Partie 21 : l'appel

Ecrit par labigsaphir

[ BLESSING ]

- Oui, Faith.

- Noon, Blessing. En es-tu certaine ?

- Mais oui ; elle ouvre grand les yeux et pose les mains sur les hanches.

- Blessing, en es-tu certaine ?

Elle se lève, s'avance vers moi et vient poser la paume de sa main sur ma figure, attend quelques secondes avant de l'enlever et reculer.

- Tu n'es pourtant pas malade, Blessing.

- Mais je ne le suis pas.

- Qu'est-ce qui t'arrive, ma chère ?

- L'amour.

- Pardon ?

- L'amour, Faith.

- En si peu de temps ?

- Comment si peu de temps ? Cela fait quelques mois que j'y pense.

- Minceeee Blessing !

- Quoi ?

- Je pensais que tu allais juste y penser.

- J'y ai pensé.

- Mais tu n'as pas fait que ça, Blessing. Et pourquoi, maintenant ?

- Plus le temps passe, Faith, plus je me sens de mieux en mieux avec Malick.

- Humm, l'aimes-tu ?

- Oui, je l'aime.

- Blessing, tu l'aimes ou es reconnaissante envers lui ?

- Je l'aime, Faith, je l'aime.

- Jusqu'à faire l'impasse sur tes convictions religieuses ?

- Comment ça faire l'impasse sur tes convictions religieuses ?

- Ne viens-tu pas de me dire que tu songes à porter le voile ?

- Faith, je vais le faire par amour.

- Par quoi ? S'exclame-t-elle en posant les mains sur la tête.

- Par Amour.

- Mais Blessing...

TOC...TOC...TOC...

- Qui est-ce encore ? Dis-je de mauvaise grâce.

- Attends-tu quelqu'un ?

- Non, personne.

- Humm, J'y vais ou pas ?

- Laisse-moi y aller.

Je me lève, vais ouvrir en secouant la tête et manque m'étouffer en reconnaissant ma cousine, Christelle.

- Wéééééééé Aloba, est-ce bien toi ? M'enquis-je en posant les mains sur la tête.

- Oui oooo Blessing.

- Christelle, mon Dieu ! Christelle ! Christelle !

- Massa, les choses qui arrivent aux autres commencent à m'arriver.

- Dieu soit loué, ma sœur.

Nous tombons l'une dans les bras de l'autre et nous étreignons avec passion. Cela fait des années que je n'ai pas vu ma cousine Christelle, elle vit au Texas aux USA. Elle est ma grande-sœur de deux années et fait toujours ses études.

- Dis donc, tu as blanchi, ma chérie.

- Tchiiip ! AU lieu de me dire bienvenue, tu me parles de ma peau.

- Esseuh je mens alors ? Ne reste pas là, pardon, rentre dans la maison.

- Eukieee vraiment tu enlèves quelqu'un du village, le village reste dans lui.

- Amen, Villageoise !

- Si si si une villageoise mbenguiste. Shouagne !

- Ha ha ha ha ha fait Faith qui nous observait durant tout ce temps.

Christelle s'approche de Faith qui porte un verre de jus à ses lèvres, je la talonne en souriant.

- Christelle, je te présente ma pote, Faith. Et Faith, voici Christelle.

- Enchantée, fait Faith en serrant la main à Christelle.

- Moi de meme.

- Blessing, tu ne m'avais pas dit que tu avais une cousine aux USA.

- Laisse seulement, est-ce que tu connais toute ma famille, Faith ?

- Ai-je prétendu le contraire, ma co'o ?

- Huhum, voilà. Dis-je en m'asseyant près de Faith.

- Aka laisse-la, you know him, men ? Intervient Christelle en souriant.

- Massa, tu ne sais pas que Blessing est la petite-sœur de la Vierge Marie ?

- Ga ga ga ga vraiment !

- Eh Dieu ! Christelle et Faith qui s'entendent, je suis foutue.

- Ha ha ha éclatent-elles de rire en chœur.

- Christelle, as-tu besoin de quelque chose ? S'enquiert Faith en se levant.

- Massa, tu ne te laisses pas faire, Faith. Réussis-je à placer en ouvrant grand les yeux.

- Je suis ici chez moi.

- Je voudrais bien du jus de goyave.

