Partie 40 : le reveil

Ecrit par labigsaphir

J'ouvre difficilement les yeux, je ne sais qui a braqué toute cette lumière sur moi, c'est abusé tout de même. Je veux soulever la main pour la placer en visière mais n'y arrive pas, elle retombe mollement sur le drap ; je dois vraiment être fatigué. J'essaie d'ouvrir la bouche pour crier et demander à ce que l'on vienne à moi, mais les mots viennent s'échouer dans ma bouche. Je me mets donc à tousser et essayer de bousculer le lit et faire tomber ce qu'il y a sur la table de chevet, tout près de ma tête.

Je soupire et m'y remets de plus belle, les yeux fermés car je suis vraiment ébloui. Quelques minutes plus tard, j'entends un objet se briser sur le sol. J'arrive à me tourner et accroche de la main un fil que je tire au hasard, une machine se met immédiatement à biper. Quelques secondes plus tard, c'est le branle-bas. J'entends des pas approcher, une porte s'ouvrir puis des voix et une voix près de mon visage.

- Monsieur Graham,

- Oui, réussis-je à murmurer.

- Regardez par ici, s'il vous plait.

Il braque une torche dans mes yeux, je suis éblouie et cligne des yeux plusieurs fois.

- C'est bon signe, se contente-t-il de dire.

- Huhum.

- Combien de doigts voyez-vous ?

- Deux, dis-je en suivant le mouvement desdits doigts.

- C'est bien.

Durant une dizaine de minutes, je suis soumis à un examen et soupire lorsque la troupe s'en va. Je suis épuisé et m'apprête à m'endormir lorsque la porte s'ouvre et ma mère rentre dans la chambre en pleurant.

- Maman, que fais-tu ici ?

- Je suis une mère, Allan. Qui allait veiller sur toi ?

- Il ne fallait pas, maman. J'étais entre de bonnes mains, tu sais.

- Avec un flic devant ta chambre depuis une semaine.

- Quoi ?

- Oui, cela fait une semaine que tu es dans le coma.

- Ooooooooo le procès ! M'exclamai-je en essayant de me redresser.

- Sacré procès, continue-t-elle en grimaçant, il se tiendra demain.

- Comment ?

- Suite à ton agression, il a été ajourné.

- Je pourrais donc aller témoigner.

- Non, tu n'iras pas. Si c'est pour mettre ta vie en danger, non.

- Maman, je ne suis pas un gamin.

- Dit celui qui a fait une semaine de coma, poursuit-elle en me toisant.

- Maman, je dois aider une amie et ne saurais me défiler.

- Est-ce cette fameuse amie qui fait battre ton cœur ?

- ...

- Reste silencieux, de toutes les façons tu as déjà répondu à mes questions.

- ...

- Est-ce Jeneya Croft ?

- Où as-tu entendu ce nom ?

- Est-ce Jeneya Croft ?

- Oui, maman. Où as-tu entendu ce nom ?

- Elle est passée ici, presque tous les jours.

- Ok ; je souris et suis touché par l'attention qu'elle porte à ma personne.

- Mais....

- Mais quoi ? M'agaçai-je.

- Elle n'était jamais seule, toujours flanquée d'un black.

- Tu comprends pourquoi, je tenais à ce que tu épouses une boer comme moi.

- Maman, je n'ai jamais été pour un mariage arrangé et ça, tu le sais bien.

- Les filles de mes amies sont célibataires, pourquoi ne voudrais-tu pas essayer ?

- J'aimerais me trouver une femme tout seul.

- Et surtout, une femme que j'aimerais. De toutes les façons, cette Jeneya, n'aurait pu me plaire.

- Voilà pourquoi je ne tenais pas à te la présenter. Si l'on se mettait en couple, j'allais te mettre devant le fait accompli.

- Dieu me préserve de pareilles conneries.

- Maman !

- Je ne veux que ton bonheur, Allan !

- Mon bonheur aurait pu être avec elle...

- Si quoi ? Si le black n'était pas là ?

- ...

- Mon fils, ressaisis-toi ! Tu es dans cet état à cause de cette fille alors que votre histoire n'a pu aboutir.

- Il n'y a jamais eu d'histoire entre nous, corrigeai-je.

- Ose dire que tes nombreux voyages en France, n'avaient rien à voir avec elle ?

- ...

- Oui, j'ai échangé avec elle. Durant des mois, je t'ai vu sourire et changer. Je me suis dite, enfin ! 

- ...

- Mon fils, Celle-là n'est tout simplement pas fait de ta cote.

