Partie 24 : le ver est dans la pomme
Ecrit par labigsaphir
[ BLESSING ]
- Blessing, je sais ne pas être en odeur de sainteté chez toi, commence mon père.
- Huhum, fais-je en opinant de la tête.
- Que tu ais pensé à venir me présenter ton fiancé et qu’il soit venu, je trouve son attitude correcte et vous en remercie.
- Ce n’est rien, papa, fait Malick en se redressant.
- Ton oncle et moi, apprécions le geste mais ne saurons vraiment ou franchement accepter puisque nous ne le connaissons pas. Raison pour laquelle, nous souhaitons avoir la possibilité de le côtoyer, durant une année. Tu penses que je me fous de tes frères et toi, au vu de notre relation chaotique, j’aurais pu dire avec raison mais c’est faux.
- Humm, fais-je en me tournant vers Malick et posant ma main sur la sienne.
- Quoi qu’il ait pu se passer entre nous, je ne pourrai voir un de mes enfants aller se jeter dans un piège et laisser faire.
- Papa, cela fera bientôt deux ans que nous nous fréquentons.
- Je vois…Ok.
- Nous pensons et voulons nous marier dans quelques mois.
- Mon fils,
- Oui papa, répond Malick.
- Tu es surement là pour me demander la main de ma fille et demander la liste.
- C’est vrai.
- Cela aurait pu être possible si j’avais pu apprendre à te connaitre et juger si tu es bien pour ma fille.
- Huhum.
- Mais je ne te connais pas malgré tout ce qu’elle pourra dire.
- C’est aussi vrai. Je reconnais que c’était une erreur d’attendre aussi longtemps avant de venir me présenter.
- Voilà qui est bien dit, appuie mon oncle en secouant la tête.
- Après concertation avec mon frère, nous ne voulons rien et aimerions que vous attendiez un an.
- Non, c’est impossible !
- Pourquoi ? Insiste mon père.
- Cela fait deux ans que nous nous connaissons et fréquentons. Je n’ai pas besoin de dix ans pour savoir que c’est lui que je vais épouser.
- Blessing,
- Non, papa. C’est décidé, dis-je sur un ton abrupt.
- Blessing, tu devrais peut-etre laisser ton père continuer. Me suggère Malick en posant sa main sur mon épaule.
- Non, c’est tout vu. M’énervai-je en me dégageant.
- Je comprends ton ressentiment, Blesing, je comprends. Si tu ne peux vraiment attendre, vas-y. Je n’attends rien de toi.
- …
- Navré que cela se déroule ainsi, mon fils. Nous ne voulons rien et espérons que tout ira pour le mieux pour vous.
- J’ai apporté des bouteilles de vin, elles sont dans mon véhicule. Je les chercher, donnez-moi une minute ; il se lève.
- Qu’en penses-tu ? Demande mon géniteur à son frère.
- Pourquoi pas ?
- Va chercher ; j’aurai été tonnée qu’il le refuse. J’ai la rage qu’il puisse avoir un copeck de moi.
Pendant que Malick quitte la pièce, je me tourne et regarde résolument du côté opposé où se trouvent mon géniteur et son frère.
- Blessing, appelle-t-il doucement.
- …
- Je sais que tu me détestes. Je représente le diable pour toi mais crois-moi, tout comme toi, je regrette que tout ce soit passé ainsi.
- …
- J’espère que Malick et toi, serez heureux.
- …
Malick revient avec le paquet qu’il m’a montré et un autre de six bouteilles. J’ouvre grand les yeux, il fait semblant de ne pas le remarquer et pose tout sur la table-basses. Les deux autres hommes semblent satisfaits et se lève pour mieux contempler les bouteilles de vin : le respect n’est vraiment qu’un lointain souvenir dans cette famille.
UNE DEMI-HEURE PLUS TARD…
- Pourquoi l’as-tu fait ?
- Je ne comprends pas, fait-il en se tournant vers moi alors que nous sommes arrêtés à un feu.
- Pourquoi as-tu gâté mon père et son fainéant de frère ?
- Il le fallait.
- Pourquoi tiens-tu à acheter leur amour ou leur affection ?
- Je n’achète rien du tout, Blessing, rien !
- Alors, pourquoi toutes ces bouteilles ? Si tu ne sais quoi faire avec cet argent, donne-le-moi et je construirai une maison pour ma mère.
