Marrakech

Ecrit par Meritamon

Marrakech.

 

C’est la première fois de ma vie que je prends l’avion. J’ai le vertige, mes cuisses nues sous ma minijupe mouillent le siège de sueur. J’ai menti à ma famille pour être ici avec lui, dans ce pays étranger, pour 5 jours. Ça fait des mois que je continue de mentir.

Où vas tu comme ça? Mon groupe de révision. Pourquoi rentres-tu tard? Ma pratique de Volley-ball. Où étais-tu? Au centre/ville

Ça fait des mois que le mensonge m’étouffe. Je ne reconnais plus la personne que je suis devenue. Cette fille aux aguets que je suis, le rire forcé qui sort de ma gorge, ma mélancolie omniprésente.

 

L’homme me paie des grosses sommes d’argent pour laver le tort qu’il fait à mon corps, à mon innocence volée. Il se rachète une conscience en me couvrant de cadeaux. Il dit qu'il prend soin de moi. Peut-être. Mais il prend aussi beaucoup de moi. Mon corps, mon temps, ma vie. Il veut être au courant de mes allées et venues en dehors de l'école, qui je vois, où je vais. Il dit qu'il n'a pas confiance en moi. Il me contrôle. Il m'étouffe.

 

Notre relation est malsaine. Nous en sommes conscients tous les deux. Mais nous ne savons pas comment nous arrêter, dans cette spirale infernale, obsessionnelle, où nous nous possédons brutalement dans la chair, et nous rejetions par la suite avec dégoût l’un de l’autre, pour revenir inlassablement nous abreuver encore et encore dans notre mare pestilentielle.

J’ai essayé de le quitter. Plusieurs fois, je suis partie pour faire le vide, arrêter la roue et me « purifier » de cette passion. Jamais longtemps : Le manque, l’envie de lui me reprenait aux tripes et me ramenait, rampante à ses pieds.

 

Parce que Le monde, tel que je le connaissais, sans lui, perdait ses couleurs et devenait fade.

 

Nous pensions tous les deux être maudits de cette passion incontrôlable. Il s’en voulait et m’en voulut par la même occasion du trop-plein de désir qu’il avait pour moi, de la faim de mon corps, jamais complètement assouvie, la perte de contrôle et surtout de la souffrance qu’on était capable de s’infliger au nom de ce qui nous liait, peu importe ce que c’était, du désir et peut-être d’un peu d’amour, même si nous n’y croyons pas vraiment.

 

Quand, après nos ébats, Xander s’écroulait sur moi et roulait de l’autre côté du lit, il repliait son bras sur le front, regardait le plafond et murmurait, suffisamment pour que je l’entendis : « Tu me conduis droit en enfer ». Je lui répondais : « Je suis déjà en enfer, figures toi ».


 Je me dirigeais dans la salle de bain et me nettoyais de son odeur. Le miroir me renvoyait brutalement mon visage aux yeux cernés, mes traits fatigués et la marque de ses doigts sur mon cou délicat que je devrais dissimuler pendant quelque temps. Je me rhabillai rapidement avant qu’il eût encore envie. J’avais encore perdu quelques perles aux reins, l’une des bretelles de mon soutien-gorge ne tenait qu’à un fil, arrachée par les doigts impatients et fébriles. 


« Ramène-moi, tu veux? Je dois rentrer » et, en le surveillant du coin de l’œil, prudemment, j’ajoutai : « Je ne reviendrai pas demain, ni cette semaine et ni celle d’après... ». Xander soupira, et me fixa du regard, contrarié : « qu’est ce qui se passe »?


-         Mes examens de fin d’année. Je suis très en retard dans mes révisions. 

-         Tu peux apprendre tes leçons ici, tu as assez d’espace et de tranquillité, je te laisserais le bureau, je te prendrais un tuteur si tu veux.

Nous savions tous les deux que ce n’était pas vrai, je n’avais jamais vraiment pris mes leçons dans son appartement qui invitait plus à l’indolence, la luxure qu’aux études. Tout était fait pour me distraire. La musique qu’il aimait faire jouer, ses livres, lui. Surtout lui.


-         Non. Ce n’est pas une bonne idée.  

Et comme il ne comprenait pas, je lui expliquai que j’avais besoin de m’éloigner pour réussir mes cours et pour la première fois, j’avais peur de rater tous mes examens, en partie parce que j’étais très fatiguée, déconcentrée, désorganisée.

-         Et c’est ma faute? Je pensais que tu t’ennuyais au Lycée... qu’est ce qui te motive tout à coup? Me demanda-t-il l’œil soupçonneux.

