M plus grande motivation
Ecrit par Les Chroniques de Naty
Chapitre 37
****Akabla****
La jeunesse n'est pas une période de la vie, elle est un état d'esprit, un effet de la volonté, une qualité de l'imagination, une intensité émotive, une victoire du courage sur la timidité, du goût de l'aventure sur l'amour du confort. On ne devient pas vieux pour avoir vécu un certain nombre d'années ; on devient vieux parce qu'on a déserté son idéal. Quand on est jeune, on a cette fougue des premiers jours.
C’est un peu comme tomber amoureux.
Tout nous possède et on croit tout posséder. Et pourtant. Rien ne nous appartient à part ce sentiment de lassitude qui nous prend quand on croit avoir tout donné.
J’ai moi aussi eu un idéal. Etre riche. Je ne parle pas de cette richesse qui vous fait toujours courir après l’argent. Je fais allusion à cette richesse, qui lorsque vous la posséder, elle vous rend invincible et invaincu. Je parle de cette richesse qui est capable de te faire dormir sur tes lauriers. Dans laquelle tu te réveilles et te rendors comme un paresseux car tu ne crains pas qu’elle puisse finir un jour.
J’ai toujours rêvée de ce genre de richesse. Et pourtant je ne viens pas d’une famille riche, je ne viens même pas d’une famille modeste. Je suis d’une famille pauvre. Une famille d’une pauvreté à faire peur.
Mon père était un simple cultivateur qui a eu en tout quinze gosses. Je me demande s’il n’a jamais eu vent du planning familial. Ma mère quant à elle a su tirer son épingle du jeu et ne lui a fait que deux enfants. Moi et mon jeune frère qui lui est décédé d’une méningite. Et pour quoi ? Faute de moyen bien entendu. Le mal n’a pas été vite diagnostiqué d’une part. Et d’autre part, quand le mal a été connu de tous, l’argent pour lui procurer les soins adéquats faisait encore défaut. Et Affely a perdu la vie pour une histoire d’argent. Je n’avais que 12 ans à l’époque et lui 9 ans. Mais je ne pourrais jamais oublier ce que j’ai ressentis ce jour-là. Mon cœur de petite fille refusait de laisser partir son petit frère. J’ai pleuré comme jamais je n’ai encore pleuré de ma vie. Même quand mon père est décédé, je n’ai pas pleuré autant.
Cependant, je me rappelle m’être juré ce jour-là, que je ne mourrirai pas pauvre. Je ferai tout et n’importe quoi pour être riche. Quitte à ce que je tue mon prochain, je le ferai sans état d’âme.
J’ai accepté ma condition de pauvre. Je sais que je ne serai pas riche grâce à l’héritage que me laisseront mes parents contrairement à certaines personnes. Je dois travailler à la sueur de mon front et d’autre chose pour avoir ce bien tant convoité qu’est l’argent. Il ya des pauvres et des riches, et c’est ce mélange-là qui fait le monde. Cette injustice est la caractéristique principale de notre monde ; j’ai su tout ça depuis toute petite. Car je voyais certains de nos voisins manger à leur faim tandis que nous raclions les fonds de marmites à la recherche de la dernière bouchée. J’ai vu mon pauvre petit frère mourir par manque de soins, tandis que certaines personnes se faisaient soigner à coup de milliers de francs, et ce juste à notre vu et notre su.
Qu’est-ce que ces gens ont fait pour nous lorsque nous étions dans le besoins ?
RIEN !
Ils n’ont rien fait. Même quand après la mort de papa et de maman avant que tantie Flore ne vienne me chercher pour m’emmener avec elle à Bouaké, quand nous mourrions de faim, personne n’a daigné nous aider. Alors c’est tout à fait normal que l‘argent soit mon seul et unique idéal. C’est encore plus normal qu’il soit ma meilleure motivation. Parce que c’est de lui que j’ai manqué depuis ma plus tendre enfance. C’est de par son absence que je n’ai pas eu la chance de continuer les cours. Je n’ai eu que le CEPE. Après il n’y avait plus d’argent pour qu’on m’envoie au collège et j’ai dû ranger au placard mon rêve de devenir dentiste. Je suis donc devenu une domestique. Depuis l’Age de 15 ans, je suis devenue la bonne à tout faire dans les nombreuses familles dans lesquelles je suis passée. J’ai roulé ma bosse tellement partout. J’ai été balloté de famille en famille, de foyer en foyer. J’en ai vu de toutes sortes.
