer ta femme.
Bradley : mouais c’est ça, escroc !
Il me donne deux autres billets que j’ai le temps de fourrer dans ma poche avant que Sacha arrive. Toujours aussi extravagante, pour un simple rencard elle est tirée à quatre épingles comme si elle avait un dîner avec le président de la République. Si elle pouvait deviner qu’elle vient se faire ramasser le cul.
Je fais des présentations rapides après quoi Bradley nous laisse. Je ne donne même pas l’occasion à Sacha de commander que j’attaque.
Moi : toi c’est la dernière fois, je dis bien la dernière fois que tu me casses les couilles comme ça. Tu as quoi à faire la folle tout le temps au téléphone ?
Sacha : il fallait bien que je te crache ce que j’ai à te dire sur le visage.
Je garde les sourcils froncés et les mains croisées sur ma poitrine.
Moi : vas-y je t’écoute.
Sacha bourrue : je suis venue te dire que tu es un salaud Armel, un cochon des sous-bois, un sale type doublé d’un menteur ! (je lève le sourcil) Oui oui tu n’es rien d’autre qu’un tricheur qui joue au double jeu ! Je n’aurais jamais pu penser que tu préférerais une quarteronne à une authentique Africaine comme moi. Qu’est-ce que tu as bien pu lui trouver ?
Moi : de quoi me parles-tu ?
Sacha : tu veux savoir ? Attends une seconde.
Elle lance un appel sur son téléphone.
Sacha au téléphone : tu peux venir.
Moi lorsqu’elle coupe l’appel : tu peux me dire ce qui se passe ?
Elle ne réagit pas jusqu’au moment où mes yeux tombent sur Ruth qui sort de sa voiture. Lol une embuscade de rivales. Décidément cette journée !!
Sacha me regardant mal : tu la connais, n’est-ce pas ?
Moi zen : comment est-ce que toi tu la connais ?
Sacha : ce n’est pas le plus important en ce moment !
Moi (ne prenant pas des gants) : ok si tu veux tout savoir, je sors avec elle. Maintenant, tu veux quoi ?
Elle ouvre les yeux et me regarde hébétée.
Sacha : et tu me le dis de cette manière, sans être gêné.
Moi : tu voulais que je te le dise comment ? Tu es partie chercher l’information toi-même, je n’ai fait que confirmer.
Ruth qui est là depuis peu nous regarde juste sans broncher. Je lui fais un sourire auquel elle reste insensible. Weh j'avoue que la situation n'est pas drôle. Sacha se lève furibond et me jette le contenu de mon verre sur le visage.
Sacha méprisante : tu n’es qu’un sombre idiot Armel, un bougre heureux, imbécile ! Tu te crois balèze, mais tu n’es qu’une merde. Tu sais quoi, c’est fini entre nous ! Tu ne me mérites même pas (claquant ses fesses, une main posée sur son sein droit) tu vois ça ? Tu ne l’auras plus jamais !! Never again !!!
Alléluia, les dieux sont de mon côté !! Elle dit tout ça debout face à moi en faisant de grands gestes avec ses mains. Le spectacle a déjà attiré des curieux. Ce qui me sidère, c’est le calme de Ruth. Sacha s’agite toujours alors que je ne réagis pas.
Sacha quasi-stérique : salaud ! Je te souhaite une diarrhée explosive subite alors que tu seras coincé dans les embouteillages avec des éternuements fréquents !
Au final, ce sont les serveurs qui se sont occupés de la jeter hors des lieux. C’est maintenant au tour de Ruth de me dire sa perception des faits.
Ruth : tu m’as énormément déçu Mel, je n’aurais jamais pu imaginer ça de toi. Je t’aimais tant.
C’est tout ce qu’elle dit et fait volte-face pour se diriger vers sa voiture. Je regarde dans son sillage jusqu’à ce qu’elle disparaisse dans la circulation. Je finis par soupirer.
Ça, c’est ce qu’on appelle avoir eu une journée de merde !