Maman...
Ecrit par Les Chroniques de Naty
Chapitre 33
*****Madame Asseu*****
Je ne savais pas exactement quelle attitude adopter lorsque j’ai parlé à Yannick, l’ami de mon fils. Je ne sais pas si je dois être heureuse ou malheureuse. Heureuse de pouvoir le revoir ou malheureuse à cause des circonstances dans lesquelles nous nous reverrons après toutes ces années.
Moctar ! Mon fils !
Pourquoi a-t-il fallut que tu tombes dans le piège de cette femme ? Elle t’a eu dans ses filets et je ne peux qu’en vouloir à moi-même. Car je l’ai certes aidé à te mettre le grappin dessus. J’aurai pu l’en empêcher ; mais non j’ai fermé les yeux et les oreilles. Et voici qu’aujourd’hui, nous en payons tous les conséquences et moi la première.
Mais l’heure n’est plus aux lamentations, j’ai à nouveau la chance de pouvoir revoir mon fils et de lui parler sans que cette mégère ne soit dans les parages ; alors je dois en profiter. Comme je l’ai dit à son ami, elle l’a ensorcelé avec des pratiques mystiques et ce dernier est bien d’accord avec moi, dans la mesure où lui-même a constaté cela. Je l’ai bien vu de mes propres yeux mettre des trucs pas nets dans la nourriture de mon fils. Et quand j’en ais parler à cette dernière, il m’a à la limite traitée de folle.
Comme l’a demandé Yannick, je ne dois informer personne de l’état de Moctar. Nous devons agir prudemment car il est encore sous l’emprise de cette Akabla. Et le surcharger avec trop d’émotions pourrait lui faire péter les câbles et il ne voudrait plus nous voir, ni nous parler. Par conséquent, nous devrions agir avec tact et diplomatie.
C’est donc le cœur battant que je suis arrivée à l’hôpital accompagné de Yannick. Il m’a juste indiqué la chambre et s’est assis dans la salle d’attente. Il ne voulait pas être de trop. Je l’ai beaucoup remercié avant de pénétrer dans la pièce qui était plongé dans une semi obscurité.
—Qui est là ? demanda-t-il d’une petite voix.
—Moctar ?
—Maman ? C’est toi maman !
Il se lève promptement en grimaçant de douleur. Mais cela ne l’a aucunement empêché de descendre du lit et se jeter à mes pieds.
—Mon fils ! Mon fils !
Ne cessais-je de murmurer en lui caressant doucement sa tête bandée. Un peu comme lorsqu’il était enfant et qu’il se faisait mal et courrait venir chercher du réconfort dans mes bras.
Je pouvais enfin pleurer toutes les larmes de mon pauvre cœur de mère. Comme j’ai souffert de son absence et de son indifférence. Je croyais l’avoir perdu pour toujours et que plus jamais je ne le reverrai. Mais pourtant il est là, dans mes bras et je peux le serrer tout contre mon cœur endoloris.
—Maman ! Maman ! C’est bien toi ?
—Oui Moctar, c’est bien moi. Je suis là mon garçon. Ne pleure plus !
Il me serre encore plus fort que j’en étouffe presque. J’avais oublié ce que ça fait d’être pris dans les bras de son enfant. Je ne souhaite à aucune mère de vivre ce que j’ai vécu durant ces dernières années. Etre séparer de son enfant est la pire chose qui puisse arrivée à une femme. Porter une personne en son sein, s’attacher à cette dernière pendant neuf mois. Etre relié et lié par le cordon ombilical, partager des émotions et tout ce qui est vital. Et quand cette personne naitra, par la douleur de l’enfantement, vous serez différente et comprendrez alors l’importance d’une mère. L’importance d’être mère.
On ne voie plus les choses de la même manière ; surtout qu’on doit protéger et aimer une personne plus fort que soi-même. Comment ressentir de la haine pour un être que l’on aime plus fort que soit ? C’est ça la définition même de l’amour maternel. Aimer de manière inconditionnelle et inconditionnée. Faire mieux pour une autre personne que soi ! N’est-ce pas tellement noble ?
