Partie 23

Ecrit par Ornelia de SOUZA

Un mouvement de sa part et je me retrouvai perché sur l'épaule de ce maudit chauffeur. Je criais totalement prise par surprise au sens littéral du terme. À quoi jouait cet homme? Il ne tint pas un instant compte de mes protestations et me porta jusqu'à la voiture. Les passants nous regardaient. Certains approchaient pour vérifier si tout allait bien car je criais à l'aide.


-C'est mon épouse! finit-il par leur dire avant de me reposer à terre contre la voiture.

-Quoi? Vous mentez...

-Taisez-vous! siffla t-il entre ses dents. Vous avez gâché la petite sortie et maintenant nous allons devoir rentrer. 

-Je vais me plaindre à mon époux ; menaçai-je

-Faites comme bon vous semble ma chère ; dit-il en m'indiquant la banquette arrière du véhicule. J'ai la conscience tranquille car je ne fais que mon travail.

-Je ne rentre pas ; fis-je en le toisant

-Ne faites pas de scène en public madame. Votre époux n'appréciera pas. 


Il avait complètement raison. À l'heure qu'il était, il était préférable pour moi de faire exactement ce que Carin ordonnait. J'effleurai la plaie sur le haut de ma jambe à travers ma robe. Je ne voulais pas revivre ça. Lui faire la surprise de le retrouver à la maison pour lui demander pardon et essayer de sauver mon couple était bien différent de créer une scène sur une place publique. Cela n'allait rien arranger. J'obtempérai donc et je pris place sur cette fameuse banquette arrière. Yves démarra aussitôt et le silence fut de marbre jusqu'à ce qu'on traverse la clôture de la propriété familiale. Je n'attendis pas qu'il descende pour m'ouvrir la portière. Je sortis de la voiture par mes propres moyens et je me dirigeai furieusement vers la bâtisse principale sans un regard en arrière. Dans le vestibule une valise posée attira mon attention. Sa propriétaire ne se trouvait pas loin d'elle.


-Irina ; murmurai-je

-Oui? fit la belle jeune femme en se retournant. Ah... C'est toi...


Elle ne m'appréciait pas et ce n'était pas un secret mais j'allais faire abstraction de ça. J'avais assez d'ennemis dans cette maison. 


-Tu as fait bon voyage? m'enquéris-je un énorme sourire accroché aux lèvres.

-Oui; répondit-elle après une certaine hésitation. Qu'est-ce qui t'est arrivé?

-Juste un petit incident; dis-je en effleurant ma joue.

-Que fais-tu donc ici ? 

-J'habite ici maintenant ; dis-je en cherchant quelque chose au sol pour me donner une certaine contenance.

-Ah bon?! s'exclama t-elle. Avec Carin?

-Non... Toute seule...

-Comment donc? s'inquiéta Irina. Pourquoi ?

-Oh il s'est passé certaines choses ; dis-je pas très sûre de vouloir développer le sujet

-Quelles choses?

-Irina! appela Ashley qui venait d'entrer dans le hall m'empêchant de répondre à la question de sa jeune sœur


Bien entendu égal à elle même, elle me toisa avant de rejoindre sa sœur.


-Le déjeuner va être servie !

-Ok, on y va! dit Irina


Toutes les deux avancèrent puis Irina s'arrêta net en voyant que je ne faisais pas de même. 


-Alors tu viens? Il y a eu un peu de retard parce que maman tenait à ce que je sois là. Je m'en excuse mais maintenant allons déjeuner.

-Non; s'interposa Ashley. Elle ne vient pas.

-Pourquoi ? demanda Irina. Tu as déjà mangé ?

-Non; répondis-je innocemment.

-Alors viens! insista Irina

-Son déjeuner lui sera porté dans sa chambre ; intervint une fois de plus Ashley

-Et pourquoi puisqu'elle est ici et qu'elle se porte bien?


Ashley se retrouva à court d'arguments. Irina me fit un geste de la main et je la suivis même si je savais que l'atmosphère serait irrespirable. J'en avais un peu marre de déjeuner et de dîner entre les quatres murs de ma chambre. Et de plus j'aurais accès à ma belle-mère. J'avancai malgré le mauvais regard qu'Ashley me lança. Je n'avais pas peur d'elle. Dans la salle à manger, ma belle-mère était déjà à sa place habituelle et Dame Esther ainsi qu'une jeune domestique étaient prêtes à servir les mets. La dame se leva aussitôt à ma vue.


-Que fais-tu ici?

-Je suis là pour le déjeuner; repondis-je le plus calmement possible.