- Blessing, fait-il doucement et posant la main sur ma cuisse.
- Non ! Où était-il lorsque ma mère, mes frères et moi, mourrions de faim ?
- Blessing, essaie-t-il à nouveau en embrayant.
- Non, Malick, où était-il ? Où était-il ? Criai-je avant d’exploser en sanglots.
- Blessing, ma chérie.
- Non, je veux juste rentrer.
- Je comprends ce que tu ressens mais…
- Non, ramène-moi chez moi.
Nous prenons le chemin de mon domicile, j’essuie les larmes qui coulent en silence sur mes joues. La douleur est si forte que j’en deviens aphone. Seul le tremblement frénétique de mes mains, est le signe de la bataille qui fait rage en moi. Mon père a encore réussi à me toucher et me blesser.
A peine sommes-nous arrivés que je descends et rentre dans la maison en courant, m’enfermer dans les toilettes.
- Chéri, fait-il derrière la porte.
- …
- Désolé, mon but n’était pas de te blesser.
- …
- Blessing, c’est ton père. Du fait qu’il ait doté ta mère même s’il a démissionné de ses fonctions de père et mari, sa famille et lui, ont des droits sur vous.
- Laisse-moi, je veux rester seule.
- Ok.
DEUX SEMAINES PLUS TARD…
Depuis l’épisode avec mon père, Malick et moi, n’en avons plus jamais parlé. Et avec ma mère, c’est le désert total. Je trouve juste la paix et le repos dans la prière et à ce sujet,
TOC…TOC…TOC….
- Oui, entrez ! Fais-je en me redressant.
- Attends, je vais t’aider à bien mettre le voile. Dit-elle aussitôt en rentrant dans la chambre.
- Merci, Lubna.
- Voilà qui est mieux : elle recule pour admirer le résultat.
- Merci, ma chère.
- Il n’y a pas de quoi, tu rends mon frère heureux.
- Humm.
Elle pose son sac sur la coiffeuse, l’ouvre et en sort une palette de maquillage. Je regarde sans comprendre jusqu’à ce qu’elle se tourne vers moi.
- Non, Lubna, ton frère n’aime pas.
- Tu n’es pas une prisonnière à ce que je sache.
- Non, mais il n’aime pas me voir maquillée.
- Il t’a connue maquillée, à ce que je sache.
Elle s’avance vers moi, tenant un pinceau et la palette de maquillage. Je repousse ses mains et m’échappe en piaffant ; elle pose le tout sur la coiffeuse et se tourne vers moi.
- Désolée, Blessing.
- …
- Il est vrai que mon frère est jaloux.
- Non, possessif, Lubna.
- Oui, c’est vrai ; elle se déplace et s’assied sur le tabouret non-loin.
- Huhum.
- Il est possessif mais il t’aime. De plus, tu n’as vraiment pas besoin de te maquiller, Blessing. Tu n’as pas encore 22 ans et pas d’imperfection à cacher.
- Huhum.
- Pense aussi à toi.
- Non, je respecte les vœux de mon homme.
- Ok, sourit-elle en se levant et venant prendre mes mains dans les siennes.
- …
- Contrairement à son ex-femme, tu lui seras soumise.
- Je l’aime, Lubna. J’aime ton frère et tiens à le rendre heureux.
- …
- Je déplacerais des montagnes pour lui, tu sais.
- C’est ce que je comprends.
- Avec lui, je me sens exister en tant que femme et mère.
- Je suis heureuse que mon frère ait enfin trouvé la bonne.
- Merci. C’est dommage que les autres ne puissent être là.
- Ce n’est pas le plus important, Blessing.
- Je n’aimerai pas qu’elles croient que je les snobe.
- Blessing, tu…
TOC…TOC…TOC…
Lubna et moi, nous regardons puis je me tourne vers la porte qui s’ouvre, livrant le passage à Modeste.
- Bonjour la big, fait-il en souriant.
- Bonjour frérot ; il parait gêné.
- Je vais y aller, dit Lubna en récupérant son sac à main.
- Merci d’être passée et pour ton soutien.
- De rien, ma BS.
Modeste marque un arrêt devant la coiffeuse, pensif puis dégaine son portable, compose un numéro, lance l’appel et me tend ledit mobile sans mot dire.
- Qui est-ce ?
- Prends seulement, la big.