J’aime mon fils et je ne peux rester fâché avec lui aussi longtemps. Le cœur d’une mère est profond, il accepte toutes les douleurs et autres frustrations. N’est-ce pas à cause de ses enfants qu’une femme supporte l’infidélité et le manque d’amour d’un homme ? N’est-ce pas pour ses enfants qu’elle reste dans un mariage où l’amour n’y est plus ? N’est e pas pour eux qu’elle fait toutes ces concessions et tous ces compromis ? N’est-ce pas pour eux, Sally, Moctar et Nouria que je suis resté dans ce mariage ? Supportant toutes les misères de mon époux et de sa famille. Alors pourquoi maintenant que je dois récolter les fruits de ma patience je ne pourrais pas faire preuve de tolérance ? Comme le disait ma mère, tant que mes deux yeux sont sur mes enfants, ils ne seront point malheureux. Car je serai ce parapluie qui les protégera envers et contre tout.
—Maman il faut que tu me pardonne ! murmura-t-il. Je ne sais pas pourquoi j’ai fait tout ça. Je ne comprends pas ce qui m’a pris ; mais je veux que tu me pardonne et que tu sache que je le regrette du plus profond de mon âme.
Il continuait de pleurer en s’agrippant à moi comme le naufragé tient à sa bouée de sauvetage.
Que puis-je te dire mon garçon ?
Il ya tellement longtemps que je t’ai pardonné. Mon cœur de mère ne saura rester de marbre devant autant de tristesse. Je rejoins Moctar dans ce long ballet incessant de pleurs.
—Tu sais que je ne pourrai jamais t’en vouloir pour ce qui s’est passé. Dis-je tout en me détachant de lui, afin qu’il puisse lire dans mon regard toute la sincérité que je mets dans mes propos. Je suis ta mère chéri et je t’ai porté neuf mois en mon sein. Je t’ai mis au monde, et je t’ai allaité de mes deux seins. Je t’ai mis au dos, je t’ai veillé quand tu étais souffrant. Je t’ai tenu quand tu commençais à t’asseoir ; je me rappelle des moindres détails de ta petite enfance. Tu as fait les quatre pattes tellement vite ; je me souviens comme si c’était hier de tes premiers pas, de tes premiers mots. Tu adorais dire « maman hé vé bibi » je souris à cette pensée. Et puis tu as été à l’école. Déjà j’ai su que tu serais un homme intègre, fort et bon. Tu es d’une bonté innée. Tu ne sais pas être méchant ; tu es ce genre de personne qui donne au point de s’oublier soi-même. Tu es ce père qui protège, cet homme qui aime et tu es ce frère rassurant et protecteur. Tu as tellement de valeur qui fait de toi un homme de qualité. Je te connais chéri… je te connais mieux que quiconque. Je te connais plus que toi-même. Et tu sais pourquoi ?
—Non maman.
—Parce que je suis ta mère et que c’est moi qui t’aime le plus dans ce monde. Me comprends-tu ?
—Oui maman.
—Alors sache que je t’ai pardonnée depuis le premier jour de ta naissance. Depuis le jour où la sage-femme t’a posé sur ma poitrine, et que j’ai entendu tes pleurs. Depuis le premier jour que j’ai posé mes yeux sur toi et que j’ai sentis ton poids contre moi ; depuis ce jour heureux où j’ai su que tu étais dans mon ventre et que tu grandiras en moi. Je t’ai pardonné depuis que tu es né Moctar. J’ai dit à Dieu ce jour-là que je te pardonnerai toutes tes offenses et ce jusqu’à mon dernier souffle. Quand nait l’enfant, nait le pardon. Il n’y pas plus tolérant que le cœur d’une mère, il n’y a pas plus aimant qu’une maman Moctar. Sois rassuré et vis mieux. Parce que maman t’aime de tout son cœur et que son pardon tu l’as depuis qu’elle sait que tu es dans son ventre.
—Oh maman ! Que vais-je faire sans toi ? Tu es… tu es…
Il ne pouvait parler. L’émotion est à son comble dans cette petite chambre d’hôpital. Les liens entre une mère et son enfant ne sont pas perceptibles pour ceux qui ne peuvent pardonner. A l’enfant on pardonne l’impardonnable. C’est la nature des choses ; on n’y peut rien. C’est ainsi et ça le restera.