Irina nous dévisagea toutes les deux d'un air interrogateur.


-Qu'a t-il bien pu se passer durant mon absence?

-Nous en parlerons plus tard mon enfant; répondit ma belle-mère en se rasseyant. Pour l'instant, dejeûnons pour que tu puisses te reposer par la suite. C'est le plus important.


Nous prîmes donc place chacune. Je m'installai près d'Irina le regard baissé vers mon assiette. Dame Esther nous servit l'entrée. Nous mangions dans un silence de plomb pendant cinq minutes avant qu'Irina ne se décide à le briser.


-Alors personne ne me demande comment s'est déroulé mon voyage?

-Plus tard ma fille ; intervint une fois de plus ma belle-mère. Nous n'allons pas parler devant une étrangère.

-Une étrangère ? répéta Irina. Qu'est-ce qui se passe ici? Vous allez m'en parler à la fin?

-Ce n'est pas le moment; répondit Ashley

-Alors ne la traiter pas de la sorte devant moi. Chaque être humain mérite un minimum d'égard. Elle est maintenant l'épouse de notre frère et aux dernières nouvelles vous l'appreciez toutes les deux alors arrêtez ça s'il vous plait. Sinon donnez moi une raison valable.


Un silence lourd fut la seule réponse qu'eut Irina. Quelle femme droite! Je savais qu'elle ne m'appréciait pas mais affronter sa sœur et sa mère pour qu'elles me témoignent un peu de respect, je trouvais ça louable. Je savais bien entendu que ça ne durerait pas car dès qu'elle sera mise au courant de mes frasques, elle s'en prendra aussi à moi. 

Le déjeûner portait à sa fin lorsque je me décidai à saisir cette chance.


-Belle maman; murmurai-je. J'ai besoin de vous parler.

-Ne m'appelle plus jamais ainsi! ordonna la dame sans m'adresser un seul regard. Tiens toi donc à ta place. Pourquoi es-tu si déterminé à gâcher ce repas?

-Ce n'est pas ça belle-maman mais j'ai besoin de vous parler. Je dois m'expliquer parce que rien ne s'est vraiment passé comme vous le pensez.

-Ah oui? m'interrompit Ashley. Qu'est-ce que tu peux expliquer en plus? Tu vas encore nous sortir une liste de mensonges? Maman, ce n'est pas la peine de l'écouter.

-Je ne peux que vous dire la vérité puisque...

-Oh tais-toi! s'emporta ma belle-mère qui avait d'habitude une si grande maîtrise d'elle-même. Tu es décidée à gâcher ce dîner alors tu as gagné. Je vous laisse.


Elle se leva d'un pas décidé et sortit de la pièce sous le regard interrogateur d'Irina et le sourire satisfait d'Ashley.


-Tu es fière de toi j'espère ? me lança Ashley. Je n'ai plus rien à faire ici non plus.


Elle posa ses couverts et sortit à son tour. Irina expira sûrement dépassé par la situation.


-Je suis désolée; lui dis-je. Je n'aurais jamais dû déjeuner avec vous. Je te laisse.

-Un instant! m'arrêta Irina. Dis moi ce qu'il s'est passé maintenant.

-Ce n'est pas à moi de te l'expliquer et de toutes les façons, tu ne croirais pas en ma version mais sache juste que la vérité est souvent loin de tout ce qu'on croit. 


Je quittai la table et la pièce sur ces mots. J'étais franchement à bout. Cette journée était un échec sur tout les plans. À défaut de rejoindre mon foyer, j'avais cru toucher du doigt l'opportunité de faire changer d'avis à ma belle-mère. Au lieu de tout arranger, j'allais une fois de plus me retrouver entre les quatres murs de cette chambre. Je refermai et m'adossai contre la porte épuisée. Je me laissai glissé à terre et j'enfouie mon visage dans mes deux mains. Je fus propulser en avant avec une horrible douleur dans le dos. Quelqu'un venait de pousser la porte de toutes ses forces me heurtant au passage. 


*******

(Carin)


Les battements de mon cœur s'accélérèrent. Elle était là. Je la suivais depuis ce matin. Je l'avais observer depuis ma voiture alors qu'elle avait déposé sa fille à l'école et qu'elle était revenu à la maison. Quelle belle femme! Que sa fille était belle ! 