-         L’année prochaine c’est le bac et je dois aligner les bonnes notes. Le directeur Osòrio me garde à l’œil, il se doute de quelque chose, je ne peux pas lui mentir longtemps, mes absences répétées, mes notes qui baissent.

Xander avait peur que je m’éloigne et  il se leva du lit et remit son pantalon, en colère.


-         Foutue gamine! Qu’est ce qui m’a pris d’être accro à toi comme ça? Marmonna-t-il, erratique, il cherchait ses clés d’auto pendant que je priai qu’il se calmât.


-         Seulement quelques jours, Xander! Ce n’est pas la fin du monde. Tu pourrais faire les choses que tu aimes, aller aux îles, faire la photo...

-         La ferme! M’intima-t-il. J’en ai marre de ce foutu pays, tu ne comprends pas? Toute cette pagaille, cette crasse! Il n’y a que toi qui me retiens ici. Et ça te réjouit, fillette de rien de tout, de me voir ainsi, dépendant de ta présence.

-         Non, c’est faux!

-         Tu peux être sûre d'une chose Éva, si cette fois encore tu t'en vas, je ne te laisserais pas entrer à nouveau dans ma vie, tu comprends ça?  Menaça-t-il.

Je fus triste de voir que nous ne nous faisons plus du bien. Je remarquai ce que je refusais de voir depuis quelque temps déjà. Cet état fébrile qu’il avait, son irritation permanente et l’océan de son regard dans lequel plus d’une fois je me suis noyée, était trouble, d’un bleu délavé.

Et parce que j'étais trop fatiguée pour me bagarrer, je m’avançai dans l’espoir qu’il me prit dans ses bras. Il n’en fit rien, campa sur sa position, entêté. Il finit par remarquer enfin les marques à mon cou, une tristesse voila son regard. Je portai rapidement mes mains à mon cou et cachai les marques.


-         Ce n’est rien. Ça va partir.

Inconsciemment, je l’excusai. Comme si par ces mots je normalisais et banalisais la violence physique que je subissais parfois à ses côtés. 

-         Je n’ai pas le droit de te faire ça, me dit-il. Je ne veux pas être ce genre d’homme.

Mais il était trop tard, Xander devenait déjà ce genre d’homme.

« Écoute, je te propose de faire un voyage ensemble. Ça va nous faire du bien de sortir de ce pays, de voir autre chose. Ça te plaira. Laisse-moi juste organiser cela, ma kaere »

   

Dans l'avion, Xander me serre la main. Dans ses yeux, de la fierté. Il me regarde comme une maman observe son enfant faire ses premiers pas.  Je pense qu’il est heureux. Heureux de m'avoir récupérée. Heureux de me garder encore un peu près de lui.

Il veut que le monde s’ouvre à moi. Je ne lui dis pas que j’ai envie de vomir, que mon cœur s’accroche au sol alors que nous survolons Marrakech la cité rouge. Nous arrivons une heure plus tard à la Villa que nous louons. J'ai un peu peur lorsque nous prenons possession de nos clés à la réception qu'on vérifie mon âge et qu'on me demande mon lien avec l'homme qui m'accompagne. Je crois que les propriétaires, des français, s’en fichent un peu. Heureusement, Ils ne posent pas de questions, me regardant à peine. Je sens cependant leur trouble. Surtout la femme. Je croise son regard vert couleuvre qu'elle détourne rapidement en nous servant des rafraîchissements.


La villa est magnifique, nichée dans une oasis de dattiers dans le désert, les murs sont couleur ocre, des arcades, des vérandas aux milliers mosaïques. Je meure d’envie de plonger tête la première dans l’eau miroitante de la piscine. La chaleur écrasante ici est différente de celle dont je suis habituée.

 

Xander a envie de moi et me le murmure à l’oreille pendant que nous montons à notre chambre avec le groom, uniforme rouge et fez sur la tête. Je lui résiste. Je résiste à son désir bestial, à sa voracité que j'ai tant de mal à apprivoiser, qui m'engloutit, m'engloutit comme un trou noir... Et puis, je suis endolorie de partout. Tout ce que je veux c'est dormir, rattraper mes nuits blanches de révision que j'ai accumulées pour passer mes examens qu'auparavant je réussissais avec aisance, nuits blanches qui n'auraient pas existé si Xander ne s'était pas accaparé de mes après-midis après l'école, de mes weekends, de toutes les secondes et toutes les minutes de ma vie.

 

La chambre est fraîche, les draps invitants. Il suffit que je m'y glisse et me perde pour oublier. C'est sans compter sur lui qui me déshabille, à peine le groom partit. J'essaie d'esquiver ses assauts lui propose d'aller se laver, de visiter la ville et pourquoi pas nager un peu dans la piscine. 