— Calme-toi Moctar. Tu es mal en point et je ne veux pas que tu rechute.
—Comment as-tu su que j’étais là ?
—Ton ami. Yannick. Lui c’est un ami, un vrai ami qui veut ton bien. En dépit de tout ce qui vous opposé par le passé il n’a pas hésité à t’aider quand le besoin s’est fait sentir. Je lui en serai reconnaissant pour toujours.
—Moi aussi.
Il passe une main tremblante sur son visage en soufflant bruyamment. Je le sens épuisé et j’aimerais qu’il se repose.
—Tu devrais te reposer Moctar. Après ce que tu viens de subir, il ne serait pas bien que tu fournisses autant d’effort.
—Tu reste avec moi alors. Je veux profiter de toi pendant que tu es là. Je ne sais pas mais j’ai peur de te perdre maman et de ne plus te revoir.
—C’est quoi ces caprices-là ? Tu n’es plus un bébé hein ; en plus c’est Nouria la benjamine et c’est elle qui doit se comporter ainsi. Dis-je en riant.
—Je le sais. Mais moi aussi je veux avoir ma part de « bébé gâté ». Ça fait trop longtemps.
—Ne t’inquiète pas. Je suis là et je n’irai nulle part. Si tu le veux, de là nous irons à la maison. Tu te reposeras et quand tu iras mieux, tu pourras rentrer chez toi.
—D’accord maman ; mais je dois prévenir ma femme du fait que…
—Non tu ne vas prévenir personne. Tu m’entends ? Et puis je voudrais te dire que j’ai contacté un homme de Dieu et je prie régulièrement avec lui. Il viendra à la maison pour que nous puissions prier ensemble.
—Mais il faut que je dise à Akabla que je suis là. Elle pourrait s’inquiéter de ne pas me voir depuis plusieurs jours. Protestât-il.
Je lui aurai donné un bon coup sur la tête s’il n’était pas déjà mal en point. Comment peut-il être aussi stupide ? Une femme qui t’aime ne te laissera même pas seul à l’hôpital. Mais où est-elle depuis ? Je ne sais pas ce qu’elle a donné à mon fils, mais qu’elle soit rassurée que sa pratique mystique a fait de l’effet. Beaucoup d’effets même. Cependant qu’elle sache aussi que je compte bien remettre les pendules à l’heure en remettant la vie de mon fils entre les mains de Dieu. Alors que la guerre commence parce qu’elle ne pourra plus jamais me séparer de mon enfant. Et si jamais n’elle s’y aventure, je serai prête à la tuer et quitte à passer le reste de mes vieux jours à la MACA (Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan). Au moins elle sera hors d’état de nuire et mon fils sera tranquille. Les femmes comme cette maudite Akabla sont juste bonne pour attiser les flammes de l’enfer.
—Et où est ce qu’elle est depuis hier ? Pourquoi n’est-elle pas là ? Quand une femme, une vraie ne vois pas son mari rentrer à la maison, cette dernière est inquiète et cherche à savoir ce qui ne va pas. Donc vu que la tienne n’a pas fait signe de vie depuis hier, j’en déduis que ta soit disante épouse s’en fout de toi. Alors tu vas me faire le plaisir de ne plus la mentionner en ma présence. Sinon tu auras une surprise très désagréable. Est-ce que j’ai été claire ?
Je fulminais comme pas possible. Comment ose-t-il parler d’elle pendant que je cherche une solution pour m’en débarrasser pour toujours ?
—C’est compris. Maugréa-t-il. Mais en quoi l’homme de Dieu nous sera-t-il utile ? Je suis juste souffrante maman, je ne suis pas possédé par un quelconque démon.
—C’est ce que tu crois. Sinon toi-même essaie de bien analyser d’où te vient cette obsession de ta femme ? Arrives-tu à vivre bien quand tu ne la vois pas ? Es-tu le même quand elle n’est pas là ? Est-ce que tout ce qu’elle te fait de mal trouve écho à tes désirs ?