Et parce qu’aujourd’hui je trouve que la vie m’en as assez fait baver et que je dois prendre ma revanche sur elle, on trouvera que je ne suis pas une bonne personne. Sait-on quelle merde j’ai dû traverser ? J’ai dormir dehors. A la belle étoile et sur des tables dans les marchés. J’ai fait des jours et des jours sans manger. J’ai été abusé par certains patrons qui me prenaient comme jouet sexuel. Et quand j’osais en parler on me traitait de menteuse et de briseuse de foyer.
Combien de fois ne m’a-t-on pas roué de coups ? Parce que j’ai été considérer comme une voleuse. J’ai été victime de jalousie et de calomnie. J’ai été en prison pour des choses que je n’avais pas commises.
Quand je décide enfin d’ouvrir les yeux et de prendre ma revanche sur cette putain de vie, on me traite de putain de fille. Comme quoi c’est l’hôpital qui se fout de la charité.
Mais moi j’ai vite compris que la vie, c’est soit mangé où être mangé. Alors j’ai décidé de manger et ce sans remords. Advienne que pourra ; et je me fiche de ce qu’on peut bien penser de moi.
La vie c’est se remuer. Aller chercher ce que vous voulez même quand la raison hurle le contraire. La vie est pour ceux qui
agissent, qui poursuivent un rêve, et qui n'ont pas peur de se battre et de se
faire mal. Parce qu'il faut oser, et parce que personne n’a la vérité absolue
dans sa poche. Ceux qui craignent d'échouer, qui sont terrifiés par les
jugements des gens, restent immobiles et stagnants. Ils demeurent sous une
cloche de verre,
cloîtrés chez eux, portes et fenêtres fermées. Le
cœur fermé. Celui qui n'a pas envie d'oser continue à végéter privé d'émotions
fortes, sans avoir jamais souffert, sans avoir jamais eu tort... Sans n’avoir
jamais aimé vraiment, et finalement ne jamais vivre vraiment.
La vie c’est d’atteindre son objectif épuisé mais
avec la prise de conscience d’avoir apprécié et vécu avec passion et dans la
passion, sans aucun regrets.
La vie s’endort dans l'étreinte de ceux qui font battre votre cœur, c’est se réveiller heureux de les avoir à vos côtés. Parce que quand vous regarderez en arrière vous devrez avoir un sursaut de fierté, et ne gardez jamais le mal être que rien ne serait abouti.
J’ai su tirer mon épingle de cette foutue vie.
Alors ça continuera de jacasser. Oui ça continuera et pourtant moi Akabla j’avance. J’avance aussi tranquillement que me permets mon ambition. Aussi démesurée soit elle, c’est elle qui m’a fait être là où je suis.
Est-ce que j’ai des regrets ?
Non !
Pas de regrets en enfer. Il faut savoir assumer ces merdes et je sais assumer les miennes. J’assume le fait d’être entré dans la vie du couple Asseu. J’assume le fait d’être tombé amoureuse de Moctar et de l’avoir séduit. Mais ce que j’assume le plus dans toute cette histoire, c’est d’avoir atteint mon but. Oui j’ai atteint le but pour lequel je me suis cassé la tête depuis bientôt cinq ans. Je pourrai enfin être riche et vivre la vie que je veux et que je mérite aussi.
Alors j’assume le fait de voir Moctar couché, baignant dans son sang. Les meilleurs pactes, les meilleures alliances se font dans le sang. Les liens les plus solides sont scellés par le sang et sont également brisés par le sang. Donc voir l’homme que j’ai aimé, couché dans son propre sang, ne peut être pour moi que source de bonheur. Mais aussi et surtout, source de libération.