-Elle n'est pas pour toi! entendis-je dans ma tête suivi d'un ricanement


Ses maudites voix se faisaient de plus en plus persistantes mais je savais ce que j'avais à faire. Je me devais donc de les ignorer. Je la laissai me distancer un peu avant de démarrer la voiture. Je roulai très lentement car elle était à pied et je ne voulais pas qu'elle me remarque. Quelques minutes et je la vis entrer dans un marché. Que faisait-elle donc ici? Des courses peut-être. Je la sortirai de cette vie, me promis-je. Je lui offrirai le meilleur à elle et à sa fille. Je reconnais que j'avais pu rejeter cette fille par le passé uniquement parce que cette sorcière de Mélaine m'avait monté la tête mais j'allais me rattraper. J'allais tout arranger aujourd'hui. Ma vie aussi allait changer. Si elle me pardonnait et acceptait de m'avoir à nouveau dans sa vie, je ferais de gros efforts. Il s'agissait là d'une promesse que je me faisais à moi-même et que je lui ferai à elle. 

Je descendis de la voiture le cœur battant. Je traversai rapidement la voiture et j'entrai dans le marché. C'était bien entendu un endroit bruyant, odorant et bondé mais je fendis la foule le regard fixé sur ma cible. Elle tourna dans une ruelle et j'hâtai le pas de peur de la perdre. Au moment où je tentai de m'engager aussi dans cette ruelle, une main attrapa mon bras et me ramena en arrière. 


-Qu'est-ce que vous faites ici? me lança une voix que je connaissais assez bien

-Ce ne sont pas vos affaires ; répondis-je à la sœur Mina

-Oh que si! Je vous avais bien vu devant la maison dans votre voiture comme un serpent. Vous la surveilliez n'est-ce pas ? Vous tentez de l'agresser à nouveau?

-De quoi vous parlez? dis-je en jetant un coup d'œil à la ruelle par peur de perdre Inès de vue.


Je ne la voyais plus. Merde! 


-Que me voulez-vous? m'emportai-je. Lâchez moi tout de suite!

-Oh que non! Je ne vais pas vous lâcher. Je connais vos intentions envers Inès et vous allez m'expliquer tout de suite ce que vous faites non loin de sa boutique.

-Quoi? m'etonnai-je. Inès travaille ici? Comment peut-elle travailler au marché ?

-C'est ce qu'elle faisait avant que vous ne la rencontriez ; répondit la nonne; et c'est ce qu'elle continuera à faire. C'est une femme travailleuse et elle gagnera sa vie à l'aide de ses dix doigts et à la sueur de son front. Pas comme votre effrontée d'épouse.

-Ces mots là ne sont pas bien jolies dans la bouche d'une servante de Dieu; avancai-je.

-Avec les gens de votre espèce, il vaut mieux être crus au risque d'être mal compris. Je sais que Mélaine et vous avez comploté pour ôter la vie à l'enfant qu'elle portait. Tout ça pour être ensemble. 

-Faites attention à ce que vous avancez! 

-Je n'avance que ce que je sais docteur et je sais aussi pourquoi vous êtes là. Vous avez découvert le démon que vous avez épousé et maintenant vous pensez retourner vers Inès sans problème après tout le mal que vous lui avez fait? Detrompez-vous docteur! La vie n'est pas aussi facile que vous le pensez. Inès sait tout de vous. Si vous l'approchez, elle criera au meurtre. Vous êtes la personne qu'elle déteste le plus au monde et...

-Vous mentez! la coupai-je. Je n'ai jamais eu de mauvaises intentions envers elle et je compte m'expliquer avec elle. 

-Ah oui? reprit la sœur un sourire au coin des lèvres. Aucune mauvaise intention et pourtant vous avez abusé d'elle. Vous l'avez battue.


Je détournai mon regard. Inès lui avait raconté bien plus de détails que ce que je pensais.


-Écoutez moi bien docteur! continua la sœur. Vous allez remonter tranquillement dans votre voiture et vous allez retournez d'où vous venez parce que si vous l'approchez, je l'accompagnerai moi-même au poste de police pour porter plainte. Oui, je sais que vous êtes ce genre d'homme qui s'amuse à blesser les jeunes femmes mais Inès n'est pas la bonne proie. Pesez bien le pour et le contre. Que choisissez-vous? Ruiner votre réputation et celle de votre famille ou laisser ma petite Inès tranquille?


Je respirais bruyamment sans trop savoir si le responsable était la chaleur étouffante du marché ou la pression que cette bonne sœur me foutait. Inès tenait t-elle vraiment à ce que je reste loin d'elle?


-Réfléchissez rapidement docteur parce que si Inès vous voit, je ne pourrai pas l'empêcher de faire de vous ce qu'elle désire. N'oubliez pas que vous lui avez enlever un être cher.

