Partie 28 : les réalités

Ecrit par labigsaphir

« Jen est une malheureuse que tu as adoptée, je ne sais où. C'est une malheureuse à qui, tu t'es proposée de donner un peu de bonheur. Elle n'est ni une Stern ni une Croft, elle n'a donc pas le droit de jouir des privilèges liés à ces deux patronymes. »

Ces mots reviennent et tournent en boucle, telle une ritournelle dans ma tête. J'ai encore du mal à croire, du mal à comprendre et à intégrer que je suis une enfant adoptée. Pourquoi me l'a-t-on caché aussi longtemps ? Est-ce pour cela que je suis dans cette mouise ? Est-ce le fait de ne pas partager le même code génétique que mes frères, qui me vaut attend de soucis ? Qu'ai-je vraiment fait pour mériter tout cela ? Qui sont mes parents ? Qui suis-je vraiment et quelle est vraiment ma place dans cette famille, si j'en ai vraiment une ?

Je sursaute en sentant vibrer le portable dans la poche de mon Pantanlon-jean, me soulève et le sors de ma poche, c'est ma....Non, c'est madame Croft, il va falloir que je m'habitue à l'appeler ainsi, elle n'est pas ma mère mais une nourrice. Je n'ai finalement pas envie de lui parler. Je n'ai aucune envie de leur parler pour l'instant. En fait, j'aurais souhaité oublier toute cette affaire mais les 48 heures passées en garde à vue, me ramènent sans cesse à la réalité, je n'ai pas le droit de quitter la ville.

Je termine mon chocolat chaud et me dirige d'un pas décidé vers le comptoir, paie et fais un tour rapide aux toilettes. Je ne suis vraiment pas agréable à regarder, j'ai les yeux gonflés à force de pleurer et le teint blafard. Je me rince le visage et me nettoie rapidement, il faut réfléchir à la conduite à tenir assez rapidement. Je quitte les toilettes et sors du Pub, observe quelques secondes devant l'entrée, j'avise un motel en face, c'est parfait ! Je traverse et m'enquiers rapidement du prix de la chambre, c'est dans mes cordes. Je paie pour une semaine en bénissant le Seigneur de ne pas avoir permis qu'il gèle mes comptes.

J'y pense à nouveau et me rends dans un distributeur non-loin de là, fais un retrait de 800 €, vais à la recherche d'autres distributeurs et réitère l'opération, autant prendre des dispositions car l'on ne sait jamais. En quatre heures et après des douleurs aux pieds, je rentre au motel avec une rondelette somme de 5 000€, un téléphone chargé et quelques courses.

- Oui allo, fais-je en décrochant après avoir déposé les paquets sur mon lit.

- Ça va, Jen ?

- Ça va, mieux, Elric.

- Dieu Merci. Tu m'as fait peur, tu sais.

- Désolée.

- Je n'ai pu réagir depuis car j'étais occupé. Ce n'est que maintenant que j'écoute le message laissé sur le répondeur.

- Je reconnais qu'il était inquiétant. En fait, j'étais choquée.

- Et tu pleurais, Jen. Tu étais choquée et en larmes, j'ai eu peur pour toi et mal au cœur.

- Désolée, je ne souhaitais pas t'alarmer mais comme je n'avais personne vers qui me tourner.

- Tu n'as pas besoin de t'expliquer, si tu ne le sens pas.

- Ok.

- Souhaites-tu que je vienne te retrouver ?

- Cela ne te gêne pas ?

- Non, bien sûr que non.

- Voici l'adresse du motel où je loge : Prins...

- Ok, je te ferai signe, une fois arrivé.

- Merci Elric, merci d'être là pour moi.

- De rien.

J'avoue être soulagée mais culpabilise en repensant au fait qu'il ait des sentiments pour moi. Si tous ont eu le même ressenti qu'Elric, ils doivent être en train de paniquer. Je rappelle Amicie et Odessa, je ne m'étais pas trompée ; je les calmes et vais prendre une douche rapide. J'y suis lorsque mon téléphone se met à sonner, je sors et décroche rapidement. Mon avocat me tient au courant de la situation, de l'avancée de l'enquête et demande ma localisation géographique ; je réponds mais lui demande de ne pas laisser filtrer l'information car j'ai grand besoin de rester seule. Il comprend et promet m'appeler en cas de besoin.

TOC...TOC...TOC...

- Minute !

...

PENDANT CE TEMPS...