—Non. Répondit-il tout simplement.
—Alors qu’est-ce que cela veut –il dire selon toi ?
—Ça veut juste dire que je l’aime maman. C’est aussi simple que ça. Vous avez tous en tête que Akabla m’a ensorcelé et pourtant moi je ne sens rien de tout ça. Selon moi, ce que je ressens pour ma femme est juste normal et naturel. Il n’y a pas lieu de chercher d’autres explications à cela.
Plus il parle, et plus je me rends compte que le mal est très profond. Plus profond que ce que je peux imaginer. Et faire un bras de fer avec lui ne servira absolument à rien. Au contraire il ne fera que se braquer contre nous. Chose que je ne veux pas du tout. Il faut absolument que j’use de stratège afin d’aboutir à mes fins ; sinon je risque de perdre mon fils à jamais. Ce que cette femme lui a donné a pris sa tête au point où il n’arrive plus à discerner le bien du mal. Et quand un homme atteint cette phase, ce n’est pas évident qu’il redevienne le même homme qu’avant. C’est comme atteindre la phase de non-retour dans une mauvaise passe. On ne peut plus faire machine arrière et les choses ont un effet de boule de neige.
Moctar mon fils, je dois te sauver de cette tueuse d’âme. C’est mon rôle de mère de te protéger d’elle. Et crois-moi que je le ferai. C’est te sauver ou périr.
—J’ai compris mon fils. On ne va pas se disputer pour ça. Je veux juste qu’on rentre à la maison et si tu veux, tu peux appeler ta femme pour le lui dire ; moi ça ne dérange pas du tout. L’essentiel est que tu ailles bien.
Je prends sa main entre les miennes et j’entreprends de prier avec lui. Il a l’air surpris.
—Depuis quand es-tu si attaché à la religion maman ?
—Depuis toujours chéri. Je crois en Dieu et je sais qu’il existe et que nous ne faisons qu’accomplir sa volonté sur cette terre. Sauf que je n’avais juste pas le temps de l’adorer. Mais j’ai fini par m’en rendre compte ; et heureusement qu’il n’est pas trop tard. Aussi c’est grâce à une personne que j’ai découvert cela.
—Qui est cette personne ?
—Martine.
Comme si le nom lui fait un effet de douleur, il retire sa main des miennes avec empressement.
—Que vient faire le nom de Martine ici ? Depuis quand la portes tu dans ton cœur jusqu’au point de parler religion ? Je pensais que tu la détestais.
Je souris avec bienveillance. Je comprends qu’il soit surpris, car moi-même je l’ai été. Je ne pensais pas pouvoir m’entendre un jour avec ma belle-fille. Quelqu’un me l’aurait dit que j’aurai traité cette personne de folle. Mais aujourd’hui je me surprends à penser à elle ; à l’appeler pour prendre de ses nouvelles et discuter avec elle de tout et de rien comme si nous étions de vieilles copines. C’est une femme formidable avec un cœur en or. Elle est par ailleurs une bonne mère. Eduquer des garçons n’est pas chose aisée, mais elle le fait d’une main de maitre. Etre maman célibataire est un défi de tous les jours, car il faut jouer plusieurs rôles à la fois. Et ça Martine réussit à le faire avec brio. Elle est douce et sévère avec ses fils. Elle a la tendresse d’une mère, le cœur d’une mère… mais aussi l’esprit protecteur et sévère d’un père. Je ne sais pas si j’aurai réussi à sa place. Comme quoi nous ne sommes pas tous capable de porter les mêmes fardeaux.
—C’est ce que je croyais aussi. Mais comme tu le vois, je ne la déteste pas du tout et nous nous entendons très bien maintenant.
Je lui explique tout ce qui s’est passé durant ces derniers années et comment j’ai pu grâce à Nouria et tonton Kouadio demandé pardon à Martine. Comment cette dernière m’a pardonnée et m’a prise comme si rien ne s’était passé entre nous.
—C’est d’elle que je tiens cette belle leçon de tolérance. C’est grâce à elle que j’ai cette paix du cœur et aussi cette volonté de bien faire les choses ; et surtout cela m’a permis de comprendre tellement de chose.