-Je n'ai rien fait! murmurai-je assailli une fois de plus par les voix dans ma tête


Elles m'ordonnaient de repousser cette servante de Dieu et de courir vers cette femme qui ne m'aimait pas. Elles avaient tort je le savais. Elles avaient tort. Amélie m'avait conseillé de toujours faire le contraire de ce qu'elles m'ordonnaient alors je reculai et je courus loin de la nonne. Je retrouvai rapidement le confort du siège de ma voiture et je démarrai sans demander mon reste.

Merde, me dis-je en donnant des coups contre le volant. Cette bonne sœur savait que j'avais épousé Mélaine alors Inès aussi devait être au courant. Elle devait me haïr maintenant comme le disait la sœur Mina. Il n'y avait aucune chance pour qu'elle me pardonne. Et la seule responsable de cette situation était cette manipulatrice de Mélaine. Elle était la cause de toute ma souffrance.


-Tu dois la tuer! me suggéra une voix dans ma tête.


Je freinai au beau milieu de la route totalement sous le choc. C'était la première fois que ces voix me suggéraient une telle chose. Tuer quelqu'un...


-Elle le mérite! me relança une autre voix.


Je démarrai en trombe avec une destination et une cible bien en tête: Mélaine. Je conduisais tel un automate jusqu'à ma maison familiale. Le portier m'ouvrit effrayé par mes nerveux coups de klaxons. Je garai devant la bâtisse principale et je me fis accueillir comme à son habitude par dame Esther. Voyant rouge comme un taureau guidé par un tissu rouge, je grimpai les escaliers deux à deux sans prêter attention aux salutations de la gouvernante. Une fois devant la chambre que j'avais attribué à mon épouse, je poussai la porte le plus violemment possible que je pouvais mais mon mouvement fut néanmoins ralenti. En entrant dans la pièce, je compris que Mélaine était adossé contre la porte. Je la soulevai porté par des pulsions incontrôlables et je la jetai sur le lit alors qu'elle me suppliait. Je retournai vers la porte que je verroullai avant de revenir vers elle.


-Pitié ! me supplia t-elle. Qu'ai-je fait ? Il t'a parlé c'est cela ? Ce n'est pas ce que tu crois Carin. Je ne tentais pas de m'échapper. Je voulais te rejoindre.


De quoi diable parlait-elle?


-De quoi tu parles idiote? questionnai-je avant de comprendre tout seul le monologue qu'elle venait de m'offrir. Tu as donc tenté d'échapper à Yves ce matin? Sale trainée, je vais t'apprendre à respecter mes ordres.


Je retirai d'un geste rapide la ceinture qui retenait mon pantalon et j'enroulai la sangle autour de ma main. Le son de l'objet qui fendit l'air avant de s'abattre sur Mélaine était pleinement jouissif. 


-Aïïïïïïe! hurla t-elle de toutes ses forces me motivant encore plus.


Un coup puis deux coups de ceinture et elle se retourna en tentant de prendre la fuite. Les coups plurent sur son dos la paralysant entièrement. Au bout d'un moment, je n'entendais plus ses cris, ni ses appels à l'aide. Je voyais juste le tissu de sa robe se déchirer et laisser place à un dos que je marquais déjà. Elle se dandinait d'une manière fortement aguicheuse alors je m'arrêtai car je me rendis compte que mon membre était totalement dressé. Cette situation m'avait excité et tendu au maximum. Ah combien je pouvais aimer la souffrance d'une femme. Heureusement pour moi son plateau repas de la veille était encore sur sa table de chevet. Je saisis le couteau de table posé dessus dont la manche était dirigée vers moi comme un appel. Je ne me fis pas prier. J'obligeai ensuite ma soi-disante épouse à me faire face et dès qu'elle aperçut le couteau, ses cris redoublèrent d'intensité. Je posai ma main sur sa bouche espérant étouffer un peu ses hurlements mais elle me mordit. Je la giflai en retour avant de remonter sa robe pour découvrir le joli bandage fait par dame Esther. Je le carressai un instant puis je l'arrachai sans prévenir. La plaie que j'avais moi-même n'avait pas encore cicatrisé. Tant mieux, me dis-je avant d'enfoncer le couteau à l'intérieur de la plaie. Le sang gicla et je profitai du désarroi de Mélaine pour descendre sa culotte et la pénétrer. Au moment même où je sentis le paradis, des coups furieux retentirent contre la porte. Une voix familière hurla le prénom de Mélaine. C'était ma jeune sœur Irina. 


-Mélaine, que se passe t-il??? criait ma sœur à travers la porte.


Entre coups et amour