Partie 23 : un cheval de Troie

Ecrit par labigsaphir

[ BLESSING ]

- C’est comment, Blessing ?

- Comment ça ?

- Ton téléphone sonne sans discontinuité depuis dix minutes.

- Oh ! Laisse ça comme ça.

- Mais pourquoi tu ne décroches pas ?

- Je vais décrocher après.

- Après comment ?

- Marimar, quel problème as-tu ?

- Aucun. Pourquoi ?

- Tchiiiiip !

Je me lève et vais décrocher le téléphone qui sonne dans la chambre, c’est surement mon homme.

UNE DIZAINE DE MINUTES PLUS TARD…

- Ok. Bonne journée, bébé…Je t’aime, moi aussi…Je vais faire comme tu as dit…Ok, ok…C’est compris…Bisous.

Je raccroche, souriante et rentre dans le séjour où je trouve Marimar en train de feuilleter un magazine. Elle le dépose en me sentant arriver, prend le portable sur la table et me le tend sans mot dire.

- Quoi ?

- Ton portable.

- Qu’a-t-il ?

- Tu as 30 appels en absence.

- Je rappellerais la personne plus tard, fais-je en m’asseyant lourdement sur le canapé.

- Savoir qui t’appelle, ne t’intéresse pas ?

- Marimar, c’est quoi ? As-tu un problème particulier ?

- Non, mais…

- Mais quoi ? Voudrais-tu déjà diriger ma vie ?

- Non, mais c’est ta mère, Blessing ! Il s’agit de ta mère.

- Et alors ?

- C’est ta mère !

- L’aimes-tu pus que moi ?

- Non, mais c’est ta mère !

- Marimar, va voir ailleurs si j’y suis !

- Que t’arrive-t-il ?

- Marimar, va-t’en !

- Blessing, est-ce à moi que tu t’adresses ?

- Oui !

- Après tout ce que nous avons traversé ?

- Et alors ? Te suis-je redevable à vie ?

- Blessing, qu’est-ce qui t’arrive ? C’est après plus d’un avec avec Malick à vivre dans l’opulence que tu changes ?

- Blessing, que t’arrive-t-il ? J’ai du mal à te reconnaitre.

Elle se lève, arpente la pièce, puis récupère son sac à mains sur la table avant de revenir vers moi.

- Blessing, le chemin que tu es à prendre n’est pas le bon.

- Quel chemin ? Chacun construit son bonheur comme il l’entend.

- Humm, Blessing. Crois-tu pouvoir être heureuse toute seule ? A quoi te serviront toutes les richesses si tu n’as personne autour de toi ?

- …

- J’ai l’impression que tu fais intentionnellement le vide autour de toi.

- Marimar, s’il te plait !

- C’est bon, je m’en vais ! Mais Blessing, dis-toi que tu le regretteras.

- Amen ! Sainte Marimar a parlé.

Elle se tourne, martèle le sol de ses talons et quitte ma maison en piaffant.

- Je m’en fous ! Criai-je à peine la porte fermée.

Je me laisse aller sur le sofa, prends le mobile sur la table et soupire constatant les appels en absence de ma mère.

- Allo, maman.

- Oui, Blessing ; je mets le haut-parleur.

- Tu as essayé de me joindre.

- Mais oui, Blessing. Comment vas-tu, ma fille ?

- Bien, merci maman. Et vous ?

- Tout va, ici.

- …

- Dis-moi,

- Oui, maman.

- Te dois-je une cola ?

- Non. Pourquoi ?

- Depuis la dernière fois, j’ai l’impression que tu as changé.

- …

- T’ai-je offensé ?

- Non.

- Ai-je eu à te faire du mal sans m’en rendre compte ?

- Non.

- Ce jour-là avec Christelle et sa mère, t’avons-nous offensée ?

- Non.

- Alors, que se passe-t-il ?

- Rien, maman.

- Pourquoi ne m’appelles-tu plus comme avant ?

- Le travail, maman.

- Tu travaillais aussi avant, Blessing.

- C’est vrai, maman.

- Alors que se passe-t-il ?

- Rien, tout va pour le mieux.