- Attends, je vais en chercher. Tu es vraiment comme ta cousine, vous aimez les jus naturels.

- Eh oui, c'est bon pour la santé.

Faith s'en va et revient quelques minutes plus tard avec un plateau et des jus. Elle fait le service et se rassied, face à nous.

- Merci ma youyou, fait Christelle en portant le verre à ses lèvres.

- Vous êtes déjà à ce niveau ?

- Sommes-nous là pour perdre le temps ? Nous ne sommes pas là pour jouer aux billes, dis donc. 

- Tu connais, ma chérie. Alors que fais-tu dans la vie, Christelle ?

- Je fais des études et compte bien faire dans la recherche, terminer par un doctorat.

- Elle est aussi une formidable femme d'affaires, Faith. Que le petit corps-là ne te trompe pas.

- Ah bon ?

- Mais oui, Faith.

- Et toi, que fais-tu dans la vie ?

- Je suis femme au foyer.

- Ah ok, je comprends.

Le téléphone se met à sonner dans son sac à main, elle le prend, le manipule, fronce le visage puis pose le verre sur la table dans un bruit mat.

- Qu'y a-t-il ? M'enquis-je en posant la main sur ma joue.

- C'est mon mari, répond-elle évasivement.

- Un problème ? Insiste Christelle.

- Non, ça va. Je vais devoir y aller, mes chéries.

- Eukeeeee, j'espère que ce n'est pas moi qui ai apporté la poisse ici ?

- Noooon, Christelle.

- Ok, Faith.

- J'espère que ce n'est pas grave, dis-je avec inquiétude.

- Non, ça ira ; elle se lève avec empressement et récupère son sac à main sur le sol près d'elle.

- Eukieeee y a-t-il feu à la maison ? Plaisantai-je en souriant.

- Non, ce n'est rien. Au revoir les filles et Christelle,

- Je suis encore là pour un moment.

- Ok.

Faith s'en va en courant, je me tourne vers Christelle qui hausse les épaules.

- Dis donc, pourquoi ne m'as-tu pas dit que tu venais ?

- Blessing, cela n'allait plus être une surprise.

- Ok, je vois. Et où loges-tu ?

- Chez ma mère, Blessing.

- Depuis quand es-tu là ?

- Deux jours.

- Et ici ?

- Tout va pour le mieux.

- La maman dit que tu fréquentes un musulman.

- Un bassa converti, Christelle, un bassa converti.

- Où est la différence ?

- Il n'est pas né musulman.

- Et alors, ça change quoi ?

- Christelle, je ne tiens pas à ce que nous nous disputions.

- Huhum.

- Comme tu es là, tu pourras m'aider.

- A faire quoi ?

Elle pose son verre sur la table et se rapproche de ladite table en s'asseyant sur le bord.

- Pourquoi ne veux-tu pas me parler de ton gars, Blessing ?

- Tu as déjà des préjugés sur lui.

- Non, tu te trompes. Je pose juste des questions, comme le ferait n'importe qui.

- Ne reste donc pas à la case « musulman », pardon.

- Ne t'inquiète pas, j'ai beaucoup d'amis musulmans.

- Ok.

- C'est mon gars depuis plus d'un et nous n'avons toujours pas fait l'amour, il me respecte beaucoup trop.

- Quoi ? Depuis plus d'un an et vous n'avez toujours pas couché ?

- Oui, le gars est sérieux.

- Waaaaaah Bana Loba Ni Kasso, les camerounais et la culture du Ndem( la déception, argot camerounais).

- Tu exagères, Christelle.

- Dans ce Cameroun, les gars comme le tien existent encore ?

- Mais oui, la preuve.

- Dans ce Cameroun, ton gars est un mougou ou alors ces spermatozoïdes ont perdu de leur vigueur ?

- Akieuuuu un gars me respecte, tu le traites de mougou ?

- Et toi-même, comment fais-tu ?

- Ah, je m'occupe l'esprit et ai commencé à faire du sport en salle.

- Massa, Blessing, ta vie n'est pas facile.

- Au moins, je suis heureuse.

- Haaaaaan, tu es quoi ?

- Je suis heureuse et très amoureuse de mon mec.

- Kabako, on dirait que c'est une autre personne qui parle.

