Partie 12
Ecrit par PaulBernardAMGL
Je le regardai d'un air choqué.
- Qu...quoi ? bredouillai-je.
- Elle est dans le salon, répondit-il.
Je lui jetai un regard assassin.
- Comment pouvez-vous laisser une inconnue entrer dans le salon ?!
- Elle y est entrée toute seule et quand j'ai voulu la faire sortir, elle a menacé de me faire virer.
- Les seules personnes qui peuvent te faire virer c'est nous trois. Tavio, papa et moi.
J'entrai dans la maison, Alex à mes côtés.
Elle était debout devant les photos près de la télé quand nous fîmes notre entrée dans le salon.
- Alex attends-moi dans ma chambre s'il te plaît, demandai-je à mon ami.
Elle se retourna quand elle entendit ma voix. Elle fit quelques pas dans ma direction mais garda une bonne distance entre elle et moi comme si quelque chose lui barrait le chemin.
- Assieds-toi s'il te plaît, m'intima-t-elle.
J'obéis sans trop savoir pourquoi. Je ne savais pas trop comment réagir. Devrais-je être en colère ou calme ? Triste ou contente qu'elle se décide enfin à venir nous voir ?
- Comment vas-tu Tatiana ? me demanda-t-elle en m'approchant.
- Évitons ce genre de questions parce qu'on sait tous les deux que ça ne t'intéresse pas ! répliquai-je sèchement.
Elle se redressa sur son siège. Elle se tordait nerveusement la main.
- Laisse-moi deviner, tu es atteinte d'une maladie incurable et tu vas mourir bientôt. Alors tu as décidé de revenir comme une fleur dans nos vies histoire qu'on te pardonne de nous avoir abandonné. Tu veux faire cela avant d'avoir à en répondre auprès du Très Haut c'est ça ?
Elle sourit malgré elle.
- Tu as regardé trop de films et de feuilletons, me répondit-elle.
- Figure-toi que non ! J'étais trop occupée à jouer le rôle, que tu as fui, pour regarder des films et des feuilletons.
J'étais vraiment remontée. La colère que j'avais accumulée au fil des années montait rapidement dans mes veines.
Je fixai cette femme qui se disait être ma mère. Celle qui avant même que je puisse prononcer correctement son nom, nous a laissé mon frère et moi. Cette femme qui m'a donné la vie pour ensuite me voler mon enfance.
- Je... je comprends que tu sois en colère contre moi, balbutia-t-elle la tête baissée. Mais crois-moi j'avais une bonne raison de partir...
- Ta vie était-elle menacée ?
Elle secoua la tête.
- Alors je ne vois aucune autre bonne raison d'abandonner les enfants que tu as mis au monde, rétorquai-je.
- J'étais très jeune et stupide. J'avais peur de foirer votre éducation. J'avais peur de ne pas savoir m'occuper de vous comme il faudrait. J'avais peur de ne pas être à la hauteur et...
- Et tu nous as laissés à notre sort pour qu'on se débrouille tous seuls. On l'a fait.
- Et quand je vois le genre de femme que tu es devenue, je me dis que quelque part je n'avais pas totalement tort de partir.
Je laissai échapper un rire amer.
- Ça c'est la meilleure. Le genre de femme que je suis devenue ? Très tôt, à l'heure où mes paires jouaient à la poupée, je m'occupais de la maison pour que mon père puisse aller nous ramener de quoi manger. Quand j'ai eu mes premières règles, j'ai dû me gérer toute seule grâce à internet. Mes premiers petits amis, mes premières peines de cœur... Tu as tout raté. Et aujourd'hui tu reviens comme si de rien n'était pour me dire que tu vois le genre de femmes que je suis devenue ? C'est ce que tu te dis pour ne pas te sentir coupable ? Que sais-tu de moi à part mon âge et mon prénom ? Que sais-tu de ce que j'ai vécu jusque-là ? De tous les problèmes auxquels je fais face quotidiennement pendant que tu te la coules douce quelque part. Que sais-tu de moi pour prétendre voir le genre de femmes que je suis devenue ?
Je vis des gouttes de larmes tomber sur le carrelage. Elle pleurait silencieusement, la tête toujours baissée.
- La pire des choses qu'une mère puisse faire à ses enfants c'est de les abandonner. Leur faire croire qu'ils ne méritent pas d'être aimés. Mon frère et moi avions cru cela pendant des années. Que nous n'étions pas dignes d'être aimés parce que toutes celles qui ont essayé de s'occuper de nous, toutes celles qui ont essayé de jouer ton rôle, toutes celles qui ont essayé de nous montrer de l'amour ont toutes fini par s'en aller sans explications, aucune. Mais aujourd'hui je me rends compte que c'est toi qui ne méritais pas notre amour. Ce n'était pas nous le problème, c'était ceux qui nous laissaient tomber qui avaient des problèmes. Aujourd'hui tu reviens vers nous la bouche en cœur. Qu'est-ce que tu attends de nous ? Qu'on t'accueille les bras ouverts ? Tu as été une mère porteuse, après l'accouchement ton contrat était fini donc tu as mis les voiles. Alors on n'a rien à se dire. Je ne te connais pas, et mon père m'a défendu de recevoir des inconnus à la maison. Alors je te prierai de t'en aller.
Tavio choisit ce moment pour sortir de sa chambre.
- Que se passe-t-il ici ? s'enquit-il.
Nous nous tûmes toutes les deux.
- Tatiana, qui est cette femme et pourquoi lui cries tu dessus ?
J'attendis de voir ce qu'elle allait faire ou répondre. Elle avança vers Tavio mais s'arrêta à nouveau à une bonne distance comme si elle avait peur qu'il l'agresse.
- Je suis ta mère Tavio !