Comme on le dit, le roi est mort, vive le roi. Moctar est mort, vive moi Akabla. Vive moi et mes millions.
—Tu l’as tué ? Putain tu l’as tué. Cria le marocain.
Ce qui a pour conséquence de me tirer de l’inertie dans laquelle j’étais plongé.
—Mais tu vas te calmer non. C’était lui ou toi. Alors remercie-moi de t’avoir sauvé les couilles au lieu de te mettre à crier comme un pauvre débile.
Quoi ?
C’est de cet homme dont j’ai peur ?
Mon Dieu. Il a même peur du sang et a blêmit.
—Ne penses pas que j’ai peur, loin de là. Répond-t-il comme s’il lisait dans mes pensées. Je peux tuer un homme ; que dis-je, j’ai déjà tué un homme. Mais ce qui me choque, c’est que toi une femme qui prétend aimer son mari puisse l’abattre avec autant de sang-froid.
—Si je ne l’avais pas tué, il m’aurait tué. Alors c’était lui ou moi et quant à choisir entre moi et une autre personne ; tu vois que le choix est très vite fait.
—Je vois ça en effet. Alors ne dit pas que tu as tiré pour me défendre, dis plutôt que tu l’as fait pour sauver ta propre peau. Dit-il avec sarcasme.
—Oui je l’ai fait pour moi. Et crois-moi que si c’était à refaire, je le referai la joie au cœur. Cet homme était prêt à en découdre avec moi. Je n’allais quand même pas le laisser me butter après m’avoir autant battu. Regarde un peu ce qu’il a fait de moi.
Il s’approcha plus de moi pour constater le résultat des coups de Moctar sur mon visage. Par ailleurs je venais de perdre un petit doigt et j’avoue que le fait d’avoir perdu trop de sang m’a rendu faible. Il faut absolument que j’aille à l’hôpital.
Ayant remarqué mon doigt, il me prend la main et me fait asseoir dans un des fauteuils et par chercher un bol de glaçon dans la cuisine. Lorsque j’y plonge la main, je grimace de douleur. Le sang à force d’avoir trop coulé, a fini par coaguler.
—Je dois me rendre à l’hôpital. Finis-je par dire.
—Non tu ne peux pas te rendre à l’hôpital dans cet état. Il faut qu’on trouve une solution à ça.
Il désigne le corps inerte de Moctar. Je l’observe et me rends compte de la fragilité de la vie. Cet homme qui me courrait après il n’Ya pas plus d’une heure, est couché à cette même place. Sans vie.
Je venais lui répondre que je n’en sais rien à cirer de « ça » lorsque la porte du salon grinça.
Merde le gardien !
Je l’avais complètement oublié celui-là. Et voici qu’il vient tomber sur le corps sans vie de son patron. Mais lorsqu’il remarque l’arme posé à mes côtés, il essaie de s’en aller sur la pointe des pieds.
—Ne bouge surtout pas. Allez rentrer ici. Dis-je en pointant l’arme sur lui.
Elle n’est plus aussi lourde que la première fois que je l’ai prise. C’est comme si je me suis habitué à son poids.
—Pard… pardon madame. Bégaya-t-il. Je vous jure que je ne dirai rien… et je...
—Qu’as-tu vu que tu voudras ou pourra dire ?
—Baisse cette putain d’arme Akabla. Tu ne trouves pas qu’un corps ça fait déjà trop. N’en rajoute pas avec ta stupidité enfantine. Ce n’est pas un jouet.
Yasser m’arrache l’arme des mains et la braque à son tour sur le pauvre gardien qui écarquilla les yeux d’horreur.
—Pardon monsieur. Continua –t-il de plaider. Je vous jure que je m’en allais. J’avais déjà demandé la permission à monsieur Moctar et … je ne vais …
—Oh toi tu m’agace à la fin. Cria-t-il. Tu la ferme et tu m’écoute attentivement. Je vais faire simple ok ? L’autre acquiesce la peur au ventre. Tu vas ressortir comme tu es rentré. Et tu vas t’en aller très loin d’ici. Tu ne reviendras plus jamais dans cette ville. Sinon compte sur moi pour te retrouver et te tuer. Il y a déjà eu assez de sang versé pour ce soir, je ne vais donc pas en rajouter. Alors je te fais une grâce que je ne fais pas toujours ; tu devrais donc en profiter avant que je ne change d’avis. Et si jamais, au grand jamais, tu ouvrais ta gueule de morpion pour expliquer quoi que ce soit à qui que ce soit, je t’enverrai calmement rejoindre tes ancêtres. Ais je été assez clair ?