"viens avec moi". M’ordonne-t-il.  Il me soulève et me prend sans effort dans ses bras.

-         Xander, non!

Il ne m'écoute pas, déjà à son idée. Comme d'habitude, il ajoute avec un énigmatique sourire « tu aimeras ça.. »

 

Nous prenons notre douche ensemble, il me lave les cheveux alors que je ferme les yeux malgré moi de volupté, et que je m’abandonne à la magie de ses doigts pendant que l'eau tiède coule doucement sur nous. Il me lave le dos, les seins, l'intérieur des cuisses. Il est vite excité et me le fait sentir en frottant son sexe contre moi, en m'embrassant, gourmand, exigeant de moi que je lui cède immédiatement, sans concession. Je le ferai à nouveau. Encore une fois, pour avoir du répit plus tard. Le contenter sur le moment, lui donner ce qu'il veut afin que repu, il me laisse enfin.


L’homme me colle contre la paroi en vitre de la douche, me soulève par les fesses jusqu'à sa hauteur, s'enfonce en moi en grognant son plaisir. Je m'agrippe à ses épaules, mes cuisses autour de ses hanches, et j'enfouis ma tête dans sa nuque pendant qu'il imprime à mon corps des mouvements lents et profonds. Je le reçois comme un réceptacle et nos gémissements sonores font écho dans la salle de bain.  


Parfaitement emboîtés comme ça, parfaitement en symbiose, je nous trouve pendant un instant, très beaux. Le miroir embué de la salle de bain me renvoie notre reflet cru. Xander est au bord d'exploser et arrête ses coups de reins. Il me fait descendre de lui, coupe la douche et me tend une serviette pour que je m'essuie. Il me fait comprendre qu'il veut terminer dans la chambre.


L'excitation de Xander est d'abord visuelle. J'ai fini par le savoir. J'ai fini par l'apprendre comme une parfaite geisha, une courtisane. Cette capacité d'aller au-devant de ses désirs, d'anticiper ses actions, c'est cela qui fait qu'il ne peut se passer de moi, qu'il me garde encore sous son emprise en travestissant ce besoin de contrôle en passion, car il n'a pas fini de me dévorer.

Il me traîne par les cheveux près de la baie vitrée où accroupie, je lui fais une fellation. Je sais qu'il aime l'effet des gouttes d'eau sur mon corps mouillé, la cambrure de mes fesses, le creux dans mon dos.  Il m'a appris comment faire exactement comme il aime.

-         Lèves les yeux... regarde-moi, montre-moi que tu aimes ça, m'ordonne-t-il encore.

Voulant toujours repousser les limites du plaisir, Xander vient d'ajouter la sodomie à nos nombreuses pratiques sexuelles. Je déteste ça. Même les efforts de douceur qu’il déploie ne changent rien au fait que je déteste être prise de cette façon. Cette voie-là est faite pour expulser et pas qu’on y fasse entrer des choses, surtout pas une queue. À toutes les fois qu’il est en moi, j’ai l'envie violente de l’expulser. Malgré le lubrifiant dont il me badigeonne copieusement, il se heurte à une résistance, à une fermeture, une fin de non-recevoir. Et ça le contrarie, même s'il ne veut pas le faire paraître. Ça le contrarie que j'érige encore des remparts entre nous, malgré l'argent, les cadeaux et même le plaisir que je retire de nos ébats.

-         Détends-toi. Je vais y aller doucement.

-         J'ai mal... tu me fais mal!

-         Ça va seulement faire mal quand tu te crispes. Cambre-toi...

Il glisse un oreiller sous moi pour me donner un peu de hauteur et exposer mon cul.

-         Offres-toi à moi... tu finiras par aimer ça, je te promets, bientôt tu me supplieras de te prendre uniquement comme ça.

Malgré ses promesses, Je me sens déchirée par sa chair difforme, son pénis turgescent prêt à éclater. Il dit que je suis étroite, qu'il aime ça et que je devrais aimer me faire enculée parce que les sensations de plaisir sont décuplées. Je serre les dents et les fesses en même temps avec ce dégoût de moi. Ce dégoût que peut-être, comme prévu, je finirai par prendre goût à cette transgression. Quelle tournure prendrait ma vie si je prenais goût à cette pratique avant même ma majorité? 