- Blessing, fais-tu la tête parce que je t’ai demandé d’attendre concernant le possible mariage avec Malick ?

- …

- Blessing, est-ce pour cette raison que tu as pris tes distances ?

- …

- Je t’aime, ma fille et tu le sais. Seulement, je ne suis pas convaincue du bien-fondé de ce mariage.

- Pourquoi ?

- Je ne le connais pas.

- Maman, tu ne l’as vu qu’une fois. Comment pourrais-tu te faire une idée de sa personne ? 

- Blessing, je ne sais pas comment l’expliquer mais patiente encore un peu.

- Bientôt deux ans que je patiente, maman.

- Blessing,

- Que lui reprochez-vous au juste ? Il a été avec moi dans les moments difficiles, a participé à mon élévation et m’a toujours tirée vers le haut. Aujourd’hui, je travaille à cause de lui et peux parfaitement nourrir ma fille.

- Est-ce tout ce qui fait le bonheur d’une femme, d’une mère ou d’un couple ?

- Maman, je l’aime.

- N’aurais-tu pas pu y arriver toute seule ?

- Pourquoi as-tu accepté son argent tout ce temps ?

- Ma fille, je ne te demande pas de t’en séparer mais d’être patiente.

- Jusqu’à quand ?

- Ma fille, il faut attendre ou voir ton père.

- Nous irons voir papa le week-end prochain.

- Humm.

- Maman, je ne reculerai pas.

- Pense à ta fille.

- C’est justement parce que je ne pense pas seulement à moi que je voudrais me marier.

- Vas-tu te marier par reconnaissance ou par amour ?

- Par amour.

- En es-tu certaine ?

- Oui

- Blessing, le mariage n’est pas qu’une union du corps mais aussi de l’esprit.

- Je sais.

- Aujourd’hui, tu es prête à aller te présenter à ton père malgré le fait qu’il nous ait abandonnés ?

- C’est mon père, maman.

- Humm.

- Maman, il nous a abandonnés, je ne l’ai jamais oublié. Seulement, tu as été dotée avant que nous ne venions au monde et pour respecter la tradition, je suis obligée d’aller lui demander la permission de me marier.

- Dieu, j’ai souffert avec mes enfants toute seule et maintenant que l’un d’eux doit sortir la tête de l’eau, il faudrait demander l’autorisation au papa.

- Maman, je n’ai pas le choix.

- Humm, Blessing, je suis ta mère et regarde tout ceci mais de loin. Je ne suis pas convaincue du bien-fondé de de possible mariage et du fait que tu ailles voir ton père.

- …

- Je ne te voudrais jamais du mal et de la même façon, te dirais toujours ce que je pense. Tu as aujourd’hui 22 ans et souhaite te marier, tu es majeure et peux donc décider pour ton avenir.

- …

- Blessing, que le Seigneur te protège mais je n’approuve pas.

- …

- ET si c’est la raison pour laquelle tu appelles moins pour prendre les nouvelles de ta fille, je respecte ta décision.

- Maman,

- Non, Blessing. J’ai compris et tenais juste à donner le fond de ma pensée.

- …

- Bonne journée.

Elle raccroche, me laissant pantoise. Je dépose le téléphone sur le sofa, avise le tapis de prières plus loin et décide de me rapprocher d’Allah. A l’intérieur de moi, il y a un tel tumulte que je pose la main sur le cœur et souris en pensant à Malick, l’homme de mes rêves. Je prends le tapis de prière et me mets à prier. A la fin, je prends le coran afin de méditer.

DEUX JOURS PLUS TARD…

- Oui, asso, les deux tas de tomates.

- Attends, je t’emballe ça tout de suite.

- Merci mama.

- De rien oooo. Quand on a la chance d’avoir une cliente comme toi, on la reçoit bien.

- N’est-ce pas, mama ?

- Tiens.

Elle me tend le plastique contenant la tomate et en retour, je lui tends un billet qu’elle prend et glisse prestement dans son pagne. Je déambule dans le marché et m’arrête une minute devant la marchande de djindja. J’hésite à m’asseoir et boire, car Malick a formellement interdit que je le fasse encore. Selon lui, une femme de mon rang, sa future femme ne devrait non seulement plus manger en pleine route mais aussi au marché. Je cogite durant quelques minutes puis décide d’acheter les beignets et deux bouteilles de jus.