—Oui patron.
—Alors dégage de ma vue.
Le gardien courra comme s’il avait le diable à ses trousses. On ne peut pas dire qu’il a tort ; car même si ce n’est pas le diable qui le suit, c’est clair que ce sont les démons envoyés par ce dernier qui le tuera.
—Tu n’auras pas dû le laisser partir ainsi. Il pourrait nous dénoncer et croit moi que je n’ai pas envie de finir en taule. J’y aie déjà été et je peux t’assurer que ce n’est pas un lieu de divertissement.
—Ma belle, tu feras mieux de la boucler toi aussi et me laisser réfléchir à ce qui doit être fait de « ça ». dit-il en pointant un doigt vers le corps de Moctar. Et pour une fois, essaie de ne pas trop discuter mes décisions. Cet homme qui vient de sortir ne parlera même pas à son ombre, a fortiori à une autre personne.
—Si tu le dis.
—Oui je le dis. Bon je crois qu’on va lever le camp d’ici. Mes hommes passeront dans un instant pour nettoyer tout ça et faire disparaitre le corps.
—Comment fera tu cela ?
—Ne doutes jamais de moi ma beauté. Je suis un arabe ; et nous les arabes sommes des hommes de parole. Nous faisons toujours ce que nous disons, et nous ne disons que ce que nous faisons. Alors si tu veux faire tes adieux à ton époux, c’est le moment de le faire.
Je me suis donc levé de ma place et me suis placé au-dessus du corps de ce chien qui m’a arraché un doigt.
—Sale batard ; tu voulais en finir avec moi et voici que c’est toi qui est là, gisant dans ton impur sang.
Je lui flanque plusieurs coups de pieds dans les parties intimes et lui crache dessus avant de sortir de la maison.
J’en ai fini avec lui. À moi l’argent et les biens.
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Avoir un doigt en moins est assez frustrant. Je ne peux me mouvoir comme je le veux vu que je pense que tout le monde remarque mon handicap. Je porte donc un grand foulard sous lequel je glisse la main au doigt manquant. Je ne peux qu’en vouloir à Moctar d’avoir fait de moi cette personne à demi que je suis. J’espère qu’il brule au fin fond de l’enfer.
Le marocain n’a pas voulu me dire où il a fait disparaitre le corps. J’ai donc soudoyé un de ses hommes de mains qui a pris part à l’« opération » afin qu’il me dise ce qu’ils ont fait du corps. J’ai donc été au cimetière de Williamsville voir la tombe de fortune qui a été faite pour lui. C’est bien ce qu’il mérite cet imbécile. Même les animaux ont une meilleure sépulture. J’ai encore dû payer le gardien des lieux. Et je lui ais dis que des gens viendront demander si un corps a été enterré là, il devra le leur montrer.
Je savais bien que les parents de Moctar le chercheront. Son idiot d’ami ne cessait de lui envoyer des messages. Sa mère non plus ne cessait de l’appeler. J’avais juste envie de décrocher et de leur rire au nez. Mais j’aurai enlevé à la découverte du corps toute sa saveur et son mélodrame. Je savais par ailleurs qu’il le recherchait activement. J’ai donc fait une lettre avec l’indication du lieu où peut se trouver Moctar.