—J’avoue que je suis surpris par tout ce que tu viens de me dire.
—Toi aussi tu devrais songer à faire pareil.
—A faire quoi ?
—A demander pardon à ta femme.
—Ex-femme maman. Martine et moi ne sommes plus mariées. Et pour ce qui est de lui demander pardon je n’en sais trop rien. Je vais réfléchir et voir ce que je peux faire, même si j’avoue douter qu’elle veuille me pardonner.
—Tu serais surpris de voir qu’elle est aux dessus de toutes ces considérations. Essaie au moins de faire un effort. Et crois-moi qu’après ça, tu te sentiras en paix avec toi-même. Essayais-je de le convaincre.
—Comme je te l’ai déjà dit, je verrai. Pour l’instant je veux juste quitter cette chambre d’hôpital.
Je venais répondre lorsqu’on toqua à la porte et Yannick entra suivi du médecin.
—J’espère qu’on ne vous interrompt pas. Dis ce dernier.
—Pas du tout Dr. Répond-t-on en chœur.
—Monsieur Asseu, je vois que vous avez bonne mine ce matin et cela me confirme que vous vous portez bien. Par conséquent, je vais demander qu’on vous libère ; parce que vos résultats n’ont rien montré d’anormal. Tout ce que je vous recommande, c’est de prendre vos médicaments afin que vos blessures puissent vite guérir. Mais encore et surtout, je vous recommande beaucoup de repos. Pas de stress inutile, pas de réflexion trop poussée. Pas de bruit, rien qui pourrait vous énervez. Car comme je le disais hier à votre ami, vous avez évité le pire, alors vous êtes encore fragile.
—C’est compris Dr. Je tacherai de suivre tout ça à la lettre.
—C’est le mieux à faire. Bon vous passerai après dans mon bureau prendre l’ordonnance et ainsi que votre bon de sortir et tous vos reçus de paiements.
—Moi je m’occupe de ça. S’empressa de dire Yannick. Bra, je te laisse discuter avec la vieille et quand je fini on t’accompagne chez toi.
—Non Yannick, nous irons à la maison. Chez moi. Rectifiais-je. Ton ami ira se reposer et rentrera chez lui plus tard.
Celui-ci me sourit ravi. Avant de s’en aller.
Je reste à discuter de tout et de rien avec mon fils. Les retrouvailles ont un gout de miel pour moi et je veux en profiter. Je suis heureuse que les choses commencent à redevenir comme avant dans ma vie et celle de mon fils. Il est vrai que le vrai problème est toujours là, mais on peut dire qu’on a fait une grande avancée sur le chemin de la libération.
Je sais que le plus dur reste à venir. Toutefois je n’ai pas peur, je place ma confiance en Dieu et je sais qu’avec lui nos peurs et craintes se transforment en force.
****Une semaine plus tard****
Moctar a décidé de rentrer chez lui aujourd’hui. Cette nouvelle m’attriste beaucoup mais je ne peux faire autrement que d’accepter. Dans la mesure où il faut reconnaitre qu’il va mieux tant physiquement qu’émotionnellement.
Comme convenu, l’homme de Dieu est venu chaque soir prier avec nous. Même si au début mon fils était récalcitrant, mais avec le temps il a compris et s’est donné à fond dans sa délivrance. La route pour qu’il soit complètement guérir est longue. Toutefois j’ai bon espoir. Car l’homme de Dieu m’a rassuré sur le fait que lentement mais surement Moctar s’en sortira des griffes de cette sorcière.
Il a fait beaucoup de révélation sur cette femme. C’est un vrai démon, et elle a tout aussi besoin de prière. Parce qu’elle est possédée par un esprit qui lui fait faire toutes ces bêtises. Alors il veut la rencontrer afin de prier pour elle.