 

Ma tête enfouie dans l'oreiller que je mords, je gémis de douleur, noyée par les larmes. Xander ne bouge plus, un moment déstabilisé par ma souffrance, prenant la mesure de ce qu'il faut faire: continuer ou arrêter tout de suite pour me donner du répit.  Il est déjà profondément installé en moi. Ses doigts tâtonnent à la recherche de mon clitoris qu'il titille, caresse. Doucement, il pose des baisers sur mon dos, mordille ma nuque. Sans pourtant se retirer pour autant. Il ne veut pas abandonner si vite. Au contraire, il commence les va-et-vient, qui m'arrachent des cris aigus que j'étouffe dans l'oreiller. Son pelvis vient buter sur mes fesses qui claquent. Des gouttes de sueur perlent sur mon dos, une chaleur envahit mon ventre et je laisse échapper un gémissement rauque, une sorte de râle primitif. Je murmure quelque chose. Il se penche et me demande ce que j'ai dit. J'ai honte du plaisir que je retire de cet acte. Nous sommes des êtres tordus. Profondément dérangés.

  • Redis-le!
  • ja! knus mig...  C'était du danois que j'avais appris à ses côtés. Ça disait « oui! baise-moi »
  • Hore! Tu aimes ça, hein? me demande-t-il victorieux. Petite pute!

Les mains sur mes hanches, ses coups de reins sont plus précis, amples et précis, et profonds. Cambrée, offerte, je m'abandonne à lui comme citadelle conquise. Mon corps est tremblant, je suis une chair palpitante dans ses bras ou plutôt une caisse de résonance. Il glisse sa main sur ma nuque qu'il empoigne, sa sueur goutte sur mon dos, ses doigts laissent des marques rosées sur ma peau délicate. Au plus haut de son excitation, il a un cri rauque, s'arrête un instant et me mordille l'épaule. Il ne bouge plus, tout ce que je perçois c'est son souffle, son ventre qui se soulève et s'abaisse rapidement, son membre qui palpite en moi. Il est au bord de l'orgasme et doit refréner son excitation pour ne pas exploser alors que moi, croulante sous la pression, j'ai hâte qu'il termine.


« Pas tout de suite! Je n'en ai pas fini avec toi. Nous avons encore tant de frontières à traverser ensemble ». me murmura-t-il à l’oreille.

Je me retrouve dos au sol, le tapis de laine berbère me grattant le dos. Il se remet encore du lubrifiant et me pénètre à nouveau. Cette fois-là, il ne trouve aucune résistance, seulement mes chairs qui cèdent doucement et l'absorbent peu à peu. Je ne mis pas longtemps avant que je jouisse pour son grand plaisir, le corps secoué par des décharges électriques, la lumière au bout d'un long tunnel. Il me suivit dans le plaisir et laissa libre court à son orgasme et éjacula sur mon ventre. Il regarda un moment comme hébété, en reprenant son souffle, les traînées blanches qui avaient formé un lagon au creux de mon nombril et reporta son regard sur moi quand il m'entendit sangloter.


Du revers de la main, il essuie les larmes qui s'échappent de mes yeux, furtivement d'abord et ensuite qui coulent plus fort et inondent mon visage. Il est désemparé, ne sait quoi faire.

-         Chut... chut... Kaere... chérie, tu n'as pas aimé?

-         Je dois me laver. Je suis sale.

-         Non, ne dis pas ça. Rien n'est sale, je le jure.  Tu es merveilleuse mon amour.

-         Je ne suis pas ton "amour"

J'essayais de me relever, il me plaqua doucement et me força à le regarder :


-         Qu’est ce qui se passe? tu me fais quoi là?

-         Je suis fatiguée Xander, tu ne vois pas? fatiguée de ...tout ça...

Il soupira, contrarié:

-         C'est ce que je t'ai fait qui te dégoûte? je t'ai pourtant sentie réceptive à un moment donné. Si tu veux, je ne te prendrai plus de cette façon-là.

-         Tu ne comprends pas. Nous devons arrêter.

C'était bien au-delà de ce que nous avions fait, être avec lui m’apportait des douleurs, des doutes et questionnements. Être avec lui ne m'apportait plus de bien.


-         Arrêter quoi? Tu sais que c'est impossible. Je suis accro à toi, comme une drogue. Je n'ai jamais été autant attaché à quelqu'un. On se fait du bien toi et moi. Écoute, tu es fatiguée. Tes examens, le voyage et moi, qui ne te donne aucun répit en te faisant l'amour. J'ordonne un repas dans la chambre, un bon somme et ensuite Marrakech n'attend que nous pour la visiter. Et cette piscine! 

Comment me battre contre cette confiance en lui qu’il affichait?

Une autre fois, je me promis. Une autre fois, je trouverais assez de force pour le quitter pour de bon.

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Candeur et décadence