Ils l’ont découvert. J’aurai tellement aimé être là pour voir leur tête. Mais je ne pouvais pas. Car je dois m’occuper de toute la paperasse pour entrer en possession de mes biens. Je n’ai pas besoin qu’on lise le testament de Moctar. Il n’en avait plus depuis qu’il a divorcé d’avec sa femme. Tous ses biens ont été mis à mon nom. J’ai eu le nez creux ; sinon il me les aurait tous arraché avant sa mort et j’en serai sorti perdante. Je n’ai pas trimé cinq ans avec lui pour ne rien avoir. J’ai mis la maison que nous habitions en vente. Je vais m’installer dans une résidence avant que je ne finisse de faire l’inventaire de tous mes biens. Les affaires avec Yasser sont au beau fixe. Actuellement c’est la période des vaches grasses. Je dois donc en profiter pour préparer celle des vaches maigres.
Et vue que mon défunt mari a été enterré aujourd’hui, j’irai faire un petit tour chez ma belle-mère afin de leur faire un coucou.
C’est moi la veuve après tout. J’ai le droit de recevoir les condoléances des uns et des autres. C’est moi qui était sa femme quand il décédait et non cette gredine de Martine.
C’est donc le cœur léger et le pas allègre que je sonne chez la mère de Moctar. Pour la circonstance, je me suis vêtue de noir. J’ai même mis un chapeau noir et porter des gants noirs. C’est la couleur du deuil ; et qui mieux que moi est en droit de porter le deuil de Moctar.
J’ai suivi la jeune fille jusque dans le salon. Ils sont tous assis écoutant religieusement les paroles de celui qui semble être un homme de Dieu.
Encore un qui va leur faire gober du n’importe quoi. Je me demande pourquoi c’est dans le désespoir, que les gens ont tendance à se souvenir de Dieu. Je n’ai jamais vu Martine mettre un pied dans une église, mais aujourd’hui je la trouve buvant au goulot, les balivernes d’un pasteur. Il leur vendra du pipo et je suis sûr qu’ils le paieront sans même demander de reçu. Je peux comprendre qu’elle veuille de la présence de Dieu maintenant dans sa vie. D’autant plus qu’elle a passé le plus clair de son temps à travailler plus qu’à s’occuper de sa famille et de sa relation avec le Seigneur.
Ils me regardent avec étonnement. Que dis-je ? Il me regarde comme si je ne suis pas un être humain et que je viens d’une autre planète. Mais je ne me laisse pas démonter pour autant par leurs airs belliqueux.
—Bonjour à tous. Ais je saluer avec le plus grand sérieux du monde.
Quand on veut que les gens croient en nous, il faut venir vers eux avec la plus grande crédibilité qui soit. Je ne suis pas là pour leurs beaux yeux. Je veux juste constater de par moi-même que Moctar est bel et bien mort et que sa famille ne voudra pas me prendre son héritage. De toutes les façons, il n’y a pas de testament à contester. Mais on n’est jamais trop prudent et mieux vaut parvenir que guérie.
—Que viens-tu faire ici ? Attaqua la mère de Moctar.
Celle-là me casse les oreilles. Je ne l’ai jamais aimé car c’est une vieille femme aigrie. Je vois la douleur dans ses yeux et je ne peux que m’en réjouir. Au moins je lui aurais pris l’une des personnes les plus importantes de sa vie. Elle n’a pas voulu de moi dans la vie de son fils, et voici que son fils en question n’est plus de ce monde.
—Je trouve ta question un peu déplacée chère belle-mère. Tu as donc oublié que c’est à moi que Moctar était marié. Alors je suis venue saluer et en même temps prendre part aux obsèques d’une part. Et d’autre part, je vais porter le deuil de mon époux.
—Tu es vraiment sans vergogne. Cracha Nouria à son tour. Tu l’as tué et maintenant tu viens narguer sa famille. Quel genre de monstre es-tu donc ?
—Surement le monstre que vous avez créé. Bref je ne suis pas là pour faire des histoires. Je veux porter le deuil de mon mari et vous n’avez pas le droit de m’empêcher de faire ça. C’est non seulement un devoir, mais c’est aussi mon droit le plus absolu.
—Eh Moctar ! Tu vois où t’as conduit ta bêtise ? Ton erreur t’a non seulement été fatale. Mais pire, ton assassin reviens se moquer de nous, elle vient se moquer de notre peine. Cela montre à quel point elle se fiche de toi et de notre douleur. Se lamenta maman Justine.