- ...

- Je vais te présenter de filles biens.

- Maman !

- Si elles ne te plaisent pas, je te laisserais tranquille.

- ...

- Sinon, comment te sens-tu ?

- C'est maintenant que tu me le demandes ?

- Allan, je t'aime et m'inquiète pour toi.

- Je sais. Excuse-moi, maman.

- Humm.

- Il faut que je me rende au tribunal.

- Rien ne presse, dit-elle en plissant la figure.

- La vie d'une innocente est en jeu.

- Elle reste une innocente, malgré tout.

- Ok, soupire-t-elle.

- Passe-moi mon téléphone. Où est-il d'ailleurs ?

- Attends, je regarde dans le placard. Je crois avoir vu un sac contenant tes effets.

- Ok.

Elle se lève avec difficulté, mon cœur se serre en la voyant faire autant d'efforts pour moi. Elle ouvre la porte du placard et en sort un sac qu'elle pose près de moi avec une extrême lenteur.

- Merci, maman.

- De rien.

Je fouille rapidement, trouve mon portable que j'allume. Je suis tellement impatient que je me mets à pianoter sur le lit et sursaute en entendant le bruit sonore produit par l'écran qui s'allume. Je compose le numéro de Maître Carlai, qui décroche aussitôt.

- Bonjour Maître,

- Allan, est-ce vraiment vous ?

- Oui, maître.

- Comment allez-vous ?

- Comme une personne ayant fait une semaine dans le coma.

- Et la blessure ?

- Elle est bel et bien là, c'est douloureux.

- Ça va aller.

- Je sais. Alors, ce procès ?

- Demain.

- J'aimerai venir témoigner mais la forme physique.

- Ne vous inquiétez pas, j'appelle tout de suite le commissaire Fergusson et nous ferons le nécessaire.

- Ok.

- Allan,

- Oui, Maître.

- Faites-vous le plus discret possible jusqu'à l'arrivée du commissaire Fergusson.

- Ok. Comment va-t-elle ?

- Elle sera heureuse de savoir que vous allez mieux.

- Merci.

- Que votre téléphone reste allumé.

Moins d'une demi-heure plus tard, le commissaire Fergusson accompagné de deux éléments rentrent dans la pièce. Je demande à maman de discrètement sortir de la pièce, les deux autres prennent la pose et sortent rapidement des calepins et un caméscope.

- Que se passe-t-il ? Demandai-je, surpris par tout ce déploiement.

- J'ai pris la liberté de demander au procureur de la république, l'autorisation d'enregistrer votre déposition dans votre chambre, au cas où vous vous en sortirez.

- Ok.

- Je préfère que vous le fassiez là, afin de limiter les risques, vue la dangerosité des individus auquel nous avons à faire.

- Ok. Cette déposition sera donc recevable au tribunal, m'assurai-je.

- Evidemment et c'est moi qui mène l'interrogatoire. Avez-vous besoin d'un avocat ?

- Non.

- Comptez-vous déposer plainte ?

- Bien sûr.

- Tout sera fait dans les règles, rassurez-vous.

- J'ai confiance en vous et l'autorité que vous représentez.

- Bien, nous pouvons commencer.

- Attendez, je vous prie, fais-je stupéfait par la rapidité avec laquelle ils sont arrivés.

- Comment avez-vous su que je m'étais réveillé ?

- L'un des hommes en faction devant la porte, m'a appelé.

- Ok.

Durant près d'une heure, j'ai été soumis à un interrogatoire des plus costauds. J'ai dû me répéter je ne sais combien de fois, afin de prouver la véracité de mes dires. Je commençais vraiment à m'en lasser lorsqu'il a décidé de tout arrêter et de me faire changer de chambre.

- Pourquoi ? Demandai-je, surpris.

- Si le coupable venait à imaginer que vous êtes réveillé, l'envie lui viendrait peut-être de venir terminer le travail.

- Ok.

Un quart d'heure plus tard, le commissaire parti, les hommes sont en train de discuter avec le personnel hospitalier, au sujet de mon transfert. J'apprends que je vais devoir attendre une heure, avant d'être transféré dans une aile de l'hôpital.

- Bonjour Monsieur Graham, fait-il en prenant la plaque accrochée à mon lit.

- Bonjour.

- Je suis venu vérifier que votre perfusion ne rencontre pas de dysfonctionnement et ajouter un produit selon les ordres du médecin.

- Ok.

Il s'avance vers moi, vérifie la perfusion et sort une boite de sa poche, la secoue, y introduit une seringue et veut l'injecter dans la perfusion, lorsque je l'arrête.