[ ALLAN ]

L'on peut m'accuse de tout ce que l'on veut mais pas celui d'être un criminel. J'enrage à l'idée de la savoir dans cette situation. Je me demande encore pourquoi j'ai accepté tremper dans cette histoire. La petite, cette jeune femme si candide et fragile, est manifestement innocente ; j'en suis certains mais comment le prouver.

Cela fait des heures que je fulmine, ressasse tout ceci et revois le cours des évènements. J'étais un jeune chef d'entreprise, tranquille dans mon coin et voilà qu'un matin, Jamice Stern avec qui  j'entretiens de bonne relation, m'invite à dîner. Sans vraiment y réfléchir, j'y vais et croie monsieur Sten Père. J'ai regardé Jamice qui a juste eu un sourire en coin. Nous avons parlé de tout et rien, jusqu'à ce que Klaus me demande de le rencontrer à son bureau, j'ai accepté ne sachant pas dans quoi je me fourrais.

Je traverse la porte tournante, signe le registre d'entrée à l'accueil, puis monte en prenant les escaliers plutôt que l'ascenseur. J'ai vraiment besoin de me calmer avant de lui faire face. Je suis peut-être un filou comme tous les chefs d'entreprise, mais laisser un innocent aller en prison ? Jamis !

- Monsieur Klaus est occupé, dit Phoebe, répondant ainsi à ma question muette.

- C'est ça !

Elle se lève, contourne le bureau, essayant de me barrer le chemin. Je la repousse doucement et la force à se mettre sur le côté. Je pousse l'énorme porte capitonnée puis la vitrée et rentre dans le bureau, Stern a le nez dans un dossier. IL relève la tête et appuie machinalement sur le bouton rouge à sa droite.

- Monsieur Stern...C'est monsieur Graham ; le débit de la voix de Phoebe est haché, elle craint surement pour sa place.

- Je reviendrais vers vous, plus tard ; il se tourne vers moi et durcit son regard.

- Bonjour Klaus, fais-je simplement en prenant place devant lui.

- Et depuis quand m'appelez-vous, Klaus ?

- Depuis que nous nous sommes associés pour faire couler une innocente.

- Tiens donc, vous demander de la côtoyer, vous faire aimer et l'épouser, serait donc la condamner à un noire dessein ? En quoi, est-ce criminel ?

- Il est criminel de la piéger aussi grossièrement comme vous l'avez fait et la jeter en prison !

- Baissez d'un cran, jeune homme ! Au cas où vous auriez oublié à qui vous avez à faire, je suis...

- Oui, je sais, KLAUS STERN, le fameux PDG de l'empire Stern. Je croyais que votre réputation dans le milieu était surfaite mais non, non et non.

- Tiens donc, que dit-on de moi ?

- Vous êtes cupide, impitoyable, manipulateur, sans cœur, capable de vendre père et mère pour de l'argent...et vous venez de le prouver en livrant votre petite-fille à la police

- Monsieur Graham, vous êtes sans oublier que les affaires sont les affaires.

- C'est tout de même votre petite-fille et il n'était pas question que vous vous en preniez à elle !

- Auriez-vous des sentiments pour cette gamine ?

- C'est une jeune femme et non, une gamine !

- Tiens, tiens, vous avez une inclinaison pour elle, à ce que je vois.

- Libérez-là, monsieur Stern.

- La justice suit son cours, je n'ai aucune influence, vous savez.

- Si vous retirez la plainte, toutes les charges contre elle, seront levées.

- Je gère une entreprise comptant plus de 15 000 employés et non, un bistrot familial.

- Soyez honnête, ce n'est pas la première fois que la commission boursière est à vos trousses.

- Quand savez-vous ?

- J'ai aussi mes sources.

- Jeune homme, sachez ceci, quiconque se mettra sur mon chemin sera brisé. La situation actuelle de la jeune femme pour qui vous avez une inclinaison est patent, je vous briserai, s'il le faut ; son ton est dangereusement calme mais ses yeux, durs cruels.

- Elle n'a rien fait et vous le savez, pertinemment !

- Et alors ? Qui a prétendu le contraire ? L'on dit souvent que le malheur des uns, fait le bonheur des autres.

- Vous nourrissez d'autres desseins. Je n'étais qu'une carte parmi tant d'autres dans votre jeu.

- Vous l'avez compris tout seul ? Veuillez me laisser, j'ai mieux à faire que de changer vos couches et vous aider à faire vos devoirs.

- Vous ne vous en sortirez pas aussi facilement !