Elle porta ses deux mains sur sa poitrine et se mis à pleurer de plus belle.
Tout ça m’agace au plus haut point. Pourquoi faire autant de drame pour un mort ? Je ne suis pas là pour ses bêtises.
—C’est toi-même qui as encouragé ton fils à m’épouser. Tu as donc participé à ses bêtises. Tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même. Je t’ai dit que moi je ne suis pas Martine. C’est elle que tu pouvais balloter de gauche à droite sans qu’elle ne puisse broncher. En fait c’est là ta belle erreur ; celle de croire que toutes les femmes sont pareilles. Il y a des Martines, et des Akabla. Et quand tu te trompes de cible, ça peut finir comme ceci.
—Oui tu as raison. J’ai fait cette erreur et je la regretterai toute ma vie. Répond-t-elle amère.
—Laissons les regrets pour l’au-delà. Vous récoltez tous ce que vous avez semés. Tous autant que vous êtes, vous avez votre part de responsabilité dans cette histoire. Epargnez moi donc vos salades. Vous n’êtes pas mieux que moi.
—En effet nous ne sommes pas mieux que toi. Mais nous ne sommes pas comme toi. Avança Martine qui était resté silencieuse depuis le début.
La belle affaire !
C’est à elle que je voulais m’adresser depuis mon arrivée. Je suis heureuse qu’elle soit enfin sortie de sa léthargie.
—Madame je suis parfaite et je suis mieux que tout le monde s’est enfin réveillé. Que vas-tu faire ? Me frapper ? Me tuer ?
—Je ne ferrai rien de tout ça. Je laisse la vie te rendre les coups que tu as donnés. Je laisse demain te donner la monnaie de ta pièce. C’est que nous avons mal aujourd’hui et que tu es la seule à être heureuse. Mais sache que tout se paie sur cette terre des hommes et…
—Balivernes. Hurlais-je. J’ai déjà payé ne t’inquiète pas. J’ai perdu mon mari. C’est aussi une perte n’est-ce pas ? Et j’en suis là grâce à toi. Si tu ne m’avais pas tendu la perche, jamais je n’aurai eu accès à ton mari. Il t’aimait à la folie. C’est ton acharnement pour ton travail et ton manque de confiance qui ont conduit à ceci. Tu vois un peu où t’a conduit toute cette négligence ? Et tu ne semblais pas aussi me détester lorsque je lavais les sous-vêtements de ton homme.
—Pourquoi vous écoutez celle-là même ? Jetez le dehors.
Joignant l’acte à la parole, Fatou s’avança vers moi dans le but de me faire sortir comme elle l’a si bien formulé. Elle est toujours aussi fougueuse celle-là. Sauvage et sans retenu.
—Ne t’avise surtout pas de me toucher. Lui murmurais-je lorsqu’elle fut proche de moi. Sinon crois-moi que tu le regretteras toute ta vie. Je ne suis plus la petite Akabla que tu es parti chercher à l’agence, alors calme toi et pose ton cul dans ce maudit fauteuil. Tu ne sais pas de quoi je suis capable. N’oublie pas que je te connais, mais mieux, je connais très bien chez toi. Et j’espère que tes jumeaux se portent bien. Fréquent-ils toujours dans cette école primaire pas loin de la chapelle du Saint-Sauveur ?
Elle se bloqua net. J’ai le temps de lire de l’étonnement dans son regard.
—Oui tu as bien compris ce que je veux dire.
—Tu ose me menacer ? Menacer mes enfants ?
—Pas du tout. Mais demande juste à Martine ce que je peux faire aux enfants.
—Si jamais tu t’avise de…
—Mais calme-toi tantie Fatou. Pourquoi t’excite-tu pour si peu ? Je ne suis pas là pour les embrouilles. Vu que vous ne voulez pas que je porte le deuil, je vais m’en passer. De toutes les façons, je peux bien m’en passer. Cependant, je tenais à vous dire de ne pas chercher à savoir ce qu’est devenu les biens de Moctar. Je les ai tous mis … Que dis-je, Il les a tous mis à mon nom avant sa tragique et dramatique disparition.