Pour ma part, j’en doute fort. Cette Akabla est juste mauvaise ; elle est foncièrement méchante et je ne sais pas si une simple prière pourra la sauver. Même si l’on lui verse l’huile d’onction sur la tête et qu’on la noie dans de l’eau bénite, je ne crois pas qu’elle change. C’est inné. Mais je me suis gardée de dire tout ça à l’homme de Dieu. Sinon il croira que je n’ai pas la foi en Dieu. J’ai certes la foi, je crois aux miracles ; mais je sais aussi que les miracles se font sur le base de la foi que nous avons en Dieu. C’est lui qui fait les miracles et non les hommes qui prient. Par conséquent, pour qu’un miracle opère dans une vie, il faut que cette vie croit au miracle, qu’elle ait la foi que ce miracle vient de Dieu pour elle et que c’est une réponse à ses prières. Dans le cas d’Akabla je ne pense pas qu’elle ait ce degré de foi.
Par ailleurs je mettrai ma main à couper qu’elle n’a jamais mis ses pieds dans une église. C’est une âme maudite. Que Dieu me pardonne mais c’est ce que je pense.
Dans tous les cas, moi je suis heureuse de voir mon fils qui commence à reprendre gout à la vie. Et il a même prévu se rendre chez Martine afin de lui parler et demander pardon pour tout le mal qu’il lui fait. Je ne peux qu’être aux anges. Tout va bien, tout ira bien. De ça j’en suis sure.
Lorsqu’il sort de la chambre, prêt à prendre la route, je ne pus m’empêcher de verser une larme. Il va me manquer terriblement. Cette semaine qu’il a passé avec moi a été l’une des plus belles de ma vie. J’ai profité de mon fils comme jamais je ne l’avais fait auparavant. Nouria est venu avec son mari et elle aussi a pu pardonner à son frère. Toutefois, je lui ai demandé de ne pas en parler à Martine pour l’instant. On doit bien faire les choses et ne pas sauter les étapes. Ma famille était à nouveau réunie autour de moi ; Sally aussi lui a pardonné. Que rêver de mieux Seigneur ?
Alors pourquoi je me sens mal ? Je ne peux m’empêcher de pleurer.
—La Mama arrête de pleurer. Dit-il en me prenant dans ses bras. Je ne vais pas mourir quand même ; je reviendrai te voir chaque jour. Et puis c’est prévu qu’on aille ce week-end chez martine avec le pasteur Michel. Donc on se reverra seulement cinq jours. Alors pourquoi pleures-tu ?
Pourquoi pleure-je ? Je ne sais pas moi-même pourquoi je pleure. Mais je sens dans mon cœur une boule qui n’arrête pas de se former. Je sais qu’on se reverra d’ici peu. Alors pourquoi je pleure ? Pourquoi mon cœur de mère se mets en alerte ? Mon instinct de mère m’envoie des feux de détresse.
Bon j’essaie de me calmer tant bien que mal et de sourire à travers mes larmes.
—Tu as raison. C’est mieux que je ne pleure plus. Mais tu vas tellement me manquer mon bébé.
—Je ne suis plus un bébé maman. Je suis même un père de famille hein ! Donc faut transférer toute cette affection sur mes enfants.
—Tes enfants ont leur place dans mon cœur. Mais toi ta place est très spéciale… je t’aime mon fils. Et n’oublie pas que je t’ai tout pardonné. Va en paix ; et reviens vite me voir.
—Je ne l’oublie pas maman. Et moi aussi je t’aime très fort… et n’oublie pas que je suis encore désolée pour toute cette peine que je t’ai causée. On ira voit Martine et je mettrai de l’ordre dans ma vie. Je redeviendrai Moctar, ton fils chéri. Qui t’aime et que tu aimes aussi.
Je lui souris et lui fais un grand câlin. Je le béni, puis il s’en va. Arrivé sur le pas de la porte, il se retourne et me fait un signe de la main.
Je ne pus retenir mes larmes. Pourquoi ai-je cette impression de douleur dans le cœur ? Mon fils revient vers moi, je dois être heureuse et non malheureuse. Il faut que j’arrête ça. Dieu m’a fait une grâce et au lieu de le remercier, je me mets à pleurer comme une madeleine. Je retourne me coucher dans ma chambre. Je souris intérieurement, soulagée que tout l’orage puisse enfin passer et qu’il laisse place à un bel arc-en-ciel.
Va mon enfant et que Dieu ait sa main protectrice sur toi.