Il se lève, va vers la fenêtre pendant que je rapproche le combiné de mon oreille et écoute.
- Allo, fait une voix.
- A qui ai-je honneur ?
- Blessing, c’est moi, Christelle.
- Ah, ok. Excuse-moi, je n’ai pas reconnu ta voix.
- Pas grave.
- Je discutais avec Modeste lorsqu’il m’a accidentellement avoué que c’est aujourd’hui que tu le faisais.
- Je vois, marmonnai-je en me levant à mon tour et arpentant la pièce.
- Blessing, je ne suis pas là pour te juger et ne souhaiterai jamais avoir à le faire.
- Encore heureuse, parvins-je à lâcher du bout des lèvres.
- Je ne m’érige pas en moralisatrice ni en parangon de la vertu mais Blessing, ne le fais pas, je t’en supplie.
- Je l’aime, Christelle.
- Je sais que tu l’aimes mais tu n’es pas obligée. La force de ton amour ne se résume pas à cet acte.
- Christelle, je dois y aller.
- Blessing,
- J’y vais, bonne journée.
- Blessing ! Blessing !
Je raccroche et tends le téléphone à mon frère, les yeux rouges et la main tremblante.
- Blessing, je ne voulais pas, commence-t-il.
- Comment as-tu osé ? Rugis-je en serrant les points.
- Elle m’a appelé et cela m’a échappé.
- Maman est-elle au courant ?
- Non, tu le feras toi-même.
- Non, cela ne vaut pas le coup.
- Tu le dois bien à maman, Blessing.
- …
- Imagine qu’elle l’apprenne par une autre personne.
- Elle sait que je vais le faire.
- Il y a fossé entre imaginer et y être confronté.
Je soupire, me dirige vers le lit et m’assieds, pose mon regard sur la coiffeuse et sursaute en constatant que mon frère est maintenant près de moi, et me tend son téléphone.
- Modeste,
- Allo, fait une voix ; je la reconnais rapidement.
- Oui, maman. Dis-je en prenant le combiné, stressée.
- Ton frère dit que tu voudrais me parler.
- Oui, maman.
- Je t’écoute, Blessing.
- Comment va féfé ?
- Bien.
- Et les autres ?
- Bien.
- …
- Blessing,
- …
- Blessing,
- …
- Que se passe-t-il ? Un problème avec Malick ? Vous êtes-vous finalement séparés ?
- Maman !
- Puisque tu ne dis rien, j’ai présumé.
- Maman, je vais me convertir aujourd’hui.
- Quoi ?
- Je vais me convertir, maman.
- Blessing, ton père et moi, ne sommes pas d’accord.
- Et depuis quand, vous entendez-vous ?
- Au-delà de nos différends, nous sommes encore tes parents !
- J’y vais ! Il s’agit de mon bonheur, maman.
- Comment voir mon enfant se précipiter le haut d’une falaise et ne rien dire ?
- Je suis déjà majeure.
- Mais ne sais pratiquement rien de la vie.
- Bonne journée, maman.
- Ma fille, ne fait pas ça.
- Ok, c’est compris.
Je raccroche, me tiens la tête des mains. Je suis en proie à de vives émotions et ne peux m’empêcher de douter mais la figure de Malick et son amour, me rassurent.
- Merci d’être passé, Modeste.
- Pas besoin de me remercier, je suis ton frère.
- …
- Je vais t’accompagner à la mosquée même si je n’apprécie pas.
- Modeste,
- Je me tairai mais serais là pour que tu ne sois pas seule.
- Ok.
Je me lève, récupère mon sac sur la table, ajuste mon voile et quitte la chambre, talonnée de Modeste qui ne pipe pas un mot. J’avoue que j’aurai aimé avoir ma mère près de moi en ce jour mais…
UNE HEURE PLUS TARD…
Nous sortons de la mosquée sous les youyous des femmes de la famille de Malick, je suis aux anges. Mon homme me tient la main et me regarde comme si j’étais la huitième merveille du monde. Il se penche et murmure à mon oreille.
- Tu me combles, bébé. Je suis l’homme le plus heureux du monde.
- Et moi, la femme la plus complète et heureuse.
- Tu es mon mieux et mon choix le meilleur.
- Toi aussi. Je t’aime.
- Eukiee fait Lubna, nous sommes encore là.
- Félicitation, mon frère, se fend Moktar en lui serrant la main.