- Vous avez intérêt à garder ce que vous savez pour vous. N'oubliez pas que Stern est plus qu'une marque, c'est un empire et qui dit empire dit influence ; je saisis sa menace voilée.

Je sors de son bureau plus énervé qu'à mon entrée. Il a tout à fait raison en disant que je me suis laissé prendre à mon propre piège, en essayant de faire cette entourloupe à Jen. El la rencontrant, elle n'était qu'un contrat et au fil du temps, j'ai appris à connaitre la jeune femme douce, désintéressée, timide et travailleuse qu'elle est. J'en suis tombé amoureux et regrette profondément de m'être adonné à ce jeu. Comment le lui dire, sans pour autant perdre son estime ? Comment le lui avouer sans risquer de m'éloigner d'elle ? Comment le lui dire sans risquer de perdre son amour ?

...FLASH-BACK DE QUELQUES HEURES...

[ LOUHANN ]

- Voilà, tout est clair, dit-il en faisant glisser la tige sur mon ventre ; c'est froid, je ne vais quand même pas m'en plaindre.

Nos regards se croisent, je ne lis rien de concret dans le sien ; je suis peinée mais me force à sourire. Depuis quelques temps, je ne sais si je me fais des idées, Elric est redevenu doux et presque attentionné avec moi. Il passe de temps à autres, prendre de mes nouvelles et celle du bébé. Il lui est arrivé de coucher sur le clic-clac au salon, parce qu'harassé et incapable de conduire le soir. Si je vous dis que je n'ai plus de sentiments pour lui, je mentirais. J'aimerai tellement que nous puissions recoller les morceaux.

Maman m'a demandé d'être patiente, il est tout à fait normal qu'il soit sur ses gardes. Après a tentative ratée du toquer à la porte, Elric et ses parents, évitent les miens comme la peste ; essayant par-là de nous faire comprendre que ce qui nous lie, c'est cet enfant.

- Là, ce sont ses mains et là, ses pieds et attendez...attendez...Petit coquin, il bouge pour ne pas montrer...mais...attendez...attendez... mais oui, c'est un petit garçon, annonce le médecin-obstétricien.

- Ah bon ?

- Oui, bravoooo, vous serez les parents d'un petit garçon.

- Merci, répond Elric en faisant le fier.

- Merci docteur, dis-je en laissant couler une larme.

Il fait une copie des échographies et me les tend. Elric demande à ce qu'il fasse un autre jeu, il nous regarde bizarrement. Elric est obligé de dire que c'est pour ses grands-parents, ce à quoi il sourit et s'exécute. Un quart d'heure plus tard, nous nous séparons à la porte en serrant la main du médecin et nous dirigeons tranquillement vers la sortie.

- Que fais-tu, aujourd'hui ? Demandai-je en me tournant vers lui et posant la main sur mon ventre.

- Rien de spécial. Pourquoi ?

- J'ai fait du ndolè avec du bâton de manioc, si ça te dit.

- Et comment ?

- Ha ha ha ha je sais que tu raffole de ce plat.

- Si je pouvais le maîtriser, ce serait pas mal mais n'étant pas une femme, je me loupe toujours avec brio.

- C'est clair. Je me souviens que la dernière fois, ton ndolè a agi comme une purge.

- Ha ha ha n'en rajoute pas, s'il te plait.

- De toute façon, il est prêt. En plus du bâton de manioc, j'ai aussi fait des plantains car ton fils préfère les plantains murs, frits.

- Frits ? Répète-t-il, étonné.

- Mais oui.

- A ce rythme, tu gonfleras et deviendras aussi grosse qu'un ballon de baudruche.

- Ce n'est pas gentil, je suis enceinte et ce sont les envies de ton fils.

- Ce n'est pas une raison, il faudrait vraiment manger sain et limiter les quantités de tout ce qui est gras et sucré.

- C'est noté, patron.

- Tu as déjà les joues, dis donc.

- Laisse-moi, c'est ton fils ou bien ?

- Ah ça ! Quand je vais l'annoncer à mes parents, dit-il ému.

- Tu auras bientôt une trace de toi, sur terre.

- C'est clair.

Nous sommes maintenant dans le parking et nous dirigeons en discutant vers son véhicule. Il débloque les portières, je rentre et m'assieds confortablement. Le bébé se met à bouger, je soulève ma blouse et vois de temps à autres, ses membres se poser sur mon ventre. Elric qui est assis, semble fasciné et finit par reculer.

- Tu veux toucher ?

- Euh...je risque te faire mal, répond-il.