Je leur lance un sourire bien entendu en insistant sur la fin de ma phrase pour qu’ils saisissent tous l’allusion. Je sais qu’ils savent tous que je suis pour quelque chose dans la mort de Moctar. Il ne reste plus qu’à le prouver.
—Je sais que tu l’as tué pour son argent. Dit Yannick. Moctar avait prévu arrêter de travailler avec le marocain. Il voulait se reprendre et reprendre sa vie en main. Je sais que c’est la raison pour laquelle tu l’as tué.
—Merde ! Arrêtez de m’accusez de tous les maux. Ce n’est pas moi qui lui aie tiré une balle dans …
—Comment sais-tu que c’est une balle qui l’a tué ?
—Je le sais parce que c’est mon mari.
—Menteuse. Assassin. Tu n’es qu’une meurtrière. Sors de ma maison. Tu peux garder tous les biens de mon fils si tu le veux. Dans tous les cas, tu ne l’emporteras pas au paradis.
—Calmez-toi Justine. La colère est mauvaise conseillère. Souvient toi des enseignements. Tout vient de l’intérieur. Ne laisse pas l’ennemie te pourrir cet intérieur.
—Ah pasteur, faut bien lui dire hein. Cette vieille folle n’en fait qu’à sa tête.
—Mon enfant s’il te plait. Essaie de tenir compte de la douleur de ces gens. Ils traversent une période très difficile ; et même si tu n’aimais pas ton mari, respecte au moins le deuil des personnes ici présentent.
—Pasteur, tu l’as dit toi-même. Tout vient de l’intérieur. Personne ne me comprend. Personne ne s’occupe de ma douleur.
Je verse quelques larmes. Il faut savoir s’attirer la pitié souvent en versant quelques petites larmes.
—Pas la peine de faire semblant avec moi. J’ai bien vue comment tu parlais depuis ton arrivé ici. Et à aucun moment je n’ai senti de la compassion où même de la tristesse dans tes propos ; encore moins dans ton regard.
—Que voulez-vous que je fasse ? Que je me jette dans tous les sens pour exprimer ma peine ?
—Non. Ne te fatigue pas pour faire tout ce cinéma. Commença Nouria. Nous voulons juste que tu t’en aille et que tu nous laisse pleurer notre perte en toute tranquillité.
—Ok. Je m’en vais. Et je n’espère ne jamais vous revoir de toute ma vie. Bande d’ingrat et d’imbécile. Gens de peu de foi et de tolérance. Avec ça vous pensez entrez dans les bonnes grâces du Seigneur ? Vous irez tous bruler en enfer croyez-moi.
Je cale mon sac à main sur mon épaule. Je lance un long juron et leur donne dos. Je sors de là d’un pas allègre. Je suis plus que rassuré. Car je sais maintenant qu’ils n’en veulent pas à mon argent. Et à vrai dire c’est tout ce qui m’intéresse. Ils peuvent continuer à pleurer ce crétin de Moctar comme ils veulent, pour ma part j’ai déjà eu tout ce que je voulais et surement bien plus encore.
Ma plus grande ambition est d'avoir de l’argent. Quand vous l’avez, vous êtes aimé et respecté de tous. J'espère...L'argent, mon essence. Avec ça je peux, déplacer des montagnes et faire danser la terre. Avec l’argent je veux juste vivre, profiter des instants paisibles, je veux m'émerveiller, je veux aimer les petits bouts qui m'entourent. Je suis une combattante pour combattre, je suis une ambitieuse pour réussir, je veux me battre contre des égos et de la mauvaise foi juste pour prouver ma valeur. Mon ambition est d'être riche. De ne plus avoir de soucis d’argent. Car quand on a autant souffert de ne pas en avoir, on ne peut qu’être heureux d’en avoir et ne savoir quoi en faire.
Je sais que ma mère est fière de moi de là où elle se trouve.
J’ai suivi tes conseils
maman. Je suis devenu riche. Et ce n’est que le début d’une longue et agréable
vie. L'argent est mon fuel, et avec lui je ne combats plus.