Je me lève et me rapproche de la fenêtre, pensive. Je m'évade et repense aux discussions animées et enjouées que Malick et moi, avons très souvent. Je vous assure avoir l'impression de me réveiller, de rêver et la vie devient belle avec Malick. Il est vraiment mon oasis dans le désert.

Je me rappelle de ce jour où il m'a gentiment aidé à enlever ma garniture souillée alors que j'étais malade comme une chienne ; j'avais une forte température, des maux de tête et grelottais. Il m'a porté à la douche, m'a aidé à enlever ma robe, puis ma culotte et enfin la garniture avant de me laver comme un bébé, me rhabiller, me faire prendre un médicament, puis donner un gâteau avant de me mettre sous les draps.

A mon réveil, j'étais étonnée de constater que la salle de bain état propre ; ma culotte et la serviette hygiénique avaient disparu. A la question de savoir ce qu'il en a fait, il m'a dit avoir jeté la serviette hygiénique dans les toilettes et ma culotte était trempée dans un seau.

- Humm, Malick, un amour. Murmurai-je en secouant la tête.

- Malick, quoi ? Demande Christelle derrière-moi ; je sursaute et manque de cogner ma tête sur le mur.

- Excuse-moi, je ne voulais pas t'effrayer. Où étais-tu ?

- Je pensais à mon homme.

- Humm, tu en es vraiment amoureuse, ma parole.

- Mais oui.

- Humm Blessing, viens s'il te plait.

Elle me force à me tourner vers elle et la regarder droit dans les yeux.

- Blessing, commence-t-elle en prenant mes mains dans les siennes.

- Excuse-moi, Christelle, j'ai une faveur à te demander.

- Laquelle ?

- Aide-moi à convaincre ma mère à accepter Malick.

- Pardon ?

- J'aimerais me voiler pour Malick.

- Quoi ? S'exclame-t-elle choquée.

- Haaaaaaan Blessing ! Te...quoi ?

- Me voiler pour Malick.

- Attends, attends, attends, t'entends-tu parler ?

- Oui, Christelle, tu as bien entendu.

- Te voiler implique te marier avec Malick et mettre une croix sur tes convictions religieuses.

- Oui, je vais me convertir par amour, Christelle.

- Mon Dieu ! Blessing, ne me dis pas que tu le feras.

- Siiii par amour. As-tu déjà aimé plus que ta vie ?

- Blessing ! Aimer plus que ta vie ?

- Oui.

- Généralement l'on se converti parce qu'on a entendu l'appel.

- Je le fais parce que je le ressens dans mes tripes.

- Tu vas te convertir par amour et si l'amour finit ?

- Il ne finira pas, cricri. Malick et moi, sommes des âmes sœurs.

- Humm. Blessing ! As-tu demandé au Seigneur ?

- Mais c'est lui qui m'a suggéré de le faire.

- Comment peut-il te suggérer de le faire ? Quand l'a-t-il fait ?

- ...

- Quand as-tu prié ?

- ...

- Quand as-tu prié pour la dernière fois ?

- ...

- Blessing !

- Avec quoi, la bible ou le coran ?

- Djawalaaaah ! Tu pries déjà avec le coran !

- Mais oui, je suis déjà musulmane de cœur.

- As-tu demandé à Dieu, pas à Allah même si c'est le même ?

- J'ai plutôt demandé à Allah et pas à Dieu.

- Humm.

- Depuis que je lis le Coran et prie comme les musulmans, je suis plus apaisée et sereine concernant ma vie.

- ...

- Je n'ai jamais été aussi heureuse, Cricri et depuis que je fréquente Malick, mon côté spirituel a plutôt été élevé.

- Et il attendait que tu deviennes musulmane ?

- Mais oui, ça peut arriver, c'est l'appel du prophète.

- Si tu en es convaincue, pourquoi n'en parles-tu pas à tes parents ?

- ...

- Blessing, fais tout ce que tu veux mais ne te convertis pas.

- Vas-tu m'aider avec la maman ?

- Non, Blessing, il va falloir prendre tes responsabilités en main.

- Ce n'est pas correct, tu es en train de me lâcher.

- Non, Blessing. Je comprends maintenant pourquoi ta mère est dubitative.

- Vous parlez maintenant de ma vie privée ?

BLESSING, petit femm...