Une heure plus tard, après avoir mangé, je m’affale sur le canapé et m’en dors en pestant. Depuis quelques jours, je souffre de migraines intenses et ai du mal à travailler raison pour laquelle, j’ai pris une semaine de vacances pour souffler au boulot. Le mobile se met à vibrer sur la table, je me redresse, le prends et décroche sans regarder l’identité de l’appelant.

- Oui, allo.

- Bonjour, ma BS. C’est Dounia.

- Ah oui, Dounia. Comment vas-tu ?

- Bien, merci. Tu as disparu, que se passe-t-il ?

- Rien de spécial. Le travail et la maladie.

- Haaaan, je comprends. Te prenais plus mes appels, j’ai cru que nous avions un souci.

- Mais non, non.

- J’ai discuté avec Myriam et les autres, l’on dirait que nous évites.

- Non, comment ?

- Comme je te dis là ; cette discussion commence vraiment à m’énerver.

- Comment as-tu pu changer de numéro sans nous le dire ? Pourquoi ne nous as-tu pas communiqué ton nouveau numéro ?

- Dounia, j’ai été malade en plus d’être occupée.

- Blessing, t’a-t-on fait quelque chose ?

- Non. Pourquoi ?

- Tu t’éloignes de nous mais pactises avec tes belles-sœurs ?

- Ce sont mes belles-sœurs, Dounia. Que me reprochez-vous au juste ?

- Crois-tu qu’elles t’aimeront comme elles aiment leurs frères ?

- Peu importe, nous sommes en bons termes, c’est le plus important.

- Blessing, j’espère que le mariage avec tes belles-sœurs, sera éternel.

- Amen !

- Humm…Blessing, je voulais te demander de nous retrouver chez Myriam.

- Je n’ai pas de temps.

TOC…TOC…TOC…

- Attends, ne quitte pas, s’il te plait.

- Qu’y a-t-il ?

- L’on toque à ma porte.

- Ok.

Je pose le téléphone sur la table et me dirige vers la porte, je tire sur le loquet et fais face à Malick, nerveux.

- Que se passe-t-il ?

- J’ai tiré sur le loquet, oubliant que tu devais arriver.

- Humm. Où étais-tu ?

- Au téléphone avec qui ?

- Dounia.

Il pose les paquets qu’il porte sur la table de même que son attaché-case, se tourne vers moi en agitant le doigt.

- Que t’avais-je dit ? Rugit-il les yeux rouges.

- Attends, ne gronde pas, s’il te plait.

Je cous vers la table, récupère le portable, m’excuse et raccroche rapidement.

- Blessing, que t’avais-je dit ?

- De me méfier de Dounia et des femmes de mes frères.

- Et qu’as-tu fait ?

- C’est elle qui m’a appelée.

- Comment ça, elle t’a appelée ?

- C’est elle qui m’a appelée, dis-je en prenant le mobile sur la table pour le lui montrer.

- Assez !

- Combien de fois t’ai-je dit que les femmes de mes frères sont des commères ?

- Plusieurs fois.

- Tu as été témoin des bagarres crées par ces femmes lors des dernières réunions de famille.

- C’est vrai.

- Alors, que ne comprends-tu pas ?

- Rappelle-t-en, des rumeurs concernant notre famille, couraient déjà.

- …

- Il est hors de question que notre bonheur soit pollué par la bêtise humaine.

- J’ai compris, bébé. Seulement, elles pensent que je les évite.

- Et alors ?

- Bébé, ce n’est pas bien. Nous formons toutes une famille.

- Aimes-tu ma famille plus que moi ?

- Non !

- Comment ont-elles eu ton numéro de téléphone ?

- Je n’en sais rien.

- Humm.

Il va s’asseoir sur le canapé, pose les clés de la voiture sur la table.

- Franchement, j’aurai aimé que nous rentrions chez nous. Commence-t-il en secouant la tête.

- Je préfère rester chez moi jusqu’au mariage.

- Si tu le dis. Pour l’instant, j’ai faim.

BLESSING, petit femm...