- Pouvez-vous me donner le nom du produit, je vous prie ?

- Il vous aidera à vous reposer, se contente-t-il de répondre.

- Son nom, je vous prie ?

- Rhéanol.

- Qu'est-ce ?

- Vous demanderez au médecin, je ne fais que suivre des ordres.

Je me redresse et ai le réflexe de regarder ses chaussures, elles sont en cuir et ressemblent à s'y méprendre à celles des militaires. Mais attendez, les autres portent des moufles ou espèces de sabots, c'est plus hygiénique. Sans réfléchir, je me tourne vers le bouton rouge, il s'en rend compte et se tourne vers moi, le regard dur. Je suis plus rapide et appuie de toutes mes forces Le bouton se met à clignoter, une lutte s'engage durant quelques secondes, il me lâche et sort de la salle en courant et moins de cinq(5) secondes plus tard, les infirmières accourent de même que les flics en civil.

- Que s'est-il passé ? Demande l'une d'elle en se penchant vers moi.

- L'on a essayé de me tuer en injectant un produit dans ma perfusion, parvins-je à dire ne montrant la porte. Il s'en allé, vous pouvez toujours le rattraper.

- Pouvez-vous nous le décrire ?

Je donne la description rapide, l'un d'eux s'élance vers la porte tandis que l'autre appelle le commissaire qui donne rapidement des ordres, et je suis transféré à une autre chambre.

PENDANT CE TEMPS...

[ LAVIGNA ]

J'arpente la pièce en me pinçant les lèvres, plus vite nous en terminerons mieux je me sentirais. J'ai envie d'appeler mon père mais me ravise, ne tenant à mettre aucun membre de ma famille en danger. Je sais d'ores et déjà qu'ils sont surveillés et qu'il serait facile de me localiser et en finir avec moi. Je suis étonnée qu'il n'ait rien essayé contre les miens, jusqu'ici. J'ai cru qu'il serait facile de me cacher jusqu'à la tenue de ce procès en Angleterre sous leur nez et leur barbe. 

J'ai su que cette affaire prendrait de l'ampleur, le jour des incidents dans la chaîne de production de l'empire Bashan, de mineurs ils sont devenus récurrents. De légers accidents des employés ont entraîné des ralentissements dans la chaîne, me forçant à déléguer et expliquer la situation à mon père.

Tout s'est calmé, je croyais que tout irait mieux lorsque mon ordinateur s'est mis à « bugger » et me suis mise à recevoir des coups de fil d'Angleterre. J'ai rapidement fait prendre un biais par la secrétaire de papa et me suis partie de New Dehli comme une voleuse.

Le lendemain de mon départ, l'une de mes agences de voyage, a mystérieusement brûlé ; je venais surement d'échapper à la mort.

Même si j'ai du ressentiment envers les Stern, je ne pourrais laisser la petite Jeneya dans cet état. L'on a coutume de dire que le danger ne vient jamais de loin, et c'est vrai.

Je crois entendre un bruit au rez-de-chaussée, j'ai pourtant fermé toutes les portes et fenêtres de ce pavillon que j'ai finalement décidé de louer. Je crois de nouveau entendre du bruit au rez-de-chaussée, je prends un tisonnier, ouvre la porte et descends en regardant de gauche à droite. Je fais le tour de toutes les pièces, le cœur battant et souffle après avoir constaté que tout est à sa place et surtout, il n'y a personne.

Je remonte dans ma chambre, détache mes cheveux qui tombent en cascades sur mes épaules, héritage de ma famille paternelle de même que mes yeux de couleur bleu-vert. La taille, je crois qu'elle vient des deux côtés mais la grâce féline, elle vient de papa. Je souris en repensant au sourire que papa affiche tristement à chaque fois que je fais mention de maman ; elle a été son grand amour malgré l'entrée d'Ashwarya dans sa vie. Même s'il ne le dit pas, je sais qu'il a longtemps espéré qu'elle lui revienne.

J'entends comme un craquement derrière-moi, mes cheveux et poils se hérissent.

KOUM...KOUM...KOUM...

- Enfin ! Je croyais que ce moment n'arriverait jamais, il a fallu que tu fasses de nouveau parler de toi. Lève les mains et tourne-toi sans faire de faux mouvements !

J'ouvre grand les yeux et me tourne avec lenteur. Cette fois, je mangerai surement les pissenlits par la racine.

- Comme nous nous retrouvons !


Jeneya CROFT, l'Impé...