- Mais non, rassure-toi, il n'y a pas de danger. Ton fils croit que mon ventre est son terrain de football.

- Oh !

- Vas-y, Elric ; je l'encourage du regard et prend sa main, que je pose en douceur sur mon ventre.

Le bébé se met à bouger, je crois qu'il a reconnu son père. Elric se penche jusqu'à ce que sa tête se trouve au niveau de mon ventre et se met à parler. J'en profite pour lui faire un baiser dans les cheveux et humer son odeur. La réaction ne se fait pas attendre, je mouille abondamment et ai envie de faire l'amour avec lui mais au vu de la situation actuelle, cela le ferait fuir.

- Calme-toi, mon petit gars, sinon tu fatigueras maman.

- Oui, écoute ton père, confirmai-je en souriant.

Il se redresse et démarre la voiture, je souris et mets le lecteur radio en marche. IL y a un CD des Poétics Lovers, c'est parfait. Je mets le titre dont le titre est « Prenons notre temps, Darling, faisons l'amour ce soir. »


Je me mets à chantonner, puis pose la main l'air de rien, sur la cuisse d'Elric qui n'a aucune réaction. Je vais récupérer mon homme, quoi qu'il puisse se passer. Je tiens à ce que le bébé grandisse dans un foyer stable.

- As-tu pensé aux noms du bébé ?

- Son premier nom sera Biyo'o, suivi du tien.

- Et les prénoms ?

- Alden Nicodèm.

- Dis donc, tu y penses depuis des lustres, ma parole.

- Oui, oui, je l'avoue.

- Si c'était une fille, je t'aurai laissé choisir, c'est certain.

- J'aurai souhaité qu'il porte le prénom de mon père

- En deuxième ou troisième prénom, si tu veux, je n'y vois aucun inconvénient.

- Alden Narcisse Nicodèm, fais-je à haute voix.

- Narcisse ?

- Oui, pourquoi ?

- Rien, rien.

- C'est vrai que c'est un vieux prénom.

- Je ne te le fais pas dire.

Nous nous arrêtons au Centre commercial faire des courses et allons chez nous. Je vais réchauffer la nourriture à notre arrivée, pendant qu'il fait la table. Nous mangeons dans une bonne ambiance, je fais la vaisselle et lui, déplie le clic-clac et s'allonge. Lorsque j'ai terminé, je vais le retrouver et m'allonge près de lui, l'air de rien.

Nous nous endormons et sommes réveillés par la sonnerie de son téléphone. J'ouvre les yeux et croise son regard, je suis dans ses bras. J'aurai pu essayer de l'embrasser mais la sonnerie insistante de son portable nous distrait.

- Excuse-moi ; il se lève, se tourne et le récupère sur la table-basse.

- Non, ce n'est pas grave.

- Oui allo, fait-il en décrochant. Oui, maman. Tout va bien, huhum.

Je me tourne, allume la télévision et enlève le son. Lorsqu'il a terminé avec sa mère, il se redresse et manipule son portable.

- J'ai des messages, mon répondeur est plein.

- L'avais-tu éteint ?

- Mais oui, tu sais qu'il pouvait y avoir des interférences entre le téléphone et les appareils.

- Ok, je vois.

- Oh !

- Qu'y a-t-il ? Demandai-je en me tournant vers lui ; il a le téléphone vissé à l'oreille, se lève et va s'enfermer dans la chambre.

Un quart d'heure plus tard, il vient demander le chargeur et rentre dans la charge. Je piaffe d'impatience et attends qu'il revienne.

- Euh...je vais devoir te laisser, annonce-t-il.

- Quoi ? Pourquoi ?

- Je ne serai pas à Limoges ou en France, durant quelques temps.

- Où vas-tu ?

- J'espère que tout ira ici, Lou.

- Ça ira mais où vas-tu ?

- A Londres.

- Faire quoi ?

- Rencontrer qui ?

- Je vais faire mon sac et je file.

- Aurais-tu des problèmes ?

- Bonne journée, Lou.

Il ne répond à aucune question et sort dans un regard vers moi, je suis énervée mais que puis-je y faire ? Seulement, je ne suis pas bête. Lorsqu'il a souscrit à son abonnement téléphonique, j'étais avec lui. Je vais chercher mon laptop et me connecte rapidement. Il faudrait que je lise ses messages et ai accès aux listings de ses appels. Quoi ? Pourquoi, me regardez-vous ainsi ? J'aime mon homme et tiens à le récupérer, est-ce un crime ?

Jeneya CROFT, l'Impé...