Lettre 9
Ecrit par Alex_Akah
Laurent Assa,
20 juillet 1978,
Londres
Mon cher amour,
tu te souviens que j'étais très perplexe quant à la raison pour
laquelle maman m'avait laissé venir ici avec tonton Abel; n'est ce pas?
Eh bien, le mystère est résolu.
Elle veut que j'aille a Cambridge.
Elle a toujours voulu que je fasse des études soit en Angleterre, soit
au USA, et maintenant, avec l'histoire de la bourse, elle est encore
plus motivée.
Hier, tonton Abel m'a emmené visiter le campus et
rencontrer la doyen de la fac de mathématiques , parce que figure toi
que maman a envoyé mon dossier à mon insu et qu'ils m'ont retenu pour
l'entretien.
J'ai donc passé près de deux heures à discuter avec un
vieux blanc (comme ça me change de mes profs!) de mes "motivations" et
de mes "ambitions dans le domaine", l'un comme l'autre étant
inexistants.
Pourtant, dès le début, je lui ai expliqué que je
n'avais franchement aucune envie d'entrer à la fac maintenant et que
même si, je n'étais pas sur de vouloir faire carrière dans les sciences
dures. Ça n'a malheureusement pas suffit à le faire me chasser de son
bureau.
Bon, j'avoue, j'ai été mon propre ennemi sur ce coup là,
j'ai commencé à discuter avec lui de la justesse de la formule
d'Einstein. Mais à ma décharge, c'est lui qui a lancé le sujet; je n'ai
fait que répondre.
Bref, il s'est dit très impressionné par la
qualité de mes raisonnements et la finesse de mon si jeune esprit. Je me
suis retenu d'essayer de lui démontrer que le coefficient de
corrélation entre l'age physique et l'intelligence est nul. Je n'avais
pas envie de m’éterniser là bas.
Quand on est rentrés, j'ai
appelé maman pour lui dire tout le bien que je pensais de son
initiative. Elle a simplement répondu: "je sais ce qu'il y a de mieux
pour toi, Laurent. N'oublie pas ton costume pour la réception du
Président. Tes frères t'embrassent." avant de raccrocher.
Je ne sais honnêtement plus quoi faire d'elle. Plus elle vieillit, plus elle est bornée et têtue. Ça m'attriste.
Nous irons tout à l'heure avec tonton Abel sur Oxford Street, pour mon
costume. Je vais en profiter pour acheter des choses au garçons. Paul
Junior a insisté pour que je lui rapporte un manteau, va savoir
pourquoi. J'en profiterais pour t'acheter un robe. Et une à ta mère
aussi. J'en prendrais deux pareilles, mais dans des couleurs
différentes. Vous serez magnifiques dedans. Toi sûrement plus qu'elle,
mais ne lui répète pas que j'ai dit ça. Elle serait jalouse.
Je t'embrasse,
Laurent Assa.